MOSCOU : Le Bélarus a annoncé lundi suspendre sa participation au Partenariat oriental de l'UE et rappeler son ambassadeur à Bruxelles en représailles aux sanctions européennes décidées du fait de la répression politique dans le pays.
Les tensions entre Minsk et les Européens n'ont fait que de s'accentuer depuis la répression d'un mouvement de contestation post-électoral historique, qui se poursuit avec le procès d'un rival du président Alexandre Loukachenko, puis avec l'interception en mai d'un avion de ligne et l'arrestation d'un opposant à bord.
Pour punir le Bélarus, accusé de "piraterie" aérienne, les Européens ont adopté des sanctions économiques et individuelles. Elles visent des hauts responsables bélarusses et hommes d'affaires, ainsi que les secteurs clés de la potasse, du pétrole et du tabac.
C'est pour protester contre ces mesures que le Bélarus a annoncé lundi suspendre sa participation au Partenariat oriental, lancé en 2009 et destiné à rapprocher six ex-républiques soviétiques avec l'Union européenne.
"Nous ne pouvons pas remplir nos obligations au titre de cet accord dans le contexte des sanctions et restrictions imposées par l'UE", a indiqué le ministère bélarusse des Affaires étrangères dans un communiqué, ajoutant avoir commencé à "mettre en oeuvre la procédure de suspension".
«Escalade des tensions»
Pour le président du Conseil européen, Charles Michel, le Bélarus avec sa décision va entrainer "une nouvelle escalade des tensions".
La figure de proue de l'opposition bélarusse, Svetlana Tikhanovskaïa, réfugiée en Lituanie, a de son côté dénoncé une "vengeance" de Minsk contre les Européens, signe de la "faiblesse" et de "l'aveuglement" d'Alexandre Loukachenko.
Le président de la Lituanie, voisine du Bélarus, Gitanas Nauseda, a lui estimé qu'Alexandre Loukachenko "continue de renier le droit" de ses citoyens à "déterminer leur futur".
Minsk a par ailleurs annoncé rappeler son ambassadeur auprès de l'UE pour "consultations" et "inviter" le chef de la délégation européenne au Bélarus à retourner à Bruxelles pour "transmettre à ses dirigeants le caractère inacceptable des pressions et des sanctions".
Le Bélarus a également brandi implicitement la menace de cesser sa coopération en terme de lutte contre l'immigration illégale et le crime organisé. Le pays est situé aux portes de l'Union européenne, avec des frontières communes avec la Pologne et la Lituanie notamment.
Les responsables européens qui ont participé à l'élaboration des sanctions contre le Bélarus se verront également interdire d'entrée sur son territoire.
"Le Bélarus continue de préparer d'autres mesures de riposte, notamment à caractère économique. Nous espérons que les responsables de l'UE et de ses États membres sont conscients du caractère destructeur et de la futilité d'une approche belliqueuse dans les relations avec" Minsk, a ajouté le ministère.
Vol dérouté
Les sanctions européennes été adoptées en réponse à l'interception le 23 mai par Minsk d'un avion de ligne RyanAir survolant le territoire bélarusse et l'arrestation de deux passagers se trouvant à bord, le journaliste d'opposition Roman Protassevitch et de sa compagne russe, Sofia Sapega.
Les autorités bélarusses ont assuré répondre à une alerte à la bombe et affirment que la présence à bord de l'opposant était un hasard.
Avant les sanctions de juin, les Européens avaient déjà pris des mesures de rétorsion visant le régime d'Alexandre Loukachenko pour le punir de la répression du vaste mouvement contestant sa réélection jugée frauduleuse en août 2020. Ce mouvement a été progressivement maté par les autorités à coup d'arrestations et d'exils forcés.
Viktor Babaryko, opposant et rival notoire de M. Loukachenko, est d'ailleurs jugé actuellement à Minsk pour des accusations de blanchiment d'argent qu'il rejette. Le verdict est attendu le 6 juillet dans cette affaire pour laquelle il encourt jusqu'à 15 ans de prison.
L'UE a lancé le Partenariat oriental avec le Bélarus, l'Ukraine, la Moldavie, l'Arménie et l'Azerbaïdjan, proposant des relations économiques et politiques plus étroites en échange de réformes.
Certains de ces pays, l'Ukraine et la Géorgie considèrent cet accord comme une première étape en vue d'une adhésion, mais les dirigeants européens n'ont jamais fait de promesses en ce sens.
L'UE a toujours assuré que ce partenariat ne visait pas à étendre son influence aux dépens d'autres, mais la Russie, principal allié du président Loukachenko, considère ce partenariat comme une incursion dans sa zone.