Les femmes et les minorités afghanes apprennent à vivre dans la tension et l'incertitude

Le 2 août dernier, dans une salle de Kaboul, des femmes afghanes participent à un rassemblement contre les violations présumées  des droits des femmes par le régime taliban en Afghanistan. (AFP)
Le 2 août dernier, dans une salle de Kaboul, des femmes afghanes participent à un rassemblement contre les violations présumées des droits des femmes par le régime taliban en Afghanistan. (AFP)
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Publié le Samedi 28 août 2021

Les femmes et les minorités afghanes apprennent à vivre dans la tension et l'incertitude

  • De 1996 à 2001, une ségrégation stricte entre les sexes a été imposée par les talibans
  • «Ce qu’il faut avoir à l’esprit, ce n'est pas le fait que les talibans disent une chose et en font nécessairement une autre; c’est surtout qu’ils ne s’expriment pas d’une même voix»

DUBAΪ: Aussi bien pendant qu'après leur récente prise de contrôle de l'Afghanistan, les responsables talibans se sont attachés à afficher une image responsable et tolérante du groupe, près de vingt ans après son retrait du pouvoir.

Le 18 août dernier à Kaboul, le porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid a promis sur les médias que le nouveau gouvernement respecterait les droits des femmes et qu’il accorderait l'amnistie à celles qui leur avaient résisté, tout en assurant que l'Afghanistan ne redeviendrait plus jamais un refuge pour les terroristes.

Ses propos font écho à ceux de Shahabuddin Delawar, le négociateur principal des talibans, qui avait déclaré à Moscou le 9 juillet que le groupe garantirait aux femmes et aux filles le droit au travail et à l'éducation à condition que ces droits ne contreviennent pas aux principes de l'islam.

Pourtant, le régime taliban d’Afghanistan avant l'invasion américaine de 2001 laisse un souvenir édifiant. Des photos et des vidéos montrent des militants qui fouettent des femmes en burqas, sans défense, agenouillées dans la poussière.

De 1996 à 2001, une ségrégation stricte entre les sexes a été imposée par les talibans. Ce groupe fondamentaliste islamique à prédominance pachtoune avait comblé le vide du pouvoir en Afghanistan après une longue guerre civile.

Une fois qu'il a mis en œuvre son interprétation de la charia, les femmes n’ont plus été autorisées à quitter leur domicile sans un parent masculin, tandis que les filles de plus de 7 ans se voyaient privées d’éducation et finissaient souvent par être mariées à des hommes beaucoup plus âgés.

Le système d'apartheid entre les sexes institué par les talibans imposait aux femmes le port de la burqa chaque fois qu'elles sortaient de leur maison. Le vêtement, qui s'ajustait étroitement sur la tête et s'étendait jusqu'aux chevilles, rendait la femme afghane presque informe et inidentifiable en public.

Celles qui défiaient les règles et la loi encouraient des sanctions sévères, qui impliquaient souvent la flagellation publique. Les transgressions plus graves, comme l'adultère, entraînaient couramment des lapidations.

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Des Afghanes défilent à Kaboul avec des banderoles pour protester contre la récente exécution publique d'une jeune femme soupçonnée d’adultère. (AFP/Fichier Photo)

Près de deux décennies plus tard, des responsables talibans tels que Mujahid et Delawar, ainsi que Suhail Shaheen, porte-parole du groupe, signalent que leur groupe s’est adouci.

Toutefois, peu d'Afghans sont convaincus par ce changement, comme le prouve la ruée vers les vols d'évacuation occidentaux à l'aéroport de Kaboul. Très peu nombreux sont ceux qui sont disposés à parler ouvertement de la question, car ils redoutent des représailles.

«Tout le monde attend de voir ce qui se passera avec les talibans», déclare un habitant de Kaboul, qui souhaite rester anonyme, à Arab News. «Si les femmes sortent désormais de chez elles, toutes portent le hijab. Avant, c'était différent: certaines l’arboraient, d'autres non. Maintenant, elles le portent toutes parce qu'elles ont peur des talibans.»

Une autre femme de Kaboul, qui s’exprime également sous le couvert de l’anonymat, explique: «Nous ne nous attendons pas à ce que tout soit comme avant. Il y aura du changement. Nous attendons des éclaircissements sur les politiques que comptent mettre en place les talibans.»

De nombreux Afghans veulent croire, en dépit de leur intuition, que les talibans seront cette fois plus modérés; mais les rapports des atrocités commises à travers le pays mettent les nerfs des habitants à rude épreuve.

«La semaine dernière, des rumeurs ont circulé au sujet de femmes célibataires qui habitaient à l’extérieur de Kaboul et qui auraient été emmenées et mariées», confie à Arab News de manière anonyme le porte-parole d'une organisation qui travaille en Afghanistan.

«Ce qu’il faut avoir à l’esprit, ce n'est pas le fait que les talibans disent une chose et en font nécessairement une autre; c’est surtout qu’ils ne s’expriment pas d’une même voix.»

En effet, une déclaration d'un porte-parole des talibans mardi dernier indiquait que les femmes devaient rester à la maison pour le moment dans la mesure où certains de leurs combattants n'avaient «pas encore appris à se comporter correctement».

Masuda Sultan, une entrepreneuse américano-afghane qui défend les droits humains, déclare à Arab News: «On ne sait pas si les talibans s’adressent à toutes les femmes ou seulement à celles qui occupent certains postes.»

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Des femmes afghanes assistent à un cours d'alphabétisation sur leur lieu de travail à Kaboul dans les années 1980, lorsque le pays était dirigé par le gouvernement communiste de Kaboul, soutenu par Moscou. Au cours de ses quatorze années de présence, le régime communiste a offert aux femmes d’importantes opportunités pour stimuler leur implication sociale dans une société afghane par ailleurs strictement conservatrice. (AFP/Archive)

«La plupart des femmes ne quittent pas leur domicile et elles ont peur. Les gens sont très prudents. Des informations récentes indiquent que les talibans recommandent de rester à la maison pour le moment. C'est comme un régime militaire, désormais. Ils disent que les salaires des femmes seront versés mais qu'il était nécessaire que les propres membres de leurs familles leur donnent une formation supplémentaire.»

Les femmes ne sont pas les seules personnes qui, en Afghanistan, s'inquiètent de ce qui va se passer. Les minorités ethniques, en particulier les Hazaras, un groupe à prédominance chiite concentré dans la région montagneuse centrale du pays de Hazaradjat, ont également été persécutées sous le premier régime taliban.

Les Hazaras, qui constituent environ 10 à 20% de la population, ont été relégués aux échelons inférieurs d’un ordre social dominé par les Pachtounes, une ethnie dont les talibans tiraient l'essentiel de leur soutien.

D'autres groupes ethniques – les Tadjiks, les Ouzbeks, les Turkmènes, les Baloutches, les Pashai, les Nouristanis, les Gurjars, les Arabes, les Brahouis, les Sadates, les Kirghizes et les Pamiris – ne savent pas davantage à quoi ils doivent s’attendre.

EN BREF

- 80% des Afghans récemment déplacés sont des femmes et des enfants.

- Les observateurs des droits ont demandé des enquêtes sur les abus des talibans qui ont été signalés.

- Les femmes et les minorités afghanes redoutent que les atrocités passées ne se reproduisent.

Les Hazaras ont de quoi avoir peur. Après avoir pris le contrôle de la province de Ghazni, des militants talibans ont tué neuf Hazaras entre le 4 et le 6 juillet dans le village de Mundarakht, dans la région de Malistan, rapporte l'observateur des droits humains Amnesty International.

Des témoins déclarent que six de ces hommes ont été abattus et que les trois autres ont été torturés à mort. Human Rights Watch exhorte le Conseil des droits de l'homme de l'ONU (Organisation des nations unies, NDLR) à enquêter sur des signalements qui font également état de violences talibanes dans la période qui précède la chute de Kaboul, le 15 août.

Alors que le groupe resserre son étau autour du pouvoir, les Afghans estiment que la façon dont les talibans géreront les droits des femmes et des minorités à l'avenir dépendra beaucoup du type de gouvernement qui sera adopté.

«Même si les talibans ont pris le contrôle de la majeure partie du pays, ils n'ont pas réellement formalisé d’accord politique. Dans le même temps, ils sont confrontés à des défis de gouvernance», affirme Sultan.

«Il est nécessaire que soient instaurées de bonnes politiques en ce qui concerne les femmes et les filles. Les talibans ont publié des communiqués qui indiquent que les femmes et les filles auront des droits dans le cadre de la charia. Beaucoup de gens sont dans l’expectative», poursuit-il.

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Au cours du mois d’août, des femmes afghanes déplacées à l'intérieur du pays et qui ont fui la province du Nord en raison de la bataille entre les talibans et les forces de sécurité afghanes attendent de recevoir de la nourriture gratuite distribuée au parc Shahr-e Naw de Kaboul. (AFP)

Lorsque les forces américaines achèveront leur retrait – la date de l’évacuation définitive est le 31 août prochain –, les nombreuses sources internationales d'aide et de financement, qui ont maintenu l'économie afghane à flot depuis 2001, se tariront.

Les dirigeants talibans se trouvent devant la perspective d'une implosion économique qui risque d’être accompagnée de graves implications humanitaires, à moins qu'ils ne parviennent à négocier rapidement de nouveaux accords commerciaux ou que des puissances non occidentales leur jettent une bouée de sauvetage.

Selon les estimations du HCR (Haut-Commissariat des nations unies pour les réfugiés, NDLR), environ 80% des quelque 550 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays ces dernières semaines sont des femmes et des enfants. Jusqu'à un tiers des Afghans étaient déjà considérés en situation d'insécurité alimentaire au début de l’année 2021. Aujourd'hui, le pays subit sa deuxième sécheresse en trois ans.

Les agences de l'ONU mettent en garde contre des pénuries alimentaires qui vont gagner l’ensemble de l'Afghanistan dès le mois de septembre si une intervention urgente n’est pas décidée.

«L'Afghanistan est au cœur d'une crise humanitaire. 18 millions de personnes ont besoin d'une aide d'urgence. Le Programme alimentaire mondial (PAM) souligne qu'il ne peut pas faire parvenir d’aide alimentaire dans le pays car Kaboul est actuellement fermé aux vols commerciaux», confie Sultan à Arab News.

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Dans le quartier de Shahr-e Naw de Kaboul, le 18 août dernier, un combattant taliban passe devant la vitrine d’un salon de beauté dont les visages féminins, sur les panneaux, ont été défigurés avec de la peinture en aérosol. (AFP)

Au cours des dernières semaines, l’attention de communauté internationale a été accaparée par les efforts d'évacuation à l'aéroport de Kaboul et par le chaos qu’ils ont suscité; elle a oublié de se pencher sur cette majorité de la population qui ne peut ou ne veut pas partir.

«Alors que le monde a aujourd’hui les yeux rivés sur les personnes évacuées et les avions qui décollent, il est indispensable de fournir des vivres à ceux qui sont laissés pour compte», fait savoir à Reuters Richard Brennan, le directeur régional des urgences de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

L'OMS a demandé que les avions vides qui s’apprêtent à récupérer les évacués soient détournés vers ses entrepôts de Dubaï afin d’y décharger des ressources alimentaires. Il existe également un projet de «pont aérien humanitaire», précise Brennan.

Les talibans peuvent contribuer à galvaniser la bonne volonté des donateurs internationaux s’ils n’entravent pas le processus d'évacuation et s’ils joignent les actes à leurs paroles.

«Les talibans prétendent que les gens peuvent retourner au travail, mais les choses ne se sont pas encore tassées. Tout le monde attend toujours de voir ce qui va se passer», conclut Sultan.

 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com

Twitter : @rebeccaaproctor


Des pourparlers sont attendus entre Téhéran et Washington, sur fond de menaces américaines

Cette combinaison d'images créée le 09 avril 2025 montre l'envoyé américain au Moyen-Orient Steve Witkoff après une réunion avec des responsables russes au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025 (G) ; et le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi s'adressant à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah le 7 mars 2025. (Photo par EVELYN HOCKSTEIN et Amer HILABI / diverses sources / AFP)
Cette combinaison d'images créée le 09 avril 2025 montre l'envoyé américain au Moyen-Orient Steve Witkoff après une réunion avec des responsables russes au palais de Diriyah, à Riyad, en Arabie saoudite, le 18 février 2025 (G) ; et le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi s'adressant à l'AFP lors d'une interview au consulat iranien de Jeddah le 7 mars 2025. (Photo par EVELYN HOCKSTEIN et Amer HILABI / diverses sources / AFP)
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MASCATE, OMAN : Les États-Unis et l'Iran entament samedi à Mascate des discussions aux enjeux considérables sur le dossier du nucléaire iranien, après des menaces d'une opération militaire américaine en cas d'échec.

L'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, et le ministre iranien des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, doivent conduire ces discussions à huis clos à Mascate.

Il s'agira des premières négociations de ce niveau entre les deux pays ennemis depuis que les États-Unis se sont retirés en 2018 de l'accord conclu en 2015 entre l'Iran et les grandes puissances pour encadrer son programme nucléaire, en échange d'une levée des sanctions.

Leur durée et leur format restent incertains : la Maison Blanche affirme qu'il s'agira de négociations directes « dans une même pièce », tandis que l'Iran parle de discussions par l'intermédiaire des Omanais. 

Selon la télévision d'État iranienne, M. Araghchi s'est entretenu avec des responsables omanais à son arrivée à Mascate. Il est notamment accompagné de ses vice-ministres chargés des affaires politiques et juridiques.

Le président américain Donald Trump a adopté une politique de « pression maximale » à l'égard de l'Iran et imposé de nouvelles sanctions visant son programme nucléaire et son secteur pétrolier.

Il a créé la surprise en annonçant lundi la tenue de ces discussions, après des semaines de guerre des mots entre les deux pays, qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis 45 ans. 

M. Witkoff, qui était en visite vendredi en Russie, a déclaré au Wall Street Journal que la « ligne rouge » pour Washington était « la militarisation de la capacité nucléaire » de l'Iran.

« Notre position commence par le démantèlement de votre programme. C'est notre position aujourd'hui. Cela ne veut pas dire qu'à la marge nous n'allons pas trouver d'autres moyens pour tenter de parvenir à un compromis », a-t-il dit en parlant du message qu'il livrerait aux Iraniens.

Mercredi, le président américain, qui ne cesse de menacer d'attaquer l'Iran, a encore fait monter la pression en déclarant qu'une intervention militaire contre ce pays était « tout à fait » possible en cas d'absence d'accord.

« S'il faut recourir à la force, nous le ferons. Israël y sera bien évidemment très impliqué, il en sera le chef de file », a averti M. Trump, un allié du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu qui agite régulièrement le spectre d'une attaque contre le programme nucléaire iranien, perçu comme une menace pour son pays. 

Après le retrait des États-Unis de l'accord de 2015 et le rétablissement de sanctions américaines à son encontre, la République islamique d'Iran s'est démarquée du texte.

Elle a accru son niveau d'enrichissement de l'uranium jusqu'à 60 %, soit bien au-delà de la limite de 3,67 % imposée par l'accord, et se rapproche du seuil de 90 % nécessaire à la fabrication d'une bombe atomique.

Selon Ali Vaez, du groupe de réflexion International Crisis Group, le premier point à l'agenda, « et l'un des plus importants », sera de définir le champ des discussions.

Selon lui, l'Iran pourrait « s'engager à prendre des mesures pour limiter son programme nucléaire » en échange d'un allègement des sanctions, « mais pas le démanteler entièrement ».

Pour Karim Bitar, enseignant à Sciences Po Paris, « les négociations ne se concentreront pas exclusivement (...) sur le programme nucléaire. L'accord devra inclure l'arrêt du soutien de l'Iran à ses alliés régionaux ».

Les conflits à Gaza et au Liban ont attisé les tensions entre l'Iran et Israël, qui ont mené des attaques militaires réciproques pour la première fois depuis des années de guerre par procuration.

Selon M. Bitar, « la seule et unique priorité est la survie du régime, et, idéalement, l'obtention d'un peu d'oxygène, c'est-à-dire un allègement des sanctions, afin de relancer l'économie, car le régime est devenu assez impopulaire ».


L'émissaire américain Witkoff est en Russie, selon le Kremlin

Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine. (AFP)
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  • Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine
  • "Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain

MOSCOU: Steve Witkoff, l'émissaire du président américain Donald Trump, est arrivé en Russie, a affirmé vendredi le porte-parole du Kremlin, en plein rapprochement russo-américain et tractations diplomatiques pour mettre fin au conflit en Ukraine.

"Oui, je confirme, il est en effet arrivé en Russie", a déclaré Dmitri Peskov, cité par l'agence russe Ria Novosti qui le questionnait sur des informations de presse faisant état de la venue du responsable américain.

Interrogé sur la possibilité d'une rencontre avec le président russe Vladimir Poutine, M. Peskov a répondu: "si c'est le cas, nous le dirons".

La raison de la visite de Steve Witkoff n'a pas été communiquée.

Cet ami proche de Donald Trump a été impliqué dans des discussions autour du conflit en Ukraine, mais il est aussi l'émissaire du président au Moyen-Orient.

Il est attendu samedi au sultanat d'Oman pour des pourparlers inédits avec l'Iran, pays proche de Moscou mais avec lequel Washington n'a plus de relations diplomatiques depuis 45 ans.

Ces discussions visent à négocier un nouvel accord sur le nucléaire iranien.

Les Occidentaux, Etats-Unis en tête, soupçonnent depuis des décennies l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces accusations.

La Russie est un proche partenaire de l'Iran, et le Kremlin s'était dit en avril favorable à des négociations directes entre Washington et Téhéran.

Trump "furieux" 

La visite de Steve Witkoff intervient également au lendemain d'un échange de prisonniers entre Washington et Moscou et d'un round de discussions sur le fonctionnement de leurs missions diplomatiques, pour la deuxième fois depuis le retour à la Maison Blanche de Donald Trump en janvier.

Le président américain veut se rapprocher de la Russie, dont les Occidentaux se tiennent à l'écart depuis le début de l'attaque russe contre l'Ukraine en 2022.

Donald Trump cherche à mettre fin au plus vite à ce conflit qui a déjà fait des dizaines de milliers de morts.

Cette détermination fait craindre à Kiev d'être contraint par son puissant allié à accepter d'âpres concessions. D'autant que le tempétueux Donald Trump envoie des signaux contradictoires.

Il a multiplié les piques à l'encontre du président ukrainien Volodymyr Zelensky, et critiqué l'aide que son pays a apportée à Kiev.

Mais Donald Trump a aussi menacé la Russie de nouvelles sanctions si elle ne consentait pas à la paix.

Il a dit fin mars à la chaîne NBC être "très énervé" et "furieux" contre Vladimir Poutine, après que ce dernier eut évoqué l'idée d'une "administration transitoire" en Ukraine, impliquant le départ du pouvoir de Volodymyr Zelensky.

Pas de cessez-le-feu 

Steve Witkoff a lui fait l'éloge de Vladimir Poutine. Il avait estimé dans une interview, le mois dernier, que le président russe n'était pas "un mauvais type".

L'émissaire américain l'a déjà rencontré à deux reprises. En mars, il s'était rendu en Russie pour discuter d'une proposition américaine d'un cessez-le-feu inconditionnel en Ukraine.

Mais Vladimir Poutine n'avait pas été convaincu, et cette proposition de trêve de 30 jours, acceptée par l'Ukraine, ne s'est pas concrétisée.

Donald Trump a seulement réussi à obtenir de son homologue russe un moratoire des frappes sur les infrastructures énergétiques, que l'Ukraine comme la Russie s'accusent depuis de violer.

Washington avait aussi annoncé fin mars une trêve limitée en mer Noire, aux contours flous.

Lundi, le Kremlin, accusé par Kiev et des capitales occidentales de faire traîner les discussions, avait estimé que de nombreuses questions restaient à régler en vue de conclure un accord de cessez-le-feu global avec l'Ukraine.

Le directeur du Service de renseignement extérieur russe (SVR), Sergueï Narychkine, a, lui, affirmé vendredi que les discussions entre Moscou et Washington allaient se poursuivre concernant "différentes thématiques", notamment celle de potentiels échanges de prisonniers.


Droits de douane: des démocrates soupçonnent Trump de possible délit d'initié

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%. (AFP)
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  • Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER"
  • Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique

WASHINGTON: Donald Trump a-t-il commis un délit d'initié ? Plusieurs élus démocrates ont émis des soupçons, estimant que le président américain avait peut-être, en encourageant à acheter des actions juste avant son revirement spectaculaire sur les droits de douane, illégalement manipulé les marchés.

"Les proches de Donald Trump profitent-ils illégalement de ces énormes fluctuations du marché boursier par le biais de délits d'initiés ?", a interrogé le sénateur démocrate de Californie Adam Schiff sur son compte X mercredi.  "Le Congrès doit savoir", a-t-il ajouté, appelant à une enquête parlementaire.

"Le président des États-Unis participe littéralement à la plus grande manipulation de marché au monde", ont affirmé de leur côté les élus démocrates de la commission des services financiers de la Chambre des représentants, également sur X.

Après avoir déclenché une guerre commerciale mondiale et ébranlé les marchés, le président américain a écrit mercredi sur TruthSocial, quelques minutes après l'ouverture de Wall Street, "C'EST LE MOMENT D'ACHETER".

Quelques heures plus tard, il annonçait une suspension pour 90 jours des droits de douane supplémentaires à l'encontre de dizaines de pays, à l'exception de la Chine, provoquant un rebond boursier historique.

Après plusieurs jours d'effondrement, l'indice Dow Jones a fini mercredi en hausse de 7,87%, sa plus forte progression depuis 2008, et l'indice Nasdaq de 12,16%, du jamais-vu depuis 2001.

Un spécialiste en éthique a lui aussi estimé qu'il y avait matière à enquête.

"Les présidents ne sont pas des conseillers en investissement", a écrit sur X Richard Painter, professeur en droit et ancien avocat chargé de l'éthique à la Maison Blanche sous George W. Bush. "Ce scénario pourrait exposer le président à des accusations de manipulation du marché", a-t-il déclaré sur la chaîne NBC.

La Maison Blanche a assuré que Donald Trump ne voulait que "rassurer".

"Il est de la responsabilité du président des États-Unis de rassurer les marchés et les Américains sur leur sécurité économique face à l'alarmisme permanent des médias", a déclaré au Washington Post Kush Desai, porte-parole de la Maison Blanche.

Donald Trump a signé son post sur Truth des lettres "DJT", qui représentent à la fois ses initiales et l’abréviation en bourse de son entreprise de médias, Trump Media & Technology Group. L'action de la société a clôturé la journée avec une hausse de 21,67%.