Colère face à l’arrestation de 20 manifestants pro-palestiniens au Cachemire

Une femme passe devant une structure métallique couverte de graffiti pro-palestiniens biffés à Srinagar, au Jammu-et-Cachemire, une région administrée par l'Inde, le dimanche 16 mai 2021. (Photo, AP)
Une femme passe devant une structure métallique couverte de graffiti pro-palestiniens biffés à Srinagar, au Jammu-et-Cachemire, une région administrée par l'Inde, le dimanche 16 mai 2021. (Photo, AP)
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Publié le Lundi 17 mai 2021

Colère face à l’arrestation de 20 manifestants pro-palestiniens au Cachemire

  • La loi en question ne comprend aucune disposition relative à la liberté sous caution
  • Une symétrie «entièrement involontaire qui aligne les peuples de la Palestine et du Cachemire d’une part, et les États israélien et indien de l’autre»

NEW DELHI: Les habitants de Jammu-et-Cachemire ont fait part de leur amertume le lendemain de l’arrestation de vingt personnes, dont un artiste connu, pour avoir organisé un rassemblement en guise de protestation contre les événements en Israël et à Gaza,

Parmi les personnes arrêtées à Srinagar, la capitale, figure l’artiste de graffiti populaire Mudasir Gul. Il avait participé à la manifestation avec une peinture murale d'une femme en pleurs, la tête drapée dans un drapeau palestinien, avec les mots «Nous sommes la Palestine».

«De quel crime est accusé mon frère?», s’interroge le jeune frère de Gul, Badrul Islam, devant Arab News.

«Depuis quand le graffiti est-il devenu un crime au Cachemire? Les garçons qui ont participé à la manifestation n'auraient jamais imaginé être détenus. C'était une manifestation pacifique normale, une expression de colère. Nous n’avons pas le droit de manifester paisiblement non plus?». Islam affirme que toute la famille craint désormais pour l’avenir de Gul.

«Nous voulons que la police nous dise ce qu'elle compte faire de mon frère. Nous craignons qu'il ne soit (jugé selon) la Loi sur la sécurité publique, chose qui pourrait gâcher sa carrière et son avenir», explique Islam.

La loi en question ne comprend aucune disposition relative à la liberté sous caution. Les détenus restent souvent derrière les barreaux pendant des années.

Un voisin et membre de la famille d’Islam, Janbaaz Moustafa, s’inquiétait également pour son frère Dilwaz, âgé de 25 ans, et qui compte parmi les personnes arrêtées samedi.

«Il a confectionné des drapeaux pour la manifestation. La police l'a arrêté car selon elle nous ne pouvons pas protester contre Israël», explique Moustafa à Arab News. «C'est comme ça au Cachemire, personne n’a le droit de parler et la police peut tout faire», se désole-t-il.

Vendredi, la police du district de Shopian, dans le sud, a procédé à l’arrestation d’un prédicateur religieux populaire, Sarjan Barkati, sous motif de promotion de la cause palestinienne.

Mehbooba Mufti, l’ancienne ministre-en-chef de l’État de Jammu-et-Cachemire et cheffe du Parti démocratique populaire pro-indien, qualifie la «répression des manifestants cachemiris» de paranoïa.

«Le Cachemire est devenu une prison à ciel ouvert où même les idées sont surveillées. Tout ce qui pourrait déclencher la colère et le ressentiment qui animent les Cachemiris depuis deux ans est perçu comme une menace, et par conséquent étouffé dans l'œuf », affirme Mufti à Arab News.

«Voici la raison derrière la paranoïa et la répression consécutive des manifestations pacifiques pro-palestiniennes au Cachemire», a-t-elle ajouté.

Joint par Arab News dimanche, l’inspecteur général de la police de Jammu-et-Cachemire, Vijay Kumar, s’est refusé à tout commentaire. Cependant, il justifie samedi dans une déclaration la répression par la présence de «certains éléments qui pourraient tenter de profiter de la situation en Palestine pour perturber la paix et l'ordre dans la vallée du Cachemire».  

Il ajoute qu'il ne compte pas permettre à «la colère publique de déclencher la violence, l'anarchie et le désordre» dans les rues.

«Exprimer des opinions est un droit, mais la préméditation et l'incitation à la violence dans les rues sont illégales», indique le communiqué.

Jammu-et-Cachemire est soumis à une loi critique introduite par New Delhi en août 2019, quand le gouvernement central a abrogé l'autonomie constitutionnelle limitée dont jouissait l'État à majorité musulmane depuis 1948.

La région entière a subi un confinement de plus de six mois, en plus de voir ses droits démocratiques restreints. Des militants politiques et des dirigeants ont été placés en résidence surveillée pendant des mois, tandis qu'Internet est resté interrompu pour plus d'un an.

Dimanche, le parti au pouvoir Bharatiya Janata (BJP) a justifié la répression et la détention des vingt hommes cachemiris, parlant d'arrestation «préventive».

«Nous voulons la paix entre Israël et la Palestine. Nous voulons que tous les pays soutiennent la paix», a déclaré Manzoor Bhat, porte-parole du BJP au Cachemire, à Arab News.

«La paix règne à présent au Cachemire, il n'y a pas de meurtres dans les nouvelles. Nul ne peut vous arrêter si vous manifestez pour les Palestiniens, nous sommes dans une démocratie», dit-il.

«Des éléments hostiles à la paix au Cachemire profitent de ce genre de manifestations (…) afin de créer des problèmes où quelqu'un fini par être tué, et l'atmosphère est viciée», affirme Bhat. «La police a pris des mesures préventives, et l'arrestation est une tentative d'empêcher que la situation ne devienne incontrôlable», ajoute Bhat.

Mais les analystes refusent de mordre l’hameçon. L'analyste politique basé à Srinagar, Gowhar Geelani, affirme que les Cachemiris qui expriment leur solidarité avec les Palestiniens ne datent pas d’hier.

«Le Cachemire a une très longue et riche tradition de solidarité affichée avec les Palestiniens», déclare-t-il.

«La lutte palestinienne a été romancée par les Cachemiris dans des peintures murales, des graffiti, des affiches et des vidéos. En 1967, lorsque l'État sioniste a annexé Jérusalem-Est, Srinagar a connu l'une des plus grandes manifestations anti-israéliennes», rappelle Geelani à Arab News.

Il signale que New Delhi a «peur» et ne veut pas que les Cachemiris expriment leur solidarité avec les Palestiniens.

«Peut-être que New Delhi croit qu'au cours des deux dernières années, il a réussi à normaliser le silence et à freiner la dissidence grâce à des mesures draconiennes. Il estime que le sort des Palestiniens pourrait être un élément déclencheur de manifestations à grande échelle au Cachemire, ce qui pourrait éventuellement se transformer en slogan et sentiment pro-indépendance ou pro-pakistanais», ajoute-t-il.

Siddiq Wahid, un professeur à Srinagar, voit une «belle symétrie entre l'État indien et Israël au Cachemire». Une symétrie «entièrement involontaire qui aligne les peuples de la Palestine et du Cachemire d’une part, et les États israélien et indien de l’autre».

Le forum d'amitié entre l'Inde et la Palestine à New Delhi, a condamné pour sa part les arrestations.

«Arrêter quelqu'un pour avoir exprimé sa solidarité avec les Palestiniens est condamnable au plus haut point», affirme Nadim Khan, président du forum, à Arab News.

«Nous sommes dans une démocratie, et tous les citoyens ont le droit d'exprimer leur soutien aux peuples opprimés partout dans le monde. Le monde sait que l'Inde est un partisan et un ami de longue date de la Palestine. Soutenir la Palestine n'a jamais été un crime en Inde. En fait, ça a toujours été encouragé», dit-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le président chinois appelle à un cessez-le-feu à Gaza

Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat. (AFP)
Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat. (AFP)
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  • Le président chinois Xi Jinping a appelé mercredi à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et à "mettre fin rapidement à la guerre", a rapporté l'agence officielle Chine nouvelle
  • Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens

BRASILIA: Le président chinois Xi Jinping a appelé mercredi à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza et à "mettre fin rapidement à la guerre", a rapporté l'agence officielle Chine nouvelle.

Il s'est dit "préoccupé par l'extension continue du conflit à Gaza" et a demandé la mise en œuvre de la solution à deux Etats et "des efforts inlassables en vue d'un règlement global, juste et durable de la question palestinienne".

Xi s'exprimait à Brasilia, où il a été reçu mercredi par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva pour une visite d'Etat.

Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens.

 


L'envoyé américain Hochstein va rencontrer Netanyahu jeudi

L'envoyé américain Amos Hochstein cherche à négocier un cessez-le-feu dans la guerre entre Israël et le Hezbollah. (AP)
L'envoyé américain Amos Hochstein cherche à négocier un cessez-le-feu dans la guerre entre Israël et le Hezbollah. (AP)
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  • L'émissaire américain Amos Hochstein, qui tente de faire aboutir un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah libanais, doit rencontrer jeudi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu

JERUSALEM: L'émissaire américain Amos Hochstein, qui tente de faire aboutir un cessez-le-feu entre Israël et le Hezbollah libanais, doit rencontrer jeudi le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, a-t-on appris de source officielle.

Omer Dostri, porte-parole de M. Netanyahu, a confirmé que les deux hommes devaient se voir dans la journée. La rencontre doit avoir lieu à 12H30 (10H30 GMT), selon un communiqué du Likoud, le parti du Premier ministre. Selon des médias israéliens, M. Hochstein a atterri en Israël mercredi soir en provenance du Liban et s'est entretenu dans la soirée avec Ron Dermer, ministre des Affaires stratégiques et homme de confiance de M. Netanyahu.


Cessez-le-feu à Gaza: nouveau veto américain au Conseil de sécurité de l'ONU

Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens. (AFP)
Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens. (AFP)
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  • "Il n'y a aucune justification possible à un veto contre une résolution tentant de stopper les atrocités", a lancé l'ambassadeur palestinien adjoint à l'ONU Majed Bamya
  • "Nous sommes humains et nous devrions être traités comme tels", a-t-il ajouté en tapant du poing sur la table du Conseil, jugeant que le texte bloqué n'était déjà que "le strict minimum"

NATIONS-UNIES: Les Etats-Unis ont empêché mercredi le Conseil de sécurité de l'ONU d'appeler à un cessez-le-feu "immédiat, inconditionnel et permanent" à Gaza, un nouveau veto en soutien à leur allié israélien dénoncé avec force par les Palestiniens.

"Il n'y a aucune justification possible à un veto contre une résolution tentant de stopper les atrocités", a lancé l'ambassadeur palestinien adjoint à l'ONU Majed Bamya.

"Nous sommes humains et nous devrions être traités comme tels", a-t-il ajouté en tapant du poing sur la table du Conseil, jugeant que le texte bloqué n'était déjà que "le strict minimum".

Les Palestiniens plaidaient en effet pour une résolution dans le cadre du chapitre VII de la Charte des Nations unies qui permet au Conseil de prendre des mesures pour faire appliquer ses décisions, par exemple avec des sanctions, ce qui n'était pas le cas.

Le texte préparé par les dix membres élus du Conseil, vu par l'AFP, exigeait "un cessez-le-feu immédiat, inconditionnel et permanent qui doit être respecté par toutes les parties" et "la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages".

"Nous avons été très clairs pendant toutes les négociations que nous ne pouvions pas soutenir un cessez-le-feu inconditionnel qui ne permette pas la libération des otages", a justifié après le vote l'ambassadeur américain adjoint Robert Wood, estimant que le Conseil aurait envoyé au Hamas "le message dangereux qu'il n'y a pas besoin de revenir à la table des négociations".

La résolution "n'était pas un chemin vers la paix mais une feuille de route vers plus de terrorisme, de souffrance, de massacres", a commenté l'ambassadeur israélien Danny Danon, remerciant les Etats-Unis.

La plupart des 14 autres membres du Conseil, qui ont tous voté pour, ont déploré le veto américain.

"C'est une génération entière d'enfants que nous abandonnons à Gaza", a lancé l'ambassadrice slovène adjointe Ondina Blokar Drobic, estimant qu'un message uni et "sans équivoque" du Conseil aurait été "un premier pas pour permettre à ces enfants d'avoir un avenir".

En protégeant les autorités israéliennes, "les Etats-Unis de facto cautionnent leurs crimes contre l'humanité", a dénoncé de son côté Louis Charbonneau, de Human Rights Watch.

"Directement responsables"

Le Hamas a lui accusé les Américains d'être "directement responsables" de la "guerre génocidaire" d'Israël à Gaza.

Le 7 octobre 2023, des commandos infiltrés dans le sud d'Israël à partir de la bande de Gaza voisine ont mené une attaque qui a entraîné la mort de 1.206 personnes, majoritairement des civils, selon un décompte de l'AFP fondé sur les données officielles, incluant les otages tués ou morts en captivité.

Ce jour-là, 251 personnes ont été enlevées. Au total, 97 restent otages à Gaza, dont 34 déclarées mortes par l'armée.

En représailles, Israël a lancé une campagne de bombardements massifs suivie d'une offensive terrestre à Gaza, qui ont fait au moins 43.985 morts, en majorité des civils, selon des données du ministère de la Santé du Hamas, jugées fiables par l'ONU.

La quasi-totalité des quelque 2,4 millions d'habitants ont été déplacés dans ce territoire en proie à un désastre humanitaire.

Depuis le début de la guerre, le Conseil de sécurité de l'ONU peine à parler d'une seule voix, bloqué plusieurs fois par des veto américains, mais aussi russes et chinois.

Les quelques résolutions adoptées n'appelaient pas à un cessez-le-feu inconditionnel et permanent. En mars, avec l'abstention américaine, le Conseil avait ainsi demandé un cessez-le-feu ponctuel pendant le ramadan --sans effet sur le terrain--, et avait adopté en juin une résolution américaine soutenant un plan américain de cessez-le-feu en plusieurs phases accompagnées de libérations d'otages, qui n'a jamais abouti.

Certains diplomates espéraient qu'après la victoire de Donald Trump, les Etats-Unis de Joe Biden seraient plus flexibles dans les négociations, imaginant une répétition de décembre 2016.

A quelques semaines de la fin du mandat de Barack Obama, le Conseil avait alors adopté, pour la première fois depuis 1979, une résolution demandant à Israël de cesser la colonisation dans les Territoires palestiniens occupés. Un vote permis par la décision des Américains de ne pas utiliser leur droit de veto, alors qu'ils avaient toujours soutenu Israël jusqu'alors sur ce dossier.