BUDAPEST: "Rue du Dalaï Lama", "rue des martyrs ouïghours" : la municipalité libérale de Budapest a protesté contre le projet "non-souhaité" d'implantation par Viktor Orban d'un campus chinois en rebaptisant les artères alentours mercredi du nom d'opposants à Pékin.
Au total, quatre plaques ont été apposées, les deux autres rendant hommage à la "liberté de Hong Kong" et au prêtre catholique persécuté Xie Shiguang, a déclaré le maire écologiste devant des journalistes.
"Nous espérons toujours que ce projet ne se fera pas, mais s'il voit le jour, il devra faire avec ces appellations", a ajouté Gergely Karacsony, le principal adversaire du Premier ministre souverainiste.
D'ici à 2024, Viktor Orban ambitionne d'accueillir sur 50 hectares dans la capitale de la Hongrie le tout premier campus européen d'une université chinoise.
Fin avril, il a signé un accord en ce sens avec le président de l'université Fudan de Shanghaï. Mais l'opposition hongroise est vent debout contre cette coopération.
D'après des documents internes obtenus par le site internet d'investigation Direkt36, pour les travaux confiés sans appel d'offres à une entreprise chinoise seront "utilisés essentiellement des matériaux et une main-d'œuvre chinois. La Hongrie aurait contracté un prêt de 1,3 milliard d'euros auprès de Pékin.
"Nous ne voulons pas que le contribuable hongrois règle la note d'une université privée réservée à l'élite", a tonné M. Karacsony, par ailleurs favori des primaires de l'opposition qui seront organisées en septembre pour défier M. Orban aux législatives, prévues pour le début de l'année prochaine.
Une "consultation" à l'échelle de la ville, visant à recueillir l'avis de la population, débutera le 4 juin, selon la maire de l'arrondissement concerné, Krisztina Baranyi.
Les sondages d'opinion montrent que la majorité des habitants de Budapest s'opposent à la présence de ce campus, ses détracteurs montrant du doigt les menaces pour les libertés académiques.
Sous la pression du régime, l'université de Shanghaï a été contrainte en 2019 de retirer les références à "la liberté de pensée" dans sa charte.
De son côté, le gouvernement hongrois vante une "excellente chose" pour les étudiants hongrois, chinois et d'ailleurs, Fudan ayant fait son entrée l'an dernier dans le Top 100 du fameux classement de Shanghaï.
Bien que son pays soit membre de l'Otan et de l'Union européenne (UE), Viktor Orban mène une politique de renforcement des liens économiques et culturels avec la Chine, ce qui lui vaut la réprobation du Département d'État américain.
Il a récemment usé de son droit de veto pour bloquer des déclarations critiques de l'UE sur ce pays.
Avant Fudan, la Hongrie avait noué avec Pékin un contrat pour ériger une ligne ferroviaire à grande vitesse Budapest-Belgrade, en lien avec les "Nouvelles routes de la soie", s'endettant là encore à hauteur de deux milliards d'euros.