PARIS: Une âpre compétition, mais des urnes qui risquent d'être encore boudées : la France vote dimanche pour un second tour des régionales et départementales qui électrise la classe politique à un an de la présidentielle, mais beaucoup moins les électeurs.
Prime aux sortants de « l'ancien monde » PS-LR, ambitions élyséennes aiguisées à droite, « front républicain » ou pas face à un RN bien en-deçà des prévisions des sondeurs, flop de la majorité macroniste : le premier tour s'est révélé riche d'enseignements.
Mais si l'effervescence règne dans les états-majors, l'électeur, lui, reste à convaincre. Avec une abstention record au premier tour (66,7%) les pronostics sur l'état de l'opinion pour dimanche - et au-delà pour 2022 - sont fragiles.
Tous les responsables politiques - tenus au silence samedi - ont appelé ces derniers jours l'électorat à se mobiliser davantage, sans vraiment convaincre selon les sondages qui ne prédisent aucun rebond notable.
« Je vois mal une mobilisation qui viendrait bouleverser le rapport de forces établi au premier tour, même s'il y a souvent un peu plus de participation au second tour qu'au premier, comme ce fut le cas en 2015 », affirmait vendredi Romain Pasquier, directeur de recherche au CNRS.
Les électeurs ne manquent pourtant pas de choix pour désigner les 13 exécutifs régionaux métropolitains, chargés de nombreux aspects de leur vie quotidienne (transports, bâtiments scolaires, accompagnement des entreprises...).
Trois triangulaires (Auvergne-Rhône-Alpes, Occitanie, Hauts-de-France), sept quadrangulaires (Bourgogne-Franche-Comté, Centre-Val de Loire, Grand-Est, Ile-de-France, Normandie, Pays de la Loire, Corse), et même deux quinquangulaires (Bretagne, Nouvelle-Aquitaine) sont au rendez-vous.
Paysage fragmenté
Outre un paysage politique fragmenté, cette situation traduit aussi des alliances locales à géométrie variable : gauche et écologistes unis en Ile-de-France, Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté, mais pas en Bretagne ni en Nouvelle-Aquitaine par exemple.
On ne compte qu'un seul duel, en région PACA, mais il sera sans doute le vote le plus suivi: le RN y trouve sa seule chance de remporter la première région de son histoire.
Arrivé en tête, le lepéniste Thierry Mariani affronte le sortant LR Renaud Muselier, au profit duquel la liste de gauche-écologistes de Laurent Félizia s'est retirée.
Les derniers sondages donnent un résultat très légèrement favorable à Muselier, toujours à la merci d'une remobilisation de l'électorat RN.
La droite classique pousse un soupir de soulagement : on la disait promise au néant entre le RN et LREM, le premier tour a prouvé qu'elle porte encore beau dans les régions qu'elle détient.
Mais elle pourrait se retrouver dimanche soir face à son vieux démon: avoir à départager les ambitions nationales de trois présidents de région sortants en pole position dans leurs baronnies: Xavier Bertrand (Hauts-de-France), Laurent Wauquiez (Auvergne-Rhône-Alpes) et Valérie Pécresse (Ile-de-France).
A gauche, un PS à l'étiage dans les scrutins nationaux sort lui aussi requinqué du premier tour, avec notamment ses présidents sortants Carole Delga (Occitanie), Alain Rousset (Nouvelle-Aquitaine) ou Loïg Chesnay-Girard (Bretagne) bien placés.
L'arithmétique complexe du mode de scrutin pourrait toutefois compliquer le résultat dans ces deux dernières régions où se déroulent des quinquangulaires : si la prime à la liste arrivée en tête (un quart des sièges à pourvoir) n'est pas suffisante pour avoir une majorité, des alliances devront se former.
La majorité à la traîne
Les écologistes, alliés à la gauche, lorgnent une possibilité de victoire dans les Pays de la Loire, où leur candidat Matthieu Orphelin (ex-LREM) affronte la sortante LR Christelle Morançais au terme d'une campagne acrimonieuse entre les deux candidats.
Les formations présidentielles n'ont quant à elles pas grand chose à attendre de ce second tour. Absente au premier tour en PACA, éliminée dans les Hauts-de-France ou en Occitanie, la majorité macroniste est à la traîne dans les régions où elle est encore en lice.
Dans l'ombre de ces régionales, les départementales ont été logiquement marquées par une abstention massive équivalente, et des équipes sortantes issues des partis de la droite et de la gauche classiques largement en tête au premier tour.
Le RN espère toutefois progresser dans les Pyrénées-Orientales dont il dirige le chef-lieu Perpignan. Le PCF de son côté est en situation difficile dans son fief du Val-de-Marne.
Outre-mer, ce second tour concerne La Réunion, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane et Mayotte, suivant leur organisation territoriale propre.