BEYROUTH : Le représentant de l'Union européenne pour la politique étrangère, Josep Borrell, doit se rendre au Liban mardi afin de s’entretenir avec les responsables libanais.
Selon Borrell, «la situation au Liban ne s'est pas améliorée» depuis sa dernière visite trois semaines auparavant.
Lundi, la crise libanaise était à l’ordre du jour lors d’une réunion du Conseil des Affaires étrangères de l'UE.
L'agence de presse allemande DPA affirme que le Conseil envisage d’approuver officiellement des sanctions à l’encontre les responsables libanais qui nuisent à la démocratie dans leur pays. Les diplomates de l'UE seraient toutefois «divisés» à ce sujet en raison de «nombreux points techniques et judiciaires qui demeurent en suspens».
Entre-temps, une réunion diplomatique a rassemblé l'ambassadeur saoudien Walid Abdallah Al-Boukhari, l'ambassadrice américaine Dorothy Shea et l'ambassadrice française Anne Grillo à Beyrouth.
La réunion à l'ambassade saoudienne survient quelques jours après une série de rencontres entre les ambassadrices américaine et française à Riyad pour élaborer un plan d'action conjoint consacré à l'aide humanitaire et alimentaire au Liban.
Les États-Unis et la France se chargent de mobiliser l’aide afin de protéger la stabilité du pays et soutenir l'armée libanaise, d’après deux déclarations distinctes publiées la semaine dernière par leurs ambassades.
Le ballet diplomatique s’intensifie dans un contexte d’accélération de l'effondrement économique, et au milieu de craintes que la situation ne sombre dans le chaos.
Le secrétaire d'État américain Anthony Blinken, le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian et le ministre saoudien des Affaires étrangères Faysal ben Farhane ont discuté de la crise le mois dernier, en marge du sommet du G20 à Matera, en Italie.
Sur Twitter, Blinken avait alors évoqué une «discussion importante avec mes homologues saoudiens et français, @FaysalbinFarhane et @JY_LeDrian, au sujet des dirigeants politiques libanais qui doivent faire preuve de véritable leadership et mettre en œuvre des réformes cruellement requises afin de stabiliser l'économie et apporter au peuple libanais le secours dont il a tant besoin».
La réunion Al-Boukhari-Shea-Grillo
Dans un communiqué publié à l'issue de la réunion tripartite, l'ambassade saoudienne a déclaré que les discussions «se sont penchées sur les développements politiques les plus importants dans les arènes libanaise et régionale, en plus des dossiers d'intérêt commun».
L'ambassade des États-Unis a tweeté pour sa part que les consultations diplomatiques se sont concentrées sur «la situation économique désastreuse au Liban et sur les moyens de soutenir le plus efficacement le peuple libanais».
Parallèlement aux pourparlers, la Banque du Liban (BdL) a démenti des rumeurs selon lesquelles le gouverneur de la banque centrale, Riad Salamé, aurait vendu des réserves en or de la banque centrale.
La BdL a rassuré que «l'or du Liban est intact, il est inviolé et inviolable».
La Banque a déclaré que les réserves en or «ne sont pas hypothéquées ou bloquées pour garantie», même si certains en rêvent, selon l’institution financière, afin de poursuivre l’effondrement du Liban et d’exploiter les dernières ressources du pays «à des fins néfastes et contraires à ses intérêts».
La BdL rappelle qu'elle «compte maintenir les réserves obligatoires».
«La solution pour relancer l'économie libanaise est entre les mains des politiciens qui doivent assumer leurs responsabilités et former un nouveau gouvernement qui puisse mettre en œuvre les réformes requises et rétablir la confiance interne et externe».
Le Liban connaît la pire crise économique de son histoire moderne.
La monnaie nationale a perdu plus de 95% de sa valeur par rapport au dollar qui s'échange aujourd’hui contre 20 000 LL.
Ceci a entraîné une perte de pouvoir d'achat et des difficultés telles que les coupures d'électricité et les pénuries de médicaments, de carburant et de denrées alimentaires, et dont les subventions sont supprimées en raison de la rareté des devises étrangères.
Lundi, le ministère de la Santé a annoncé l’ouverture d’une enquête sur la mort d'une petite fille. La famille de l’enfant explique qu'elle n'a pas pu obtenir des soins adéquats en raison des pénuries qui frappent de plein fouet le secteur médical.
Âgée de neuf mois, Jouri Al-Sayed est décédée dimanche dans la ville d'Anout, au sud du Liban, des séquelles d'une pneumonie. Selon les parents, l'hôpital ne semblait pas disposer des médicaments nécessaires pour traiter l'infection.
En raison de sa température très élevée, Jouri est transférée dans un autre hôpital où elle perd la vie.
Le drame a ajouté à la colère des Libanais.
Dimanche et lundi, de nombreux militants, dont des médecins, ont annoncé sur les réseaux sociaux leur intention d'émigrer, en raison d’un «État qui tue son propre peuple».
Hamad Hassan, ministre de la Santé du gouvernement intérimaire, a rencontré une délégation du Syndicat des importateurs de médicaments et de propriétaires de pharmacies.
Un membre du conseil d'administration du syndicat, Marwan Hakim, explique que les «importateurs sont aux prises avec des problèmes techniques financiers liés aux transferts que la BdL doit effectuer aux entreprises à l'étranger. Les virements ont cessé depuis le 7 mai».
«Si ces problèmes ne sont pas résolus, il n'y aura plus de médicaments au Liban», martèle-t-il.
Les pharmacies ont repris le travail lundi, après une grève de plusieurs jours, bien qu'elles n'aient pas atteint leur objectif d'un meilleur approvisionnement.
Un communiqué de l’Ordre des pharmaciens menace d’une nouvelle grève si le ministre de la Santé ne respecte pas son engagement «de publier des réglementations détaillées qui balisent l’usage médicaments sur la base de l'accord entre le ministère et la BdL».
L’entente permettrait aux importateurs de libérer et de distribuer des médicaments aux pharmacies, en particulier les traitements des maladies chroniques, les anti-inflammatoires et les analgésiques.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com