PARIS: Pressé de tourner la page d'un scrutin régional calamiteux pour son parti, Emmanuel Macron recommence dès lundi à défendre son action, cette fois sur l'attractivité française, à Douai où il retrouvera Xavier Bertrand qui se pose en rival pour 2022.
Pour le président, aucun enseignement national ne peut être tiré de ce scrutin local marqué par une forte abstention et une prime aux sortants.
"Qu'ont voulu dire les électeurs? Rien car ils n'ont pas voté! Les sortants sont tous réélus", commente un conseiller. Réélu dans les Hauts-de-France, l'ex-LR "Xavier Bertrand a fait moins de voix que la fois d'avant et a été élu par 2 ou 3 électeurs sur 10 pour s'occuper du conseil régional", glisse-t-il, jugeant "qu'il n'y a aucun impact sur la présidentielle car ces deux élections sont complétement déconnectées".
Dans l'entourage du chef de l'État, on estime que l'abstention montre surtout que les Français veulent du concret. "Les gens ont la tête au sanitaire, à l'économique et au social", estime un proche. D'où son programme qui va mettre en avant des créations d'emplois et la compétitivité française.
Emmanuel Macron se rend lundi matin sur le site de Renault à Douai pour annoncer l'implantation d'une méga-usine de batteries de 2 milliards d'euros, avec 1 000 emplois à la clé. Parmi les invités, le président réélu des Hauts-de-France.
Le soir-même, Emmanuel Macron recevra 150 patrons à Versailles, inaugurera mardi les locaux de la banque JP Morgan puis terminera vendredi par l'exposition de produits "Made in France" à l'Élysée, l'occasion d'insister sur le rebond des créations d'emplois.
Son "tour de France", démarré avant les régionales, se poursuivra jusqu'à la mi-juillet, illustration de sa volonté d'"enjamber" le scrutin qui s'est avéré, comme prévu, impitoyable pour LREM.
La ligne du chef de l'État reste "d'accompagner la réouverture, de rester vigilant sur les variants, de poursuivre la vaccination, d'accompagner la relance et de déterminer s'il doit y avoir des réformes supplémentaires, lesquelles et quand, ce qui sera arbitré d'ici le 14 juillet", ajoute un proche, "ce qui n'a aucun rapport avec les élections régionales".
Pas de grand remaniement
Pas question non plus de modifier significativement le gouvernement. "Il n'y aura pas de remaniement, sauf au cas par cas si nécessaire, mais des ajustements techniques, par exemple sur le périmètre de certains ministres", ajoute une source proche de l'exécutif.
Le chef de l'État veut "reprendre la cohérence des réformes et se projeter sur le temps long avec des chantiers d'avenir industriels, économiques et sociaux".
Quant au déficit démocratique ressenti par beaucoup de Français, Emmanuel Macron a de nouveau évoqué vendredi la Conférence sur l'avenir de l’Europe, des consultations citoyennes qu'il souhaite lancer cette année jusqu'en mars 2022.
Même si le président l'écarte, certains analystes estiment pourtant que la course à la présidentielle a bien commencé dimanche soir, ne serait-ce qu'en influençant la stratégie de la gauche et de LR, relève Bruno Cautrès, du Cevipof.
L'élection de dimanche soir pose aussi la question de la dynamique du RN, l'adversaire qu'Emmanuel Macron est toujours convaincu de devoir affronter au second tour en 2022.
Le fait que le parti d'extrême droite ait encore échoué à remporter une région "casse la narration de la montée irrésistible du RN", relève le politologue, "même si cela ne veut pas dire que Marine Le Pen est enrayée en vue de la présidentielle".
"Cela montre qu'il faut réinventer une stratégie envers le RN et que le 'no pasaran' ne suffira pas, les Français n'en sont plus convaincus", renchérit un conseiller de l'exécutif.
"Qu'en conclure pour la présidentielle? rien ou presque", nuance Chloé Morin, politologue attachée à la Fondation Jean-Jaurès. "Les candidats mis en échec, Le Pen, Macron ou Mélenchon, restent les candidats les mieux placés dans les intentions de vote. Les élections sont de plus en plus déconnectées les unes des autres", explique-t-elle.
Pourtant, Xavier Bertrand a "coché une case avec sa réélection" et "a posé les bases d'un récit intéressant" comme vainqueur contre le RN qui est fort dans les Hauts-de-France. "Mais cela n'est pas encore suffisant pour devenir le troisième homme", estime-t-elle.