PARIS : L'Afrique est le continent qui présente la plus grande diversité génétique, mais est la grande oubliée du séquençage du génome humain, relève un scientifique dans la revue Nature, qui défend un projet pour combler ce manque, au nom de la recherche médicale.
Il y a vingt ans, en février 2001, était publié le premier séquençage de l'ADN humain (« Projet génome humain »), vaste cartographie du code génétique, au terme de plus d'une décennie de recherche impliquant des centaines de scientifiques à travers le monde.
Cette première « lecture » complète d'un génome humain, qui porte l'ensemble de notre information génétique, a permis d'importantes avancées dans la compréhension du rôle des gènes dans les mécanismes fondamentaux de la vie, des maladies, et ouvert des perspectives de traitements médicaux.
Mais l'Afrique est le grand absent du projet : sur les génomes de plus d'un million de personnes qui ont été séquencés jusqu'ici, moins de 2% sont Africains ou d'ascendance africaine récente, relève le professeur de génétique Ambroise Wonkam, dans un commentaire publié cette semaine dans Nature.
Berceau de l'humanité, le continent africain est pourtant, de loin, celui qui présente le plus de diversité génétique et représente donc un potentiel immense en matière de recherche.
D'où le projet de séquencer le génome de 3 millions d'Africains, « sélectionnés à travers le continent, au sein de différentes régions et groupes ethnolinguistiques », développe le Pr Wonkam, de l'Université de sciences du Cap en Afrique du Sud.
Ce projet appelé « 3MAG » prendrait environ une décennie et coûterait 4,5 millions de dollars (3,7 millions d'euros) par an, financés essentiellement par les gouvernements africains, mais aussi par des organisations internationales, suggère le chercheur.
Le but est d'embrasser tout le spectre des variations génétiques du continent et de disposer d'une base de données génétiques plus représentative, « pour le bénéfice de tous les humains et pour assurer un accès équitable à la médecine génétique ».
Ces gènes si variés aideraient à mieux comprendre certaines mutations à l'origine de pathologies spécifiques, et de trouver de nouveaux traitements, défend le Pr Wonkam.
À titre d'exemple, il cite un variant du gène PCSK9, corrélé à une concentration trop importante de lipides dans le sang (à l'origine de maladies cardio-vasculaires), qui a pu être identifié parce qu'il était 200 fois plus répandu parmi la population afro-américaine que parmi la population européenne.