Européennes : l'extrême droite renforce son influence sans aplanir ses divergences

Des militants du RN fêtent l'annonce du président français de convoquer de nouvelles élections générales le 30 juin lors d'une soirée du Rassemblement national (RN), le dernier jour de l'élection du Parlement européen, au Pavillon Chesnaie du Roy à Paris, le 9 juin 2024. (Photo Julien De Rosa AFP)
Des militants du RN fêtent l'annonce du président français de convoquer de nouvelles élections générales le 30 juin lors d'une soirée du Rassemblement national (RN), le dernier jour de l'élection du Parlement européen, au Pavillon Chesnaie du Roy à Paris, le 9 juin 2024. (Photo Julien De Rosa AFP)
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Publié le Lundi 10 juin 2024

Européennes : l'extrême droite renforce son influence sans aplanir ses divergences

  • Le président Emmanuel Macron a dissous l'Assemblée nationale après la cuisante défaite de sa majorité face au RN et les grandes manœuvres européennes, qui doivent en particulier dessiner la future Commission, sont gelées jusqu'au résultat de ce vote
  • Les droites nationalistes et radicales entendent peser davantage encore sur les orientations de l'UE mais elles restent divisées en deux groupes (Identité et démocratie/ID, Conservateurs et réformistes européens/CRE)

ROME : Sous l'impulsion de Giorgia Meloni et de Marine Le Pen, les extrêmes droites ont enregistré une poussée aux élections européennes, sans cependant renverser la table ni aplanir les divergences qui les empêchent de faire front commun.

A la tête des premiers partis d'Italie et de France, deux grands pays fondateurs du projet européen, la dirigeante de Fratelli d'Italia (FDI) et la présidente du Rassemblement national (RN) devront attendre le résultat des législatives françaises du 7 juillet pour se compter et fixer leurs stratégies.

Le président Emmanuel Macron a dissous l'Assemblée nationale après la cuisante défaite de sa majorité face au RN et les grandes manœuvres européennes, qui doivent en particulier dessiner la future Commission, sont gelées jusqu'au résultat de ce vote.

Fortes de leur score en Italie et en France, en Allemagne, aux Pays-Bas et en Autriche ou en Grèce, les droites nationalistes et radicales entendent peser davantage encore sur les orientations de l'UE mais elles restent divisées en deux groupes (Identité et démocratie/ID, Conservateurs et réformistes européens/CRE) et les rapports de force n'ont pas été profondément modifiés.

Elles n'enregistrent en effet qu'une très modeste progression en sièges au Parlement européen, passant, selon les estimations, de 118 à 131 sur 720, alors que La «grande coalition» de la droite (PPE), des sociaux-démocrates (S&D) et des centristes (Renew Europe), devrait conserver une majorité de 404 sièges.

Elles devraient aussi compter sur une réserve d'une cinquantaine d'eurodéputés de même tendance mais n'appartenant pas aux groupes ID et CRE.

Pour autant, le PPE et ses alliés, affaiblis par la déroute électorale de la majorité présidentielle en France et le recul de la coalition d'Olaf Scholz en Allemagne, ne pourront faire l'économie de compromis ponctuels avec les droites souverainistes.

«Ils devront envoyer certainement des gestes aux électeurs européens sur des questions qui ont été portées par ces partis, notamment sur deux questions, l'immigration et le pacte vert», analyse Marc Lazar, professeur à Sciences-Po et à l'université Luiss de Rome. «On aura sur certains textes un renversement des alliances avec des votes convergents».

- Une ruche, deux reines -

Les eurodéputés Conservateurs et réformistes européens sont issus de Fratelli d'Italia, du parti espagnol Vox, du PiS polonais ou encore de Reconquête du Français Eric Zemmour.

Ceux d'Identité et Démocratie rassemble notamment les Italiens de la Ligue et les Français du Rassemblement national (RN). Ils ont récemment exclu la délégation allemande de l'AfD, à la suite de plusieurs scandales.

Ces deux groupes parlementaires ont des divergences importantes, comme sur le soutien à l'Ukraine face à la Russie et, en attendant le résultat des législatives françaises, Giorgia Meloni a une nette avance sur Marine Le Pen en termes d'influence sur les affaires européennes.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, candidate du PPE pour un deuxième mandat, a ouvert la porte à une alliance avec l'ECR de la cheffe du gouvernement italien, vue comme une partenaire apte au compromis, pro-européenne et pro-Ukraine, à la différence des membres d'ID, qualifiés de «marionnettes de Poutine».

Si Marine Le Pen a évoqué pendant la campagne l'idée d'«un grand groupe souverainiste», Mme Meloni se méfie des volontés «hégémoniques» françaises et privilégie des collaborations par dossier.

«Une ruche ne peut avoir deux reines» et Meloni ne veut pas risquer sa nouvelle «respectabilité» diplomatique en faisant alliance avec un groupe qui comptait il y a encore quelques semaines dans ses rangs l'infréquentable AfD, souligne Daniele Albertazzi, du groupe de réflexion «Centre for Britain and Europe».

«Elle veut être considérée comme une dirigeante moderne s'agissant de la politique étrangère, de l'Europe, des Etats-Unis (...). Je pense qu'elle veut continuer de jouer dans la cour des grands et se concentrer sur [ses compromis] avec le PPE», dit-il.

Mme Meloni tient aussi, poursuit l'analyste, à faire partie des dirigeants qui pourront revendiquer la victoire de leur candidat à la succession de Mme von der Leyen, y compris s'il s'agit de... Mme von der Leyen.

 

 


Guerre commerciale: Pékin dénonce les pays jouant l'"apaisement" à l'égard de Washington

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  • « L'apaisement n'apportera pas la paix et le compromis ne sera pas respecté », a estimé dans un communiqué un porte-parole du ministère du Commerce chinois.
  • « Si une telle situation se produisait, la Chine ne l'accepterait jamais et prendrait résolument des contre-mesures. »

PEKIN : La Chine a dénoncé lundi les pays qui pratiquent l'apaisement à l'égard des États-Unis dans les négociations commerciales sur les droits de douane américains, affirmant « s'opposer fermement » à tout accord nuisant à ses intérêts.

« L'apaisement n'apportera pas la paix et le compromis ne sera pas respecté », a estimé dans un communiqué un porte-parole du ministère du Commerce chinois, ajoutant que le pays « s'oppose fermement à ce qu'une quelconque partie parvienne à un accord au détriment de ses intérêts ».

« Si une telle situation se produisait, la Chine ne l'accepterait jamais et prendrait résolument des contre-mesures. »

Le président américain Donald Trump a imposé des droits de douane allant jusqu'à 145 % sur un grand nombre de produits importés de Chine, ce qui porte le total des taxes à 245 % dans certains cas, notamment pour les véhicules électriques. 

Pékin a répliqué en instaurant une taxe de 125 % sur les produits américains.

Les partenaires commerciaux des États-Unis sont frappés par une surtaxe plancher de 10 %, tandis que M. Trump a suspendu, le 9 avril, l'entrée en vigueur de droits de douane bien plus élevés pour la plupart des pays concernés, pour une période de 90 jours. Nombre de ces pays ont engagé des discussions avec Washington.

« Chercher ses propres intérêts égoïstes temporaires au détriment des intérêts des autres (...) finira par échouer des deux côtés et nuira aux autres », a averti le ministère du Commerce chinois dans son communiqué.


Au Canada, le Premier ministre Mark Carney est toujours en tête, alors qu'un vote décisif est prévu dans une semaine

Le Premier ministre canadien et leader libéral Mark Carney, aux côtés de son épouse Diana Fox Carney, s'exprime lors d'un meeting de campagne à Nepean, Ottawa, Ontario, Canada, le 20 avril 2025. (Photo par Dave Chan / AFP)
Le Premier ministre canadien et leader libéral Mark Carney, aux côtés de son épouse Diana Fox Carney, s'exprime lors d'un meeting de campagne à Nepean, Ottawa, Ontario, Canada, le 20 avril 2025. (Photo par Dave Chan / AFP)
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  • À une semaine du vote au Canada, l'espoir des conservateurs de revenir au pouvoir s'amenuise
  • Tous les sondages donnent les libéraux du Premier ministre Mark Carney vainqueurs.

MONTREAL : À une semaine du vote au Canada, l'espoir des conservateurs de revenir au pouvoir s'amenuise. En effet, tous les sondages donnent les libéraux du Premier ministre Mark Carney vainqueurs, ce dernier étant considéré comme plus crédible pour affronter Donald Trump.

Le scrutin du 28 avril se déroule dans un climat tendu dans ce pays du G7 de 41 millions d'habitants, toujours sous le choc des secousses provoquées par les tensions commerciales et les menaces d'annexion du président américain.

Signe que cette campagne est considérée comme exceptionnelle par de nombreux citoyens : les débats entre les candidats ont été très suivis et, vendredi, premier jour du vote par anticipation, deux millions d'électeurs ont déposé leur bulletin dans l'urne, un record.

Christine Bonenfant, à la sortie d'un bureau de vote de Montréal, explique à l'AFP qu'elle a choisi le parti qui, selon elle, « s'en sortira le mieux face à Donald Trump » et ramènera « la sérénité ». Elle « espère que beaucoup de gens iront voter » pour cette élection « importante ».

« C'est la première fois que j'hésite autant », explique Josée Fournier, venue elle aussi voter par anticipation. Le Canada a une « épée de Damoclès » au-dessus de la tête « à cause de la situation avec le voisin du Sud ». 

 Majorité

Deux partis ont largement dominé cette campagne : les libéraux du nouveau Premier ministre Mark Carney, qui a remplacé Justin Trudeau il y a un mois, et les conservateurs de Pierre Poilievre.

Selon les dernières projections, les libéraux pourraient remporter suffisamment de sièges pour obtenir une majorité, ce qu'ils avaient échoué à accomplir lors des deux précédents scrutins.

Ils sont crédités d'environ 44 % des votes, contre 38 % pour les conservateurs. Viennent ensuite le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche) avec 8 %, suivi par le Bloc québécois (parti indépendantiste) avec 5 %, et le parti vert avec 2 %.

Finalement, le profil international de Mark Carney et son expérience de banquier central semblent avoir davantage convaincu un électorat en quête de stabilité face aux défis économiques à venir, selon les enquêtes de sondage.

« Le chaos est entré dans nos vies. C'est une tragédie, mais c'est aussi une réalité. La question clé de cette élection est de savoir qui est le mieux placé pour s'opposer au président Trump ? », a-t-il déclaré pendant le week-end, depuis Niagara, à la frontière américaine, devant les chutes. 

Dans le bras de fer commercial qui oppose le Canada aux États-Unis, ce novice en politique a promis de maintenir des droits de douane sur les produits américains tant que les mesures de Washington resteraient en place.

Il a également annoncé son intention de développer le commerce intérieur en levant les barrières douanières entre les provinces et de chercher de nouveaux débouchés, notamment en Europe.

Il s'est également engagé à investir massivement dans la défense, l'énergie et le logement, et à réduire les impôts des ménages les plus modestes.

« En recentrant le parti libéral par rapport aux années Trudeau, il a sûrement réussi à convaincre une partie de ceux qui étaient prêts à voter conservateur », estime Félix Mathieu, politologue à l'université de Winnipeg.

Et puis, « son calme et son pragmatisme rassurent les gens ». « Lors des débats, il a donné l'impression d'être au-dessus de la mêlée ». 

« Besoin d'un changement » 

Âgé de 45 ans, Pierre Poilievre, son principal opposant, est un vétéran de la politique canadienne qu'il exerce depuis plus de 20 ans. Chef du Parti conservateur depuis 2022, cet adepte des formules choc a dominé les sondages pendant des mois et semblait promis au poste de Premier ministre.

« Après la décennie libérale, marquée par l'augmentation des coûts, de la criminalité et la chute de l'économie, les libéraux ne méritent pas un quatrième mandat », a-t-il lancé ce week-end lors d'un événement de campagne.

« Nous avons besoin d'un changement avec un nouveau gouvernement conservateur qui réduira les impôts, construira des logements, libérera nos ressources et renforcera notre économie. »

Son style et certaines de ses idées, proches de celles des républicains américains, lui ont aliéné une partie de l'électorat, notamment les femmes, selon les analystes.

Le vainqueur devrait être connu quelques heures après la clôture des bureaux de vote, le 28 avril. 


Ukraine : Zelensky accuse la Russie de violer le cessez-le-feu qu'elle a pourtant annoncé

Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • « Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques.
  • En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

KIEV : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé samedi la Russie de violer le cessez-le-feu que Vladimir Poutine venait d'annoncer pour Pâques et que l'Ukraine s'était engagée à respecter, ce qui constituerait la pause la plus significative dans les combats depuis le début du conflit il y a trois ans.

« Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques aujourd'hui, de 18 heures (15 heures GMT) à minuit entre dimanche et lundi (21 heures GMT dimanche). Je donne l'ordre de cesser toutes les hostilités pendant cette période », a déclaré le chef de l'État russe.

« Nous supposons que la partie ukrainienne suivra notre exemple », a-t-il ajouté, tout en demandant aux forces russes de se tenir prêtes à une « réponse immédiate et complète » en cas de « violations de la trêve ».

« Si la Russie est prête à vraiment s'engager, l'Ukraine fera de même », a écrit le président ukrainien sur X, ajoutant qu'il proposait « d'étendre le cessez-le-feu au-delà du 20 avril ».

En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

Le gouverneur de la région de Kherson, dans le sud de l'Ukraine, a pour sa part fait état d'attaques de drones russes au même moment.

« Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent », a déclaré samedi soir le chef d'état-major de l'armée ukrainienne. « Dans certaines zones de la ligne de front, l'artillerie russe continue d'être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés. »

« Poutine vient de faire des déclarations sur sa prétendue volonté de mettre fin aux hostilités. Nous savons que ses paroles ne sont pas dignes de confiance et nous examinerons les actes, pas les paroles », a mis en garde Andriy Sybiga, le ministre ukrainien des Affaires étrangères. 

Samedi, la Russie a par ailleurs annoncé avoir échangé 246 prisonniers de guerre ukrainiens contre le même nombre de prisonniers russes, ainsi que 31 blessés ukrainiens et 15 blessés russes.

Les Émirats arabes unis, médiateurs dans ce dossier, ont confirmé l'opération dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié samedi soir, saluant « le plus grand échange de prisonniers depuis le début de la guerre ».

La Pâques, l'une des plus importantes fêtes du calendrier chrétien qui commémore la résurrection du Christ, est célébrée cette année dimanche, à la même date par les catholiques et les orthodoxes.

Des tentatives d'instaurer un cessez-le-feu à cette occasion en Ukraine ont déjà eu lieu à deux reprises depuis le début du conflit en février 2022.

La trêve ordonnée samedi par M. Poutine intervient alors que les efforts de l'administration de Donald Trump pour trouver une issue au conflit en Ukraine semblent s'enliser ces derniers jours.

Par ailleurs, la Russie a revendiqué samedi avoir « libéré » 99,5 % de la région russe de Koursk, cible en août 2023 d'une offensive surprise des forces ukrainiennes.

Une telle progression replacerait à nouveau la totalité du front sur le sol ukrainien, ce qui renforcerait la confiance de la Russie.

À Moscou, Evgeniy Pavlov, 58 ans, a exprimé son scepticisme à l'égard de la trêve annoncée.

« Il ne faut pas donner de répit à l'Ukraine. Si nous insistons, cela signifie que nous devons aller jusqu'au bout », a-t-il dit à l'AFP.