PARIS : Situation inédite, les vacances de printemps ont été alignées sur la même quinzaine pour les trois zones et seront sans déplacements, au désespoir des professionnels du tourisme qui ont « l'impression de revenir un an en arrière ».
« Nous avons reçu plein de mails d'annulation depuis hier soir et nous contactons nous-mêmes les gens pour la semaine prochaine », se désole Solange Escure, directrice nationale des Gîtes de France.
L'impossibilité de se déplacer d'une région à l'autre annoncée mercredi soir par le président Emmanuel Macron, afin de freiner la progression de la pandémie de Covid-19, va causer une perte « de plus de 4 milliards d'euros de chiffre d'affaires » pour le secteur touristique dont « 1,5 milliard pour l'hébergement, la restauration et les dépenses sur place », selon Didier Arino, directeur général de la société de conseil Protourisme.
Gîtes de France va devoir ainsi annuler « plus de 50 000 contrats » ce qui représente 25 millions d'euros. « Les vacances de printemps représentent en fonction des départements entre 10 et 20% du volume d'affaires de l'année », selon Mme Escure.
Mais surtout, « les équipes ont le moral en berne ce matin, de reproduire ce qu'elles ont fait l'année dernière, l'impression de revenir un an en arrière quand il a fallu tout annuler », explique-t-elle.
« Il y a une forme de lassitude, comme dans la vie privée, on se dit "c'est reparti pour un tour" », confirme Laurent Dusollier, directeur général d'Odalys, groupe d'hébergement touristique qui gère plus de 400 résidences touristiques, hôtels et appart-hôtels, en France et en Europe du Sud.
« C'est la moins pire des périodes », tempère-t-il toutefois: « tant qu'à fermer quatre semaines, autant ne pas attendre et risquer de mettre à mal la saison estivale ». Et d'ajouter « professionnellement, le mieux aurait été d'être stricts sur mi-février, mi-avril ».
« L'œil rivé sur l'après »
« Tout le monde espère que c'est la dernière fois », affirme Dominique Debuire, président de l'Union nationale pour la promotion de la location de Vacances (UNPLV) qui regroupe les plateformes de locations entre particuliers comme Airbnb, Abritel, SeLogerVacances ou LeBonCoin.
Malgré cet air de déjà-vu, un an après le confinement strict du printemps 2020, les professionnels sont cette fois « préparés », assure Mikaël Quilfen, exploitant de 21 campings haut de gamme en France.
« On a des appels de gens qui devaient arriver ce week-end, qui ont vraiment besoin d'un bol d'air et donc ne viennent pas pour la semaine mais viendront quand même passer le week-end puisque c'est autorisé », explique-t-il.
Les réservations des vacances de printemps, si elles ne représentent que 2% du chiffre annuel du groupe, lancent habituellement la saison des vacances en camping. Quelque 2 000 familles avaient déjà réservé leur séjour chez Siblu pour le mois d'avril.
En 2019, 20 millions de Français étaient partis en vacances ou en court séjour à cette période, selon Didier Arino.
Dans l'hôtellerie, « nous avions déjà un portefeuille de réservations assez ridicule pour le week-end de Pâques: sur nos établissements ouverts, on était à 17% de taux d'occupation ce qui est quand même excessivement bas », explique Solenne Devys, directrice générale adjointe du groupe familial Okko Hotels, qui compte dix établissements dans différentes régions de France.
« Le cœur de la demande des hôteliers en France aujourd'hui, c'est de pouvoir rouvrir la restauration et les bars, ne serait-ce qu'en terrasse. On préfère avoir beaucoup de restrictions que d'être totalement empêchés de travailler », estime-t-elle.
« Il est très difficile pour la profession de se projeter, on a serré les dents jusque-là, on doit continuer à le faire », explique Roland Héguy, président de l'Umih, principal syndicat patronal de l'hôtellerie-restauration, qui voit le bout du tunnel avec une réouverture progressive en mai.
« Il y a un peu de découragement et on a vraiment besoin de visibilité, on a vraiment besoin de repartir vite, sinon on ne profitera pas bien du rebond », plaide pour sa part Dominique Marcel, PDG de la Compagnie des Alpes et président de l'Alliance France Tourisme.
Mais « dès lors que la vaccination aura atteint les chiffres qui sont prévus (...) nous aurons un rebond très fort », prédit-il, interrogé sur BFM Business.