PARIS: Un policier a été mis en examen fin avril pour « violences volontaires » après des tirs de LBD potentiellement non-réglementaires, dont un quasiment « à bout portant », sur deux manifestants à Paris en janvier 2020 contre la réforme des retraites, a-t-on appris lundi de source proche du dossier.
Le parquet de Paris avait ouvert une enquête, confiée à l'IGPN, la police des polices, à la suite d'une vidéo virale montrant un policier, rue Saint-Lazare à Paris, armé d'un lanceur de balles de défense (LBD) tirer sur la foule à environ un mètre de distance, faisant tomber à terre un homme.
Dans une déclaration, la préfecture de police avait évoqué une vidéo « parcellaire » et « sortie de son contexte » et justifié l'emploi « de moyens intermédiaires, lacrymogènes et LBD » face à des « personnes violentes ».
Une seconde vidéo, tournée six minutes plus tard au même endroit, montre le même policier des compagnies de sécurisation et d'intervention (CSI) effectuer un tir de LBD sur un homme, Peter B., situé à une dizaine de mètres, avant de crier : « T'en veux encore ? ».
Touché, le manifestant avait porté plainte.
Dans l'une des vidéos, le numéro d'identification personnel RIO du policier, obligatoire mais pas toujours arboré, est visible.
Une juge d'instruction, saisie en novembre 2020, a mis en examen le 28 avril le policier, Ludovic C., âgé de 33 ans, pour « violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique » avec arme.
Lors d'un interrogatoire le 28 mai, le policier a évoqué une manifestation « très rude » avec des « Black Blocks (...) très virulents ».
Concernant le premier manifestant touché quasiment « à bout portant », il a reconnu que son tir était « en dessous de la distance préconisée » pour les cartouches qu'il utilisait, soit au minimum 10 m, mais il a assuré qu'il avait été fait en situation de légitime défense et était « proportionné », car le manifestant « voulait blesser les collègues ».
Concernant Peter B., situé à une dizaine de mètres et qui semble sur la vidéo donner un coup de pied dans un palet de grenade lacrymogène, Ludovic C. a indiqué vouloir « stopper la menace » : les gaz lacrymogènes peuvent « créer des détresses respiratoires ».
Ludovic C. a défendu une « riposte proportionnée ».
Sollicité, Me Arié Alimi, avocat de Peter B., et Me Thibault de Montrial, avocat de Ludovic C., n'ont pas souhaité commenter.
Arme non létale et controversée, le LBD est accusé d'avoir provoqué de graves blessures pendant les mobilisations de « gilets jaunes ».
Ludovic C. a indiqué devant la juge avoir été « recherché, menacé de mort, moi et ma famille » suite à ces tirs « fortement médiatisés ».
Mis aux arrêts « un mois » par sa hiérarchie « par mesure de sécurité », le policier a déclaré avoir « repris rapidement », avant d'être « muté dans l'intérêt de (son) service » dans le Sud de la France, où il exerce actuellement sur la voie publique, « suite à une autre affaire, l'interpellation du rappeur Ademo de PNL », à laquelle il a participé.
Les images de l'arrestation mouvementée de ce rappeur, plaqué au sol en septembre, avaient largement circulé sur les réseaux sociaux.
Poursuivi pour « outrage » et « rébellion », Ademo a été relaxé début mai pour des raisons procédurales par le tribunal correctionnel de Paris.