Ethiopie: l'armée se bat sur huit fronts, la rébellion tigréenne tourne à la «guérilla»

Des gens se tiennent à côté d'un bâtiment endommagé de l'école secondaire Ksanet, qui a été bombardé lorsque les forces fédérales sont entrées dans la ville et auraient été pillées par les forces érythréennes, à Wukro, au nord de Mekele, le 1er mars 2021 (Photo, AFP)
Des gens se tiennent à côté d'un bâtiment endommagé de l'école secondaire Ksanet, qui a été bombardé lorsque les forces fédérales sont entrées dans la ville et auraient été pillées par les forces érythréennes, à Wukro, au nord de Mekele, le 1er mars 2021 (Photo, AFP)
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Publié le Dimanche 04 avril 2021

Ethiopie: l'armée se bat sur huit fronts, la rébellion tigréenne tourne à la «guérilla»

  • L'armée éthiopienne combat un groupe rebelle dans la région Oromia du pays, que le gouvernement a rendu responsable de multiples massacres de civils
  • Les restrictions d'accès imposées aux organisations humanitaires et aux journalistes indépendants ont rendu difficile l'établissement d'un bilan clair des violences

ADDIS ABEBA: L'armée éthiopienne se bat actuellement sur « huit fronts », notamment au Tigré où les rebelles ont adopté des tactiques de « guérilla », a déclaré samedi le Premier ministre éthiopien Ahmed Abiy. 

« Actuellement, les forces de défense nationale et les forces fédérales mènent un combat majeur sur huit fronts dans le nord et l'ouest du pays contre des ennemis (...) qui sèment la discorde entre les Éthiopiens », a affirmé M. Abiy lors d'une cérémonie officielle. 

Dans la région du Tigré (nord), « la junte que nous avons éliminée en trois semaines s'est maintenant transformée en force de guérilla, s'est mêlée aux agriculteurs et a commencé à se déplacer d'un endroit à l'autre », a-t-il déclaré, en référence au Front de libération du peuple du Tigré (TPLF), parti au pouvoir dans cette région et qui a dominé la politique nationale en Éthiopie pendant près de trois décennies. 

« Maintenant, nous ne sommes pas capables de l'éliminer en trois mois », a-t-il reconnu. 

« Éliminer un ennemi qui est visible, et éliminer un ennemi qui se cache et opère en se dissimulant parmi la population n'est pas la même chose. C'est très difficile et compliqué », a expliqué le Premier ministre, lauréat du prix Nobel de la paix en 2019. 

Début novembre 2020, Abiy Ahmed avait annoncé l'envoi de l'armée fédérale au Tigré pour arrêter et désarmer les dirigeants du TPLF, dont les forces sont accusées par Addis Abeba d'avoir mené des attaques contre des camps militaires des forces fédérales. 

L'armée éthiopienne a reçu l'appui de forces venues d'Érythrée, pays frontalier du Tigré au nord, et de la région éthiopienne de l'Amhara, qui borde le Tigré au sud, et M. Abiy a proclamé la victoire le 28 novembre, après la prise de la capitale régionale Mekele. 

Le mois dernier, le Premier ministre avait déjà déclaré que les combattants pro-TPLF étaient comme « de la farine dispersée par le vent ». 

Samedi, M. Abiy a assuré que les forces fédérales avaient « mené de vastes opérations au cours des trois derniers jours », causant « de lourds dommages aux ennemis du peuple », promettant que ces efforts »seront renforcés et poursuivis ». 

L'armée éthiopienne combat également un groupe rebelle dans la région Oromia du pays, que le gouvernement a rendu responsable de multiples massacres de civils.  

Au Tigré, les troupes érythréennes sont accusées d'atrocités (massacres, viols, pillages...). Addis Abeba et Asmara ont longtemps nié que les Érythréens étaient actifs dans la région, malgré les témoignages de résidents, de groupes de défense des droits humains, de diplomates et même de certains responsables civils et militaires éthiopiens. 

Les restrictions d'accès imposées aux organisations humanitaires et aux journalistes indépendants ont rendu difficile l'établissement d'un bilan clair des violences. Mais de nombreux rapports font état de massacres, d'exécutions extrajudiciaires et de violences sexuelles. 

Samedi soir, le ministère des Affaires étrangères a annoncé que les troupes érythréennes avaient « commencé à évacuer » le Tigré pour être rapatriées. 


Royaume-Uni: premières arrestations de migrants avant leur expulsion vers le Rwanda

Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda  (Photo, AFP).
Des demandeurs d'asile dormant dans des tentes à Dublin affirment que la vie sous les bâches est meilleure et plus sûre que le risque d'être envoyé par le Royaume-Uni au Rwanda (Photo, AFP).
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  • L'adoption d'une loi permettant l'expulsion des migrants vers le Rwanda a déclenché leur départ du Royaume-Uni
  • Une centaine de tentes ont poussé devant l'Office, depuis que le gouvernement irlandais a cessé il y a quelques mois de fournir un hébergement aux demandeurs d'asile

LONDRES: Les premiers migrants susceptibles d'être expulsés par le Royaume-Uni vers le Rwanda ont été arrêtés et placés en détention, a annoncé mercredi le ministère britannique de l'Intérieur, sans préciser le nombre de personnes concernées.

"Les premiers migrants en situation irrégulière devant être expulsés vers le Rwanda ont été placés en détention à la suite d'une série d'opérations menées cette semaine à l'échelle nationale", écrit le Home Office dans un communiqué.

Davantage d'arrestations "devraient être menées dans les semaines à venir", a-t-il ajouté.

"Cette action est un élément clé du plan visant à assurer des vols vers le Rwanda dans les neuf à onze semaines à venir", a poursuivi le ministère.

Le gouvernement conservateur de Rishi Sunak a promis de mettre un terme aux traversées de la Manche par les migrants clandestins.

Le Parlement a adopté la semaine dernière une loi très controversée permettant d'expulser vers le Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni.

Leur demande d'asile sera examinée dans ce pays d'Afrique de l'Est et ils ne pourront pas revenir au Royaume-Uni, quelle que soit l'issue de leur démarche.

Le gouvernement compte commencer les expulsions au début de l'été et espère qu'elles dissuaderont d'autres migrants de venir au Royaume-Uni.

Cette politique "montrera clairement que si vous venez ici illégalement, vous ne pouvez pas rester", redit le ministère de l'Intérieur dans son communiqué.

"Nos équipes (...) travaillent à un rythme soutenu pour arrêter rapidement les personnes qui n'ont pas le droit d'être ici, afin que nous puissions faire décoller les vols", a déclaré le ministre de l'Intérieur James Cleverly, cité dans le communiqué.


L'ONG HRW critique l'application mobile pour demander l'asile à la frontière mexicano-américaine

Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
Des migrants de différentes nationalités demandant l'asile aux États-Unis voyagent à bord des wagons de marchandises du train mexicain connu sous le nom de « La Bête » alors qu'ils arrivent à la ville frontalière de Ciudad Juarez, dans l'État de Chihuahua, au Mexique, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières
  • Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application

WASHINGTON: L'obligation pour les demandeurs d'asile aux Etats-Unis d'obtenir un rendez-vous sur une application mobile avant de se présenter à la frontière avec le Mexique livre les migrants à la violence des cartels, déplore mercredi Human Rights Watch (HRW).

Depuis mai 2023, avant de se présenter à la frontière, les demandeurs d'asile, sauf les mineurs isolés, sont censés obtenir un rendez-vous sur l'application téléphonique de la police américaine des frontières ou s'être vu refuser l'asile dans un des pays traversés. Autrement, leur demande est présumée illégitime et ils risquent une procédure d'expulsion accélérée, leur interdisant pendant cinq ans l'entrée aux Etats-Unis.

Cette réglementation fait suite à la levée par l'administration du président démocrate Joe Biden d'une mesure de son prédécesseur républicain Donald Trump qui verrouillait depuis trois ans l'accès au territoire américain.

"Mais un résultat pratique reste le même pour les demandeurs d'asile", affirme HRW dans un rapport publié mercredi : pendant de longues semaines, voire des mois, "ils sont forcés d'attendre dans le nord du Mexique, ainsi que dans beaucoup d'autres villes ailleurs au Mexique par lesquelles transitent les migrants".

Systématiquement visés 

Ils y sont "systématiquement visés par les cartels qui, parfois avec l'aide de responsables des autorités mexicaines, les enlèvent, les rackettent, les agressent sexuellement et les dévalisent", énumère l'ONG.

L'exigence de prise de rendez-vous sur l'application crée un "filtrage numérique", qui livre "aux cartels une population vulnérable", selon le rapport, établi à partir d'interviews avec 128 demandeurs d'asile, des employés de centres d'accueil, des responsables mexicains et des employés d'organisations humanitaires.

Bien que l'inscription pour un rendez-vous sur l'application ne soit en principe pas obligatoire, dans les faits, les demandeurs qui se présentent à la frontière sans l'avoir préalablement obtenue sont éconduits par les autorités frontalières mexicaines et américaines, indique HRW.

Beaucoup des personnes interrogées ont fait état de nombreux problèmes pour utiliser l'application, notamment matérielles, techniques, ou linguistiques. L'application n'est ainsi disponible qu'en anglais, en espagnol et en créole haïtien.

Ces pratiques "violent le principe juridique fondamental de non-refoulement" des demandeurs d'asile vers des pays où leur vie ou leur liberté serait en danger, souligne l'ONG.

Elle exhorte donc l'administration Biden à donner instruction à la police des frontières de traiter toutes les demandes d'asile, indépendamment de la façon ou du lieu de dépôt, ainsi que de l'obtention d'un rendez-vous via l'application "CBP One" de la police des frontières.

Human Rights Watch lui suggère en outre d'en améliorer l'accessibilité et la facilité d'utilisation, y compris par l'ajout d'autres langues, comme l'arabe, le français, le russe, le chinois, le portugais, et de langages amérindiens.


Turquie : des dizaines d'interpellations à Istanbul lors des rassemblements du 1er Mai

La police turque arrête des manifestants qui tentaient de marcher vers la place Taksim, dans le quartier de Mecidiyekoy près de Taksim, lors d'un rassemblement du 1er mai (fête du travail), marquant la Journée internationale des travailleurs, à Istanbul, le 1er mai 2024 (Photo, AFP).
La police turque arrête des manifestants qui tentaient de marcher vers la place Taksim, dans le quartier de Mecidiyekoy près de Taksim, lors d'un rassemblement du 1er mai (fête du travail), marquant la Journée internationale des travailleurs, à Istanbul, le 1er mai 2024 (Photo, AFP).
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  • Le maire d'opposition Ekrem Imamoglu largement réélu le 31 mars, ainsi que le président du parti, le CHP, qui avaient appelé au rassemblement devant la municipalité
  • Selon l'association de défense des droits de la presse MLSA, plusieurs journalistes ont été jetés à terre durant ces échauffourées

ISTANBUL: Des dizaines de manifestants rassemblés à Istanbul pour célébrer le 1er mai ont été interpellés mercredi par les forces de l'ordre alors qu'ils tentaient d'accéder à l'emblématique Place Taksim, ont constaté les journalistes de l'AFP.

Selon les médias turcs, 150 personnes avaient été interpellées à la mi-journée, mais aucune confirmation officielle de ce chiffre n'a pu être obtenue.

D'autres incidents ont ensuite éclaté devant la municipalité d'Istanbul, où les policiers anti-émeutes ont tiré des gaz lacrymogènes et des balles en plastique contre les manifestants qui essayaient de forcer leurs barrages, a constaté une vidéaste de l'AFP.

Istanbul a été placée en état de siège depuis l'aube par les forces de l'ordre qui ont bloqué le coeur de la principale de ville de Turquie afin d'empêcher les manifestants de gagner la Place Taksim, complètement barricadée depuis la veille.

Plus de 42.000 policiers ont été déployés dans la mégapole, avait prévenu mardi le ministre de l'Intérieur, Ali Yerlikaya dénonçant par avance les "organisations terroristes (qui veulent) faire du 1er mai un champ d'action et de propagande".

Des rives du Bosphore jusqu'à la péninsule historique de Sultanhamet et le palais de Topkapi, des barrières métalliques barrent tout passage, les transports en commun, ferries compris, sont à l'arrêt, prenant au piège des touristes désemparés qui trainent leurs valises sous un ciel maussade.

Dès le début de la matinée, alors que les manifestants se rassemblaient dans le quartier de Besiktas pour célébrer le 1er Mai, des incidents ont éclaté avec les policiers et plusieurs dizaines de personnes ont été emmenées sans ménagement dans les fourgons de la police.

Appel au rassemblement 

Le maire d'opposition Ekrem Imamoglu largement réélu le 31 mars, ainsi que le président du parti, le CHP, qui avaient appelé au rassemblement devant la municipalité, ont été empêchés d'avancer.

"Vous ne pouvez pas nous priver de Taksim!", "Taksim, c'est partout, la résistance est partout!" criaient les manifestants.

Selon l'association de défense des droits de la presse MLSA, plusieurs journalistes ont été jetés à terre durant ces échauffourées.

Le président du CHP, première de l'opposition au parlement, Özgür Özel, a promis de "ne pas abandonner": "Nous poursuivrons nos efforts jusqu'à ce que Taksim soit libre".

"Taksim appartient aux travailleurs", a-t-il déclaré, puis s'adressant aux policiers: "ces travailleurs ne sont pas vos ennemis. Notre seul souhait est que ce jour soit célébré comme une fête. Nous ne voulons pas de conflit".

Les rassemblements ne sont plus autorisés Place Taksim, devenue l'épicentre de la contestation  du pouvoir de Recep Tayyip Erdogan depuis la vague de contestation qui a secoué le pays en 2013. Mais les organisations syndicales et politiques appellent régulièrement leurs membres à y converger.

Mardi soir, le chef de l'Etat a dénoncé "les organisations terroristes qui veulent faire du 1er mai un outil de propagande" et mis en gardes les syndicats et partis politiques contre "toute action qui nuirait à l'atmosphère du 1er mai".