STRASBOURG: Des associations tchétchènes ont mis en garde samedi à Strasbourg (est) contre la « stigmatisation » et les « amalgames » visant leur communauté, alors que la France accélère les procédures d'expulsion de ceux soupçonnés de radicalisation après l'assassinat en octobre du professeur Samuel Paty.
Professeur de collège en région parisienne, Samuel Paty avait été décapité par un islamiste russe tchétchène le 16 octobre pour avoir montré en classe des caricatures de Mahomet dans un cours sur la liberté d'expression.
« Nous devons tous garder le sang-froid, le respect mutuel et éviter toute action démesurée et toute stigmatisation » de même que les « amalgames », a déclaré lors d'une conférence de presse Chamil Albakov, porte-parole de l'Assemblée des Tchétchènes d'Europe, qui fédère une trentaine d'associations.
« La méfiance s'installe (...) envers les personnes d'origine Tchétchène », a-t-il déploré.
Fin mai, quatre jeunes d'origine tchétchène, dont trois mineurs, ont été interpellés par des policiers du renseignement intérieur à Strasbourg et dans sa banlieue, dans le cadre d'une enquête préliminaire du Parquet national antiterroriste (Pnat) pour association de malfaiteurs terroriste criminelle.
Ces quatre personnes, toutes nées dans le Caucase russe et âgées de 16, 17 et 18 ans, ont été relâchées quelques jours plus tard, sans qu'aucune charge ne soit à ce stade retenue contre elles.
Elles étaient « soupçonnées d'avoir préparé un projet d'action violente ». Des « supports numériques » avaient été saisis en perquisition, selon une source judiciaire.
« Si pour le moindre soupçon et pour une simple vérification » de « certains de nos membres, la presse (fait) un énorme bruit tout en donnant de quoi agiter certains courants politiques, alors toutes les personnes d'origine Tchétchène seront considérées comme dangereuses », a mis en garde Albakov.
La grande majorité des membres de la communauté « fait le maximum pour s'intégrer. Mais ça, c'est invisible », a-t-il pointé, tout en disant comprendre « que les forces de l'ordre » fassent « leur travail ».
Présent lors de la conférence de presse, un jeune de 18 ans présenté comme l'un des quatre interpellés s'est dit « choqué » par son arrestation : d'abord conduit à l'hôtel de police de Strasbourg, il a dit avoir ensuite été transféré « à Paris » pour y être de nouveau longuement entendu, avant d'être relâché, comme les trois autres jeunes.
« Le soupçon est communiqué partout », a assuré Pascale Chaudot, présidente du comité Tchétchénie. Si un Tchétchène veut quitter la France, « ce dossier va le suivre » dans les pays où il va aller comme une « marque indélébile », « y compris en Russie ».
Depuis l'assassinat du professeur Samuel Paty par un jeune réfugié tchétchène, Abdoullakh Anzorov, les autorités françaises ont mis l'accent sur les Tchétchènes de France, en accélérant les procédures d'expulsion de ceux qui sont soupçonnés de radicalisation.