VERSAILLES : La justice française a requis mercredi en appel deux ans de prison avec sursis contre un ancien ministre de la Justice burundais et son épouse, soupçonnés d'esclavage moderne pour avoir exploité un compatriote pendant plusieurs années chez eux en région parisienne.
Le couple avait été condamné en première instance à deux ans de prison avec sursis et 70 000 euros de dommages et intérêts notamment pour « traite d'être humain ».
Méthode S., cultivateur burundais, a expliqué à la cour d'appel de Versailles comment il avait été « forcé » à « travailler dans la peur » pendant dix ans dans la maison du couple, à Ville-d'Avray, au sud-ouest de Paris.
Il s'était retrouvé « coincé » en France après que le couple lui eut confisqué son passeport. Ménage, repassage, jardinage, il écopait de toutes les corvées... « Si je ne le faisais pas, ils ne me donnaient pas à manger », a-t-il soutenu.
En 2018, avertis par une commerçante, les forces de l'ordre pénètrent dans la villa de l'ex-ministre et ancien diplomate de l'Unesco Gabriel Mpozagara.
Ils y découvrent un homme « amaigri et manifestement apeuré » au sous-sol, dans une pièce insalubre.
M. Mpozagara a contesté avec véhémence mercredi ces accusations. Il a affirmé que Méthode S. avait dit au couple avoir perdu son passeport. « Il voulait rester en France et a réussi ! », s'est-il exclamé, l'accusant d'avoir « habilement » inventé une situation de vulnérabilité pour obtenir l'asile.
Une procédure visant à réclamer les salaires dus est engagée en parallèle devant les prud'hommes, aucun contrat de travail ni aucune trace tangible de rémunération n'ayant été établis.
Les époux Mpozagara sont également poursuivis pour travail dissimulé et aide à l'entrée et au séjour irréguliers.
Ils avaient déjà été condamnés en 2007 en France mais relaxés en appel dans un dossier similaire qui concernait deux jeunes nièces venues du Burundi.
Ces dernières avaient alors plaidé leur cause auprès de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), qui a condamné la France en octobre 2012 pour avoir failli dans sa lutte contre le travail forcé.
En 2013, le Parlement français a introduit dans le code pénal le travail forcé, la réduction en servitude et la réduction en esclavage.