COPENHAGUE: En difficulté à l'école mais avide de compétition et passionné de cuisine, le chef danois Sebastian Holberg Svendsgaard espère remporter lundi à Lyon le Bocuse d'Or, titre suprême de ces "Jeux olympiques" de la gastronomie.
"Maintenant, c'est à moi de briller", dit à l'AFP le chef de 25 ans aux bras couverts de tatouages qui a fait partie des délégations danoises au concours depuis 2019 et a remporté l'édition européenne 2024, se qualifiant ainsi pour l'épreuve lyonnaise.
Natif d'une petite ville au sud-ouest de Copenhague, le benjamin du Bocuse d'Or 2025 s'ennuyait à l'école.
"Je n'étais pas bon du tout à l'école, j'étais dyslexique, j'avais besoin de beaucoup d'aide, il fallait que je trouve ma passion, ce à quoi j'étais bon", raconte-t-il souriant.
C'est en suivant son père, boucher et chasseur amateur, qu'il a le déclic.
"Quand mon père abattait un cerf, à la maison on essayait de le cuisiner d'une façon amusante. Je crois que j'avais 12 ans quand je me suis dit: +allez, faut que je devienne chef+".
S'ensuit une formation à l'école hôtelière à la sortie du collège. C'est lors d'un voyage d'études qu'il découvre la compétition, une révélation.
"Je me souviens de l'intensité (...) je me suis dit qu'un jour, il faudrait que je sois là", dit celui qui concourrait alors dans des compétitions étudiantes.
Pour cette édition du concours, remporté trois fois par un Danois, l'un des palmarès les plus importants de la compétition, l'accent est mis sur les "patrimoines gastronomiques".
"C'est difficile cette année car c'est assez fermé mais bien sûr on peut encore être créatif", rassure M. Holberg.
Sept mois de préparation
Pour lui, la force de la cuisine scandinave - la Norvège a remporté cinq fois le concours, juste derrière la France, victorieuse à huit reprises - réside dans son respect des saveurs.
"Par exemple, prenez une pomme, on va déterminer quel est le meilleur goût d'une pomme dans le respect de la pomme. Mais qu'est-ce qui rend la pomme meilleure ? Peut-être un peu de raifort, peut-être un peu de chou-rave. Nous essayons donc de conserver la même saveur, mais en lui redonnant de l'énergie", explique-t-il.
Pour le concours, qui dure 5h30, il assure avoir "repoussé les limites du possible".
"Nous allons préparer tous les plats le jour même, mais tout a été testé pendant sept mois. La nourriture est donc parfaite. Nous savons que lorsque nous faisons bouillir une tranche de pomme de terre, elle est coupée parfaitement à chaque fois sur trois millimètres", détaille le jeune homme.
"C'est intéressant de voir à quel point les Danois mettent les moyens. Ils ont compris la puissance et l'influence que la gastronomie pouvait conférer à un pays", note Christophe Parisot, ambassadeur de France au Danemark, qui souligne que la cuisine "véhicule une image très positive de la France".
Pour Francis Cardenau, président de la délégation danoise au Bocuse, la richesse de l'art culinaire danois vient de son adaptabilité.
"Les scandinaves sont très flexibles, malléables. Ce sont des vikings. Ils sont habitués à voyager", dit-il. "Ils vont voir dans les autres pays quelle est la boîte à outils qu'ils utilisent, ensuite voient s'il y a quelque chose qu'ils peuvent ramener dans leur boîte".
Et cette curiosité leur permet de bâtir une culture gastronomique dans un pays sans grande tradition culinaire.
"On est en train de construire la culture du pays", se félicite M. Cardenau.
Après le Bocuse, Sebastian Holberg s'est promis de consacrer plus de temps à la vie en dehors de la cuisine.
"Là, je fais la plus grande chose que je puisse faire pour moi et ma carrière professionnelle en tant que chef. Je dois être bon à Lyon!"
Ensuite s'ouvrira un nouveau chapitre, jamais très éloigné des cuisines.
"Le prochain rêve est de tout faire pour mon fils", confie-t-il.