NEW-DELHI : L'Inde a battu samedi un nouveau record du nombre quotidien de décès dus à la Covid-19, s'enfonçant toujours davantage dans la crise sanitaire, et la flambée épidémique dans ce pays a fait grimper le nombre de cas recensés dans le monde sur une journée, plus de 893 000 cas vendredi, selon un comptage de l'AFP, un nombre jamais atteint jusqu'ici.
Devant les hôpitaux des principales villes d'Inde, où près d'un million de nouveaux cas ont été recensés en trois jours, les files d'attente de malades de la Covid et leurs proches inquiets s'allongent.
Au cours des dernières 24 heures, 2 624 décès liés à la maladie ont été recensés, un nouveau record qui porte le nombre total des morts officiellement dénombrés depuis le début de la pandémie à près de 190 000 dans ce pays de 1,3 milliard d'habitants.
Plus de 340.000 nouveaux cas ont également été recensés au cours des dernières 24 heures, ce qui porte le total des personnes atteintes du coronavirus à 16,5 millions dans le pays, le plaçant en deuxième position après les Etats-Unis, pays le plus touché de la planète.
Mais les experts estiment que les chiffres pourraient en réalité être plus élevés et attribuent cette nouvelle vague à une "double mutation" du virus et à des événements de masse, comme la fête religieuse hindoue Khumb Mela qui a rassemblé des millions de pèlerins.
A New Delhi, confinée jusqu'à lundi, des hôpitaux manquant cruellement d'oxygène et de médicaments lancent des appels à l'aide quotidiens au gouvernement pour qu'il fournisse d'urgence des réserves afin d'alimenter des centaines de patients placés sous respirateur.
"J'ai vu trois cadavres en six minutes", raconte Ravi Kumar, qui a réussi à faire admettre son grand père de 80 ans à l'hôpital après avoir attendu toute la nuit devant.
"A l'intérieur, il n'y a pas de lits, que des brancards avec deux patients sur chaque", ajoute-t-il. La veille, son grand père a dû quitter un hôpital privé, car l'oxygène était épuisé.
Inquiétude au Japon
Plusieurs pays ferment leurs portes à l'Inde. A partir de dimanche, seuls les citoyens de nationalité allemande pourront voyager d'Inde vers l'Allemagne. Le Koweït a annoncé samedi la suspension des vols commerciaux directs en direction et en provenance de l'Inde.
Quant aux Etats-Unis, ils y déconseillent les voyages, même pour les personnes vaccinées, et le Canada a suspendu pendant 30 jours vendredi les vols en provenance d'Inde et du Pakistan.
La détection du variant "indien" en Belgique d'abord, puis en Suisse samedi, inquiète en Europe.
Si la flambée enregistrée cette semaine en Asie est liée principalement à la situation en Inde, le Népal a aussi connu une progression fulgurante de l'épidémie (+242%), avec 1 400 nouveaux cas quotidiens.
A trois mois des Jeux olympiques, le Japon suscite aussi des inquiétudes : l'état d'urgence va être appliqué à Tokyo et dans trois autres départements (Kyoto, Osaka et Hyogo), à partir de dimanche et au moins jusqu'au 11 mai, a annoncé vendredi le Premier ministre Yoshihide Suga.
La lenteur de la vaccination alimente aussi les doutes sur la capacité du Japon à organiser les JO dans moins de cent jours, 1,5 million de personnes ayant reçu une première dose à la date de mercredi et seulement 827 000 étant totalement vaccinées, soit moins de 0,7% de la population.
La pandémie a fait au moins 3 088 103 morts dans le monde depuis que le bureau de l'OMS en Chine a fait état de l'apparition de la maladie fin décembre 2019, selon un bilan établi par l'AFP samedi.
Lueur d'espoir : la vaccination qui s'accélère. Le cap du milliard de doses de vaccins anti-Covid administrées à travers le monde devrait être franchi samedi en fin de journée, selon un décompte réalisé par l'AFP à partir de chiffres officiels.
Aux Etats-Unis, cette campagne d'immunisation commence à porter ses fruits.
La reprise, autorisée vendredi par les autorités sanitaires, de la vaccination avec le sérum Johnson et Johnson - à dose unique et conservable au réfrigérateur - doit permettre d'atteindre plus facilement les groupes vulnérables, ont souligné les experts des Centres américains de lutte et de prévention des maladies (CDC).
"Les données disponibles suggèrent que le risque" de thrombose "est très bas" avec ce vaccin, selon les autorités, qui vont toutefois rester "vigilantes et continueront d'enquêter sur ce risque".
Durcissement en Allemagne
Avancée aussi sur le front de la vaccination en Europe, où la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a annoncé vendredi qu'elle espérait pouvoir atteindre dès juillet l'objectif fixé pour septembre de vacciner 70 % des adultes de l'UE.
De son côté, l'Agence européenne des médicaments (EMA) a déclaré après une nouvelle étude que les bénéfices du vaccin AstraZeneca augmentaient avec l'âge et continuaient de l'emporter sur les risques, tels que des cas de caillots sanguins.
"Les bénéfices de Vaxzevria (le nom du vaccin AstraZeneca) l'emportent sur les risques chez les adultes de tous les groupes d'âge", a ajouté l'EMA.
L'utilisation de ce vaccin, qui utilise la même technologie que celui de J&J, a été restreinte dans la plupart des pays de l'Union européenne à cause de très rares cas graves de thromboses qu'il peut provoquer. Le Danemark ne l'utilise plus. Et au Chili, qui a réceptionné vendredi sa première cargaison du vaccin anglo-suédois, il ne sera administré qu'aux hommes, à partir de la semaine prochaine.
Alors que de nombreux pays européens, comme l'Italie, la Suisse, la Belgique ou la France, ont programmé l'assouplissement des restrictions, l'Allemagne s'inscrit à contre-courant en musclant samedi son arsenal anti-Covid, avec notamment des couvre-feux nationaux.
Adopté cette semaine au Bundestag sous les protestations dans la rue de milliers d'opposants, le dispositif impose un durcissement des règles sanitaires dès que le taux d'incidence, qui mesure les infections sur une semaine, est supérieur à 100 pendant trois jours.