« Tueur »: Poutine se moque de Biden et promet de défendre les intérêts russes

Joe Biden et Vladimir Poutine. (Photo, AFP)
Joe Biden et Vladimir Poutine. (Photo, AFP)
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Publié le Vendredi 19 mars 2021

« Tueur »: Poutine se moque de Biden et promet de défendre les intérêts russes

  • « C'est celui qui le dit qui l'est ! », a lâché Poutine, « ce n'est pas juste une expression enfantine (...), nous voyons toujours en l'autre nos propres caractéristiques »
  • Cette passe d'armes verbale semble précipiter les relations américano-russes dans une nouvelle spirale de tensions

MOSCOU : Le président russe Vladimir Poutine s'est moqué jeudi de son homologue américain Joe Biden, qui l'avait qualifié de « tueur », avant de réaffirmer que la Russie défendra ses intérêts face aux Etats-Unis.

Cette passe d'armes verbale semble précipiter la relation américano-russe dans une nouvelle spirale de tensions alors que, malgré leurs multiples désaccords, les deux puissances disaient, depuis le changement d'administration américaine, vouloir coopérer sur des dossiers d'intérêts communs.

« C'est celui qui le dit qui l'est ! », a lâché M. Poutine selon des propos retransmis à la télévision russe : « Ce n'est pas juste une expression enfantine (...), nous voyons toujours en l'autre nos propres caractéristiques ».

La veille, Joe Biden avait répondu par l'affirmative à un journaliste lui demandait si le maître du Kremlin était « un tueur ». Des propos qu'il ne regrette pas, a indiqué jeudi sa porte-parole Jen Psaki.

« Nous défendrons nos propres intérêts et nous travaillerons avec (les Américains) aux conditions qui nous seront avantageuses », a insisté M. Poutine.

Dans la soirée, il est revenu sur ces échanges pour proposer à son homologue "une discussion en direct" diffusée en ligne ou à la télévision vendredi ou lundi.

« Cela serait intéressant pour le peuple russe, le peuple américain et pour beaucoup d'autres pays », a-t-il déclaré à la télévision. La Maison Blanche n'a pas répondu dans l'immédiat, Jen Psaki indiquant seulement que M. Biden voyage vendredi et est « très occupé ».

Au-delà de ces piques, Moscou a fait savoir que les remarques de M. Biden étaient inacceptables à ses yeux.  

Fait inédit depuis 1998, l'ambassadeur russe aux Etats-Unis a été rappelé pour des consultations sur les relations russo-américaines, plongées dans « l'impasse ».

Selon l'ambassade russe, les « déclarations irréfléchies de responsables américains risquent d'entraîner l'effondrement de relations déjà excessivement conflictuelles ».

« Prix à payer »

Seul signe jusqu'ici de désescalade, le département d'Etat américain a assuré qu'il ne prévoyait pas de rappeler son propre représentant à Moscou.

Dans son entretien mercredi à la chaîne ABC, M. Biden avait plus globalement tapé du poing sur la table face au dirigeant russe, disant vouloir lui faire « payer » l'ingérence dans les élections américaines de 2016 et 2020, que Moscou dément.

Ces propos ont été qualifiés mercredi par le président de la chambre basse du Parlement russe, Viatcheslav Volodine, d' « insulte » aux Russes et d' « attaque » contre son pays.

Réaction étrangère, le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas a salué le « langage très clair » des Etats-Unis à l'égard de la Russie tout en disant souhaiter « maintenir la fenêtre de dialogue ouverte avec Moscou », sur le désarmement ou le changement climatique. 

Les relations russo-américaines et plus généralement russo-occidentales sont délétères depuis des années : annexion de la Crimée, guerre en Ukraine, conflit en Syrie ou l'empoisonnement puis l'emprisonnement de l'opposant Alexeï Navalny...

Coopération naissante menacée

De multiples sanctions et contre-sanctions ont été adoptées en conséquence. Washington a annoncé mercredi encore qu'il étendait les restrictions d'exportation de produits sensibles vers la Russie, et menacé jeudi de sanctions « toutes les entités impliquées » dans le projet controversé de gazoduc Nord Stream 2 entre la Russie et l'Allemagne.

Le G7 a lui de nouveau dénoncé « l'occupation » de la Crimée. Jeudi, M. Poutine s'est justement adressé à Joe Biden durant des évènements célébrant l'annexion de la péninsule ukrainienne en mars 2014 : une visio-conférence avec des représentants locaux et un concert géant dans un stade.

Le président américain affiche depuis son arrivée à la Maison Blanche en janvier une grande fermeté à l'égard du Kremlin, contrastant avec la bienveillance souvent reprochée à son prédécesseur Donald Trump.

Mais la brusque dégradation des rapports russo-américains pourrait menacer la coopération naissante sur des dossiers d'intérêt commun, dont le meilleur exemple a encore été cité par M. Biden mercredi : le prolongement du traité de limitation des arsenaux nucléaires New Start.

D'autres sujets sur lesquels Russes et Américains tablent sur des compromis sont le nucléaire iranien, les pourparlers en Afghanistan ou encore la crise climatique, selon Moscou.

M. Biden a d'ailleurs lui aussi réaffirmé vouloir « travailler » avec les Russes « quand c'est dans notre intérêt commun ». Mais la Maison Blanche a également insisté que son locataire n'allait pas « taire ses inquiétudes au sujet de ce qu'il considère être des actes néfastes ».

 


Sécurité européenne, Ukraine : réunion des ministres européens de la Défense lundi

Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
Drapeaux de l'Union européenne et l'Ukraine (Photo i Stock)
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  • Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien
  • Cette réunion des ministres de la Défense s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

PARIS : Une douzaine de ministres européens de la Défense tiendront lundi une réunion par visioconférence afin de définir une réponse coordonnée à l'offensive diplomatique américano-russe concernant le dossier ukrainien et de renforcer la sécurité du Vieux continent, a-t-on appris dimanche auprès du ministère français des Armées.

Cette réunion, qui se tiendra dans l'après-midi à l'initiative de l'Estonie et de la France, rassemblera également les ministres de la Défense de Lituanie, de Lettonie, de Norvège, de Finlande, de Suède, du Danemark, des Pays-Bas, d'Allemagne, d'Italie, de Pologne et du Royaume-Uni, selon cette source.

À cette occasion, le ministre français des Armées, Sébastien Lecornu, se rendra à Tallinn aux côtés de son homologue estonien Hanno Pevkur, après avoir participé aux célébrations de la fête nationale estonienne.

La France déploie environ 350 militaires en Estonie dans le cadre d'un bataillon multinational de l'OTAN.

Cette réunion des ministres de la Défense, trois ans jour pour jour après l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie, s'inscrit dans le ballet diplomatique provoqué par l'annonce de pourparlers bilatéraux américano-russes visant à mettre fin au conflit.

La semaine passée, plusieurs chefs de gouvernement européens avaient été conviés à Paris par le président Emmanuel Macron. D'après un résumé obtenu de sources parlementaires, ils se seraient accordés sur la nécessité d'un « accord de paix durable s'appuyant sur des garanties de sécurité » pour Kiev, et auraient exprimé leur « disponibilité » à « augmenter leurs investissements » dans la défense.

Plusieurs pays membres avaient en revanche exprimé des réticences quant à l'envoi de troupes européennes en Ukraine, dans l'hypothèse d'un accord mettant fin aux hostilités.


Le ministre russe des Affaires étrangères effectue une visite en Turquie lundi

Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
Cette photo prise et diffusée par le ministère russe des Affaires étrangères montre le ministre russe des Affaires étrangères, Sergey Lavrov, donnant une conférence de presse après la réunion avec le secrétaire d'État américain, le conseiller à la sécurité nationale et l'envoyé pour le Moyen-Orient au palais de Diriyah à Riyad, le 18 février 2025. M. (Photo by Handout / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP)
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  • La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.
  • Le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

ISTAMBUL : Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, est attendu en Turquie lundi, jour du troisième anniversaire du déclenchement de l'invasion russe de l'Ukraine, ont annoncé dimanche des sources diplomatiques turques.

M. Lavrov doit s'entretenir à Ankara avec son homologue turc Hakan Fidan, ont indiqué ces mêmes sources, précisant que les deux hommes discuteraient notamment d'une solution au conflit ukrainien.

Dimanche, la porte-parole de la diplomatie russe, Maria Zakharova, a confirmé à l'agence Tass qu'une délégation menée par Sergueï Lavrov devait se rendre prochainement en Turquie pour y discuter d'« un large éventail de sujets ».

La Turquie, membre de l'OTAN, souhaite jouer un rôle de premier plan dans la fin des hostilités, comme elle avait tenté de le faire en mars 2022 en accueillant par deux fois des négociations directes entre Moscou et Kiev.

Mardi, en recevant son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky, le président turc Recep Tayyip Erdogan a de nouveau affirmé que son pays serait un « hôte idéal » pour des pourparlers sur l'Ukraine associant Moscou, Kiev et Washington.

Toutefois, ces dernières semaines, Moscou et Washington ont entamé un dialogue direct, alors que les relations se réchauffent entre Donald Trump et Vladimir Poutine.

Mardi, Russes et Américains se sont rencontrés en Arabie saoudite pour entamer le rétablissement de leurs relations, une réunion dénoncée par Volodymyr Zelensky qui redoute un accord sur l'Ukraine à leur insu.

M. Lavrov, dont la dernière visite en Turquie remonte à octobre, doit se rendre dans la foulée en Iran, un allié de la Russie.

La Turquie, qui est parvenue à maintenir ses liens avec Moscou et Kiev, fournit des drones de combat aux Ukrainiens mais n'a pas participé aux sanctions occidentales contre la Russie.

Ankara défend parallèlement l'intégrité territoriale de l'Ukraine et réclame la restitution de la Crimée du Sud, occupée par la Russie depuis 2014, au nom de la protection de la minorité tatare turcophone de cette péninsule.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.