WASHINGTON : Des policiers traumatisés par l'assaut sur le Capitole témoignent mardi devant des élus du Congrès à l'ouverture des travaux d'une commission d'enquête qui suscite de vives controverses à Washington.
Quatre agents se succéderont à partir de 09H30 (13H30 GMT) dans l'imposant bâtiment néoclassique qu'ils ont tenté de défendre le 6 janvier contre des centaines de partisans de Donald Trump venus perturber la certification de la victoire de Joe Biden à l'élection présidentielle.
Membres de la police du Capitole ou de Washington, ils ne feront probablement pas de révélations mais témoigneront de la violence physique et verbale de l'attaque, qui a profondément choqué l'Amérique et le monde.
L'un d'eux, Michael Fanone, a subi un arrêt cardiaque et un traumatisme crânien lors de l'assaut, qu'il a décrit depuis comme "le corps-à-corps le plus brutal, le plus sauvage" de sa vie. Un autre, Aquilino Gonell, un ancien militaire, a été roué de coups avec le mât d'un drapeau.
Ces témoignages sont d'autant plus "importants que certains essaient aujourd'hui de réviser l'histoire et de présenter le 6 janvier comme une simple visite de touristes", a déclaré lundi sur CNN l'élu démocrate Adam Schiff, qui siège au sein de cette commission d'enquête.
"Leur audition n'est que le début" d'investigations au long cours, pour lesquelles "nous ne nous interdirons rien", a écrit dans une tribune publiée par le Washington Post son confrère Bennie Thompson, qui dirigera les travaux. "Nous ferons tout ce qui est nécessaire pour comprendre ce qui s'est passé, pourquoi et comment", a-t-il relevé.
550 arrestations
La commission, qui aura le pouvoir de réclamer des documents et de convoquer des témoins, a fait l'objet d'un bras de fer politique qui pèse sur sa crédibilité.
En janvier, les responsables des deux partis avaient pourtant tous condamné l'attaque sur le Capitole, le leader républicain à la Chambre Kevin McCarthy allant jusqu'à évoquer la part de "responsabilité" de Donald Trump, qui avait harangué la foule avec ses allégations infondées de "fraudes électorales" quelques instants plus tôt.
Mais l'ancien président, toujours très populaire au sein d'une partie de la population, a vite réaffirmé son emprise sur le parti, ce qui lui a permis d'être acquitté en février à l'issue d'un procès au Congrès pour "incitation à l'insurrection".
Son refus de toute remise en question a ensuite poussé les républicains, qui disposent d'une minorité de blocage au Sénat, à torpiller la création d'une commission d'enquête indépendante composée d'experts nommés par les deux partis, comme celle mise en place après les attentats du 11-Septembre.
Les enquêtes judiciaires en cours --plus de 550 personnes ont été arrêtées-- et les auditions déjà menées au Congrès pour comprendre les manquements des services de renseignement, de police ou de l'armée, suffisent amplement, avaient-ils justifié.
«Puéril»
Après ce revers, les démocrates ont avancé seuls, avec la présidente de la Chambre Nancy Pelosi à la manoeuvre. Le 24 juin, elle a annoncé la création d'une "commission spéciale" composée d'élus et dit espérer que Kevin McCarthy nomme "des gens responsables" pour en faire partie.
Près d'un mois plus tard, elle retoquait deux des parlementaires choisis par le responsable républicain, dont l'élu Jim Jordan, connu pour ses outrances et sa fidélité absolue envers Donald Trump.
En représailles, Kevin McCarthy a retiré les autres membres de son parti sélectionnés pour siéger dans cette commission.
Seuls deux républicains, directement choisis par Mme Pelosi, ont accepté de participer: Liz Cheney et Adam Kinzinger, rares voix du Grand Old Party à oser ouvertement critiquer Donald Trump, qu'ils ont même jugé "coupable" à l'issue de son second procès en destitution.
La commission est "une imposture" dont le "résultat est prédéterminé", a tonné Kevin McCarthy en accusant ces deux élus d'être au service de Nancy Pelosi. Un commentaire jugé "puéril" par Liz Cheney.
Donald Trump a quant à lui jugé cette commission "hautement partiale", dans un communiqué lundi, semblant attribuer sans fondements une partie de la responsabilité des événements du 6 janvier à... Nancy Pelosi.
"Nancy enquêtera-t-elle sur elle-même?", s'est interrogé l'ancien président républicain.
Le président Joe Biden, qui se pose en réconciliateur, a apporté son soutien à la nomination de ces deux républicains. Selon la porte-parole de la Maison Blanche Jen Psaki, "il a le même objectif que Mme Pelosi: aller au fond de ce qui s'est passé et empêcher que ça se reproduise."