LONDRES/MOSCOU : Les appels du président américain Joe Biden à l'OPEP+ pour pomper plus de pétrole pourraient être de courte durée, et la pression politique risque de s'atténuer face aux prix de l'essence au cours des prochains mois.
Les prix de l'essence aux États-Unis ont augmenté de 2,4% en juillet par rapport au mois précédent, portant leur progression sur 12 mois à 41,8%, selon les données sur l'inflation. Le prix moyen national quotidien à la pompe était de 3,19 $ le gallon le 11 août.
Cependant, ce prix devrait baisser de près de 12% à une moyenne de 2,82 $ le gallon au quatrième trimestre, selon les prévisions du gouvernement américain. La progression continue du variant Delta pourraient entraîner un nouvel effondrement de la demande et une baisse encore plus importante.
La demande mondiale de pétrole devrait croître plus lentement que prévu cette année et pourrait entraîner une offre excédentaire en 2022, car la propagation du variant Delta crée un goulot d’étranglement dans les principaux pays consommateurs, a déclaré jeudi l'Agence internationale de l'énergie.
La demande a bondi en juin avec l'augmentation de la mobilité en Amérique du Nord et en Europe. Mais elle a «brusquement inversé le cours» en juillet, quand le variant Delta a secoué les livraisons en Chine, en Indonésie et dans d'autres régions d'Asie, explique l'AIE dans son rapport mensuel.
En revanche, l'OPEP a maintenu jeudi sa prédiction d'une forte reprise de la demande mondiale de pétrole en 2021 et d'une nouvelle croissance l'année prochaine. L’organisation s'attend à ce que la demande augmente de 5,95 millions de barils par jour (bpj) cette année, ou 6,6%, inchangée par rapport aux prévisions du mois dernier.
«L'économie mondiale continue de se redresser», affirme l'OPEP dans le rapport. «Cependant, de nombreux défis demeurent et qui pourraient facilement freiner cet élan. En particulier, la progression de la Covid-19 requiert une surveillance étroite».
Le Brent a chuté de 0,4% à $71,35 le baril à 11 h 51 à Londres. Il a clôturé près d'un sommet de deux ans, à $76,33 le baril, le 30 juillet.
«Les réductions de production effectuées pendant la pandémie devraient être inversées à mesure que l'économie mondiale se redresse, afin de baisser les prix pour les consommateurs», a déclaré Biden mercredi à la Maison Blanche.
Toutefois, l'OPEP+ a accepté le mois dernier d'augmenter l'offre de 0,4 million de barils par jour du mois d'août à décembre, pour un total de 2 millions de barils par jour.
«Cet appel de la Maison Blanche constitue une contradiction en quelque sorte, étant donné le fort plaidoyer environnemental de l'administration Biden. Mais ceci montre une fois de plus à quel point les prix de l'essence restent une priorité dans la politique énergétique américaine», déclare Herman Wang, rédacteur en chef, OPEP/Middle East news à S&P Global Platts, à Arab News. «C'est aussi un rappel que l'OPEP et ses alliés gardent une influence considérable sur le marché», dit-il.
«Concrètement, il peut sembler théâtral de parler de pétro-diplomatie américaine, mais la propre analyse de l'OPEP montre aujourd'hui que son offre est bien inférieure aux volumes nécessaires pour équilibrer le marché», souligne Wang.
«Une action imminente de l'OPEP+ est peu probable, de nombreux membres se sont déjà engagés sur les volumes d'exportation de septembre. Mais son message lors de la réunion du 1er septembre sera certainement analysé de près par les responsables américains», poursuit le rédacteur en chef.
La décision de l'administration était apparemment programmée pour coïncider avec l'annonce de l'inflation, explique l'analyste de Height Capital Markets, Benjamin Salisbury, à Bloomberg News.
«Le mantra de l'inflation croissante, surtout en ce qui concerne les prix du carburant, est le risque numéro un pour le plan économique de Biden, les programmes du plan américain pour l'emploi et les familles américaines ainsi que les perspectives de réélection des démocrates», conclut Salisbury.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com