Qui pour diriger Haïti, déjà en crise avant l'assassinat de son président ?

Depuis juin, des affrontements entre bandes armées dans l'ouest de la capitale Port-au-Prince ont poussé des milliers d'habitants des quartiers pauvres à fuir. (Photo, AFP)
Depuis juin, des affrontements entre bandes armées dans l'ouest de la capitale Port-au-Prince ont poussé des milliers d'habitants des quartiers pauvres à fuir. (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 11 juillet 2021

Qui pour diriger Haïti, déjà en crise avant l'assassinat de son président ?

  • Quelques heures après l'assassinat, Claude Joseph, Premier ministre depuis avril, a déclaré avoir la charge des affaires courantes, décrétant notamment l'état de siège pour 15 jours
  • En Haïti, la Constitution prévoit certes que le Premier ministre assure l'intérim en cas d'empêchement du président mais Jovenel Moïse avait nommé deux jours avant sa mort un nouveau chef du gouvernement, Ariel Henry

PORT-AU-PRINCE, Haïti: Un Premier ministre en partance qui déclare l'état de siège, le président du Sénat désigné par huit de ses pairs pour assurer l'intérim : l'assassinat du président d'Haïti mercredi a aggravé la crise institutionnelle dans laquelle était déjà plongé ce pays pauvre des Caraïbes depuis des mois.

Les trois pouvoirs affaiblis

Le pouvoir exécutif haïtien brutalement affaibli par le meurtre du chef de l'Etat a mis les deux autres - législatif et judiciaire - à l'épreuve.

Jovenel Moïse n'ayant pas organisé d'élections depuis son arrivée au pouvoir en 2017, les mandats des parlementaires haïtiens sont arrivés à expiration sans que leurs successeurs soient désignés. Haïti ne compte donc plus, depuis janvier 2020 et la fin du mandat des députés et de la majorité des sénateurs, que dix représentants nationaux élus, soit le tiers du Sénat.

Et le judiciaire n'est pas beaucoup mieux loti : le gouvernement de Jovenel Moïse n'a pas non plus proposé de juges pour remplacer les membres du Conseil supérieur du pouvoir judiciaire dont les mandats de trois ans arrivaient à leur terme, laissant un Conseil aux rangs dégarnis et dont le président est mort du Covid-19 en juin.

"Pour ce qui a trait à la Constitution, il n'y a pas de possibilité de trouver une solution (à la crise politique actuelle, NDLR) car Jovenel Moïse et son équipe avaient bien pris le soin de démanteler toutes les institutions. Que l'on se tourne vers le Parlement ou l'appareil judiciaire, il n'y a rien", résume Marie Rosy Auguste Ducena, avocate pour le Réseau national de défense des droits humains.

 

Haïti : Martine Moïse, la veuve du président assassiné, veut poursuivre la "bataille" de son mari

La Première dame d'Haïti, Martine Moïse, blessée mercredi par les meurtriers du président haïtien Jovenel Moïse, a appelé samedi à poursuivre la "bataille" livrée par son mari dans un pays plongé dans le chaos que de nombreux Haïtiens cherchent à fuir.

"Je suis vivante", dit-elle en créole dans un message audio sur Twitter, sa première intervention publique depuis l'attentat.

"Je suis vivante mais j'ai perdu mon mari, Jovenel", ajoute-t-elle dans cet enregistrement authentifié pour l'AFP par le ministre haïtien de la Culture et de la Communication, Pradel Henriquez. 

Jovenel Moïse a été tué dans sa résidence mercredi vers 01H00 du matin (05H00 GMT) par un commando armé composé de 28 hommes (26 Colombiens et deux Américains d'origine haïtienne), dont 17 ont été arrêtés par la police et trois tués.

Blessée, la Première dame a été soignée dans un hôpital local avant d'être évacuée par avion vers Miami. Elle était dès mercredi soir "hors de danger", selon le Premier ministre haïtien par intérim Claude Joseph.

"En un clin d'oeil, les mercenaires sont entrés dans ma maison et ils ont criblé mon mari de balles (...) sans même lui donner la chance de dire un seul mot", raconte Martine Moïse dans son message.

D'après le juge chargé de l'affaire, cité par la presse locale, la dépouille du président haïtien a été retrouvée avec 12 impacts de balles et son bureau et sa chambre ont été saccagés.

Un des enfants du couple présidentiel, Jomarlie, se trouvait au domicile de ses parents au moment de l'attaque mais celle-ci s'est cachée dans une chambre à coucher, a déclaré le magistrat, Carl Henry Destin, au journal Le Nouvelliste.

Claude Joseph ou Joseph Lambert ?

Quelques heures après l'assassinat, Claude Joseph, Premier ministre depuis avril, a déclaré avoir la charge des affaires courantes, décrétant notamment l'état de siège pour 15 jours, une disposition qui renforce les pouvoirs de l'exécutif.

"La Constitution est claire. Je dois organiser des élections et transmettre le pouvoir à quelqu'un d'autre qui ait été élu", a-t-il par ailleurs déclaré dans un entretien diffusé samedi sur la chaîne de télévision américaine CNN.

En Haïti, la Constitution prévoit certes que le Premier ministre assure l'intérim en cas d'empêchement du président mais Jovenel Moïse avait nommé deux jours avant sa mort un nouveau chef du gouvernement, Ariel Henry. Cette nomination, enregistrée lundi au Journal officiel, a conduit certains observateurs à remettre en question la légitimité de Claude Joseph.

Dans ce contexte, huit des dix sénateurs encore en fonctions ont signé vendredi soir une résolution offrant au président du Sénat, Joseph Lambert, le titre de président provisoire de la République.

"On ne peut pas nier que les dix sénateurs sont les dix seuls élus restants mais il est évident qu'ils ne sont pas représentatifs de la population", critique la militante Emmanuela Douyon.

Et la personnalité de Joseph Lambert, un homme politique expérimenté, est loin de faire l'unanimité en Haïti, où il a "toujours été décrié", selon Marie Rosy Auguste Ducena.

Faire appel à des soldats étrangers ?

Le gouvernement haïtien a demandé aux Etats-Unis et à l'ONU d'envoyer des troupes en Haïti afin d'aider à sécuriser des sites stratégiques, comme les ports et les aéroports, de crainte qu'ils ne soient sabotés après l'assassinat de Jovenel Moïse.

Un appel qui semble faire écho aux années d'occupation américaine entre 1915 et 1934, à la suite de l'assassinat du président haïtien de l'époque, Vilbrun Guillaume, et jugé inutile par de nombreux observateurs. 

"On a eu la Minustah (une mission de l'ONU de 2004 à 2017) pendant toutes ces années et après son départ, regardez ce que nous sommes en train de vivre : une gangstérisation quasi complète du territoire national", déplore Emmanuela Douyon.

La mainmise des gangs sur Haïti s'est aggravée depuis le début de l'année. Depuis juin, des affrontements entre bandes armées dans l'ouest de la capitale Port-au-Prince ont poussé des milliers d'habitants des quartiers pauvres à fuir. 

Un responsable du gouvernement américain a dit samedi que Washington ne fournirait pas d'assistance militaire pour le moment mais que des membres de la police fédérale et du ministère de la Sécurité intérieure seraient envoyés en Haïti dès que possible pour "évaluer la situation".

Laisser les Haïtiens décider

De facto à la tête d'Haïti depuis mercredi, Claude Joseph a reçu le soutien d'Helen La Lime, l'émissaire de l'ONU en Haïti, mais cette prise de position irrite les acteurs de la société civile haïtienne.

"Ça n'est pas une représentante des Nations unies qui doit dire +Voilà qui est en charge+ : ça rappelle les périodes coloniales et personne n'a envie de revivre ça", souligne Emmanuela Douyon.

"Après Black Lives Matter, après tous ces mouvements pour demander la réparation de l'esclavage, ça n'est pas le moment pour des forces étrangères de montrer qu'elles essaient d'imposer des solutions aux Haïtiens", estime la militante.


Zelensky arrive à Rome, une rencontre avec Trump semble possible

Cette combinaison d'images créées le 18 mars 2025 montre, de gauche à droite, le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025, le président américain Donald Trump dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025 et le président russe Vladimir Poutine à Moscou le 18 mars 2025. (Photo de SAUL LOEB et Maxim Shemetov / diverses sources / AFP)
Cette combinaison d'images créées le 18 mars 2025 montre, de gauche à droite, le président ukrainien Volodymyr Zelensky dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025, le président américain Donald Trump dans le bureau ovale de la Maison Blanche à Washington, DC, le 28 février 2025 et le président russe Vladimir Poutine à Moscou le 18 mars 2025. (Photo de SAUL LOEB et Maxim Shemetov / diverses sources / AFP)
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  • Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, arrivé samedi à Rome pour assister aux funérailles du pape François,
  • Donald Trump a affirmé que la Russie et l'Ukraine étaient « très proches d'un accord », tandis que son homologue russe Vladimir Poutine évoquait la « possibilité » de « négociations directes » entre Moscou et Kiev.

KIEV : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky, arrivé samedi à Rome pour assister aux funérailles du pape François, pourrait y rencontrer son homologue américain Donald Trump, a indiqué à l'AFP un haut responsable.

« Les deux présidents pourraient se rencontrer », a-t-il ajouté.

Donald Trump, qui était arrivé dans la capitale italienne vendredi soir, a affirmé peu après que Kiev et Moscou, qui a lancé une invasion de l'Ukraine il y a trois ans et occupe 20 % de son territoire, étaient « très proches d'un accord ».

Samedi soir, il a affirmé que la Russie et l'Ukraine étaient « très proches d'un accord », tandis que son homologue russe Vladimir Poutine évoquait la « possibilité » de « négociations directes » entre Moscou et Kiev.

Le président américain a également assuré que la Russie conserverait la Crimée, une péninsule ukrainienne qu'elle a annexée en 2014.

Mais en dépit de ses pressions, Volodymyr Zelensky a réaffirmé vendredi soir que la Crimée appartenait à Kiev.

« Les États russe et ukrainien sont très proches d'un accord et les deux parties devraient maintenant se rencontrer, au plus haut niveau, pour le finaliser », a écrit Donald Trump sur sa plateforme Truth Social peu après son arrivée à Rome, où il doit assister samedi aux funérailles du pape François.

Depuis plusieurs semaines, les États-Unis mènent des discussions séparées avec Russes et Ukrainiens dans le but de trouver un accord sur un cessez-le-feu. 

Jeudi soir, aux États-Unis, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a assuré sur la chaîne CBS que son pays était prêt à un accord pour que les combats cessent.

Des déclarations sont faites au lendemain de frappes russes de missiles sur Kiev qui ont fait au moins 12 morts et des dizaines de blessés. D'après le président ukrainien, l'un des missiles a été produit en Corée du Nord à partir de « au moins 116 composants provenant d'autres pays, dont la plupart, malheureusement, ont été fabriqués par des entreprises américaines ». 

Donald Trump a également assuré que Washington exerçait « une forte pression » sur Moscou pour mettre fin au conflit, estimant que la Russie ferait « une assez grosse concession » en ne cherchant pas à s'emparer de toute l'Ukraine.

Kiev et ses alliés européens accusent la Russie de prolonger intentionnellement les pourparlers en présentant publiquement des exigences maximalistes : le contrôle des cinq régions ukrainiennes dont elle revendique l'annexion, le fait que l'Ukraine ne rejoigne pas l'Alliance atlantique et sa démilitarisation.

L'Ukraine veut quant à elle des garanties de sécurité militaires solides de la part de ses alliés occidentaux pour dissuader Moscou d'attaquer à nouveau après la conclusion d'un éventuel cessez-le-feu.

Le président Zelensky est arrivé à Rome samedi matin en compagnie de son épouse, a indiqué son porte-parole Serguiï Nykyforov. « Volodymyr Zelensky, la Première dame Olena Zelenska et la délégation ukrainienne prendront part à la cérémonie des funérailles », a-t-il ajouté.

Vendredi soir pourtant, le président ukrainien avait déclaré qu'il n'était plus certain d'avoir le temps de se rendre à Rome. 


Le Canada vote lundi sur fond d'offensive de Trump

Le Premier ministre canadien et chef des libéraux, Mark Carney, s'exprime lors d'un meeting de campagne à London (Ontario), le 25 avril 2025. Les Canadiens se rendront aux urnes le 28 avril 2025,  (Photo par Geoff Robins / AFP)
Le Premier ministre canadien et chef des libéraux, Mark Carney, s'exprime lors d'un meeting de campagne à London (Ontario), le 25 avril 2025. Les Canadiens se rendront aux urnes le 28 avril 2025, (Photo par Geoff Robins / AFP)
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  • Un Canada inquiet et déstabilisé par les attaques de Donald Trump votera lundi pour des élections législatives.
  • Le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, avec des droits de douane et des menaces d'annexion, ont changé la donne.

MONTREAL : Un Canada inquiet et déstabilisé par les attaques de Donald Trump votera lundi pour des élections législatives, où les libéraux sont favoris après une campagne dominée par l'économie et les relations avec les États-Unis.

Il y a quelques mois encore, la voie semblait toute tracée pour permettre aux conservateurs canadiens menés par Pierre Poilievre de revenir aux affaires après dix ans de pouvoir de Justin Trudeau.

Mais le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et son offensive inédite contre le Canada, avec des droits de douane et des menaces d'annexion, ont changé la donne.

À deux jours du scrutin, même si les écarts semblent se resserrer ces derniers jours, le candidat libéral et nouveau Premier ministre Mark Carney est toujours en tête dans les sondages, les électeurs le jugeant plus crédible pour faire face au président américain.

Âgé de 60 ans, ce banquier central n'a jamais été élu, mais il ne cesse de rappeler que la menace américaine est bien réelle pour le Canada. « Ils veulent nos ressources, notre eau. Les Américains veulent notre pays », a-t-il prévenu.

Promettant de s'opposer fermement à son voisin et de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington seront en place, il a attaqué vendredi son rival conservateur, l'accusant de « ne pas avoir de plan pour tenir tête à Donald Trump ». 

De son côté, le chef du parti conservateur veut convaincre les électeurs de ce pays du G7, 9^e puissance mondiale, de tourner le dos aux libéraux qui promettent d'incarner un changement en réduisant les impôts et les dépenses.

« La trajectoire sur laquelle nous nous trouvons après cette décennie libérale perdue conduira à davantage de désespoir, d'inflation et de coûts plus élevés si elle se poursuit », a-t-il déclaré jeudi.

Mais la campagne ne lui aura pas permis de tordre le cou à l'idée qu'il est proche, par son style et certaines de ses idées, du président américain, ce qui lui a aliéné une partie de l'électorat, notamment les femmes, selon les analystes. 

Dans ce contexte anxiogène, beaucoup de Canadiens voient ce scrutin comme historique : ils sont en effet plus de 7 millions à avoir déjà voté par anticipation pendant le week-end de Pâques sur les 28,9 millions d'électeurs appelés aux urnes.

Selon les derniers sondages, les libéraux recueillent environ 42 % des voix, contre 38 % pour les conservateurs. Viennent ensuite le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche) avec 9 %, suivi par le Bloc québécois (parti indépendantiste) avec 6 %, et le parti vert avec 2 %. 

Daniel Béland, professeur de sciences politiques à l'université McGill de Montréal, note que les libéraux ont « réussi à imposer Mark Carney comme étant la bonne personne pour ce moment », où il faut faire face aux États-Unis.

Même s'il y a eu des efforts de la part des partis d'opposition « pour changer le sujet de la campagne », ils ont échoué « et la donne n'a pas vraiment changé », ajoute-t-il.

« Les conservateurs espéraient qu'il y aurait davantage de débats sur le coût de la vie et les autres enjeux sur lesquels ils ont marqué des points », renchérit Tim Powers, analyste politique.

Il leur reste un week-end pendant lequel ils vont se « démultiplier » sur le terrain, selon lui, car parfois « des surprises peuvent se produire encore la veille de l'élection ».


Iran et Etats-unis se retrouvent à Oman pour de nouveaux pourparlers sur le nucléaire

L'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, s'adresse aux journalistes à l'extérieur de l'aile ouest de la Maison Blanche à Washington, DC, le 6 mars 2025. (AFP)
L'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, s'adresse aux journalistes à l'extérieur de l'aile ouest de la Maison Blanche à Washington, DC, le 6 mars 2025. (AFP)
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  • Les Etats-Unis et l'Iran se retrouvent samedi à Oman pour un troisième cycle de négociations cruciales sur le dossier du nucléaire iranien
  • Ce nouveau round de pourparlers, sous médiation omanaise, fait suite aux discussions indirectes qui se sont déjà tenues les 12 et 19 avril à Mascate puis à Rome

MASCATE: Les Etats-Unis et l'Iran se retrouvent samedi à Oman pour un troisième cycle de négociations cruciales sur le dossier du nucléaire iranien, les deux parties ayant fait état de progrès lors des deux premières sessions.

Ce nouveau round de pourparlers, sous médiation omanaise, fait suite aux discussions indirectes qui se sont déjà tenues les 12 et 19 avril à Mascate puis à Rome.

Les discussions entre les deux pays ennemis sont les premières à ce niveau depuis le retrait en 2018 des Etats-Unis, sous la première présidence de Donald Trump, d'un accord international conclu trois ans plus tôt qui encadrait le programme nucléaire de Téhéran en échange d'une levée des sanctions.

Le chef de la diplomatie iranienne, Abbas Araghchi, et l'émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, seront à la manoeuvre samedi à Oman, et le ministre des Affaires étrangères omanais, Badr al-Boussaïdi, servira de médiateur, selon le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, Esmaïl Baghaï.

Une session de pourparlers techniques entre experts est prévue avant les négociations à haut niveau.

La réunion du 19 avril avait été qualifiée de "bonne" par les deux pays, qui n'ont plus de relations diplomatiques depuis 1980.

"Pour que les négociations progressent, il faut une démonstration de bonne volonté, de sérieux et de réalisme de la part de l'autre partie", a déclaré vendredi M. Baghaï.

- L'AIEA veut des explications -

Les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, et Israël soupçonnent l'Iran de vouloir se doter de l'arme nucléaire. Téhéran rejette ces allégations, défendant un droit au nucléaire à des fins civiles.

En 2018, M. Trump avait retiré son pays de l'accord sur le nucléaire conclu à Vienne en 2015 et rétabli des sanctions. En représailles, l'Iran a progressivement pris ses distances avec le texte, en enrichissant notamment de l'uranium à un niveau élevé.

M. Araghchi a fait part cette semaine de l'"optimisme prudent" de son pays sur le processus en cours, en disant que "si la seule demande des Etats-Unis est que l'Iran ne possède pas d'armes nucléaires, cette demande est réalisable".

Il a cependant prévu des "problèmes" si l'autre partie avait "d'autres exigences".

M. Baghaï a indiqué vendredi sur X que la priorité de son pays était d'obtenir "la levée rapide des sanctions illégales et inhumaines".

Depuis son retour à la Maison Blanche, Donald Trump a relancé sa politique dite de "pression maximale" sur l'Iran, et l'a appelé en mars à négocier un nouvel accord tout en menaçant de bombarder le pays en cas d'échec de la diplomatie.

Dans des déclarations publiées vendredi par Time Magazine, il a assuré être prêt à rencontrer le guide suprême ou le président iraniens, tout en prévenant que, faute d'accord sur le nucléaire, il serait "le premier" à avoir recours à la force.

Washington a annoncé mardi de nouvelles sanctions visant le secteur pétrolier iranien. Téhéran a dénoncé une "approche hostile".

Mercredi, l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), chargée de surveiller le programme nucléaire iranien en vertu de l'accord de Vienne et du Traité de non-prolifération des armes nucléaires, dont l'Iran est partie, a demandé à Téhéran d'expliquer la présence de tunnels autour du site de Natanz (centre) qui abrite des centrifugeuses utilisées pour enrichir l'uranium.

L'organisme Institute for Science and International Security, basé à Washington, a publié des images satellites de ce site, montrant un nouveau tunnel situé près d'un tunnel plus ancien, ainsi qu'un nouveau périmètre de sécurité.

Téhéran n'a pas commenté ce rapport dans l'immédiat.

- Droit "non négociable" -

Dans une interview publiée mercredi par le podcast Honestly, le secrétaire d'Etat américain, Marco Rubio, a réitéré la position de son pays contre l'enrichissement de l'uranium par l'Iran, réclamant que la République islamique "importe du matériel enrichi".

L'Iran enrichit actuellement l'uranium à un niveau élevé (60%), inférieur aux 90% nécessaires à la fabrication de l'arme atomique, mais très loin du plafond de 3,67% fixé par l'accord de Vienne.

Selon M. Araghchi, le droit de l'Iran à enrichir de l'uranium est "non négociable".

Le ministre iranien s'est dit jeudi disposé à se rendre en Allemagne, en France et au Royaume-Uni, autres pays parties à l'accord de Vienne, pour des discussions sur ce dossier.

La semaine dernière, Marco Rubio avait appelé les Européens à se décider rapidement concernant le rétablissement des sanctions de l'ONU sur l'Iran.

L'accord de 2015 prévoit la possibilité de les rétablir automatiquement en cas de non conformité au texte, mais cette option expire en octobre.

L'Iran a prévenu qu'il pourrait se retirer du Traité de non-prolifération nucléaire si ce mécanisme était déclenché.