La guerre des vaccins au cœur d'un sommet de l'UE

Le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca n'a livré aux Vingt-Sept que 30 des 120 millions de doses promises au 1er trimestre. (Photo, AFP)
Le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca n'a livré aux Vingt-Sept que 30 des 120 millions de doses promises au 1er trimestre. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 26 mars 2021

La guerre des vaccins au cœur d'un sommet de l'UE

  • Dominée par les problèmes d'approvisionnements en vaccins, le sommet européen par visioconférence a aussi été l'occasion d'un court échange avec le président Biden
  • L'Allemagne va classer la France en zone à haut risque ce qui devrait entraîner des restrictions à l'entrée sur son territoire

BRUXELLES : L’Union européenne veut « sa juste part des vaccins » anti-Covid: AstraZeneca ne sera pas autorisée à exporter ses doses produites dans l'UE tant qu'elle n'aura pas rattrapé ses retards de livraison aux Vingt-Sept, a averti jeudi la Commission à l'issue d'un sommet européen.

Par ailleurs, l'Allemagne va classer la France en zone à haut risque face à la pandémie de Covid, ce qui devrait entraîner des restrictions à l'entrée sur son territoire, a indiqué jeudi soir Angela Merkel.

Dominée par les problèmes d'approvisionnements en vaccins, cette réunion par visioconférence a aussi été l'occasion d'un court échange avec le président américain Joe Biden, symbole fort du renouveau de la relation transatlantique après les années Trump.

La rencontre s'est tenue dans un contexte politique tendu : la troisième vague de la pandémie a conduit plusieurs pays, dont la France et l'Allemagne, à durcir à nouveau les restrictions imposées à la population, et les campagnes de vaccination sont à la peine.

Critiquée pour sa stratégie et soucieuse d'améliorer l'accès aux précieux flacons, Bruxelles a décidé de muscler son jeu, notamment face au Royaume-Uni – premier destinataire des doses exportées par l'UE.

La Commission européenne a donc renforcé mercredi son mécanisme de contrôle des exportations, afin de les restreindre drastiquement vers les pays qui en produisent eux-mêmes ou dont la population est déjà largement vaccinée.

« Fin de la naïveté »

Le laboratoire suédo-britannique AstraZeneca, qui n'a livré aux Vingt-Sept que 30 des 120 millions de doses promises au 1er trimestre, « devra d'abord rattraper son retard » et honorer son contrat avant de pouvoir exporter hors du continent, a prévenu jeudi Ursula von der Leyen, la présidente de l'exécutif européen.

Le durcissement du mécanisme de contrôle a déclenché l'ire du Royaume-Uni – même si Londres et Bruxelles se sont engagés à trouver une solution et pourraient parvenir à un accord dès samedi, croit savoir le Premier ministre néerlandais Mark Rutte, dont le pays héberge une usine produisant le vaccin AstraZeneca et dont les débouchés sont au cœur des pourparlers.

L'UE a exporté depuis décembre quelque 21 millions de doses au Royaume-Uni, selon des chiffres de la Commission, soit les deux tiers de celles administrées à ce jour aux Britanniques, sans que les Vingt-Sept ne reçoivent en retour le moindre vaccin fabriqué dans les usines d'outre-Manche.

Le contrôle des exportations, un moyen de pression comparé à un « pistolet chargé sous la table » par une source européenne, est soutenu par plusieurs pays dont l'Italie et la France.

C'est « la fin de la naïveté », a jugé le président français Emmanuel Macron devant la presse. « Nous devons bloquer toutes les exportations aussi longtemps que des laboratoires ne respectent pas leurs engagements avec des Européens », a-t-il soutenu.

Certaines capitales sont beaucoup plus réservées : « Nous avons toute confiance dans l'action de la Commission » mais il est « souhaitable que les chaînes d'approvisionnement ne soient pas remises en question », dans un secteur pharmaceutique mondialisé, a déclaré la chancelière allemande Angela Merkel.

« Efforts intensifiés »

Une préoccupation partagée par la Belgique et les Pays-Bas, terres de nombreux sites de production pharmaceutique. « Je ne suis pas certain que cela nous aidera à obtenir davantage de vaccins », a commenté Mark Rutte, tout en reconnaissant l'utilité de cet outil.

Au total, l'UE a exporté depuis décembre quelque 77 millions de doses vers 33 pays, sans compter les contributions à l'initiative internationale Covax en faveur des pays défavorisés. Et 88 millions de doses sont restées dans l'UE pour approvisionner les Etats membres.

Les Vingt-Sept soulignent qu' « accélérer la production, les livraisons et le déploiement des vaccins reste essentiel et urgent pour surmonter la crise », et que « les efforts doivent être intensifiés » dans leur déclaration finale du sommet qui s'est achevé dans la nuit de jeudi.

L'UE s'est fixé comme objectif de vacciner 70% de sa population adulte d'ici la fin de l'été. Un objectif réaffirmé par Ursula von der Leyen, qui table sur une nette augmentation de la production comme des livraisons dans les prochaines semaines.

Autre question sensible, la répartition des vaccins au sein des Vingt-Sept : six pays, dont l'Autriche, qui s'estiment lésés, ont demandé une correction du système de répartition.

L'UE est prête à chercher une solution pour aider les pays les plus en difficulté comme la Bulgarie, la Lettonie et la Croatie, mais cela ne concerne pas l'Autriche, qui « n'est pas en mauvaise posture pour le moment » dans ses vaccinations, selon Mark Rutte.

« L'Amérique de retour »

Dans la soirée, le président américain Joe Biden s'est joint à la réunion virtuelle, peu après sa première conférence de presse à la Maison Blanche, lors de laquelle il a annoncé doubler son objectif de vaccinations contre la Covid-19 pour ses 100 premiers jours.

« L'Amérique est de retour. Nous sommes heureux que vous soyez de retour », a déclaré le président du Conseil Charles Michel en accueillant le responsable démocrate, appelant à « un nouvel état d'esprit transatlantique ».

La dernière participation d'un président américain à une réunion des chefs d'Etat et de gouvernement européens remonte à 2009, quand Barack Obama avait participé à un sommet UE-Etats-Unis.

« En se tenant côte à côte, l'UE et les Etats-Unis peuvent montrer que les démocraties sont les mieux à même de protéger leurs citoyens, promouvoir la dignité et servir la prospérité" », a tweeté Charles Michel.

 

 


L'Allemagne aux urnes, sous pression de l'extrême droite et de Trump

Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
Le chancelier allemand Olaf Scholz, candidat principal à la chancellerie du parti social-démocrate allemand SPD, vote pour les élections générales dans un bureau de vote à Potsdam, dans l'est de l'Allemagne, le 23 février 2025. (Photo par RALF HIRSCHBERGER / AFP)
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  • Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.
  • Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

BERLIN : Alors qu'elle est déstabilisée par les crises, l'Allemagne vote dimanche pour des élections législatives où l'opposition conservatrice part largement favorite après une campagne bousculée par le retour au pouvoir de Donald Trump et l'essor de l'extrême droite.

Surveillé dans le monde entier, ce scrutin va doter la première puissance européenne d'un nouveau parlement afin d'affronter les défis qui ébranlent son modèle de prospérité et inquiètent la population.

« Nous traversons une période très incertaine », constatait Daniel Hofmann, rencontré à la sortie d'un bureau de vote à Berlin.

Selon cet urbaniste de 62 ans, qui se dit préoccupé par la « sécurité européenne » sur fond de guerre en Ukraine, le pays a besoin d'un « changement, une transformation ».

Récession économique, menace de guerre commerciale avec Washington, remise en cause du lien transatlantique et du « parapluie » américain sur lequel comptait Berlin pour assurer sa sécurité : c'est le « destin » de l'Allemagne qui est en jeu, a déclaré samedi le chef de file des conservateurs Friedrich Merz.

Ce dernier semble très bien placé pour devenir le prochain chancelier et donner un coup de barre à droite dans le pays, après l'ère du social-démocrate Olaf Scholz. D'après les derniers sondages, il recueillerait environ 30 % des intentions de vote.

Visiblement détendu, souriant et serrant de nombreuses mains, le conservateur de 69 ans a voté à Arnsberg, dans sa commune du Haut-Sauerland, à l'ouest.

Son rival social-démocrate, visage plus fermé, a lui aussi glissé son bulletin dans l'urne, à Potsdam, à l'est de Berlin.

Les électeurs ont jusqu'à 18 heures (17 heures GMT) pour voter. Les premiers sondages sortie des urnes seront publiés dans la foulée.

Selon les sondages, l'extrême droite de l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) peut espérer obtenir au moins 20 % des voix, soit deux fois plus qu'en 2021 et un résultat record.

Le parti anti-migrant et pro-russe a imposé ses thèmes de campagne, suite à plusieurs attaques et attentats meurtriers perpétrés par des étrangers sur le territoire allemand.

L'AfD a également bénéficié du soutien appuyé de l'entourage de Donald Trump pendant des semaines.

Son conseiller Elon Musk, l'homme le plus riche du monde, n'a cessé de promouvoir la tête de liste du parti allemand, Alice Weidel, sur sa plateforme X.

« AfD ! » a encore posté M. Musk dans la nuit de samedi à dimanche, accompagnant son message de drapeaux allemands.
Les élections législatives anticipées ont lieu la veille du troisième anniversaire de l'invasion russe en Ukraine, un événement particulièrement marquant en Allemagne.

Le conflit a mis fin à l'approvisionnement en gaz russe du pays, qui a accueilli plus d'un million d'Ukrainiens. La perspective d'une paix négociée « dans le dos » de Kiev et des Européens inquiète tout autant.

Interrogé sur ces élections allemandes, le président américain a répondu avec désinvolture qu'il souhaitait « bonne chance » à l'allié historique des États-Unis, qui ont leurs « propres problèmes ».

Le discours de son vice-président JD Vance à Munich, dans lequel il exhortait les partis traditionnels allemands à mettre fin à leur refus de gouverner avec l'extrême droite, a creusé un peu plus le fossé entre Washington et Berlin.

Friedrich Merz souhaite que l'Allemagne puisse « assumer un rôle de leader » en Europe.

Dans le système parlementaire allemand, il pourrait s'écouler des semaines, voire des mois, avant qu'un nouveau gouvernement ne soit constitué.

Pour former une coalition, le bloc mené par les conservateurs CDU/CSU devrait se tourner vers le parti social-démocrate (SPD), excluant ainsi toute alliance avec l'AfD, avec laquelle il a entretenu des relations tendues durant la campagne, notamment sur les questions d'immigration.

Les sondages lui attribuent 15 % des voix. Ce score serait son pire résultat depuis l'après-guerre et signerait probablement la fin de la carrière politique d'Olaf Scholz. Mais auparavant, le chancelier devra assurer la transition.

« J'espère que la formation du gouvernement sera achevée d'ici Pâques », soit le 20 avril, veut croire Friedrich Merz.

Un objectif difficile à atteindre si les deux partis qui ont dominé la politique allemande depuis 1945 sont contraints, faute de majorité de députés à eux deux, de devoir trouver un troisième partenaire.

La fragmentation au Parlement dépendra notamment des résultats de petits partis et de leur capacité ou non à franchir le seuil minimum de 5 % des suffrages pour entrer au Bundestag.


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.