La résistance du Panchir, une aventure incertaine

Massoud "a des jeunes, des véhicules, des hélicoptères, des munitions, ça fait des mois qu'il se prépare". (Photo, AFP)
Massoud "a des jeunes, des véhicules, des hélicoptères, des munitions, ça fait des mois qu'il se prépare". (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 21 août 2021

La résistance du Panchir, une aventure incertaine

  • Ahmad Massoud a exhorté à la résistance et demandé un soutien international, notamment des armes et des munitions aux Etats-Unis
  • Mais d’aucuns pensent que cette résistance n’est qu’une manière de peser sur les négociations à Kaboul pour défendre les intérêts des Panchiris

PARIS : L'organisation d'une résistance armée aux talibans dans la vallée du Panchir autour de deux figures emblématiques afghanes, l'ex-vice-président Amrullah Saleh et le fils du défunt commandant Massoud, pourrait certes faire du bruit, mais son issue serait incertaine, selon des experts interrogés par l'AFP.

Dans plusieurs textes publiés ces derniers jours, Ahmad Massoud a exhorté à la résistance du Panchir et demandé un soutien international, notamment des armes et des munitions aux Etats-Unis.

Amrullah Saleh a lui promis de résister et s'est retiré dans cette vallée.

Les deux hommes se sont affichés ensemble sur les réseaux sociaux, semblant poser la première pierre d'un mouvement de résistance.

L'ex-vice-président Abdullah Abdullah a posté vendredi sur Facebook des photos le montrant avec l'ex-président Hamid Karzaï (2001-2014) en discussion avec des notables du Panchir, quelques jours après que le duo ait rencontré des leaders talibans.

La vallée du Panchir, au nord-est de Kaboul n'est pas sous contrôle taliban, a relevé jeudi le ministre russe des Affaires étrangères Serguei Lavrov. Mais cela ne signifie pas nécessairement qu'il y a des combats.

"La résistance est pour l'instant verbale, parce que les talibans n'ont pas cherché à pénétrer le Panchir", estime Gilles Dorronsoro, professeur de sciences politiques à l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, auteur en 2021 du livre "Le gouvernement transnational de l'Afghanistan - Une si prévisible défaite".

En revanche, "ils encerclent le Panchir de toutes parts", relève Abdul Sayed, politologue à l'université de Lund, en Suède.

L'ONG italienne Emergency a signalé mercredi un "nombre croissant de blessés de guerre" dans son hôpital de la vallée du Panchir.

"Il n'y a pas de combats actuellement dans le Panchir, mais il y a peut-être eu quelques accrochages, sur la route de la vallée, dans la plaine de Chamali", explique, sous couvert d'anonymat, un Français qui a combattu dans le Panchir aux côtés du commandant Massoud à la fin des années 1990.

Pour Bill Roggio, du think tank américain FDD, le Panchir échappe aux talibans, "mais le statut de la province voisine du Parwan n'est pas clair. Il semble que les forces de Saleh auraient essayé d'y étendre leur contrôle depuis le Panchir".

"Les talibans ont construit leur victoire sur le blitzkrieg et la reddition; finalement ils sont arrivés sans beaucoup de violence", rappelle M. Dorronsoro. "Une attaque frontale avec tout le poids symbolique du Panchir aujourd'hui, ça irait contre leur volonté de se normaliser".

L'un vit dans le sillage de la légende de son père mais a peu de relais politiques, l'autre, profondément politique, a été aux manettes du pouvoir afghan pendant des années.

"Les relations entre Ahmad Massoud et Amrullah Saleh sont un peu compliquées. Dès le début il y a une dissonance entre les deux", analyse M. Dorronsoro. "Ahmad Massoud n'a pas de position officielle dans le régime, c'est quelqu'un qui n'a pas de soutien fort en Afghanistan hors du Panchir", selon le chercheur.

A l'instar de l'ancien combattant français, il estime que le fils Massoud vit dans le "fantasme paternel" et la "légende" du père.

"Il se sent porteur d'un héritage, il prend des habits du lionceau (son père était surnommé "le Lion du Panchir"). Il se dit: s'il faut que quelqu'un entre en résistance, c'est à moi de le faire", analyse l'ancien combattant.

M. Saleh "lui prétend être constitutionnellement le président afghan légitime après la fuite d'Ashraf Ghani", relève M. Sayed.

Quels sont les objectifs poursuivis ? "Négocier avec les talibans ou (...) une vraie résistance armée ?", s'interroge le chercheur français.

"Les intérêts des Panchiris sont actuellement défendus politiquement à Kaboul par (l'ancien chef du gouvernement) Abdullah Abdullah, qui négocie avec les talibans, et par les oncles de Massoud qui sont en train de négocier au Pakistan", pointe l'ancien combattant.

Il juge possible que "cette résistance soit une manière de peser sur les négociations à Kaboul pour que soient défendus les intérêts des Panchiris, et qu'à un moment donné, Abdullah ou la famille appelle Massoud et lui dise: C'est bon, tu peux arrêter, on a un bon accord".

Il estime que M. Saleh n'est pas dans la même logique car c'est un "ennemi personnel des talibans".

Gilles Dorronsoro n'exclut pas pour autant qu'il tente malgré tout de négocier avec les nouveaux maîtres du pays, "puisqu'il parle de processus de paix qui devrait être plus inclusif".

Militairement, "cela ne va nulle part", selon le chercheur français. "Les talibans n'ont qu'à verrouiller le Panchir et voilà, même pas besoin d'y pénétrer véritablement".

Massoud "a des jeunes, des véhicules, des hélicoptères, des munitions, ça fait des mois qu'il se prépare", estime de son côté l'ancien combattant français. Pour autant, il partage l'analyse du chercheur: "Ils ont les moyens de faire semblant", de se claquemurer dans la vallée, mais guère plus.

Reste à connaître la position d'éventuels parrains étrangers qui pourraient avoir intérêt à voir une résistance active, enthousiasmés par la légende Massoud ou opposés à la création dans la zone d'une théocratie fanatique.


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.