ROMILLY-SUR-SEINE: Le Coq sportif, petit équipementier français, a du dépasser de "nombreuses difficultés" et grossir pour habiller la délégation des Bleus aux Jeux: au sein de son usine historique où la machine n'a pas remplacé l'humain, son dirigeant réaffirme que tout sera livré à temps.
Dans l'usine de la marque au gallinacé, située à Romilly-sur-Seine (Aube), on travaille dans une atmosphère feutrée. Quelques dizaines d'ouvriers et de modélistes sont à pied d'oeuvre, concentrés sur leurs tâches, qui demandent dextérité et concentration.
Dans ces locaux à taille humaine, rares sont ceux à travailler encore sur des tenues olympiques et paralympiques. Tout sera achevé d'ici fin juin, espère Ewa Samson, directrice textile du Coq sportif.
L'usine pourra alors entièrement se consacrer à ses prochaines pièces, dont la liste est déjà affichée au centre de la chaîne de production: ensembles pour le grand public, tenues de golf, maillot d'un club de football de 3e division.
Pendant de longs mois, les 147 salariés de l'usine, sur les 363 que compte le Coq sportif en France, ont pourtant vécu au rythme des JO.
C'est là qu'ont été conçues de A à Z les tenues que porteront la grande majorité des athlètes français lors des Jeux olympiques, du 26 juillet au 11 août, et paralympiques (28 août-8 septembre).
Dans l'usine ont également été fabriquées les tenues que les athlètes français arboreront sur les podiums, ainsi qu'une petite partie de celles qu'ils porteront en compétition.
Cent ans plus tard
Tenues d'entraînement, de représentation et une grande majorité des tenues de compétition ont été produites par des sous-traitants, au Maroc et au Portugal.
Au total, ce sont environ 150.000 pièces qui sont attendues. Un défi d'envergure pour la petite entreprise au chiffre d'affaires inférieur à 150 millions d'euros par an.
"Les concurrents contre qui on se bat ont tous 4, 5, 6 milliards minimum, je ne parle pas de Nike qui va faire 30 ou 40 milliards" de chiffre d'affaires, souligne auprès de l'AFP Marc-Henri Beausire, homme d'affaires suisse et actionnaire majoritaire du Coq sportif depuis 2005 via sa holding suisse Airesis.
Mais quand s'est présenté l'appel d'offres pour équiper la délégation française à Paris-2024, Marc-Henri Beausire n'a pas hésité: "cent ans plus tard, c'est le sens de l'histoire", dit-il, rappelant que son entreprise a habillé les équipes de France des Jeux de 1912 à ceux de 1972, y compris lors des derniers Jeux organisés à Paris, en 1924.
Certes, "nos difficultés ont été nombreuses", admet-il.
« On sera toujours là »
Le Coq sportif, qui a perdu 10 millions d'euros au premier semestre 2023 et a contracté l'an dernier un prêt garanti par l'Etat du même montant, reconnaît des retards dans le paiement de certains sous-traitants.
Le patron du comité olympique français (CNOSF), David Lappartient, a pointé il y a trois semaines "un petit peu de retard" dans la livraison des équipements aux athlètes français.
"Certaines fédérations sont inquiètes", assurait alors à l'AFP un haut responsable du mouvement olympique français, alors qu'un autre s'inquiétait, estimant du Coq Sportif "qu'ils n'avaient pas les reins solides".
Mais, à six semaines des Jeux, Marc-Henri Beausire se veut rassurant: "Tous les équipements vont être délivrés" à temps.
Et l'entrepreneur suisse souhaite candidater aux prochains appels d'offres visant à équiper les délégations françaises aux Jeux olympiques. "On est nés de ça, donc on sera toujours là, avec nos moyens", explique-t-il.
D'autant que, grâce au contrat des JO-2024, "on a acquis énormément de compétences" que le Coq sportif entend pérenniser, souligne Ewa Samson. A titre d'exemple, elle assure que l'équipe chargée des prototypes est ainsi passée de 4 à 10 membres depuis l'obtention du contrat JO.
Marc-Henri Beausire, lui, espère que l'exposition de sa marque lors des Jeux va permettre au Coq sportif de se développer à l'international, pour diversifier un chiffre d'affaires qui se fait actuellement de 80 à 90% en France. "On a changé de catégorie", assure-t-il, n'imaginant pas pouvoir être rétrogradé.