SAIDA: Israël a intensifié ses frappes au Liban voisin, tuant mercredi un chef militaire du Fatah palestinien pour la première fois depuis le début de la guerre à Gaza, où près de 30 Palestiniens ont péri dans des bombardements israéliens selon la Défense civile.
Le Fatah du président Mahmoud Abbas a accusé Israël de vouloir, avec "l'assassinat" de Khalil Al-Maqdah, "embraser la région", à l'heure où le secrétaire d'Etat Antony Blinken a achevé une nouvelle tournée au Proche-Orient, sans percée annoncée pour un accord de trêve à Gaza.
Quelques heures après son départ, le président américain Joe Biden a "souligné l'urgence de finaliser un accord sur un cessez-le-feu et une libération des otages" dans la bande de Gaza pendant un échange avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, a fait savoir la Maison Blanche.
La conversation a aussi porté sur les "discussions à venir au Caire pour écarter les obstacles qui restent" avant d'arriver à un compromis entre Israël et le Hamas, selon la même source.
Déclenchée par une attaque sans précédent du mouvement islamiste palestinien Hamas contre Israël le 7 octobre, cette guerre a fait des dizaines de milliers de morts dans le territoire palestinien, où sont assiégés environ 2,4 millions d'habitants.
Allié du Hamas, le Hezbollah au Liban a ouvert le 8 octobre un front contre Israël à la frontière des deux pays, théâtre depuis d'un engrenage de violences entre le mouvement pro-iranien et l'armée israélienne.
Ces dernières 24 heures, l'armée a mené plusieurs raids au Liban, tuant six personnes, selon les autorités libanaises, dont Khalil Al-Maqdah, un chef de la branche armée du Fatah, dans une frappe contre sa voiture à Saïda (sud).
L'armée l'a accusé "d'agir pour le compte" de l'Iran, ennemi juré d'Israël, et d'implication dans des "attaques terroristes".
Le Hamas, allié de l'Iran, et le Fatah sont des rivaux depuis des décennies: les islamistes ont pris le pouvoir à Gaza en 2007 et le Fatah est basé en Cisjordanie, territoire palestinien occupé par Israël depuis 1967.
- "N'importe quel scénario" -
Le Hezbollah a lui affirmé avoir mené une dizaine d'attaques mercredi contre des positions militaires dans le nord d'Israël et sur le Golan occupé par Israël avec des roquettes et drones explosifs.
"Nous sommes prêts à faire face à n'importe quel scénario, tant sur le plan défensif qu'offensif", a déclaré M. Netanyahu lors d'une visite dans une base du nord d'Israël.
C'est dans ce contexte explosif que M. Blinken a achevé une nouvelle tournée régionale, en avertissant que la dernière proposition de compromis américaine pour une trêve à Gaza pourrait être celle de la "dernière chance".
Le secrétaire d'Etat, qui s'est rendu en Israël, en Egypte et au Qatar, avait affirmé qu'Israël avait accepté ce plan dont les détails n'ont pas été rendus publics et demandé au Hamas de faire de même.
Le mouvement islamiste a accusé les Etats-Unis d'avoir intégré au plan de "nouvelles conditions" d'Israël, incluant le maintien des troupes israéliennes à la frontière entre Gaza et l'Egypte.
Des médias israéliens ont aussi affirmé que M. Netanyahu voulait conserver le contrôle de cette frontière, mais M. Blinken a souligné l'opposition de son pays à une "occupation à long terme de Gaza par Israël".
- "Dans quel monde" -
Le Hamas exige l'application d'un plan annoncé le 31 mai par Joe Biden, qu'il avait accepté début juillet. Il prévoit d'abord une trêve de six semaines accompagnée d'un retrait israélien des zones densément peuplées de Gaza et de la libération d'otages enlevés le 7 octobre, puis, dans une deuxième phase, un retrait total israélien du territoire assiégé.
De nouvelles discussions sont en principe attendues en Egypte cette semaine entre Israël et les médiateurs américain, qatari et égyptien.
Benjamin Netanyahu a souvent dit vouloir poursuivre la guerre jusqu'à la destruction du Hamas, considéré comme terroriste par Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne.
Pour les Etats-Unis, un cessez-le-feu à Gaza aiderait aussi à éviter un embrasement au Moyen-Orient, après des menaces de l'Iran et de ses alliés de riposter à l'assassinat, imputé à Israël, du chef du Hamas Ismaïl Haniyeh le 31 juillet à Téhéran.
L'attaque des commandos du Hamas infiltrés depuis Gaza dans le sud d'Israël, a entraîné la mort de 1.199 personnes, en majorité des civils, selon un décompte de l'AFP à partir de données officielles israéliennes. Sur 251 personnes enlevées ce jour-là, 105 sont toujours retenues à Gaza, dont 34 déclarées mortes par l'armée.
Dans un kibboutz du sud d'Israël, des proches ont enterré l'un des six otages morts récupérés par l'armée dans la bande de Gaza.
"Dans quel monde les familles doivent-elles supplier, crier et pleurer pour le retour de leurs proches, vivants ou tués? Ramenez-les tous", a déclaré sa mère, Esther Buchshtab.
- "Sur nos têtes" -
En riposte à l'attaque du Hamas, Israël a lancé une offensive dévastatrice à Gaza qui a fait au moins 40.223 morts, selon le ministère de la Santé du gouvernement du Hamas qui ne détaille pas le nombre de civils et combattants tués. Mais d'après l'ONU, la plupart des morts sont des femmes et des mineurs.
Mercredi, au moins 27 Gazaouis ont péri dans des bombardements israéliens, dont trois dans une frappe sur une école abritant des déplacés à Gaza-ville (nord), selon la Défense civile. L'armée a accusé le Hamas de cacher une base dans l'école.
"Reste-il une once d'humanité (dans cette guerre)?" s'est interrogé sur X Philippe Lazzarini, chef de l'Unrwa, l'agence onusienne chargée des réfugiés palestiniens.
Selon l'ONU, les multiples ordres d'évacuation israéliens poussent les habitants du territoire palestinien en proie à un désastre humanitaire "vers des zones surpeuplées et dangereuses".
"Où sont censés aller les gens? Ils (Israël, ndlr) frappent partout. Il n'y a pas de résistance ici, les bombes tombent sur la tête des gens", lance à Deir al-Balah (centre) Oum Mina Abou Mughassib, déplacée déjà cinq fois.