PARIS: Sur fond de tensions entre la France et l'Algérie, le Sénat a débattu mardi de l'accord migratoire de 1968 entre les deux pays, affichant les mêmes divisions qu'au sein de l'exécutif entre partisans d'une renégociation diplomatique et représentants d'une ligne dure prête à le dénoncer.
A la demande des Républicains, première force du Sénat, les groupes politiques de la chambre haute ont donné leur sentiment sur un dossier sensible au cœur de l'actualité, alors qu'Emmanuel Macron et différents ministres du gouvernement ont soufflé le chaud et le froid sur le sujet ces derniers jours.
Le président de la République a assuré qu'il était "favorable, non pas à dénoncer, mais à renégocier" l'accord de 1968 qui donne un statut particulier aux Algériens en France, ex-puissance coloniale, en matière de circulation, de séjour et d'emploi.
Or son Premier ministre François Bayrou était allé plus loin en menaçant de "dénoncer" cet accord si, dans six semaines, l'Algérie ne reprenait pas ses ressortissants en situation irrégulière.
Cette ligne, celle du ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau, a été défendue majoritairement au Sénat lors d'un débat sans vote, au sein du groupe LR et d'une partie de ses alliés centristes.
"Cet accord, c'est un traitement de faveur pour les Algériens", a regretté la sénatrice LR Muriel Jourda, dénonçant un "système totalement déséquilibré dans lequel nous, nous avons des dispositions qui sont favorables à l'Algérie".
"Rapprocher la situation algérienne du droit commun serait tout simplement l'expression de notre volonté souveraine", a renchéri Olivier Bitz (Horizons).
Ces deux sénateurs avaient cosigné ces derniers jours un rapport sénatorial intégrant cette proposition, qui avait suscité la vive opposition de la gauche.
L'accord migratoire est "indispensable, indissociable de l'histoire singulière qui lie notre pays à l'Algérie", a ainsi appuyé la socialiste Corinne Narassiguin, favorable à une renégociation "dans le cadre d'un accord exigeant et respectueux". "La population algérienne n'a pas à payer pour l'attitude de son gouvernement", a-t-elle ajouté, quand l'écologiste Akli Mellouli a reproché à la droite "les calculs politiciens du moment".
Le ministre délégué à l'Europe, Benjamin Haddad, a lui tenté de résumer la position du gouvernement: "une renégociation" mais des "rapports de force assumés" pour "défendre nos intérêts".
Ce débat fait également suite à la visite du président du Sénat Gérard Larcher au Sahara occidental, territoire où l'Algérie soutient les indépendantistes du Polisario contre le Maroc. Le Sénat algérien avait par la suite annoncé suspendre ses relations avec la Haute Assemblée française pour protester contre cette venue.