Coup d'Etat au Mali: Revers pour la stratégie de la France au Sahel?

Emmanuel Macron en compagnie du président nigérian  Mahamadou Issoufou lors d’une cérémonie militaire à Niamey en 2019 (Photo, AFP).
Emmanuel Macron en compagnie du président nigérian Mahamadou Issoufou lors d’une cérémonie militaire à Niamey en 2019 (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 20 août 2020

Coup d'Etat au Mali: Revers pour la stratégie de la France au Sahel?

  • "En théorie l'issue favorable est possible si à terme s'installe un gouvernement qui fonctionne mieux et plus légitime"
  • Accusé de corruption et d'incurie, le président malien Ibrahim Boubacar Keita a démissionné après avoir été arrêté par l'armée, au terme de plusieurs semaines de contestation populaire

PARIS: Le coup d'Etat perpétré par l'armée au Mali fragilise la stratégie de la France, intensément engagée au Sahel avec plus de 5.000 militaires pour lutter contre les jihadistes, main dans la main avec les gouvernements locaux.

Accusé de corruption et d'incurie, le président malien Ibrahim Boubacar Keita ("IBK") a démissionné après avoir été arrêté par l'armée, au terme de plusieurs semaines de contestation populaire. Son départ forcé prive Paris de l'un de ses principaux interlocuteurs au Sahel depuis 2013, dans un pays où l'ex-puissance coloniale concentre la majeure partie de ses efforts militaires.

Le président Emmanuel Macron a estimé que "la lutte contre les groupes terroristes et la défense de la démocratie et de l'État de droit sont indissociables". "En sortir, c'est provoquer l'instabilité et affaiblir notre combat. Ce n'est pas acceptable", a-t-il poursuivi Twitter, en appelant à ce que le pouvoir soit "rendu aux civils".

Ces protestations n'ont pas dissuadé les militaires de s'emparer du pouvoir, tout en promettant d'organiser des élections "dans un délai raisonnable".

"Aujourd'hui, d'une certaine manière c'est un retour à la case départ", juge Jean-Hervé Jezequel, spécialiste du Sahel chez International Crisis Group. "Huit années d'efforts, d'investissement, de présence pour au fond revenir à la situation du Mali au moment du coup d'Etat de 2012, avec une situation aussi confuse à Bamako, des insurrections armées plus violentes et des violences intercommunautaires accrues".

"Un revers pour la France" ?

D'après cet expert du Sahel, "la France, les Etats sahéliens et les autres partenaires doivent véritablement questionner les choix stratégiques qu'ils ont fait ces dernières années. On ne peut durablement sécuriser un espace sans changer les formes de gouvernance qui le régissent".

"Ce coup d'Etat est un revers pour la France", qui a lourdement investi depuis sept ans pour tenter d'aider le Mali à sortir de l'ornière, renchérit Michael Shurkin, du centre de réflexion américain RAND.  "En même temps, cela pourrait en théorie avoir une issue favorable à terme si cela permet d'installer un gouvernement qui fonctionne mieux, plus légitime", souligne-t-il, en faisant valoir que "le Mali sous IBK faisait peu, voire pas de progrès" sur le plan sécuritaire.

En coulisses, l'exécutif français se montrait lui-même sceptique sur la capacité de l'ex-président malien à faire progresser la sécurité et la gouvernance dans son pays. Ce coup de force et l'imbroglio politique qui risque de s'ensuivre promet de compliquer le travail des diplomates et militaires français. "Il faut se concentrer sur le retour d'un pouvoir civil et de l'état de droit, avec une autre priorité: ne pas perdre l'engagement dans la lutte contre le terrorisme", selon l'Elysée.

La junte a pris soin de déclarer que "la paix au Mali est notre priorité", et que les forces régionales et étrangères présentes au Mali "demeurent nos partenaires". Il s'agit de la Minusma (mission de l'ONU au Mali), la force Barkhane, le G5 Sahel, la force Takuba (groupement de forces spéciales européennes destiné à accompagner les militaires maliens).

Coopération militaire en question

"La junte (...) ne veut pas s'aliéner le soutien de la communauté internationale, dont Barkhane. L'objectif était apparemment surtout d'éjecter IBK et ses proches du pouvoir", commente sur Twitter Yvan Guichaoua, chercheur à l'université de Kent (Belgique). Toutefois, l'un des piliers de la stratégie de Paris consiste à collaborer étroitement avec les forces armées locales dans l'espoir qu'elles puissent à terme assurer seules la sécurité au Sahel. Or, comment continuer à travailler avec une institution auteure d'un coup d'Etat?  "Pour les militaires français, les choses vont être un peu plus compliquées", commente Michel Goya, colonel français à la retraite. "Les opérations peuvent continuer, on peut les mener en autonomie, mais la coopération avec les forces maliennes risque de subir un coup d'arrêt. Et les groupes armés vont peut-être essayer de profiter de la situation pour étendre leur action", prévient-il.

Parallèlement, alors que Paris s'évertue depuis des mois à convaincre l'Europe de lui prêter main forte au Sahel, "je ne serais pas surpris que cela refroidisse quelque peu les ardeurs des partenaires européens, déjà un peu réticents, sur Takuba et d'autres projets, de même que le G5 Sahel", estime Elie Tenenbaum, chercheur à l'Institut français des relations internationales (IFRI).

Pour l'heure, la force Barkhane se tient prête à évacuer du Mali les ressortissants français si besoin, a-t-on appris de source militaire française.


Première mission du porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle aux Philippines

Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
Le 6 juillet 1999, un prototype du Rafale M02 effectue un appontage sur la piste du porte-avions nucléaire Charles de Gaulle à Brest (Photo Getty Images)
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  • L'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.
  • La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

SUBIC BAY FREEPORT ZONE PHILIPPINES : Le porte-avions nucléaire français Charles de Gaulle a effectué sa première mission aux Philippines, où l'ambassadrice de France a jugé dimanche que ces exercices militaires étaient « encore plus importants » en raison de la montée des tensions en mer de Chine méridionale.

« Compte tenu de la montée des tensions, il est d’autant plus important de défendre le droit international et la liberté de navigation, que ce soit en mer ou dans les airs », a déclaré l'ambassadrice Marie Fontanel sur le pont du porte-avions, dans la baie de Subic, au nord de Manille.

Le groupe aéronaval a rejoint la marine des Philippines vendredi pour ces exercices.

Constitué de quelque 3 000 marins, il avait quitté le port de Brest en novembre pour une mission de plusieurs mois en mer Rouge, dans l'océan Indien et dans le Pacifique, durant laquelle il doit intégrer régulièrement des frégates ou des sous-marins de pays étrangers.

La France cherche à réaffirmer son poids dans la région Asie-Pacifique, où la Chine et les États-Unis sont en concurrence pour exercer leur influence.

Les Philippines cherchent pour leur part à renforcer leurs relations avec leurs alliés face aux confrontations régulières entre Manille et Pékin concernant la mer de Chine méridionale. Pékin y revendique en effet la majeure partie de cette voie navigable stratégique.

En novembre, Manille avait annoncé l'achat à la France de 40 vedettes rapides de patrouille dans le cadre d'un accord de 440 millions de dollars (environ 420 millions d'euros).


L'écrivain Boualem Sansal a entamé une grève de la faim, a déclaré son avocat

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  • « Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.
  • Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

PARIS : L'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, incarcéré en Algérie depuis mi-novembre, a entamé lundi une grève de la faim, a indiqué son avocat dimanche à l'AFP, précisant tenir cette information d'une source judiciaire.

« Je suis inquiet pour sa santé, comme pour la possibilité même d'un procès équitable », a affirmé Me François Zimeray, avocat français de l'écrivain, confirmant une information du JDD.

Selon Me Zimeray, qui a expliqué ne pas avoir obtenu de visa pour se rendre en Algérie afin de voir son client, Boualem Sansal aurait pris cette décision « en raison des pressions exercées contre lui pour changer d'avocat ».

« Ni la pondération dans l'expression de sa défense, ni la retenue face à la campagne abjecte que j'ai subie dans certains médias algériens, ni le respect du cadre judiciaire de ce pays ne semblent avoir été appréciés par un régime qui persiste à me refuser le visa sans raison valable, privant Boualem Sansal de la défense de son choix », a martelé l'avocat.

Ce dernier a également affirmé que le protocole de soin suivi par Boualem Sansal avait été interrompu, alors que l'écrivain souffrirait d'un cancer, d'après des informations de presse.

Boualem Sansal est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du Code pénal algérien, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

Selon le quotidien français Le Monde, le pouvoir algérien aurait mal pris les déclarations de Boualem Sansal au média français Frontières, réputé d'extrême droite, reprenant la position du Maroc selon laquelle le territoire de ce dernier pays aurait été amputé sous la colonisation française au profit de l'Algérie.

Son incarcération a provoqué les protestations de nombreux intellectuels et écrivains, qui estiment les poursuites sans aucun fondement.

Boualem Sansal a longtemps affirmé être né en 1949, ce qui lui donnerait aujourd'hui 75 ans. En décembre, son éditeur Antoine Gallimard avait pour sa part indiqué qu'il était en vérité né en 1944 et avait donc 80 ans.


Immigration : un conseil interministériel se réunit mercredi

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (C) serre la main d'un agent de la police nationale française dans une caserne de pompiers après une attaque au couteau à Mulhouse, dans l'est de la France, où un homme est soupçonné d'avoir tué une personne et grièvement blessé deux agents de police, le 22 février 2025 (Photo par SEBASTIEN BOZON / AFP)
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  • Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.
  • Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

PARIS : Le gouvernement français réunira un conseil interministériel de contrôle de l'immigration mercredi, alors qu'une attaque au couteau, perpétrée par un Algérien en situation irrégulière, a fait un mort samedi à Mulhouse, a assuré dimanche le ministre des Affaires étrangères.

Ce conseil, qui était prévu avant l'attaque de Mulhouse, « se réunira ce mercredi », a déclaré Jean-Noël Barrot lors d'un entretien avec Europe 1 et CNews, où il était interrogé sur l'attaque de samedi.

Au cours de l'entretien, le ministre a été interrogé sur les discussions avec ses homologues algériens concernant les obligations de quitter le territoire français (OQTF).

« Cette attaque terroriste nous appelle à amplifier encore la mobilisation qui est la nôtre pour mieux contenir et prévenir les conséquences de la présence de ce terroriste islamiste sur le territoire national », a estimé le ministre avant d'évoquer le conseil interministériel.

Interrogé sur TF1, le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a indiqué que le suspect faisait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français (OQTF) et a accusé l'Algérie de l'avoir refoulé à 10 reprises.

Le Premier ministre, François Bayrou, a d'ailleurs convoqué un conseil interministériel de contrôle de l'immigration ce mercredi. « Nous devons faire plus et nous devons faire mieux », a-t-il déclaré.

M. Barrot a également affirmé avoir demandé « aux 19 ambassadeurs, dans les pays où nous rencontrons le plus de difficultés pour renvoyer les étrangers en situation irrégulière, à me faire un rapport circonstanciel dont je présenterai les résultats ce mercredi au Premier ministre pour que nous puissions prendre des mesures fortes ».

« Il y a des pays vis-à-vis desquels il nous faut effectivement prendre des mesures fortes. Il y en a d'autres où, au contraire, il nous faut des mesures d'accompagnement », a-t-il ajouté.