RIYAD : L’économie syrienne pourrait prendre des décennies pour se remettre de la guerre, selon un rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), à moins d’une accélération spectaculaire de la croissance.
Alors que le produit intérieur brut du pays s'est contracté à moins de la moitié de sa valeur de 2011 et que le chômage a triplé, le rapport suggère que la Syrie pourrait se redresser en une décennie si la croissance économique annuelle était multipliée par six.
L'évaluation, intitulée "L'impact du conflit en Syrie : une économie dévastée, une pauvreté omniprésente et un chemin difficile vers la reprise sociale et économique", souligne le lourd tribut économique et social de 14 années de guerre.
"Aux taux de croissance actuels, l'économie syrienne ne retrouvera pas son niveau de PIB d'avant le conflit avant 2080", indique le rapport. Pour parvenir à une reprise dans les 15 ans, il faudrait une croissance ambitieuse multipliée par dix, ce qui ramènerait le PIB au niveau où il aurait été sans le conflit.
Une crise qui s'aggrave
Selon le PNUD, neuf Syriens sur dix vivent aujourd'hui dans la pauvreté et un sur quatre est au chômage. L'économie a subi des pertes cumulées de PIB estimées à 800 milliards de dollars depuis le début de la guerre. Les infrastructures publiques se sont effondrées, exacerbant la crise et prolongeant l'instabilité.
Le secteur de la santé s'est effondré, avec un tiers des centres de santé endommagés et près de la moitié des services d'ambulance inopérants, ajoute le rapport. L'éducation a également été durement touchée, 40 à 50% des enfants âgés de 6 à 15 ans n'étant pas scolarisés.
Le logement et les services publics ont été lourdement endommagés, un tiers de toutes les unités ayant été touchées, laissant 5,7 millions de Syriens à la recherche d'un abri. Plus de la moitié des réseaux d'eau et d'égouts sont endommagés ou hors d'usage, ce qui affecte près de 14 millions de personnes. La production d'énergie a chuté de 80%, réduisant de plus de trois quarts la capacité du réseau national.
En conséquence, l'indice de développement humain de la Syrie est passé de 0,661 en 2010 à 0,557, tombant en dessous de son niveau de 1990, année où l'IDH a été enregistré pour la première fois.
La feuille de route du redressement
Le rapport du PNUD présente une feuille de route pour accélérer la reprise économique et rétablir la stabilité. "Au-delà de l'aide humanitaire immédiate, le redressement de la Syrie nécessite un investissement à long terme dans le développement afin d'instaurer une stabilité économique et sociale pour son peuple", a déclaré Achim Steiner, administrateur du PNUD.
"Le rétablissement de la productivité pour créer des emplois et lutter contre la pauvreté, la revitalisation de l'agriculture pour assurer la sécurité alimentaire et la reconstruction des infrastructures pour les services essentiels tels que les soins de santé, l'éducation et l'énergie sont les clés d'un avenir autonome, de la prospérité et de la paix", a-t-il affirmé.
Le rapport souligne la nécessité d'une vision nationale claire, de réformes institutionnelles et d'un meilleur accès au marché. Il calcule qu'au taux de croissance annuel actuel de 1,3% de la Syrie, entre 2018 et 2024, il faudrait 55 ans pour retrouver les niveaux de PIB d'avant le conflit. La reprise en 15 ans nécessite une croissance annuelle d'au moins 5%, tandis que le rattrapage d'un scénario sans conflit exige une croissance annuelle de près de 14%.
"L'avenir de la Syrie dépend d'une approche solide de reprise du développement", a déclaré Abdallah al-Dardari, administrateur adjoint du PNUD et directeur du bureau régional du PNUD pour les États arabes.
"Cela exige une stratégie globale portant sur la réforme de la gouvernance, la stabilisation économique, la revitalisation du secteur, la reconstruction des infrastructures et le renforcement des services sociaux. En mettant en œuvre ces réformes interconnectées, nous pouvons aider la Syrie à reprendre le contrôle de son avenir, à réduire sa dépendance à l'égard de l'aide extérieure et à ouvrir la voie à un avenir résilient et prospère pour tous en Syrie", a expliqué M. al-Dardari.
L'évaluation du PNUD s'inscrit dans le cadre d'un effort plus large de l'équipe de pays des Nations unies en Syrie visant à façonner les initiatives de redressement et de reconstruction précoces.
Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com