PARIS: L'ancienne garde des Sceaux Rachida Dati, visée par une enquête anticorruption sur ses prestations de conseil auprès de l'ex-magnat de l'automobile Carlos Ghosn, a fait valoir auprès des juges d'instruction que les faits étaient prescrits et ne pouvaient faire l'objet de poursuites judiciaires.
Fin novembre, l'actuelle maire LR du VIIe arrondissement de Paris avait été convoquée par les magistrates parisiennes chargées des investigations en vue de sa mise en examen, notamment pour corruption et trafic d'influence, mais elle était finalement ressortie de leur bureau sous le statut intermédiaire de témoin assisté.
Les juges d'instruction peuvent toutefois réviser cette décision et ordonner la mise en examen de l'élue à tout moment de la procédure. Sans attendre, Dati a donc adressé début mars aux magistrates une requête aux fins de constatation de la prescription de l'action publique, selon une source proche du dossier.
« Cette demande de prescription est fondée sur la transparence absolue de l'activité d'avocat de Rachida Dati pour l'alliance Renault-Nissan », a déclaré Me Olivier Baratelli, un des avocats de Dati.
Les juges n'ayant pas répondu à cette requête dans un délai d'un mois, cela équivaut à un rejet de l'argumentation de la défense. « Nous allons demander à la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris de réviser cette position », a indiqué Me Baratelli.
Selon une source proche du dossier, Dati, qui nie toute irrégularité, aurait touché 900 000 euros d'honoraires en tant qu'avocate entre 2010 et 2012, alors qu'elle était à l'époque aussi députée européenne.
La justice cherche notamment à savoir si les revenus de Dati correspondent à des activités déterminées ou s'il s'agissait d'un emploi de complaisance, ayant pu masquer des activités de lobbying, interdites pour les députés européens.
L'équipe de défense de Dati fait valoir qu'aucun élément de sa rémunération n'a été dissimulé, et que par conséquent la prescription de trois ans pour ces délits est acquise depuis 2017. Or, le parquet national financier (PNF) n'a ouvert une enquête qu'en 2019, après avoir reçu une plainte d'une actionnaire de Renault.
Les avocats observent par ailleurs que ni le Parlement européen, ni la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, ni le ministère public n'ont décidé de la poursuivre alors même que des accusations de conflits d'intérêt la visant ont été relayées par la presse entre 2009 et 2015.