Soupçons de financement libyen : l'ex-président français Nicolas Sarkozy jugé à Paris

L'ancien président français Nicolas Sarkozy assiste aux commémorations du 106e anniversaire de l'armistice du 11 novembre 1918, mettant fin à la Première Guerre mondiale, sur la place de l'Étoile, à Paris, le 11 novembre 2024. (AFP)
L'ancien président français Nicolas Sarkozy assiste aux commémorations du 106e anniversaire de l'armistice du 11 novembre 1918, mettant fin à la Première Guerre mondiale, sur la place de l'Étoile, à Paris, le 11 novembre 2024. (AFP)
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Publié le Vendredi 03 janvier 2025

Soupçons de financement libyen : l'ex-président français Nicolas Sarkozy jugé à Paris

  • L'ancien dirigeant est de retour au tribunal à partir de lundi aux côtés de trois anciens ministres
  • Dans cette affaire retentissante, l'ex-chef de l'État est soupçonné d'avoir noué, via ses proches, un "pacte de corruption" avec le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, afin qu'il finance sa campagne victorieuse de 2007

PARIS: L'ancien président français Nicolas Sarkozy a-t-il accepté l'argent d'un richissime dictateur pour financer la campagne qui l'a porté au sommet de l'État ? L'ancien dirigeant est de retour au tribunal à partir de lundi aux côtés de trois anciens ministres.

Dans cette affaire retentissante, l'ex-chef de l'État est soupçonné d'avoir noué, via ses proches, un "pacte de corruption" avec le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi, afin qu'il finance sa campagne victorieuse de 2007, en échange notamment d'un retour en grâce sur la scène internationale.

Une "fable", a toujours rétorqué Nicolas Sarkozy, qui "attend avec détermination ces quatre mois d'audience. Il va combattre la construction artificielle imaginée par l'accusation. Il n'y a aucun financement libyen de la campagne", a déclaré son avocat, Me Christophe Ingrain.

Jugé jusqu'au 10 avril pour corruption, recel de détournement de fonds publics, financement illégal de campagne et association de malfaiteurs, il encourt 10 ans de prison et 375.000 euros d'amende, ainsi qu'une privation des droits civiques (donc une inéligibilité) allant jusqu'à 5 ans.

Pour la première fois, l'ex-chef de l'État comparaîtra avec un casier judiciaire, trois semaines après avoir été définitivement condamné pour corruption dans une autre affaire à un an de prison ferme sous bracelet électronique.

- Rencontre à Tripoli -

Après dix ans d'investigations, deux juges ont estimé en août 2023 les charges suffisantes pour renvoyer devant la justice 12 hommes, dont les anciens ministres Claude Guéant, Brice Hortefeux et Eric Woerth.

Le tribunal va explorer un dossier foisonnant et se plonger dans une époque révolue, celle où la Libye était dirigée depuis près de 40 ans par Mouammar Kadhafi.

L'affaire débute pour l'accusation fin 2005, à Tripoli, lors d'une rencontre officiellement consacrée à l'immigration irrégulière entre le colonel Kadhafi et Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, qui se rêve candidat à l'élection présidentielle de 2007.

Un "pacte" est alors conclu, selon l'accusation qui s'appuie sur les déclarations de sept anciens dignitaires libyens, sur les déplacements discrets, avant et après, de Claude Guéant, directeur de la campagne présidentielle de M. Sarkozy, et Brice Hortefeux, fidèle de l'ex-président, mais aussi sur les carnets de l'ex-ministre libyen du Pétrole Choukri Ghanem, retrouvé noyé dans le Danube en 2012.

Les contreparties supposées ? D'abord une réhabilitation internationale : M. Kadhafi sera accueilli en grande pompe par Nicolas Sarkozy tout juste élu président lors d'une visite controversée à Paris, première depuis trois décennies.

Mais aussi la signature de gros contrats et un coup de main judiciaire à Abdallah Senoussi, directeur des renseignements libyens condamné à perpétuité en son absence en France pour son rôle dans l'attentat du DC-10 d'UTA en 1989, qui a coûté la vie à 170 personnes dont 54 Français. Une vingtaine de proches sont parties civiles au procès.

- Exfiltration -

Parmi les prévenus figurent deux hommes de l'ombre, rompus aux négociations internationales parallèles : l'homme d'affaires franco-algérien Alexandre Djouhri et le Franco-Libanais Ziad Takieddine - aujourd'hui en fuite au Liban.

Sur un compte de ce dernier ont été retrouvés trois virements des autorités libyennes pour 6 millions d'euros au total. Il a aussi décrit des "valises" remises à Claude Guéant, contenant des "grosses coupures".

Les investigations ont par ailleurs montré que des espèces d'origine inconnue avaient circulé au QG de campagne de Nicolas Sarkozy : Eric Woerth, trésorier à l'époque, rétorquera qu'il s'agissait de "dons anonymes" pour quelques milliers d'euros seulement.

Alexandre Djouhri devra entre autres s'expliquer sur la rocambolesque exfiltration hors de France de Béchir Saleh, l'ancien directeur de cabinet de M. Kadhafi, dans l'entre-deux-tours de la présidentielle de 2012.

"Claude Guéant démontrera qu'après plus de dix années d'instruction, aucune des infractions qui lui sont reprochées ne sont établies", a déclaré son avocat Me Philippe Bouchez El Ghozi, dénonçant "une somme d'assertions, d'hypothèses et autres approximations".

Nicolas Sarkozy conteste tout: pour lui, les accusations des Libyens ne sont qu'une "vengeance" s'expliquant par son soutien actif aux rebelles libyens au moment du printemps arabe qui fera chuter M. Kadhafi, tué en octobre 2011.

Sa défense récuse les potentielles contreparties et proteste qu'"aucune trace" de financement illégal n'a été retrouvée dans les comptes de la campagne, brocardant aussi les "16 versions" de Ziad Takieddine dans ce dossier.

L'une de ces versions, une rétractation temporaire en 2020, fait l'objet d'une autre enquête: une douzaine de personnes sont mises en cause pour avoir voulu innocenter Nicolas Sarkozy par des moyens frauduleux. L'ex-président est mis en examen, soupçonné d'avoir avalisé ces manœuvres.


Régularisation des travailleurs sans papiers : les métiers en tension actualisés « fin février »

Des manifestants brandissent une banderole sur laquelle est écrit "Postiers sans papiers, régularisation !" lors d'une manifestation en faveur de la régularisation des migrants clandestins et de leurs conditions de vie dans le cadre d'une campagne "antiracisme et solidarité" le jour de la journée internationale des migrants, à Paris, le 18 décembre 2021. (Photo AFP)
Des manifestants brandissent une banderole sur laquelle est écrit "Postiers sans papiers, régularisation !" lors d'une manifestation en faveur de la régularisation des migrants clandestins et de leurs conditions de vie dans le cadre d'une campagne "antiracisme et solidarité" le jour de la journée internationale des migrants, à Paris, le 18 décembre 2021. (Photo AFP)
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  • Ce texte, qui devrait être publié prochainement, doit durcir les critères d'admission qui ont permis, en 2023, à 34 724 personnes d'obtenir des papiers, selon les données du ministère de l'Intérieur.
  • Il doit remplacer la circulaire Valls de 2012, qui permet à un étranger en situation irrégulière de demander une « admission exceptionnelle au séjour » (AES) pour motif familial, économique ou étudiant.

PARIS : Prévue par la loi immigration promulguée début 2024, l'actualisation de la liste des métiers en tension dans lesquels les travailleurs sans papiers peuvent être régularisés devrait être publiée « fin février », a affirmé dimanche la ministre du Travail, Astrid Panosyan-Bouvet.

« Avec M. Retailleau, ministre de l'Intérieur, nous travaillons sur la question de la régularisation des sans-papiers, puisque nous devons signer ensemble une circulaire », a-t-elle déclaré lors d'un entretien sur France Inter, France Télévisions et Le Monde.

Ce texte, qui devrait être publié prochainement, doit durcir les critères d'admission qui ont permis, en 2023, à 34 724 personnes d'obtenir des papiers, selon les données du ministère de l'Intérieur.

Il doit remplacer la circulaire Valls de 2012, qui permet à un étranger en situation irrégulière de demander une « admission exceptionnelle au séjour » (AES) pour motif familial, économique ou étudiant. Le préfet est chargé de décider de l'acceptation ou non de la demande.

« Le problème de la circulaire Valls, c'est qu'elle obligeait les personnes en situation irrégulière et qui travaillaient à demander une autorisation à leur employeur », a expliqué la ministre.

« Ce qui serait une véritable nouveauté aujourd'hui, ce serait, grâce à la loi, de pouvoir demander spontanément une régularisation sans être à la merci de son employeur », a-t-elle poursuivi.

Les ministères du Travail et de l'Intérieur ont cartographié « région par région » les métiers en tension, « tous niveaux de qualification confondus », a expliqué Mme Panosyan-Bouvet, précisant qu'« ingénieurs et élèves en master » représentent « un tiers de l'immigration économique ».

Interrogée sur la date de publication de la liste des métiers concernés, elle a indiqué s'être « engagée auprès des partenaires sociaux » pour une publication « fin février ».

Quelques semaines après son arrivée place Beauvau, Bruno Retailleau, reconduit dans le gouvernement Bayrou, avait annoncé la réécriture de la circulaire Valls.

Cette dernière permet aux préfectures de régulariser chaque année environ 30 000 travailleurs sans papiers grâce à la délivrance d'une autorisation de travail ou pour motif familial.

Pour être admissible, un travailleur sans papiers doit vivre en France depuis au moins trois ans et justifier d'au moins deux ans de travail. Ils étaient 11 525 à en avoir bénéficié en 2023.

« Moi, ce que j'aime chez M. Retailleau, c'est qu'on soit d'accord ou pas, mais c'est une forme de colonne vertébrale », a déclaré Mme Panosyan-Bouvet au sujet de son collègue de Beauvau.

« Cela participe de la recherche du compromis. Nous pouvons avoir des histoires politiques différentes, mais nous pouvons aussi nous entendre sur le besoin d'ordre, de sécurité et de justice régalienne », a-t-elle justifié.


Paris exprime des « doutes » quant aux intentions de l'Algérie envers la France

Le nouveau ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, arrive à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 septembre 2024, pour une réunion avec les membres du nouveau cabinet et le Premier ministre. (Photo AFP)
Le nouveau ministre français de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, arrive à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 septembre 2024, pour une réunion avec les membres du nouveau cabinet et le Premier ministre. (Photo AFP)
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  • « Nous avons rédigé une feuille de route en 2022 (...), nous tenons à ce qu'elle puisse être suivie », a déclaré le ministre des Affaires étrangères lors d'un entretien sur la radio privée RTL.
  • « Mais nous observons des postures, des décisions de la part des autorités algériennes qui nous permettent de douter de la volonté des Algériens de respecter cette feuille de route. Il faut être deux pour tenir la feuille de route », a-t-il ajouté.

PARIS : Le ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot a émis dimanche des « doutes » sur la volonté d'Alger de respecter la feuille de route des relations bilatérales franco-algériennes, répétant aussi ses préoccupations concernant le cas de l'écrivain Boualem Sansal.

« Nous avons rédigé une feuille de route en 2022 (...), nous tenons à ce qu'elle puisse être suivie », a déclaré le ministre des Affaires étrangères lors d'un entretien sur la radio privée RTL.

« Mais nous observons des postures, des décisions de la part des autorités algériennes qui nous permettent de douter de la volonté des Algériens de respecter cette feuille de route. Il faut être deux pour tenir la feuille de route », a-t-il ajouté.

M. Barrot a déclaré être, à l'instar du président de la République, « très préoccupé par le fait que la demande de libération adressée par Boualem Sansal et ses avocats a été rejetée ».

Âgé de 75 ans, Boualem Sansal, critique du pouvoir algérien, est né d'un père d'origine marocaine et d'une mère algérienne. Il est incarcéré depuis la mi-novembre pour atteinte à la sûreté de l'État et se trouve dans une unité de soins depuis la mi-décembre.

« Je suis préoccupé par son état de santé et la France est très attachée à la liberté d'expression et à la liberté d'opinion. Les raisons qui ont pu conduire les autorités algériennes à l'incarcérer ne sont pas valables », a relevé Jean-Noël Barrot.

Abdelmadjid Tebboune, le président algérien, avait évoqué pour la première fois dimanche dernier l'arrestation de l'écrivain à la mi-novembre à Alger, le qualifiant d'"imposteur" envoyé par la France.

L'auteur de 2084: la fin du monde, naturalisé français en 2024, est poursuivi en vertu de l'article 87 bis du code pénal, qui sanctionne comme acte terroriste ou subversif tout acte visant la sûreté de l'État, l'intégrité du territoire, la stabilité et le fonctionnement normal des institutions.

« Nous souhaitons entretenir les meilleures relations avec l'Algérie (...) mais ce n'est pas le cas aujourd'hui », a regretté le ministre français.

Alger a retiré son ambassadeur à Paris fin juillet, en réponse au soutien appuyé apporté par le président français Emmanuel Macron aux propositions marocaines concernant le Sahara occidental, avant que ce dernier ne se rende à Rabat fin octobre.


Actes antisémites en France : les chiffres de 2024 devraient approcher ceux de 2023, déjà très élevés selon le ministre

La ministre déléguée à l’égalité des sexes et à la lutte contre les discriminations, Aurore Berge, quitte le gouvernement après la première réunion du cabinet depuis sa nomination le 24 décembre 2024 au palais présidentiel de l’Élysée à Paris, le 3 janvier 2025 (photo AFP)
La ministre déléguée à l’égalité des sexes et à la lutte contre les discriminations, Aurore Berge, quitte le gouvernement après la première réunion du cabinet depuis sa nomination le 24 décembre 2024 au palais présidentiel de l’Élysée à Paris, le 3 janvier 2025 (photo AFP)
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  • Selon Mme Bergé, « la plupart de ces faits ne se limitent pas au registre de l'insulte ; ce sont des atteintes directement aux personnes, soit parce qu'elles sont juives, soit parce qu'on le pense ».
  • Selon ses services, les atteintes à la personne représentent 63 % des faits recensés.

PARIS : Le nombre de faits d'antisémitisme recensés en France en 2024 devrait approcher celui comptabilisé l'année précédente, qui marquait une très forte hausse, a affirmé Aurore Bergé, ministre de la Lutte contre les discriminations. Elle a également souhaité que les faits commis à l'université et dans les grandes écoles soient pris en compte.

« L'augmentation des faits d'antisémitisme est assez spectaculaire (...), aujourd'hui, les chiffres que j'ai, au 30 novembre, nous faisaient état de près de 1 500 faits d'antisémitisme », a-t-elle déclaré dimanche dans un entretien à Europe 1/Les Échos/CNews, précisant que les chiffres globaux pour 2024 seront publiés par le ministère de l'Intérieur.

Selon Mme Bergé, « la plupart de ces faits ne se limitent pas au registre de l'insulte ; ce sont des atteintes directement aux personnes, soit parce qu'elles sont juives, soit parce qu'on le pense ».

Selon ses services, les atteintes à la personne représentent 63 % des faits recensés.

En 2023, selon les données du Crif (Conseil représentatif des institutions juives de France) communiquées en janvier, le nombre de faits antisémites recensés dans le pays avait été multiplié par quatre en un an, avec 1 676 cas.

« Le simple fait de défendre des positions claires, républicaines, de rappeler que le 7 octobre, ce sont d'abord des attentats terroristes perpétrés par le Hamas, de soutenir tout simplement les familles d'otages (...) fait de vous une cible potentielle d'attaques antisémites », a affirmé la ministre.

Mme Bergé a estimé que le « chantier prioritaire » était celui de « l'université ». Évoquant des « faits absolument intolérables et insupportables », « insultes », « tentatives d'intimidations », rapportés « quasiment au quotidien dans les universités ou dans des grandes écoles », elle a affirmé : « J'entends qu'ils puissent être comptabilisés. »

Évoquant des étudiants « empêchés d'aller en cours » ou « qui vont entendre scander des slogans absolument insupportables juste à côté d'eux », elle a pointé un « sentiment de solitude absolue » et un « manque de courage des autres étudiants ».

Elle a déploré qu'« après des attentats terribles le 7 octobre dernier, au lieu d'avoir une vague de soutien, on assiste à une vague d'antisémitisme ». Selon elle, « aujourd'hui, on dresse une cible dans le dos de chaque Français juif, car on le considère comme co-responsable de la situation humanitaire à Gaza ».

La France compte la première communauté juive d'Europe, avec environ 500 000 personnes, pour un total de 68 millions d'habitants.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, la population de confession ou de tradition musulmane sur le territoire métropolitain a très fortement augmenté, pour atteindre près de 9 % de la population.