KABOUL : Le cofondateur des talibans, le mollah Abdul Ghani Baradar, est rentré mardi en Afghanistan à peine deux jours après la prise du pouvoir, les nouveaux maîtres du pays assurant que leurs adversaires seraient pardonnés et que les femmes seraient respectées selon "les principes de l'islam".
Le mollah Abdul Ghani Baradar, co-fondateur et numéro deux des talibans, qui dirigeait depuis le Qatar le bureau politique du mouvement, est rentré au pays où il devrait être appelé à de hautes fonctions.
"Une délégation de haut niveau menée par le mollah Baradar a quitté le Qatar, a atteint notre pays tant aimé cet après-midi et atterri à l'aéroport de Kandahar", a tweeté un porte-parole des talibans.
Face au discours apaisant des talibans, plusieurs pays, dont la Chine et la Russie, qui n'ont pas fermé leurs ambassades, ont indiqué leur volonté de normaliser les relations avec les talibans.
Les Etats-Unis se sont dits prêts mardi à maintenir leur présence diplomatique à l'aéroport de Kaboul après la date limite de retrait fixée au 31 août si les conditions le permettent.
"Si (la situation) est sûre, et si c'est responsable pour nous de rester plus longtemps, nous pourrions envisager cela", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine Ned Price.
Mais pour le procureur de la Cour pénale internationale, des crimes et des exécutions en guise de représailles ont été commis dans le pays, qui pourraient relever de violations du droit international humanitaire.
Pour sa part, le Conseil des droits de l'homme de l'ONU a annoncé mardi soir une session spéciale le 24 août à Genève pour examiner "les inquiétudes sérieuses concernant les droits de l'homme" après la prise du pouvoir par les talibans.
Calme prudent à Kaboul
A Kaboul, des magasins ont rouvert, le trafic automobile a repris et des policiers réglaient la circulation, les talibans tenant des postes de contrôle.
Mais des signes montraient que la vie ne serait plus celle d'hier. Les hommes ont troqué leurs vêtements occidentaux pour le « shalwar kameez » (ample habit traditionnel afghan) et la télévision d'Etat diffuse désormais essentiellement des programmes islamiques.
Les écoles et universités de la capitale restent fermées.
Depuis qu'ils sont entrés dans la ville dimanche, après une fulgurante offensive leur ayant permis en dix jours de contrôler quasiment tout le pays, les talibans ont multiplié les gestes d'apaisement à l'égard de la population.
Mais pour nombre d'Afghans, la confiance sera dure à gagner. Du temps où ils étaient au pouvoir (1996-2001), les talibans avaient imposé une version ultra-rigoriste de la loi islamique. Les femmes ne pouvaient ni travailler ni étudier, et voleurs et meurtriers encouraient de terribles châtiments.
"Les gens ont peur de l'inconnu", confie un commerçant de Kaboul. "Les talibans patrouillent la ville en petits convois. Ils n'importunent personne mais, bien sûr, les gens ont peur".
Un corps trouvé dans le train d'atterrissage d'un C-17 américain
WASHINGTON : L'armée américaine a découvert des "restes humains" dans le train d'atterrissage de l'avion militaire qui avait été pris d'assaut lundi par des Afghans paniqués a l'aéroport de Kaboul, a indiqué mardi l'armée de l'air américaine, qui a ouvert une enquête.
L'US Air Force va examiner toutes les vidéos qui circulent sur les réseaux sociaux d'un avion de transport C-17 que des centaines de personnes avaient poursuivi en courant, certains tentant follement de s'accrocher à ses flancs ou à ses roues. Une autre vidéo montrait le même appareil en vol au-dessus de Kaboul, et ce qui apparaissait comme deux personnes tombant dans le vide.
"Outre les vidéos mises en ligne et les informations de presse faisant état de personnes tombant de l'appareil au départ, des restes humains ont été découverts dans le train d'atterrissage du C-17 lorsqu'il a atterri à la base aérienne Al Udeid, au Qatar", a précisé une porte-parole de l'US Air Force, Ann Stefanek.
"L'enquête sera exhaustive pour nous permettre d'obtenir tous les faits sur cet incident tragique", a-t-elle ajouté dans un communiqué.
La porte-parole n'a pas donné de bilan total ni confirmé les informations faisant état d'une personne écrasée sous les roues de l'appareil avant le décollage.
Le C-17 venait d'atterrir et était chargé d'équipement destiné aux renforts militaires américains envoyés à Kaboul pour sécuriser les évacuations de civils.
"Avant que l'équipage n'ait pu décharger l'avion, il a été encerclé par des centaines d'Afghans" qui avaient envahi le tarmac après avoir forcé le périmètre de sécurité de l'aéroport, a précisé la porte-parole. "Face à une situation qui se détériorait rapidement autour de l'avion, l'équipage a décidé de repartir aussi vite que possible".