Bitcoin ou dollars: la diaspora salvadorienne face à la volatilité des cryptomonnaies

Un homme paie en bitcoins dans un magasin au sud-est de San Salvador, le 9 juin 2021. Le bitcoin va avoir cours légal au Salvador, a déclaré le président du pays (AFP)
Un homme paie en bitcoins dans un magasin au sud-est de San Salvador, le 9 juin 2021. Le bitcoin va avoir cours légal au Salvador, a déclaré le président du pays (AFP)
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Publié le Mardi 22 juin 2021

Bitcoin ou dollars: la diaspora salvadorienne face à la volatilité des cryptomonnaies

  • Le président salvadorien Nayib Bukele a approuvé le 9 juin le bitcoin comme devise légale dans le petit pays d'Amérique centrale
  • Le Salvador est ainsi le pays d'Amérique latine percevant le plus gros volume d'argent de sa diaspora, qui vit en majorité aux Etats-Unis, proportionnellement à la taille de son économie

MONTEVIDEO : Les Salvadoriens de l'extérieur peuvent désormais transférer des fonds en bitcoin à leurs familles restées dans le pays. Mais se risqueront-ils à utiliser la cryptomonnaie au cours hautement volatile ?

Le président salvadorien Nayib Bukele a approuvé le 9 juin le bitcoin comme devise légale dans le petit pays d'Amérique centrale. Il a affirmé que son adoption évitera de perdre des "millions de dollars" en taux de change interbancaire lors des envois d'argent depuis l'extérieur.

Le Salvador, 6,4 millions d'habitants, est très dépendant de ces "remesas", qui représentent 24,1% de son Produit intérieur brut (PIB). Selon les données de la Banque mondiale (BM), en 2020, il a reçu plus de 5,9 milliards de dollars de ses ressortissants vivant hors du pays.

Le Salvador est ainsi le pays d'Amérique latine percevant le plus gros volume d'argent de sa diaspora, qui vit en majorité aux Etats-Unis, proportionnellement à la taille de son économie.

Avec une contraction de 7,9% du PIB en 2020 en raison de la pandémie, le Salvador parie sur la croissance de ces transferts de fonds (+4,8 % l'an dernier) comme un soutien important pour son économie dollarisée.

"En mai, les expéditions de bitcoins vers le Salvador ont quadruplé et pourraient encore s'accroître si le cours (des cryptomonnaies) continue d'augmenter", constate Edward Moya, analyste de marché chez Oanda.

"Il s'agit d'une expérience en cours qui pourrait être couronnée de succès si la volatilité du bitcoin continue de baisser et que son prix évolue à la hausse", ajoute-t-il.

Mais M. Moya estime que dans un premier temps les "méthodes traditionnelles" d'envoi de dollars perdureront "jusqu'à ce que le bitcoin devienne un actif stable".

Manuel Orozco, directeur du Centre pour la migration et la stabilisation économique à Washington, prévient cependant qu'"il est faux de supposer qu'il n'y aura pas de frais de transaction" pour l'envoi de fonds en bitcoins "car le traitement lui-même et le sceau réglementaire entraînent des coûts".

«Lacunes»

Le bitcoin est régulièrement critiqué par les régulateurs pour ses usages illégaux, notamment le blanchiment d'argent provenant d'activités criminelles, le financement du terrorisme et le manque de protection de ses utilisateurs.

D'autres pointent du doigt son empreinte carbone.

La Banque mondiale a rejeté jeudi la demande d'assistance du Salvador dans sa tentative d'adopter le bitcoin comme devise légale et devenir le premier pays au monde à l'utiliser à partir de septembre pour toutes les transactions.

"Ce n'est pas quelque chose que la Banque mondiale peut soutenir étant donné les lacunes en matière d'environnement et de transparence", a expliqué  un responsable de la BM.

La semaine dernière, le Fonds monétaire international (FMI) avait, lui, avait fait part de ses inquiétudes."L'adoption du bitcoin comme monnaie légale soulève un certain nombre de problèmes macroéconomiques, financiers et juridiques qui nécessitent une analyse très minutieuse", avait déclaré un porte-parole, notant les "risques importants".

Le FMI a cependant accepté de rencontrer cette semaine des représentants du gouvernement salvadorien. La Banque centraméricaine d'intégration économique (BCIE) a annoncé qu'elle fournirait son assistance technique.

Volatilité

L'extrême volatilité du prix du bitcoin, qui peut faire varier la valeur d'un envoi entre son point de départ et son arrivée au Salvador, est l'un des problèmes les plus généralement pointés.

"Pour qu'une monnaie remplisse la fonction de réserve de valeur (...) elle ne devrait pas être aussi volatile", juge Oscar Cabrera, ancien président de la Banque centrale de réserve du Salvador.

Une enquête de la Chambre de commerce et d'industrie du Salvador, publiée la semaine dernière, dévoile que 96,4% des hommes d'affaires du pays préfèrent que l'utilisation du bitcoin soit facultative, que 93,2% des salariés préfèrent conserver le dollar pour percevoir leurs salaires, et 82,5 % choisiraient la monnaie américaine plutôt que le bitcoin pour recevoir des transferts de fonds.

Pour M. Orozco, la circulation du bitcoin aurait cependant un côté positif : la génération d'"une importante liquidité qui générerait un surplus pour le crédit et l'investissement", en plus de la modernisation du système bancaire.

"À court terme, sur le plan stratégique, c'est une opportunité pour le système financier salvadorien", juge-t-il.


L'industrie horlogère suisse craint de payer plus cher les droits de douane imposés par Donald Trump

Un homme prend une photo d'une réplique géante d'un nouveau modèle de land-dweller de Rolex, lors de la journée d'ouverture du salon de l'horlogerie de luxe « Watches and Wonders Geneva », à Genève, le 1er avril 2025. (Photo de Fabrice COFFRINI / AFP)
Un homme prend une photo d'une réplique géante d'un nouveau modèle de land-dweller de Rolex, lors de la journée d'ouverture du salon de l'horlogerie de luxe « Watches and Wonders Geneva », à Genève, le 1er avril 2025. (Photo de Fabrice COFFRINI / AFP)
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  • La Suisse s'est vu imposer des droits de douane de 31 % (contre 20 % pour l'Union européenne), pénibles à absorber même pour des fabricants de montres de luxe.
  • Les États-Unis sont le plus gros marché des horlogers suisses, qui a absorbé 16,8 % de leurs exportations en 2024.

ZURICH, SUISSE : Lors de sa campagne électorale, le président américain Donald Trump avait mis en vente des montres suisses à 100 000 dollars fabriquées en Suisse. Or, l'horlogerie est le secteur le plus touché par le décret de la Maison blanche. Ce texte est tombé en plein salon horloger de Genève, où les grandes marques présentaient leurs nouveautés, portant un sérieux coup au secteur.

La Suisse s'est vu imposer des droits de douane de 31 % (contre 20 % pour l'Union européenne), pénibles à absorber même pour des fabricants de montres de luxe.

Les États-Unis sont le plus gros marché des horlogers suisses, qui a absorbé 16,8 % de leurs exportations en 2024. Les exportations de montres suisses s'y chiffraient à 4,37 milliards de francs suisses (4,65 milliards d'euros), en hausse de 5 % sur un an, aidant à atténuer la forte chute de la demande en Chine. 

Yves Bugmann, le président de la fédération horlogère, a réagi auprès de l'AFP, déclarant que ces droits de douane étaient « nuisibles et injustifiés ». Il demande au Conseil fédéral (gouvernement) d'expliquer « rapidement le point de vue de l'économie » suisse à ses homologues américains.

Jeudi, la présidente de la Confédération et le ministre de l'Économie ont déclaré vouloir se rendre « très prochainement » aux États-Unis pour tenter de convaincre l'administration de Donald Trump que ces mesures douanières sont « contreproductives pour tous ».

Pour l'instant, la Suisse a choisi de ne pas répliquer pour ne pas faire monter la tension avec Washington.

Et pour compenser ces droits de douane « clairement plus élevés qu'attendu », les prix vont devoir augmenter d'environ 11 à 13 %, selon les analystes de la Banque cantonale de Zurich, qui doutent qu'ils puissent être répercutés intégralement, au détriment des marges.

L'ampleur des droits de douane « a pris tout le monde par surprise », a indiqué Jon Cox, analyste chez Kepler Cheuvreux, à l'AFP, qui s'attend lui aussi à des répercussions sur la rentabilité.

Les grandes marques se réunissent chaque année au salon Watches & Wonders, un événement luxueux organisé à Genève. Toutefois, la ville entière vibre au rythme de l'horlogerie à grand renfort de fêtes et d'expositions, les petites marques profitant également de l'occasion pour organiser des événements et attirer les collectionneurs et les détaillants.

Cependant, cette année, « l'ambiance est plutôt maussade », constate Jon Cox, qui s'attend cependant à ce que le gouvernement cherche à négocier une réduction des droits de douane.

« Il est évident qu'il y aura un impact, mais nous restons optimistes », a déclaré à l'AFP Edouard Meylan, le patron de la marque de luxe H. Moser, car « beaucoup pensent que cette mesure sera temporaire ».


Droits de douane : la Bourse de Paris creuse ses pertes et recule de plus de 3 %

Bourse de Paris (Photo AFP)
Bourse de Paris (Photo AFP)
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  • La Bourse de Paris s'enfonce jeudi, chutant de plus de 3 % au lendemain de l'offensive commerciale de Donald Trump
  • L'indice vedette CAC 40 reculait de 3,27 % à 7 602,01 points par rapport à la clôture de la veille, soit un recul de 256,82 points.

PARIS : La Bourse de Paris s'enfonce jeudi, chutant de plus de 3 % au lendemain de l'offensive commerciale de Donald Trump qui a décidé d'imposer des droits de douane massifs sur les produits importés aux États-Unis.

Vers 15 h 30, heure de Paris (13 h 30 GMT), l'indice vedette CAC 40 reculait de 3,27 % à 7 602,01 points par rapport à la clôture de la veille, soit un recul de 256,82 points.

L'offensive protectionniste de la Maison-Blanche, sans équivalent depuis les années 1930, prévoit l'application de droits de douane généralisés de 10 % sur l'ensemble des importations à partir du 5 avril à 04 h 01 GMT. Des majorations sont prévues à partir du 9 avril pour les pays jugés particulièrement hostiles en matière commerciale.

Les marchandises en provenance de l'Union européenne seront taxées à hauteur de 20 %.

« La réalité a été bien pire » que les attentes des marchés, affirme Oliver Blackbourn, gérant de portefeuille multi-actifs chez Janus Henderson.

« Les investisseurs sont ébranlés par les mesures plus agressives qu'anticipé prises par Donald Trump pour remodeler le paysage économique mondial », affirme Patrick Munnelly, analyste chez Tickmill Group.

Jeudi après-midi, le président français Emmanuel Macron réunira à l'Élysée les représentants de filières exportatrices et du patronat.

Les valeurs du luxe, dominantes dans l'indice CAC 40, voyaient rouge.

LVMH, leader mondial du secteur et première capitalisation boursière française, perdait 5,11 % à 545,80 euros par action, Hermès lâchait 3,63 % à 2 336 euros et Kering 5,80 % à 180,86 euros. 

Le géant français de l'optique EssilorLuxottica enregistrait quant à lui la pire chute du CAC 40 à la Bourse de Paris jeudi, particulièrement plombé par les nouveaux droits de douane annoncés par Donald Trump aux États-Unis, où il réalise près de la moitié de ses ventes.

Le titre du groupe, propriétaire de la célèbre marque Ray-Ban, perdait 7,32 %, s'échangeant contre 248 euros.

À l'inverse, les valeurs pharmaceutiques sont épargnées, la Maison Blanche ayant fait savoir dans la soirée du mercredi que certaines catégories, dont les produits pharmaceutiques, n'étaient pas concernées par ces droits de douane. 

Sanofi restait à l'équilibre (0,12 %) à 100,28 euros, tandis que BioMerieux gagnait 2,39 % à 119,90 euros et Eurofins prenait 2,51 % à 49,87 euros.

Les investisseurs sont à la recherche de valeurs qui dépendent en majeure partie de leur marché local et sont donc moins sensibles aux barrières douanières.

Jeudi, c'est le géant agroalimentaire français Danone qui a pris la tête du CAC 40, avec une hausse de 2,90 % à 72,46 euros. Le géant des télécommunications Orange prenait 2,25 % à 12,27 euros.


La Suisse se prépare à un véritable branle-bas de combat à la suite de l'imposition de droits de douane de 31 %

Les nouveaux modèles de montres Rolex land-dweller sont présentés dans une vitrine de l'horloger suisse Rolex au salon de l'horlogerie de luxe « Watches and Wonders Geneva », à Genève, le 1er avril 2025.  (Photo par Fabrice COFFRINI / AFP)
Les nouveaux modèles de montres Rolex land-dweller sont présentés dans une vitrine de l'horloger suisse Rolex au salon de l'horlogerie de luxe « Watches and Wonders Geneva », à Genève, le 1er avril 2025. (Photo par Fabrice COFFRINI / AFP)
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  • Seul point positif : la pharmacie, pilier de l'économie suisse et des exportations, est pour l'instant épargnée par le boulet de 31 %.
  • Ces droits de douane, jugés « excessivement élevés » pour les produits suisses, constituent un « coup dur » pour l'économie helvétique

ZURICK : La Suisse est sous le choc. Sonnée par le coup de massue de 31 % de droits de douane sur une multitude de produits exportés vers les États-Unis, elle est forcée de trouver une parade pour tenter de préserver son marché le plus important.

La surprise et le choc sont d'autant plus grands dans ce petit pays alpin après l'annonce de mercredi par le président Donald Trump, que l'Union européenne ne devrait être frappée que de 20 % de droits de douanes « réciproques » et que personne ne comprend comment l'administration américaine a fait ses calculs.

Seul point positif : la pharmacie, pilier de l'économie suisse et des exportations, est pour l'instant épargnée par le boulet de 31 %.

Ces droits de douane, jugés « excessivement élevés » pour les produits suisses, constituent un « coup dur » pour l'économie helvétique, a réagi l'organisation patronale Economiesuisse, qui appelle le Conseil fédéral (gouvernement) à « agir rapidement » pour négocier une solution avec le gouvernement américain, soulignant que la Suisse dispose de « solides arguments » à faire valoir.

Signe qu'il y a urgence, le Conseil fédéral tiendra une conférence de presse dès jeudi après-midi.

« Du point de vue économique, rien ne justifie les droits de douane américains contre la Suisse – bien au contraire », a insisté l'organisation patronale.

Le pays est « un partenaire économique de tout premier plan pour les États-Unis », rappelle Economiesuisse.

Elle souligne que la Suisse est « le sixième investisseur étranger » aux États-Unis et qu'elle « occupe même la première place en matière de recherche et développement ».

Les entreprises suisses y génèrent « environ 400 000 emplois », avec des salaires élevés en plus.

De plus, « la Suisse applique un taux de TVA très bas et n'a pas mis en place de mécanisme de compensation des émissions de CO2 à l'égard des pays tiers », ajoute l’organisation.

- L'excédent commercial excède -

Selon les statistiques de l'Office fédéral de la douane, les exportations de la Suisse, qui repose sur une industrie pharmaceutique florissante, ont atteint 52,65 milliards de francs suisses (54,97 milliards d'euros) vers les États-Unis, soit 18,6 % du total.

Les importations en provenance des États-Unis s'élevaient pour leur part à 14,13 milliards de francs suisses.

L'excédent commercial de la Suisse ou de tout autre pays est un chiffon rouge pour le président américain, qui y voit le signe d'une « arnaque ».

Dès mercredi soir, la présidente de la Suisse, Karin Keller-Sutter, a indiqué sur le réseau social X que Berne allait « définir rapidement la suite », sans préciser si le gouvernement envisage de répliquer ou non. 

« Les intérêts économiques à long terme du pays constituent la priorité », a ajouté la présidente, tout en estimant que « le respect du droit international et le libre-échange sont fondamentaux ».

Le Parti socialiste suisse, le Centre et les Vert-e-s suisses ont sommé le gouvernement de trouver une solution, le président du groupe centriste, Gerhard Pfister, déclarant que « l'augmentation des droits de douane nuit à tout le monde ».

- Les pays les moins frappés -

La Suisse réalise 51 % de ses exportations vers l'Union européenne, mais les États-Unis sont son plus gros marché.

En 2021, les États-Unis avaient détrôné l'Allemagne, qui était le premier marché d'exportation de la Suisse depuis 70 ans, sous l'effet de la hausse des produits pharmaceutiques vendus aux États-Unis. 

Entre 2001 et 2021, les exportations de la Suisse vers les États-Unis ont triplé, les trois quarts de cette progression étant attribuables au secteur de la chimie et de la pharmacie, comme l'avait alors expliqué l'Office fédéral de la douane.

Les produits pharmaceutiques ne sont pas épargnés par les droits de douane de 10 % qui s'appliqueront à toutes les importations aux États-Unis, mais ils font partie des produits exonérés.

Dans une note de marché, Mark Diethelm, analyste chez Vontobel, estime que les secteurs les plus touchés devraient être l'horlogerie et le secteur du luxe, ainsi que les entreprises suisses de taille moyenne. Les grandes entreprises, plus implantées aux États-Unis, qui y ont des usines, « pourraient même bénéficier des augmentations de prix » qui vont en résulter, selon lui.