ALEXANDRIE: Le riyal yéménite a plongé de manière historique mercredi, s’échangeant à 1 003 pour un dollar sur le marché noir, malgré les nouvelles mesures économiques du gouvernement, déclarent les agents de change à Arab News.
Présidé par le Premier ministre, Maeen Abdelmalik Saeed, le Conseil économique suprême (SEC) du gouvernement a approuvé mardi un certain nombre de mesures pour freiner la chute de la monnaie, accusant les sociétés de change locales de manipuler sa valeur à des fins lucratives.
Le conseil a enjoint la Banque centrale du Yémen, basée à Aden, de surveiller les sociétés de change locales en adoptant des mesures punitives contre les agents qui violent la loi financière du pays. La Banque centrale a été chargée de former deux comités: l’un examinerait la collecte des recettes, s’assurant qu’elles sont déposées dans ses succursales dans les provinces libérées; l’autre travaillerait à stimuler les exportations de pétrole.
Le gouvernement a accusé les agents de change de se livrer à des activités spéculatives sur les devises fortes qui ont contribué à la chute rapide et soudaine du riyal. «La SEC confirme que la récente dépréciation de la monnaie n’est pas basée sur des raisons objectives, mais sur des considérations spéculatives et de la désinformation», déclare le Conseil dans un communiqué diffusé par l’agence de presse officielle.
Entre-temps, les inspecteurs de la Banque centrale, escortés par des soldats armés, ont été vus sillonnant la ville d’Aden pour fermer des sociétés qui ne respectent pas les règles monétaires du pays. Le marché n’a pas réagi positivement aux mesures et menaces du gouvernement. La valeur du riyal yéménite, qui se négociait à 215 pour 1 dollar début 2015, est descendue au niveau record de 1 000 pour 1 dollar dimanche soir. Après avoir rebondi à 985 lundi, elle a atteint 1 003 pour 1 dollar mercredi après-midi dans la ville portuaire d’Al-Mukalla, dans le sud du pays.
Le riyal s’était brièvement rétabli en janvier après le retour d’un nouveau gouvernement – formé dans le cadre de l’Accord de Riyad – à Aden alors que les hostilités entre le gouvernement internationalement reconnu et le Conseil séparatiste de transition du Sud (STC) s’étaient calmées.
Les médias officiels ont rapporté mardi que le président du Parlement yéménite, Sultan Al-Barkani, avait exhorté le Premier ministre à trouver des solutions urgentes à la dévaluation du riyal et à réformer le système financier du pays, ajoutant que le Parlement maintiendrait les mesures du gouvernement pour la collecte des revenus et lutter contre la corruption.
«Toutes les mesures nécessaires doivent être prises rapidement pour stopper la détérioration (de la monnaie) et parvenir à une vraie solution. Et nous vous tenons pour responsable si vous échouez car la situation ne peut durer», souligne Al-Barkani dans une lettre au Premier ministre.
Les mesures précédentes pour remédier à la dépréciation du riyal se sont toutes révélées inefficaces. Les tentatives comprenaient la fermeture de sociétés de change, l’arrêt du système de transfert de fonds entre les sociétés de change locales connues sous le nom de «Hawala» – le remplaçant par un réseau électronique formel sous la supervision de la Banque centrale – et l’approvisionnement en dollars des importateurs locaux de carburant et de marchandises. Aucune de ces tentatives n’a abouti.
Les analystes yéménites font valoir que ni le gouvernement ni la Banque centrale ne peuvent imposer les dernières mesures dans les zones libérées, car le gouvernement yéménite siège à l’extérieur du pays depuis mars. Le gouvernement yéménite répond qu’il ne peut pas rentrer chez lui en raison du harcèlement et des interventions du STC dans son travail.
Mardi, le comité gouvernemental pour la mise en œuvre de l’accord de Riyad a déclaré que le STC n’avait pas respecté ses engagements sécuritaires et militaires au titre de l’accord et continuait de déployer des unités militaires, de perturber le travail des organes gouvernementaux à Aden et d’inciter les gens à s’opposer au gouvernement.
Le porte-parole du STC n’a pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires d’Arab News en réponse aux accusations du gouvernement.
Les économistes mettent en cause le gouvernement dans le plongeon du riyal en raison de l’impression «excessive» et irresponsable de billets et de son incapacité à exercer un contrôle sur le marché des changes.
Waled al-Attas, professeur adjoint de sciences financières et bancaires à l’Université Hadramout, déclare à Arab News que les dernières mesures gouvernementales sont des «procédures inadéquates et très tardives». Al-Attas explique que le gouvernement yéménite s’appuie sur une politique de monnaie volatile pour faire face à la dévaluation, en imprimant et en distribuant des espèces sur le marché.
«L’augmentation de la masse monétaire a entraîné une demande supplémentaire de devises étrangères, provoquant la détérioration de la valeur de la monnaie locale. À mon avis, la solution réside dans l’arrêt de l’injection de fonds supplémentaires et dans l’augmentation des recettes publiques à déposer auprès de l’organisme légalement autorisé qui est la Banque centrale», conclut-il.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com