Près de Deauville, le pass sanitaire sonne comme «un coup de marteau supplémentaire»

«Chers clients, avant de vous installer nous vous remercions de bien vouloir nous présenter votre pass santé» peut-on lire à l'entrée d'un café à Deauville le 27 juillet 2021. (Photo, AFP)
«Chers clients, avant de vous installer nous vous remercions de bien vouloir nous présenter votre pass santé» peut-on lire à l'entrée d'un café à Deauville le 27 juillet 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 28 juillet 2021

Près de Deauville, le pass sanitaire sonne comme «un coup de marteau supplémentaire»

  • Plusieurs établissements ont dû fermer leurs portes ces dernières semaines car leur personnel a été testé positif à la Covid-19
  • Selon les derniers chiffres fournis par la préfecture, le taux d'incidence s'élevait à 833 cas pour 100 000 habitants lundi

TOURGÉVILLE: Sur la côte fleurie en Normandie où le nombre de cas positifs progresse nettement, le pass sanitaire est testé "volontairement" depuis dimanche. "Un coup de marteau", selon certains restaurateurs, qui pâtissent déjà d'une fréquentation en berne. 

"Une catastrophe", lâche Bernard Bellemère, 58 ans, gérant de Chez Berny, un restaurant de plage à Benerville-sur-Mer, tout près de Deauville.

"A cette heure-là d'habitude, je suis plein", dit-il en montrant la dizaine de clients éparpillés parmi les 125 chaises et canapés de la terrasse en bois. "J'ai jamais vu une aussi faible fréquentation en 15 ans", soupire le restaurateur, qui dit refuser une cinquantaine de clients par jour dans le cadre de l'expérimentation du pass sanitaire, annoncée samedi par le préfet du Calvados pour faire face à un rebond de l'épidémie.

"Quand on l'annonce à la porte, les gens repartent. Déjà qu'on n'a pas une météo favorable pour un mois de juillet", déplore-t-il.

C'est le cas de Laurent et Stéphanie, deux quadragénaires des Yvelines en congés sur la côte normande, qui se voient refuser l'accès au restaurant par un patron dépité. "On pensait que pour les terrasses, c'était bon, que c'était valable juste dans les établissements fermés", explique Stéphanie, 47 ans.

"On est des touristes, on vient dans le Calvados pour prendre du plaisir et on peut pas en prendre", regrette Laurent, 46 ans, qui n'est pas vacciné. 

Un peu plus loin, sur la longue plage de sable fin, Frédéric Larue, 47 ans, employé à La Paillote, à Tourgéville, fait le même constat.

"On a beaucoup de gens qui ne viennent pas parce qu'ils savent qu'ils seront refoulés. Et il y a des gens qui prennent mal qu'on leur demande le pass sanitaire", explique-t-il, signalant même "quelques comportements agressifs à la marge".

Là encore, les 340 transats et chaises de la terrasse sont presque vides, alors que les nuages peinent à se disperser. "Entre la météo et le Covid, c'est la mort, c'est galère, galère", confirme un serveur désœuvré. La veille, le restaurant a fait moins de 100 couverts contre 500 en temps normal.

"Le pass sanitaire, c'est un coup de marteau supplémentaire", regrette M. Larue, qui admet cependant qu'il fallait bien agir "si on veut que l'épidémie diminue". 

Le vaccin, «la seule solution»

Sur la côte fleurie, plusieurs établissements ont dû fermer leurs portes ces dernières semaines car leur personnel a été testé positif à la covid-19.

Selon les derniers chiffres fournis par la préfecture, le taux d'incidence de la communauté de communes Cœur Côte fleurie (Deauville, Trouville, etc) s'élevait à 833 cas pour 100 000 habitants lundi, soit quatre fois plus que la moyenne départementale (193). Ce taux a plus que doublé en une semaine.

"J'ai eu la chance de rester ouverte parce que tout mon personnel est vacciné", se félicite Christelle Joly, 54 ans, gérante des Ammonites à Benerville-sur-Mer, qui emploie une trentaine de personnes.

Pour elle, le vaccin, c'est "la seule solution". "Les gens comprennent vraiment qu'en ce moment sur la côte fleurie, c'est compliqué, qu'on a beaucoup de cas positifs", assure-t-elle. 

Pour les clients qui ne sont pas encore complètement vaccinés, "on donne quand même une petite chance" avec "l'accord du préfet", reconnaît-elle. 

Parmi les rares clients attablés, le pass sanitaire est d'ailleurs plutôt bien accepté. "Moi, ça me rassure", lâche Didier Ravassard, retraité de 68 ans. "C'est très bien: on doit tous se protéger et protéger les autres."

"C'est pas grand chose, il faut l'installer sur son iPhone et après on prend l'habitude. C'est pas très contraignant", abonde Elisabeth Meyer-Schoenfeld, retraitée de 68 ans, qui déjeune en famille. "Tout le monde devrait être vacciné, c'est un geste citoyen", appuie-t-elle.

"Si ça nous permet de sortir de tout ça, de retrouver un semblant de normalité, je trouve ça très bien", estime aussi Grégory, 44 ans.


Après les tensions, Paris et Alger entament un nouveau chapitre

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise. (AFP)
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  • Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune ont décidé de relancer les échanges bilatéraux
  • L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique

Après avoir frôlé la rupture, un nouveau chapitre s'ouvre dans les relations entre la France et l'Algérie.

Lors d'un appel téléphonique récent, les présidents Emmanuel Macron et Abdelmadjid Tebboune sont convenus de relancer les échanges bilatéraux et de jeter les bases de cette reprise.

Le communiqué publié par le palais de l'Élysée fait suite à plusieurs signes récents de rapprochement, notamment l'entretien accordé par Tebboune aux journalistes des médias publics algériens, où il a exprimé sa volonté de renouer le dialogue avec son homologue français et de mettre fin à ce qu'il a qualifié de «période d'incompréhension» entre leurs deux pays.

L'échange téléphonique a permis de formaliser une feuille de route ambitieuse et pragmatique, centrée sur trois axes prioritaires: la coopération sécuritaire, la gestion des flux migratoires et les questions mémorielles.

Le communiqué conjoint, publié à l’issue de cet échange, souligne la volonté des deux chefs d’État de dépasser les crises récentes pour amorcer une relation apaisée et mutuellement bénéfique.

Premier résultat concret dans le cadre de cette volonté affichée, le ministre français de l’Europe et des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot se rend à Alger le 6 avril pour des entretiens avec son homologue algérien Ahmed Attal.

Les ministres devront détailler un programme de travail ambitieux et en décliner les modalités opérationnelles et le calendrier de mise en œuvre.

La coopération sécuritaire doit reprendre sans délai, notamment pour lutter contre le terrorisme au Sahel et sécuriser les frontières de la région.

La gestion des migrations irrégulières et la question des réadmissions de ressortissants algériens en situation irrégulière en France sont au cœur des discussions. 

Cette dynamique s’inscrit dans la continuité de l’engagement du président français, exprimé dès le début de son premier mandat et même avant, lors de sa campagne électorale en Algérie, où il avait qualifié la colonisation de «crime contre l’humanité».

Plus tard et dès son élection en 2017, Macron a affiché sa volonté de regarder «la vérité en face». Sa première visite officielle en Algérie marquait la priorité qu’il entend donner à la relation franco-algérienne, en posant les bases d’un dialogue sincère et apaisé. 

Cet engagement a été réaffirmé par la déclaration d’Alger en août 2022, qui prévoyait la mise en place d’une «commission mixte des historiens» chargée d’examiner les archives et de favoriser une meilleure compréhension mutuelle.

Les enjeux de ce rapprochement, dont l’objectif est la poursuite du travail de refondation des relations bilatérales, dépassent le cadre strictement bilatéral et s’inscrivent dans un contexte géopolitique et sécuritaire complexe.

La coopération entre Paris et Alger est essentielle pour répondre aux défis régionaux, notamment dans le Sahel, où le terrorisme et l’instabilité menacent la sécurité de l’Afrique du Nord et de l’Europe. 

La France et l’Algérie partagent un intérêt commun pour la lutte contre les groupes armés et leur coopération stratégique revêt une importance capitale pour stabiliser la région.

La gestion des flux migratoires reste un point de tension récurrent, car si la France souhaite des mécanismes de réadmission efficaces, l’Algérie demande le respect de la dignité et des droits de ses ressortissants. 

Malgré la volonté de réconciliation affichée, le dossier mémoriel reste un obstacle majeur.

La question des excuses officielles pour les crimes coloniaux demeure sensible. Si Emmanuel Macron a reconnu des «crimes contre l’humanité» en 2017, les demandes d’excuses formelles de l’Algérie n’ont pas encore été pleinement satisfaites. 

Les travaux de la commission mixte des historiens, lancés à l’été 2022, doivent permettre d’approfondir la recherche sur cette période sombre et de poser les bases d’un dialogue apaisé.

Malgré les gestes d’ouverture, les relations entre Paris et Alger restent fragiles, en partie en raison d’une méfiance réciproque, alimentée par des perceptions contradictoires des enjeux bilatéraux.

L’un des points de friction les plus marquants est la question du Sahara occidental. La position française, perçue comme favorable au Maroc, a suscité des crispations du côté algérien, allant jusqu’au rappel de l’ambassadeur d’Algérie en France. 

Pour Alger, le soutien implicite de Paris au plan d’autonomie marocain est perçu comme un alignement qui remet en cause l’équilibre diplomatique régional.

Bien que la France ait tenté de clarifier sa position, en affirmant vouloir accompagner une dynamique internationale de sortie de crise, ce dossier demeure une source de tension. 

Au-delà des relations diplomatiques, les opinions publiques des deux pays jouent un rôle crucial dans l’évolution du partenariat.

En Algérie, une partie de la population reste méfiante vis-à-vis des intentions françaises, nourrie par un sentiment de souveraineté exacerbée et par la mémoire toujours vive des exactions coloniales. 

En France, la question algérienne suscite également des clivages politiques. Certains considèrent les gestes mémoriels comme une forme de repentance excessive, tandis que d’autres appellent à une reconnaissance plus franche des torts commis pendant la colonisation. 

La relance des relations entre la France et l’Algérie repose sur un équilibre délicat entre la reconnaissance du passé, la gestion des défis actuels et la mise en œuvre d’une coopération tournée vers l’avenir. 

Malgré la volonté politique manifeste, la concrétisation de ce partenariat dépendra de la capacité des deux dirigeants à dépasser les clivages historiques et à impulser une dynamique durable.


Paris entend résoudre les tensions avec Alger « sans aucune faiblesse »

le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
le chef de la diplomatie française, chef de la diplomatie française (Photo AFP)
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  • Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ».
  • « L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

PARIS : Le chef de la diplomatie française a assuré mardi que Paris entendait résoudre les tensions avec Alger « avec exigence et sans aucune faiblesse ». Il s'exprimait au lendemain d'un entretien entre les présidents français et algérien, qui visait à renouer le dialogue après huit mois de crise diplomatique sans précédent.

« Les tensions entre la France et l'Algérie, dont nous ne sommes pas à l'origine, ne sont dans l'intérêt de personne, ni de la France, ni de l'Algérie. Nous voulons les résoudre avec exigence et sans aucune faiblesse », a déclaré Jle chef de la diplomatie française devant l'Assemblée nationale, soulignant que « le dialogue et la fermeté ne sont en aucun cas contradictoires ».

« L'échange entre le président de la République (Emmanuel Macron, ndlr) et son homologue algérien (Abdelmadjid Tebboune) a ouvert un espace diplomatique qui peut nous permettre d'avancer vers une résolution de la crise », a-t-il ajouté.

Les Français « ont droit à des résultats, notamment en matière de coopération migratoire, de coopération en matière de renseignement, de lutte contre le terrorisme et au sujet bien évidemment de la détention sans fondement de notre compatriote Boualem Sansal », a affirmé le ministre en référence à l'écrivain franco-algérien condamné jeudi à cinq ans de prison ferme par un tribunal algérien. 


Algérie: Macron réunit ses ministres-clés au lendemain de la relance du dialogue

Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
Emmanuel Macron, président français (Photo AFP)
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  • Emmanuel Macron  réunit mardi plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune
  • Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales.

PARIS : Emmanuel Macron  réunit mardi à 18H00 plusieurs ministres en première ligne dans les relations avec l'Algérie, dont Bruno Retailleau, Gérald Darmanin et Jean-Noël Barrot, au lendemain de l'appel avec son homologue algérien Abdelmadjid Tebboune pour relancer le dialogue, a appris l'AFP de sources au sein de l'exécutif.

Le président français a décidé, à la suite de ce coup de fil, de dépêcher le 6 avril à Alger le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot afin de « donner rapidement » un nouvel élan aux relations bilatérales après des mois de crise, selon le communiqué conjoint publié lundi soir.

Le ministre français de la Justice, Gérald Darmanin, effectuera de même une visite prochainement pour relancer la coopération judiciaire.

Le communiqué ne mentionne pas en revanche le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, figure du parti de droite Les Républicains, partisan d'une ligne dure à l'égard de l'Algérie ces derniers mois, notamment pour obtenir une nette augmentation des réadmissions par le pays de ressortissants algériens que la France souhaite expulser.

Bruno Retailleau sera présent à cette réunion à l'Élysée, avec ses deux collègues Barrot et Darmanin, ainsi que la ministre de la Culture, Rachida Dati, et celui de l'Économie, Éric Lombard, ont rapporté des sources au sein de l'exécutif.

 Dans l'entourage du ministre de l'Intérieur, on affirme à l'AFP que si la relance des relations décidée par les deux présidents devait bien aboutir à une reprise des réadmissions, ce serait à mettre au crédit de la « riposte graduée » et du « rapport de force » prônés par Bruno Retailleau.