PARIS : Études de marchés, assistance administrative et juridique, gestion des ressources humaines, appels d’offres, création d’entreprises, aide à l’exportation, implantation et logistique, les opérateurs économiques ont accès depuis le 28 juin à la plate-forme Algeria Invest.
Lancée au Centre international des conférences (CIC) à Alger, par la société i2B, intégrateur de solutions IT (solutions informatiques), Algérie Invest propose un accès exclusif aux investisseurs nationaux et internationaux ainsi qu’un accompagnement dans tous les schémas d’investissement. Créée en 2020, I2B, qui compte aujourd’hui plus de 80 collaborateurs et quelque 5 000 clients dans divers secteurs d’activité, est fondatrice de la société Algéria Tenders, la plate-forme des marchés publics en Algérie. Algéria Tenders, qui a pour objectif l’identification des besoins des partenaires et des clients, propose des services ciblés et personnalisés et rapproche les investisseurs des détenteurs de projets.
«Algeria Invest a pour but de mieux connaître et comprendre le marché algérien et de mieux cibler les investissements et leurs stratégies», souligne Hamid Batata, PDG de la société i2B. «Cet outil digital propose aux investisseurs potentiels des analyses sectorielles et thématiques de qualité ainsi qu’une veille économique et concurrentielle», souligne le directeur de la société fondatrice, un organisme indépendant de tout sponsoring public ou privé.
«La plate-forme offre trois services: une rubrique sur les opportunités d’affaires triées et sélectionnées selon les derniers développements de l’économie nationale; le second service est dédié à l’analyses des experts sur l’environnement des affaires, notamment dans les volets législatif, fiscal et parafiscal, et enfin, le troisième volet est consacré à l’accompagnement dans tous les schémas d’investissement», explique Reda Rachid Allalouche, chargé de communication d’Algeria Invest.
Pour sa part, la Confédération générale des entreprises algériennes (CGEA) a salué le lancement de la plate-forme qu’elle considère comme un outil de facilitation à l’investissement en Algérie.
L’indispensable attractivité économique pour attirer les investissements directs étrangers (IDE)
Algéria Invest, dont les principales missions consistent à promouvoir le potentiel de l’Algérie en matière d’investissements directs étrangers (IDE) et à la mise en avant des secteurs porteurs sur le marché, va-t-elle réussir à atteindre ses objectifs dans l’écosystème algérien? Le climat des affaires en Algérie permet-il de booster les IDE?
Pour Brahim Guendouzi, professeur d’économie, «il est nécessaire de se pencher sérieusement sur la question de l’attractivité de l’économie nationale pour attirer les IDE, lesquels représentent un important levier de financement des investissements mais pas uniquement», car, estime-t-il, «les IDE constituent également un moyen d’améliorer “la compétitivité des entreprises nationales grâce au savoir-faire et à l’apprentissage technologique ainsi qu’à l’insertion dans des chaînes de valeur”.»
L’économiste affirme que «cinq sources de croissance économique identifiées font l’objet d’une attention particulière dans le programme de relance économique: l’agriculture, l’industrie pharmaceutique, la pétrochimie, les énergies renouvelables et les activités minières. On s’attend à un effort soutenu des investissements dans ces secteurs, susceptibles de donner à l’Algérie la diversification tant recherchée de son tissu économique. Il existe également un secteur transversal qui requiert un accompagnement solide, car il est déterminant à moyen et long terme: celui de l’économie de la connaissance et des nouvelles technologies sur lequel misent les pouvoirs publics pour ancrer le pays dans une vision de développement.»
La réforme du système financier, une urgence?
Selon de nombreux experts, la réforme du système financier et monétaire devient urgente. Il en va de même pour le système fiscal. Interrogé par Arabnews en français sur le rôle du secteur bancaire dans l’impulsion des IDE et la dynamisation de l’économie nationale, Mohamed Haichour, expert financier, membre du club d'Alger du Centre algérien de diplomatie économique et membre du conseil scientifique de la Commission d'organisation et de surveillance des opérations de Bourse (Cosob), estime que les produits proposés par les banques ne correspondent pas vraiment aux attentes des entreprises et qu’il est urgent de lever les obstacles qui bloquent le chemin de la croissance.
L’expert nous explique que dans le cadre du plan de relance économique gouvernemental, allant de l’année fiscale 2021 à 2024, les réformes du secteur financier concernent quatre domaines: la fiscalité, la politique monétaire, le marché des changes et le système bancaire. «L’assouplissement des lois devient vital pour assurer la survie et la pérennité du secteur bancaire», nous précise Mohamed Haichour, «la Banque d’Algérie doit reprendre son rôle de régulateur par des mécanismes de marché et non pas celui du gendarme qui empêche d’aller vers les innovations.»
Mohamed Haichour plaide pour la modernisation de la réglementation bancaire par l’assouplissement du contrôle des changes, la libération des opérations financières et l’ouverture progressive du marché offshore pour les banques intermédiaires. Il estime également nécessaire de doter le système financier national de tous les compartiments des différents marchés; marché du savoir, marché monétaire, financier et de change.
«Dans le cadre des IDE, le capital étranger injecté est libellé en monnaie locale mais les fonds sont envoyés en devises», souligne l’expert. «L’investisseur ne dispose pas d’un service adéquat afin d’obtenir des informations sur l’évolution des cours du change lui permettant de connaître la contre-valeur exacte lors du transfert de fonds.» M. Haichour précise qu’il faudra dissocier les opérations du commerce extérieur de celles de change par la suppression de la domiciliation du guichet unique et laisser les opérateurs économiques négocier le cours de change auprès de plusieurs banques.»
Selon l’expert, ces mesures seront bénéfiques pour dynamiser le secteur, car, selon lui, les banques intermédiaires pourront prêter, emprunter, vendre, exécuter des opérations de cross currency (transposition d’une dette libellée dans une devise en une dette libellée dans une autre devise) librement avec les banques internationales et sur les marchés internationaux. «Cela permettra aux banquiers locaux d’acquérir une certaines expérience et expertise quant aux nouvelles pratiques des marchés à l’international», ajoute-t-il.
Flexibilité et transparence des transactions financières
Interrogé sur les bénéfices des avantages fiscaux et parafiscaux accordés récemment par l’Algérie dans le cadre de la loi de finances 2021, l’expert financier affirment que ces derniers «n’ont pas encore donné de résultats, car ce qui intéresse un investisseur étranger en premier lieu, c’est la stabilité économique et politique et la flexibilité dans le mouvement des capitaux». Il ajoute que «sur le plan technique et réglementaire, la loi permet à une entreprise de transférer les dividendes et d’injecter des capitaux, mais ce sont les obstacles bureaucratiques et administratifs qui entravent ces opérations».
Mohamed Haichour indique que les entreprises étrangères actives dans le commerce (négoce) n’ont pas le droit de transférer les dividendes, seules les entreprises qui investissent dans la production ont la possibilité de le faire. «Cela incite les entreprises à opter pour la surfacturation (Transfer pricing). Cet obstacle doit être levé», souligne-t-il en précisant qu’il faudra adopter une démarche de transparence dans les activités commerciales. Car, précise-t-il, «la surfacturation porte préjudice aussi bien à l’économie nationale qu’aux consommateurs».