DJEDDAH: Au cours des quelques dernières décennies, les fauconniers d’Arabie saoudite font figure de pionniers dans l’élevage et de la conservation. La fauconnerie a connu une croissance exponentielle depuis ses humbles débuts bédouins.
Le Royaume est fort d’un patrimoine historique riche et la tradition de la fauconnerie en fait partie. Le faucon est un fidèle compagnon du voyageur bédouin à travers les déserts d’Arabie. La chasse avec les faucons faisait partie intégrante du territoire pendant des milliers d’années puisque l’animal permettait au voyageur épuisé de se nourrir en attrapant des proies.
«Un faucon doit être à la fois doux et féroce. Il doit s’adapter aux changements climatiques du pays de son propriétaire. Il doit être suffisamment fort et agile pour attraper sa proie et l’abattre. Il doit également être suffisamment futé pour désapprendre une grande partie de ses connaissances autochtones», écrit Fuertes dans son article.
Aujourd’hui, la fauconnerie est l’un des sports les plus intéressants et les plus lucratifs pour les Saoudiens et autres peuples de la région.
Cependant, c’est l’élevage des faucons qui a permis à cet ancien passe-temps de retrouver toute sa gloire. Historiquement, les faucons sauvages étaient capturés très jeunes, de préférence avant d’avoir un an. En effet, les dresser correctement exigeait des mois de travail et l’élevage se plaçait au cœur des intérêts des fauconniers et des conversationnistes dans les années 1960 et 1970.
La fauconnerie devient alors un passe-temps lucratif puisque seuls les faucons les plus rapides, les plus puissants, les plus beaux et les plus futés sont choisis et dressés par d’honorables éleveurs. Le processus de sélection n’est pas simple. Les éleveurs dépensent des milliers de riyals saoudiens rien que pour les former. Choisir les meilleurs faucons est inhérent au processus d’élevage.
Comprendre l’histoire de l’oiseau revêt une importance primordiale, rapporte le vétérinaire et expert en conservation de la faune Albara al-Othman, spécialiste en espèces menacées depuis seize ans.
«Ce n’est pas une tâche facile», confie Al-Othman à Arab News. «L’espèce de faucon est sélectionnée en fonction de l’objectif. Les animaux sont utilisés à des fins de chasse ou de concours avec des catégories, règles et exigences spécifiques. Dans les concours de beauté, seules les races pures sont autorisées tandis que les espèces hybrides peuvent participer aux courses.»
«La course de faucons est l’un des sports les plus exclusifs. Seuls les meilleurs oiseaux peuvent y participer. L’élevage est donc indispensable pour que les fauconniers puissent atteindre cet objectif.»
Selon Al-Othman, les oiseaux de proie atteignent l’âge adulte au bout de cinq ans. C’est alors que la reproduction commence et que les petits faucons naissent. Les mamans faucons jouent également un rôle important.
En 1920, Louis Agassiz Fuertes, un célèbre ornithologue et expert en oiseaux américain, publie un article intitulé «La Fauconnerie, sport des rois» dans le magazine National Geographic. Il décrit cet art comme un «sport beau et romantique».
Jeudi, l’Arabie saoudite accueillera la première vente aux enchères internationale des fermes d’élevage de faucons au siège du Saudi Falcon Club (SFC) à Malham, au nord de la capitale Riyad. La vente aux enchères propose des faucons de premier plan en provenance de la région et certaines des meilleures fermes à travers le monde.
La vente aux enchères passera en revue l’évolution de la biologie génétique et le processus d’élevage des faucons qui a lieu dans des fermes spécialisées.
La protection des espèces de faucons dans la nature est bien plus qu’une simple activité lucrative. Ils sont souvent élevés en captivité, ce qui a favorisé le lancement d’un mouvement à plus grande échelle visant à protéger les oiseaux les plus vulnérables qui pourraient bientôt figurer sur la liste des espèces en voie de disparition.
Al-Othman affirme que l’élevage joue un rôle important dans la préservation des effectifs, sachant que la demande est élevée.
«Une incidence potentiellement négative serait que les oiseaux hybrides se perdent dans la nature», précise-t-il. «Ils peuvent être particulièrement agressifs lorsqu’ils s’égarent. C’est rare que cela se produise mais ça reste un risque quand même.»
En décembre dernier, le SFC a lancé la première phase de son programme «Hadad» qui vise à remettre les faucons dans leur habitat naturel. Ce programme sera mis en place en coordination avec les Special Forces for Environmental Security et le National Center for Wildlife Development, entre autres.
Selon le SFC, les oiseaux seront surveillés et leur comportement étudié.
«Pour que les fauconniers tirent le meilleur d’une race donnée, l’histoire de l’oiseau sélectionné est le facteur le plus important parce que les statistiques comptent et sont indispensables au processus de sélection», souligne Abdellah Chamroukh, un fauconnier fort d’une expérience de deux décennies.
«Les Émirats arabes unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas font partie des meilleurs pays en matière de programmes de reproduction. Le plus célèbre est le croisement entre le faucon shaheen et le faucon gerfaut de race pure. Connus sous le nom de Falco Peregrinus, ils ont été choisis pour leur vitesse et ont eu beaucoup de succès. C’est l’une des espèces les plus remarquables qu’on trouve dans n’importe quel concours.»
L’année dernière, un jeune faucon shaheen pesant 1,1 kg avait été capturé à Hafr al-Batin, au nord-est du Royaume. Il a été vendu à plus de 170 000 dollars américains (1 dollar = 0.84 euros). Selon le SFC, il s’agit là du prix de vente le plus élevé.
Chamroukh dispose d’une grande expérience en fauconnerie. Il commence même à participer à des concours. En tant que fauconnier dont le passe-temps se transforme en carrière professionnelle, il privilégie le Mountain Falco Peregrinus, plus connu sous le nom d’Al-Barbary parmi les fauconniers de la région, même s’il n’est pas aussi célèbre que son cousin, le Marine Falco Peregrinus.
Selon Chamroukh, les fauconniers préfèrent les faucons élevés en captivité plutôt que les faucons sauvages puisqu’ils ont plus de chance de remporter les concours et les courses.
«La vente aux enchères qui devrait bientôt se tenir a fait couler beaucoup d’encre ces derniers temps. C’est l’un des événements les plus importants jamais organisés», conclut-il.
Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com