TOURGÉVILLE: Sur la côte fleurie en Normandie où le nombre de cas positifs progresse nettement, le pass sanitaire est testé "volontairement" depuis dimanche. "Un coup de marteau", selon certains restaurateurs, qui pâtissent déjà d'une fréquentation en berne.
"Une catastrophe", lâche Bernard Bellemère, 58 ans, gérant de Chez Berny, un restaurant de plage à Benerville-sur-Mer, tout près de Deauville.
"A cette heure-là d'habitude, je suis plein", dit-il en montrant la dizaine de clients éparpillés parmi les 125 chaises et canapés de la terrasse en bois. "J'ai jamais vu une aussi faible fréquentation en 15 ans", soupire le restaurateur, qui dit refuser une cinquantaine de clients par jour dans le cadre de l'expérimentation du pass sanitaire, annoncée samedi par le préfet du Calvados pour faire face à un rebond de l'épidémie.
"Quand on l'annonce à la porte, les gens repartent. Déjà qu'on n'a pas une météo favorable pour un mois de juillet", déplore-t-il.
C'est le cas de Laurent et Stéphanie, deux quadragénaires des Yvelines en congés sur la côte normande, qui se voient refuser l'accès au restaurant par un patron dépité. "On pensait que pour les terrasses, c'était bon, que c'était valable juste dans les établissements fermés", explique Stéphanie, 47 ans.
"On est des touristes, on vient dans le Calvados pour prendre du plaisir et on peut pas en prendre", regrette Laurent, 46 ans, qui n'est pas vacciné.
Un peu plus loin, sur la longue plage de sable fin, Frédéric Larue, 47 ans, employé à La Paillote, à Tourgéville, fait le même constat.
"On a beaucoup de gens qui ne viennent pas parce qu'ils savent qu'ils seront refoulés. Et il y a des gens qui prennent mal qu'on leur demande le pass sanitaire", explique-t-il, signalant même "quelques comportements agressifs à la marge".
Là encore, les 340 transats et chaises de la terrasse sont presque vides, alors que les nuages peinent à se disperser. "Entre la météo et le Covid, c'est la mort, c'est galère, galère", confirme un serveur désœuvré. La veille, le restaurant a fait moins de 100 couverts contre 500 en temps normal.
"Le pass sanitaire, c'est un coup de marteau supplémentaire", regrette M. Larue, qui admet cependant qu'il fallait bien agir "si on veut que l'épidémie diminue".
Le vaccin, «la seule solution»
Sur la côte fleurie, plusieurs établissements ont dû fermer leurs portes ces dernières semaines car leur personnel a été testé positif à la covid-19.
Selon les derniers chiffres fournis par la préfecture, le taux d'incidence de la communauté de communes Cœur Côte fleurie (Deauville, Trouville, etc) s'élevait à 833 cas pour 100 000 habitants lundi, soit quatre fois plus que la moyenne départementale (193). Ce taux a plus que doublé en une semaine.
"J'ai eu la chance de rester ouverte parce que tout mon personnel est vacciné", se félicite Christelle Joly, 54 ans, gérante des Ammonites à Benerville-sur-Mer, qui emploie une trentaine de personnes.
Pour elle, le vaccin, c'est "la seule solution". "Les gens comprennent vraiment qu'en ce moment sur la côte fleurie, c'est compliqué, qu'on a beaucoup de cas positifs", assure-t-elle.
Pour les clients qui ne sont pas encore complètement vaccinés, "on donne quand même une petite chance" avec "l'accord du préfet", reconnaît-elle.
Parmi les rares clients attablés, le pass sanitaire est d'ailleurs plutôt bien accepté. "Moi, ça me rassure", lâche Didier Ravassard, retraité de 68 ans. "C'est très bien: on doit tous se protéger et protéger les autres."
"C'est pas grand chose, il faut l'installer sur son iPhone et après on prend l'habitude. C'est pas très contraignant", abonde Elisabeth Meyer-Schoenfeld, retraitée de 68 ans, qui déjeune en famille. "Tout le monde devrait être vacciné, c'est un geste citoyen", appuie-t-elle.
"Si ça nous permet de sortir de tout ça, de retrouver un semblant de normalité, je trouve ça très bien", estime aussi Grégory, 44 ans.