«Biens mal acquis» de dirigeants étrangers: la France se dote d'un mécanisme de restitution

L'organisation Transparency International France salue elle aussi une «avancée considérable, après 14 ans de procédures et de plaidoyer de la part des ONG». (Photo, AFP)
L'organisation Transparency International France salue elle aussi une «avancée considérable, après 14 ans de procédures et de plaidoyer de la part des ONG». (Photo, AFP)
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Publié le Mercredi 21 juillet 2021

«Biens mal acquis» de dirigeants étrangers: la France se dote d'un mécanisme de restitution

  • Les «biens mal acquis» désignent des avoirs et biens publics détournés par des dirigeants étrangers ou leurs proches à des fins personnelles
  • «Ce dispositif constitue un moyen très concret pour lutter contre les ravages de la corruption et de la prévarication», a souligné M. Le Drian

PARIS: Le Parlement français a adopté définitivement mardi, par un ultime vote du Sénat, la réforme de l'aide française au développement qui crée un dispositif de restitution aux populations des avoirs saisis dans les affaires dites de "biens mal acquis" par des dirigeants étrangers.

Ce projet de loi concrétise l'engagement du président Emmanuel Macron de porter l'aide publique au développement (APD) à 0,55% du revenu national brut (RNB) à la fin du quinquennat, en 2022. "C'est un texte essentiel pour l'avenir de notre diplomatie", a souligné le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian, vantant "une loi à la fois stratégique et humaniste".

Il permet en outre de doter la France d'un mécanisme de restitution aux populations concernées des recettes provenant de la confiscation par la justice française de "biens mal acquis", réclamé par les ONG depuis près de 15 ans. Les "biens mal acquis" désignent des avoirs et biens publics détournés par des dirigeants étrangers ou leurs proches à des fins personnelles : biens immobiliers luxueux, voitures, montres, comptes en banque...

"Ce dispositif constitue un moyen très concret pour lutter contre les ravages de la corruption et de la prévarication", a souligné M. Le Drian.

Le texte prévoit que soient "restituées, au plus près de la population de l'État étranger concerné", les "recettes provenant de biens confisqués aux personnes définitivement condamnées pour blanchiment, recel...", au lieu d'être absorbées dans le budget de l'État français. 

En pratique, une ligne budgétaire spécifique, abondée par la revente des biens, est attendue dans le budget français sous la responsabilité du ministère des Affaires étrangères. Elle doit financer des "actions de coopération et de développement", au "cas par cas" dans les pays concernés, en matière de santé, éducation, égalité femmes-hommes...

Le premier cas concret devrait être celui de la Guinée équatoriale, si un arrêt de la Cour de cassation attendu le 28 juillet confirme la condamnation du vice-président Teodorin Obiang et la confiscation de ses biens en France. Le fils du président de Guinée équatoriale a été condamné en appel le 10 février 2020 à trois ans de prison avec sursis, 30 millions d'euros d'amendes et des confiscations. 

«Avancée historique»

Les restitutions devront articuler respect de la "souveraineté" des États concernés et inclusion de la société civile pour éviter que l'argent ne reparte dans des circuits de corruption. La mission s'annonce délicate en Guinée équatoriale, dirigée depuis bientôt 42 ans par Teodoro Obiang Nguema. "C'est un cas d'école", reconnaît Jean-Pierre Sueur, qui a œuvré très activement pour l'adoption du dispositif et salue "une avancée historique".

Le Sénat à majorité de droite avait adopté en première lecture, en mai 2019, une proposition de loi du sénateur socialiste qui posait le principe d'une restitution aux populations victimes de l'argent "confisqué" par la justice française dans des affaires de corruption internationale. Mais le gouvernement avait alors souhaité attendre la remise d'un rapport sur la question.

"Je resterai vigilant quant aux modalités pratiques afin que les sommes restituées ne soient pas confondues avec le budget de l'aide publique au développement", a indiqué M. Sueur.

L'organisation Transparency International France salue elle aussi une "avancée considérable, après 14 ans de procédures et de plaidoyer de la part des ONG".

Plus globalement, le projet de loi redéfinit la "doctrine française" de l'aide publique au développement. Il fixe 19 pays prioritaires, Haïti et 18 pays d'Afrique subsaharienne, et prône une politique de dons plutôt que de prêts.

Le texte indique en outre que la France "s'efforcera" en 2025 de consacrer 0,7% de son RNB à l'APD, un objectif martelé depuis les années 1970 par la communauté internationale et devenu un vieux totem de l'aide au développement.


La manifestation de soutien à Le Pen "n'est pas un coup de force", dit Bardella

La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
La présidente du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), l'eurodéputé Jordan Bardella (G) et la présidente du groupe parlementaire du parti d'extrême droite français Rassemblement national (RN), Marine Le Pen, quittent le palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 26 août 2024, après leur rencontre avec le président français. (Photo by Bertrand GUAY / AFP)
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  • « Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française.
  • « Cela nous semblait nécessaire que nous puissions nous exprimer directement aux Français.

STRASBOURG : La manifestation de soutien à Marine Le Pen prévue dimanche à Paris « n'est pas un coup de force », mais une mobilisation « pour la démocratie », a assuré mercredi Jordan Bardella, président du Rassemblement national, à des journalistes au Parlement européen à Strasbourg.

« Ce n'est pas un coup de force, c'est au contraire une défense très claire et très profonde de l'État de droit et de la démocratie française. C'est une mobilisation en réalité, non pas contre, mais pour la démocratie française », a déclaré l'eurodéputé au sujet de ce rassemblement annoncé par le RN après la condamnation de la triple candidate à la présidentielle à une peine d'inéligibilité immédiate.

« Cela nous semblait nécessaire (...) que nous puissions nous exprimer directement aux Français par l'intermédiaire de ces discours qui seront prononcés dimanche avec l'ensemble de nos cadres, de nos parlementaires et de nos militants », a-t-il ajouté.

Cette condamnation, que le RN qualifie de « scandale démocratique », compromet grandement ses chances de concourir une quatrième fois à la fonction suprême en 2027.

Pour Jordan Bardella, cela ne change « absolument rien » à sa relation avec Marine Le Pen, « si ce n'est qu'elle est peut-être encore plus forte qu'elle ne l'a été par le passé ».

« Je suis à ses côtés, je vais continuer à l'être (...) Nous allons évidemment mener le combat », a assuré l'eurodéputé qui faisait son retour au Parlement européen après avoir manqué les deux premiers jours de la session.

Il a qualifié de « bonne nouvelle » l'annonce de la justice qu'une décision en appel devrait être rendue « à l'été 2026 », donc bien avant la présidentielle.


Condamnation de Marine Le Pen: Macron rappelle au gouvernement l'indépendance de la justice

Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
Le président français Emmanuel Macron (Photo AFP)
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  • Le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés
  • Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours ».

PARIS : Mercredi en Conseil des ministres, le président français Emmanuel Macron a « rappelé » que l'autorité judiciaire est indépendante et que les magistrats doivent être protégés, après la condamnation de la cheffe de l'extrême droite Marine Le Pen qui a suscité des attaques contre les juges, ont rapporté des participants.

Le chef de l'État a également affirmé que « tous les justiciables ont droit au recours », selon ces sources. La justice a déjà fait savoir qu'un nouveau procès en appel pourrait se tenir dans des délais qui laissent une porte ouverte à une éventuelle candidature présidentielle en 2027 de la leader du Rassemblement national (RN), principale formation d'extrême droite française. 

Devant la presse, à l'issue du Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a rapporté mercredi les propos du chef de l'État.

« La première chose qu'il a rappelée, a poursuivi Mme Primas, est que la justice est évidemment indépendante et prend ses décisions en toute indépendance, et qu'il faut donc la respecter comme l'un des piliers de notre démocratie. La première, a-t-elle dit, est que la justice est indépendante et qu'elle prend ses décisions en toute indépendance et qu'il faut donc la respecter comme un pilier de notre démocratie.

« La troisième chose, pour rappeler que les menaces qui sont faites à l'encontre des magistrats sont absolument insupportables et intolérables, puisque nous sommes encore une fois dans une démocratie. Et la justice est tout à fait indépendante et doit être respectée », a-t-elle ajouté.

« Et la troisième chose, pour rappeler que chacun a le droit à une justice équivalente et que le droit est le même pour tous. »


Bac: l'épreuve de maths en première se précise pour l'an prochain

La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
La ministre de l'Education nationale, de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, lors d'une conférence de presse à l'issue d'une visite à l'école élémentaire Claude-Monnet à Rueil-Malmaison, en banlieue parisienne, le 28 mars 2025. (Photo Thomas SAMSON / AFP)
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  • Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté
  • L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première,

PARIS : Le projet d'épreuve de mathématiques en classe de première pour l'an prochain, qui vise à mettre en œuvre le « choc des savoirs » annoncé par l'ex-ministre de l'Éducation nationale Gabriel Attal, a été présenté mardi devant une instance consultative de l'Éducation nationale, étape-clé avant sa publication.

Le Conseil supérieur de l'éducation (CSE, qui rassemble syndicats, associations de parents, collectivités, etc.) a majoritairement voté contre le projet de décret et d'arrêté instaurant cette « épreuve terminale de culture mathématique aux baccalauréats général et technologique ».

Ils ont recueilli 0 voix pour, 27 contre, 31 abstentions et 4 refus de prendre part au vote (l'administration ne votant pas dans cette instance), un vote indicatif qui n'empêche pas la mise en œuvre de la réforme, selon des sources syndicales.

Cette épreuve écrite d'une durée de deux heures, qui entrera en vigueur au printemps 2026, sera « affectée d'un coefficient 2 » (points pris sur l’épreuve du Grand oral en terminale), selon ces textes, consultés par l'AFP.

L'ex-ministre de l'Éducation nationale, Gabriel Attal, avait annoncé en décembre 2023 la création de cet examen sur le modèle de l'épreuve anticipée de français pour le baccalauréat en fin de première, un projet confirmé en novembre 2024 par sa successeure, Anne Genetet.

Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Snes-FSU, principal syndicat du second degré (collèges et lycées), qualifie auprès de l'AFP la mesure de « rafistolage supplémentaire du bac Blanquer », décidé en 2019 par l'ex-ministre Jean-Michel Blanquer.

Pour Jérôme Fournier, secrétaire national du SE Unsa, la nouvelle épreuve « alourdit la fin de l'année pour les élèves et les correcteurs ».

La première partie, qui est commune à tous les élèves, sera sous forme de QCM et pourrait être corrigée automatiquement, ce à quoi « de nombreuses organisations syndicales sont opposées », a-t-il ajouté, tandis que la deuxième partie devrait consister en des résolutions de problèmes.

Des projets de textes ont par ailleurs été votés au CSE relatif à « la mise en place du +parcours renforcé+ en classe de seconde générale et technologique » ou professionnelle à partir de la rentrée 2026, avec trois votes pour, 45 contre et 13 abstentions.

Mis en place par la ministre Élisabeth Borne, ce parcours est destiné aux élèves n’ayant pas obtenu le diplôme du brevet. Son organisation relèvera « de l’autonomie de l’établissement sur la base indicative de deux heures hebdomadaires sur tout ou partie de l’année », selon le projet d'arrêté.

Sophie Vénétitay déplore « une coquille vide » tandis que Tristan Brams (CFDT Éducation) regrette l'absence de « moyens supplémentaires ».