Iran: duel entre un réformateur et un ultraconservateur pour la présidentielle

Des véhicules passent devant un panneau d'affichage montrant les visages des six candidats à la présidence (de gauche à droite) : Mohammad Bagher Ghalibaf, Amirhossein Ghazizadeh-Hashemi, Alireza Zakani, Saeed Jalili, Mostafa Pourmohammadi et Masoud Pezeshkianin, à Téhéran, capitale de l'Iran, le 29 juin 2024. (Photo par Atta Kenare AFP)
Des véhicules passent devant un panneau d'affichage montrant les visages des six candidats à la présidence (de gauche à droite) : Mohammad Bagher Ghalibaf, Amirhossein Ghazizadeh-Hashemi, Alireza Zakani, Saeed Jalili, Mostafa Pourmohammadi et Masoud Pezeshkianin, à Téhéran, capitale de l'Iran, le 29 juin 2024. (Photo par Atta Kenare AFP)
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Publié le Samedi 29 juin 2024

Iran: duel entre un réformateur et un ultraconservateur pour la présidentielle

  • Aucun des deux candidats n'ayant obtenu la majorité absolue, un second tour est nécessaire, pour la deuxième fois seulement en 14 élections présidentielles depuis 1979
  • La participation, à environ 40% selon les autorités, a été encore plus faible que pour la présidentielle de 2021 et pour les législatives de mars

TÉHÉRAN, Iran : La présidentielle en Iran se décidera le 5 juillet entre les candidats réformateur Massoud Pezeshkian et ultraconservateur Saïd Jalili, arrivés en tête d'un premier tour où la participation a été la plus faible depuis les débuts de la République islamique en 1979.

Quasiment inconnu lorsqu'il est entré dans la course, le député Massoud Pezeshkian a réalisé la performance d'obtenir 42,5% des suffrages vendredi.

Il a devancé Saïd Jalili, ancien négociateur du dossier nucléaire, crédité de 38,6% au premier tour de cette présidentielle organisée après la mort du président Ebrahim Raïssi dans un accident d'hélicoptère en mai.

Aucun des deux candidats n'ayant obtenu la majorité absolue, un second tour est nécessaire, pour la deuxième fois seulement en 14 élections présidentielles depuis 1979.

Les électeurs ont un choix clair à faire entre le réformateur qui, tout en se déclarant loyal à la République islamique, prône l'ouverture, notamment à l'international, et l'ultraconservateur défendant la poursuite d'une politique anti-occidentale et de fermeté sur les questions de société, comme le port du voile pour les femmes.

Saïd Jalili a reçu samedi le soutien du président conservateur du Parlement, Mohamad Baquer Ghalibaf, arrivé troisième avec 13,8% des voix.

«Je demande à toutes les forces révolutionnaires et à mes partisans» d'«essayer d'élire le candidat du front révolutionnaire», a-t-il déclaré. Deux autres candidats conservateurs, qui avaient abandonné avant le premier tour, ont également appelé à voter pour l'ultraconservateur.

Pour l'emporter, Massoud Pezeshkian devra compter sur une mobilisation des abstentionnistes décidés à faire barrage à Saïd Jalili.

Mais la tache s'avère ardue alors que la participation, à environ 40% selon les autorités, a été encore plus faible que pour la présidentielle de 2021 et pour les législatives de mars.

Les appels à voter avaient pourtant été lancés à la fois par la plus haute autorité de la République islamique, l'ayatollah Ali Khamenei, et par les figures des camps réformateurs et modérés.

De plus, les opérations de vote, qui devaient se terminer à 18H, ont été prolongées jusqu'à minuit.

Des opposants, notamment ceux de la diaspora, avaient appelé au boycott du scrutin.

- Des candidats très différents -

Le second tour sera suivi avec attention à l'étranger alors que l'Iran, poids-lourd du Moyen-Orient, est au cœur de plusieurs crises géopolitiques, de la guerre à Gaza au dossier nucléaire, dans lesquelles il s'oppose aux pays occidentaux.

L'élection aura toutefois un impact limité puisque le président a des pouvoirs restreints: il est chargé d'appliquer, à la tête du gouvernement, les grandes lignes politiques fixées par le guide suprême, qui est le chef de l'Etat.

Agé de 69 ans et chirurgien de profession, Massoud Pezeshkian est député de Tabriz, la grande ville du nord-ouest de l'Iran, et a une expérience gouvernementale limitée, qui se résume à un poste de ministre de la Santé de 2001 à 2005 dans le gouvernement réformateur de Mohammad Khatami.

Il s'est fait connaître pour son franc-parler, n'ayant pas hésité à critiquer le pouvoir lors du mouvement de protestation provoqué par la mort en détention de Mahsa Amini en septembre 2022.

Il prône en outre un réchauffement des relations entre l'Iran et les pays occidentaux, Etats-Unis en tête, afin de lever les sanctions qui affectent durement l'économie.

A contrario, Saïd Jalili, 58 ans, est partisan d'une politique inflexible face à l'Occident. Il l'a démontré durant les six années où il a mené les négociations sur le nucléaire iranien, entre 2007 et 2013.

Tout au long de sa carrière, M. Jalili a accédé à des postes clés au sein de la République islamique en ayant la confiance du guide suprême, l'ayatollah Khamenei.

Il est actuellement l'un de ses deux représentants au Conseil suprême de sécurité nationale, la plus haute instance sécuritaire du pays.

Sans publier les premiers résultats, la presse a pris position samedi matin selon son attachement politique. «Vive l'espoir», titrait le journal réformiste Sazandegi en publiant une photo de Massoud Pezeshkian, tandis que le quotidien gouvernemental Iran appelait à «voter pour l'autorité de l'Iran».

L'élection a été meurtrie par la mort de deux policiers dans l'attaque vendredi soir par des hommes armés d'un véhicule transportant des urnes dans la province troublée du Sistan-Baloutchistan (sud-est), selon l'agence de presse Tasnim.


La Turquie arrête 67 personnes après l'attaque de propriétés syriennes par des émeutiers

Des membres des forces spéciales de la police turque sécurisent la zone près du ministère de l'Intérieur, le 1er octobre 2023. (AFP)
Des membres des forces spéciales de la police turque sécurisent la zone près du ministère de l'Intérieur, le 1er octobre 2023. (AFP)
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  • Un groupe d'hommes a pris pour cible des entreprises et des propriétés syriennes à Kayseri dimanche soir, des vidéos diffusées sur les médias sociaux montrant une épicerie en train d'être incendiée.
  • La Turquie, qui accueille quelque 3,2 millions de réfugiés syriens, a été secouée à plusieurs reprises par des flambées de violence xénophobe ces dernières années.

ISTANBUL : La police turque détenait 67 personnes lundi après qu'une foule se soit déchaînée dans une ville du centre de l'Anatolie après qu'un Syrien ait été accusé d'avoir harcelé un enfant.

Un groupe d'hommes a pris pour cible des entreprises et des propriétés syriennes à Kayseri dimanche soir, des vidéos diffusées sur les médias sociaux montrant une épicerie en train d'être incendiée.

Le président Recep Tayyip Erdogan a condamné cette nouvelle flambée de violence à l'encontre de l'importante communauté de réfugiés syriens en Turquie.

"Peu importe qui ils sont, il est inacceptable de mettre le feu à des rues et à des maisons", a-t-il déclaré, avertissant que les discours de haine ne devaient pas être utilisés à des fins politiques.

Le ministre de l'intérieur, Ali Yerlikaya, a déclaré que le ressortissant syrien, identifié uniquement par ses initiales I.A., avait été arrêté par des citoyens turcs et remis à la police.

Il a déclaré que les Turcs qui s'étaient rassemblés dans la zone avaient agi "illégalement" et d'une manière "qui ne correspond pas à nos valeurs humaines", endommageant des maisons, des magasins et des voitures appartenant à des Syriens. Soixante-sept personnes ont été arrêtées après les attaques.

"La Turquie est un État de droit et d'ordre. Nos forces de sécurité poursuivent leur lutte contre tous les crimes et les criminels aujourd'hui, comme elles l'ont fait hier.

Dans l'une des vidéos, on entend un Turc crier : "Nous ne voulons plus de Syriens ! Nous ne voulons plus d'étrangers".

Les autorités locales ont appelé au calme et ont révélé que la victime était un ressortissant syrien âgé de cinq ans. La Turquie, qui accueille quelque 3,2 millions de réfugiés syriens, a été secouée à plusieurs reprises par des flambées de violence xénophobe ces dernières années, souvent déclenchées par des rumeurs se propageant sur les médias sociaux et les applications de messagerie instantanée.

En août 2021, des groupes d'hommes ont pris pour cible des commerces et des maisons occupés par des Syriens dans la capitale Ankara, après une rixe qui a coûté la vie à un jeune homme de 18 ans.

Le sort des réfugiés syriens est également un sujet brûlant dans la politique turque, les opposants d'Erdogan aux élections de l'année dernière ayant promis de les renvoyer en Syrie.

 


Iran: l'abstention, enjeu clé de la présidentielle

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  • Le second tour de la présidentielle en Iran s'annonce très indécis et son issue est liée à la mobilisation des partisans du "changement" promis par le candidat réformiste Massoud Pezeshkian opposé à l'ultraconservateur Saïd Jalili.
  • Les problèmes économiques et sociaux, liés notamment à une forte inflation, font partie des préoccupations majeures des électeurs, qui s'inquiètent aussi de l'implication de l'Iran dans les crises internationales.

TEHERAN : Le second tour de la présidentielle en Iran s'annonce très indécis et son issue est liée à la mobilisation des partisans du "changement" promis par le candidat réformiste Massoud Pezeshkian opposé à l'ultraconservateur Saïd Jalili, selon des experts.

"Jalili et Pezeshkian au coude à coude", a titré dimanche le quotidien gouvernemental Iran pour résumer l'incertitude avant le second tour du 5 juillet.

Le député réformateur Massoud Pezeshkian est retourné en campagne avec l'avantage d'être sorti en tête, avec 42,5% des suffrages, du premier tour de cette présidentielle provoquée par la mort du président Ebrahim Raïssi dans un accident d'hélicoptère en mai.

Il a devancé d'environ un million de voix Saïd Jalili, ancien négociateur du dossier nucléaire, qui a obtenu 38,6%.

Cet ultraconservateur, considéré comme proche du guide suprême, l'ayatollah Ali Khamenei, a reçu le soutien des autres candidats conservateurs, dont Mohammad Bagher Ghalibaf, le président du Parlement, arrivé troisième avec 13,8% des voix.

Au delà des logiques politiques, le second tour se jouera sur la capacité des deux camps, réformateurs et conservateur, à convaincre les abstentionnistes à se rendre dans les bureaux de vote.

Rien n'est sûr alors que la participation au premier tour vendredi a atteint, à 39,92%, son taux le plus bas en 45 ans de République islamique, loin des quelque 80% des présidentielles de la fin du XXe siècle.

Ce chiffre "montre clairement que les bases des réformistes comme des conservateurs ont considérablement diminué", souligne Ali Vaez, de l'International Crisis Group.

- "Facteur peur" -

Ce bond de l'abstention est un "véritable camouflet pour les dirigeants", alors que l'ayatollah Khamenei avait exhorté les Iraniens à voter, tout comme les principales figures réformistes et modérés.

Dans un tel climat de défiance, les partisans de Massoud Pezeshkian espèrent une mobilisation de ceux qui veulent des "changements fondamentaux", estime le commentateur politique Mohammad Reza Manafi.

Pour lui, les électeurs du député de 69 ans sont réalistes: "ils ne s'attendent pas à un miracle ni à des améliorations rapides, mais espèrent qu'il pourra progressivement empêcher la situation de s'aggraver".

"Le facteur peur lié à Saïd Jalili ne peut être négligé", avance Ali Vaez. "Une partie de ceux qui n'ont pas voté pourraient le faire au second tour, non pas parce qu'ils espèrent le meilleur, mais parce qu'ils craignent le pire".

Les problèmes économiques et sociaux, liés notamment à une forte inflation, font partie des préoccupations majeures des électeurs, qui s'inquiètent aussi de l'implication de l'Iran dans les crises internationales, comme la guerre à Gaza et le risque d'une extension au Liban.

A contrario, Saïd Jalili attire les Iraniens partisans d'une ligne très ferme face aux pays occidentaux, Etats-Unis en tête, sous le slogan "pas de compromis, pas de capitulation".

L'ultraconservateur occupe actuellement un rôle stratégique en représentant l'ayatollah Khamenei au Conseil suprême de sécurité nationale, la plus haute instance de sécurité en Iran.

Pour le journal réformateur Etemad, le second tour représente "la compétition finale entre partisans et opposants à l'accord" nucléaire signé en 2015 entre Téhéran et les grandes puissances, puis dénoncé trois ans plus tard par les Etats-Unis.

L'expert politique Mohammad Marandi estime cependant que Saïd Jalili n'est "peut-être pas aussi radical que ses opposants le décrivent".

Il prévoit que, quelque soit le nouveau président, l'Iran "continuera à développer de solides relations avec les pays du Sud, et examinera ce qui peut être fait sur le dossier nucléaire".

Il est toutefois certain que "M. Jalili abordera cette question avec plus de scepticisme" que M. Pezeshkian, partisan du dialogue avec Washington, selon Mohammad Marandi.

Quel qu'il soit, le futur élu n'aura pas les coudées franches.

Le président n'est en effet que le numéro deux de la République islamique, sous l'autorité du guide suprême qui fixe les grandes lignes politiques. Il doit aussi tenir compte de la forte influence des grandes institutions comme les Gardiens de la révolution, l'armée idéologique du pouvoir.


Biden tente de rassurer les donateurs après son débat calamiteux

Le président américain Joe Biden, la Première dame Jill Biden, leurs petites-filles Natalie (à droite) et Finnegan (2e à droite), descendent d'Air Force One à leur arrivée à l'aéroport régional de Hagerstown dans le Maryland, en route vers Camp David, le 29 juin 2024 (Photo, AFP).
Le président américain Joe Biden, la Première dame Jill Biden, leurs petites-filles Natalie (à droite) et Finnegan (2e à droite), descendent d'Air Force One à leur arrivée à l'aéroport régional de Hagerstown dans le Maryland, en route vers Camp David, le 29 juin 2024 (Photo, AFP).
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  • Aucune figure du Parti démocrate n'a encore rallié les voix l'appelant à se retirer
  • Tous deux se sont rendus samedi dans le New Jersey pour une collecte de fonds à laquelle le gouverneur démocrate de l'Etat, Phil Murphy, participait également

OCEANPORT: Le président américain Joe Biden a assisté samedi à trois collectes de fonds pour sa campagne et tenté de rassurer les donateurs les plus généreux, affirmant être en mesure de remporter l'élection présidentielle malgré sa prestation chaotique lors du débat face à son prédécesseur Donald Trump.

"Je n'ai pas passé une bonne soirée mais Trump non plus", a relaté le candidat démocrate lors d'une des collectes organisées dans les Etats de New York et du New Jersey, dans le nord-est des Etats-Unis.

"Je vous promets que nous allons remporter cette élection", a-t-il ajouté.

Jill Biden a défendu avec force son époux de 81 ans, face aux appels en faveur du retrait de sa candidature, en affirmant que "Joe n'est pas seulement la bonne personne pour le poste, il est la seule personne pour le poste".

Inquietude 

Tous deux se sont rendus samedi dans le New Jersey pour une collecte de fonds à laquelle le gouverneur démocrate de l'Etat, Phil Murphy, participait également.

"Je comprends votre inquiétude après le débat", a déclaré le président américain, lançant: "Je vais me battre davantage".

La candidature de Joe Biden fait l'objet de doutes, depuis sa prestation calamiteuse lors du débat face à l'ancien président Donald Trump, jeudi soir, entre mots avalés, phrases inachevées et expression hagarde, une contre-performance qui a ébranlé ses partisans et fait réagir les médias.

Dans un éditorial, le prestigieux quotidien américain New York Times a dépeint M. Biden comme étant "l'ombre d'un dirigeant", après avoir "échoué à son propre test" lors du duel télévisé.

"Le plus grand service public que pourrait rendre aujourd'hui M. Biden serait d'annoncer qu'il ne se représentera pas à l'élection", a écrit le comité de rédaction, ajoutant cependant qu'il a été "un président admirable".

Aucune figure du Parti démocrate n'a encore rallié les voix l'appelant à se retirer. Les anciens présidents Barack Obama et Bill Clinton ont redit vendredi leur soutien à Joe Biden.

Selon une note publique de Jennifer O'Malley Dillon, à la tête de l'équipe de campagne du candidat démocrate, un sondage interne après le débat a conclu que "les opinions des votants (n'avaient) pas changé".

Jennifer O'Malley Dillon affirme également que le soutien s'est accru pendant le débat et à son issue. Selon elle, 27 millions de dollars (25 millions d'euros) ont pu être levés vendredi soir.