Dans un village arménien, la crainte d'une nouvelle guerre avec l'Azerbaïdjan

Des villageois assistent à un rassemblement devant le conseil du village de Voskepar, dans le nord-est de l'Arménie, le 27 mars 2024. (AFP)
Des villageois assistent à un rassemblement devant le conseil du village de Voskepar, dans le nord-est de l'Arménie, le 27 mars 2024. (AFP)
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Publié le Jeudi 04 avril 2024

Dans un village arménien, la crainte d'une nouvelle guerre avec l'Azerbaïdjan

  • Selon un plan évoqué par M. Pachinian, Voskepar pourrait se retrouver isolé du reste du pays et certaines maisons du village pourraient même passer sous contrôle de Bakou
  • Bakou revendique huit villages détenus par l'Arménie et réclame la création d'un couloir terrestre à travers la région arménienne de Siounik

VOSKEPAR: Par la fenêtre, Ichkhan Aghbalian observe une foule agitée. Devant sa mairie de Voskepar, dans le nord-est de l'Arménie, des habitants s'inquiètent des revendications territoriales de l'Azerbaïdjan, à la fois voisin et ennemi juré.

Ces villageois se rassemblent quotidiennement pour partager leurs craintes depuis que le Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, a dit en mars être prêt à faire des concessions à l'Azerbaïdjan pour relancer des pourparlers de paix.

Selon un plan évoqué par M. Pachinian, Voskepar pourrait se retrouver isolé du reste du pays et certaines maisons du village pourraient même passer sous contrôle de Bakou.

"Les gens d'ici craignent de perdre leur territoire au profit de l'Azerbaïdjan et nos problèmes de sécurité ne seront pas résolus si cela se produit", explique le maire Ichkhan Aghbalian.

Dans la foule, Edgar Grigorian, 38 ans, abonde: "si les Azerbaïdjanais arrivent, notre petit village sera bloqué, coupé d'Erevan, pris dans une sorte de blocus."

Différends territoriaux

En septembre 2023, les troupes azerbaïdjanaises ont repris aux séparatistes arméniens la région du Haut-Karabakh, lors d'une offensive éclair qui a clos un conflit sanglant de trois décennies pour le contrôle de cette région montagneuse du Caucase.

Depuis, les Etats-Unis, l'Union européenne et la Russie ont tenté de jouer les médiateurs entre Nikol Pachinian et l'indéboulonnable président azerbaïdjanais, Ilham Aliev.

Les deux dirigeants clament régulièrement leur optimisme quant à la perspective d'un traité de paix réglant leurs disputes territoriales, mais les pourparlers ne montrent guère d'avancées concrètes.

Bakou revendique huit villages détenus par l'Arménie et réclame la création d'un couloir terrestre à travers la région arménienne de Siounik (Sud) afin de relier l'Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan, puis à la Turquie, son allié.

De son côté, Erevan demande l'enclave d'Artsvashen (Bashkend en azéri), située en territoire azerbaïdjanais et contrôlée par Bakou depuis les années 1990, ainsi que les zones conquises par l'Azerbaïdjan au cours des trois dernières années et qui se trouvent à l'intérieur des frontières arméniennes.

"Pour obtenir ce qui appartient légitimement à l'Arménie, nous devons être prêts à céder ce qui ne nous appartient pas légitimement", a déclaré mi-mars M. Pachinian, se disant prêt à accepter la demande de Bakou concernant à ce stade quatre villages frontaliers.

"Notre politique est d'empêcher la guerre", a-t-il résumé.

«Prêt à prendre les armes»

Difficile toutefois, pour les habitants de Voskepar, de s'imaginer un futur avec de nouvelles frontières.

Fridik Barsegian, 73 ans, vit en périphérie du village. Or, la nouvelle frontière, telle qu'envisagée, traverserait son jardin.

"Imaginez que vous vous réveillez un jour et que vous découvrez que votre maison se trouve soudain dans un autre pays !", peste-t-il.

"Je me tue depuis l'âge de 16 ans (...) pour construire cette maison", dit-il. "Nous resterons ici jusqu'à la fin."

Un sentiment partagé par d'autres habitants, comme Artiom Manoucharian, 61 ans.

"Si les Azerbaïdjanais veulent prendre le contrôle (de la zone), alors ils devront me traîner dehors. Je ne partirai pas de mon plein gré", lance-t-il. "Je resterai ici, sur ma terre."

L'édile Ichkhan Aghbalian résume la position de son village: "nous sommes des gens pacifiques, mais tout le monde ici est prêt à prendre les armes s'il le faut."

Certains habitants ont même déjà entamé une formation militaire avec un groupe d'anciens combattants.

L'entraînement "inclut des exercices tactiques et la maîtrise des armes à feu", explique à l'AFP l'un des représentants du groupe "Confrérie de combattants", Hrant Ter-Abrahamian.

"Les villageois ne peuvent évidemment pas se battre avec une armée régulière, mais s'ils sont armés et entraînés, c'est un moyen de dissuasion supplémentaire", estime-t-il.

«Guerre»

Dans la zone de Voskepar, quatre villages abandonnés, conquis par l'Arménie dans les années 1990, et revendiqués par l'Azerbaïdjan, représentent des positions militaires avantageuses et surplombent une route vers la Géorgie voisine -- vitale pour le commerce de l'Arménie -- ainsi qu'un gazoduc russe.

"Si les Azerbaïdjanais en prennent le contrôle, ils couperont notre route vers la Géorgie, notre bouée de sauvetage, notre lien (...) avec le monde extérieur", avertit le maire Ichkhan Aghbalian.

Selon lui, les chances d'un accord entre ses dirigeants et ceux de l'Azerbaïdjan restent néanmoins très maigres.

"Chaque fois que nous entendons parler Aliev, il est évident qu'il ne veut pas la paix. C'est pourquoi je crains que nous nous préparions à un nouveau conflit", observe-t-il.

En regardant son jardin, il prédit tristement: "le printemps est au coin de la rue, mais cette année, il n'apportera pas que des fleurs. Il va apporter une guerre."


Ukraine : Zelensky accuse la Russie de violer le cessez-le-feu qu'elle a pourtant annoncé

Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
Un couple passe devant des drapeaux et des portraits de soldats tombés au combat à un mémorial improvisé pour les combattants ukrainiens et étrangers tombés au combat, sur la place de l'Indépendance à Kiev, le 19 avril 2025,Le président russe Vladimir Poutine a annoncé samedi une trêve de Pâques dans le conflit en Ukraine, qui débutera ce soir et durera jusqu'au 20 avril 2025 à minuit. (Photo Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • « Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques.
  • En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

KIEV : Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a accusé samedi la Russie de violer le cessez-le-feu que Vladimir Poutine venait d'annoncer pour Pâques et que l'Ukraine s'était engagée à respecter, ce qui constituerait la pause la plus significative dans les combats depuis le début du conflit il y a trois ans.

« Guidée par des considérations humanitaires, la partie russe décrète une trêve de Pâques aujourd'hui, de 18 heures (15 heures GMT) à minuit entre dimanche et lundi (21 heures GMT dimanche). Je donne l'ordre de cesser toutes les hostilités pendant cette période », a déclaré le chef de l'État russe.

« Nous supposons que la partie ukrainienne suivra notre exemple », a-t-il ajouté, tout en demandant aux forces russes de se tenir prêtes à une « réponse immédiate et complète » en cas de « violations de la trêve ».

« Si la Russie est prête à vraiment s'engager, l'Ukraine fera de même », a écrit le président ukrainien sur X, ajoutant qu'il proposait « d'étendre le cessez-le-feu au-delà du 20 avril ».

En fin de journée, Volodymyr Zelensky a toutefois assuré sur X que « des assauts russes se poursuivaient dans plusieurs secteurs du front », tandis qu'une alerte antiaérienne retentissait à Kiev. 

Le gouverneur de la région de Kherson, dans le sud de l'Ukraine, a pour sa part fait état d'attaques de drones russes au même moment.

« Les combats se poursuivent et les attaques russes continuent », a déclaré samedi soir le chef d'état-major de l'armée ukrainienne. « Dans certaines zones de la ligne de front, l'artillerie russe continue d'être entendue, malgré la promesse de silence du dirigeant russe. Des drones russes sont utilisés. »

« Poutine vient de faire des déclarations sur sa prétendue volonté de mettre fin aux hostilités. Nous savons que ses paroles ne sont pas dignes de confiance et nous examinerons les actes, pas les paroles », a mis en garde Andriy Sybiga, le ministre ukrainien des Affaires étrangères. 

Samedi, la Russie a par ailleurs annoncé avoir échangé 246 prisonniers de guerre ukrainiens contre le même nombre de prisonniers russes, ainsi que 31 blessés ukrainiens et 15 blessés russes.

Les Émirats arabes unis, médiateurs dans ce dossier, ont confirmé l'opération dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères publié samedi soir, saluant « le plus grand échange de prisonniers depuis le début de la guerre ».

La Pâques, l'une des plus importantes fêtes du calendrier chrétien qui commémore la résurrection du Christ, est célébrée cette année dimanche, à la même date par les catholiques et les orthodoxes.

Des tentatives d'instaurer un cessez-le-feu à cette occasion en Ukraine ont déjà eu lieu à deux reprises depuis le début du conflit en février 2022.

La trêve ordonnée samedi par M. Poutine intervient alors que les efforts de l'administration de Donald Trump pour trouver une issue au conflit en Ukraine semblent s'enliser ces derniers jours.

Par ailleurs, la Russie a revendiqué samedi avoir « libéré » 99,5 % de la région russe de Koursk, cible en août 2023 d'une offensive surprise des forces ukrainiennes.

Une telle progression replacerait à nouveau la totalité du front sur le sol ukrainien, ce qui renforcerait la confiance de la Russie.

À Moscou, Evgeniy Pavlov, 58 ans, a exprimé son scepticisme à l'égard de la trêve annoncée.

« Il ne faut pas donner de répit à l'Ukraine. Si nous insistons, cela signifie que nous devons aller jusqu'au bout », a-t-il dit à l'AFP.


Canada: participation élevée pour le vote anticipé

Un bénévole installe des panneaux de signalisation pour diriger les gens vers un bureau de vote lors du vote anticipé à Montréal, Québec, Canada, le 19 avril 2025. (Photo par ANDREJ IVANOV / AFP)
Un bénévole installe des panneaux de signalisation pour diriger les gens vers un bureau de vote lors du vote anticipé à Montréal, Québec, Canada, le 19 avril 2025. (Photo par ANDREJ IVANOV / AFP)
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  • Selon les données préliminaires d'Elections Canada envoyées à l'AFP, plus de 2 millions de Canadiens ont voté dès le premier jour du vote par anticipation vendredi, soit une augmentation de 36 % par rapport au même jour lors des élections de 2021.
  • Le pays est confronté à une crise sans précédent avec son voisin américain.

MONTREAL : L'organisme chargé des élections au Canada a noté samedi une participation anticipée élevée, qui témoigne d'un « engouement pour le vote » à une semaine d'un scrutin législatif dominé par les tensions avec le voisin américain.

Selon les données préliminaires d'Elections Canada envoyées à l'AFP, plus de 2 millions de Canadiens ont voté dès le premier jour du vote par anticipation vendredi, soit une augmentation de 36 % par rapport au même jour lors des élections de 2021.

Les électeurs canadiens peuvent voter par anticipation jusqu'à lundi soir, avant le scrutin du 28 avril. Vendredi, de longues files d'attente se sont formées devant des bureaux de vote dans plusieurs grandes villes du pays et l'attente a duré jusqu'à deux heures, ont rapporté des superviseurs à l'AFP.

« C'est une élection particulière à cause de ce qui se passe avec les États-Unis », explique à l'AFP Josée Fournier, rencontrée devant un bureau de vote à Montréal samedi. 

Le pays est confronté à une crise sans précédent avec son voisin américain, et « c'est sérieux ce qui se passe », ajoute l'agent de ressources humaines de 60 ans, qui a hésité jusqu'au bout avant de faire son choix.

Raphaël Collomb, 35 ans, a suivi de très près la campagne en « lisant tout dans les médias et les programmes des candidats ». Son souhait ? « Que l'économie aille mieux et qu'il y ait plus de tranquillité pour tout le monde », dit-il à l'AFP.

Donald Trump multiplie les menaces douanières et les attaques contre la souveraineté du pays, ce qui incite de nombreux électeurs canadiens à voter pour le parti perçu comme le plus apte à faire face au président américain.

Selon les derniers sondages, les Libéraux du Premier ministre sortant Mark Carney recueillent environ 44 % des voix, contre 38 % pour les conservateurs. Viennent ensuite le Nouveau parti démocratique (NPD, gauche) avec 8 % des intentions de vote, puis le Bloc québécois (parti indépendantiste qui ne présente des candidats qu'au Québec) avec 5 %.  


Des milliers d'Américains manifestent contre Trump

Une personne crie à côté d'une image du président Donald Trump alors que des gens participent à une manifestation organisée pour « Protéger les migrants, protéger la planète » le 19 avril 2025 à New York. Les organisateurs de la manifestation nationale ont déclaré que les manifestations visaient à dénoncer la « prise de contrôle hostile du gouvernement » par l'administration Trump. Adam Gray//Getty Images via AFP)
Une personne crie à côté d'une image du président Donald Trump alors que des gens participent à une manifestation organisée pour « Protéger les migrants, protéger la planète » le 19 avril 2025 à New York. Les organisateurs de la manifestation nationale ont déclaré que les manifestations visaient à dénoncer la « prise de contrôle hostile du gouvernement » par l'administration Trump. Adam Gray//Getty Images via AFP)
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  • Des milliers d'Américains sont descendus dans la rue samedi à New York et dans d'autres grandes villes du pays pour une deuxième journée de mobilisation anti-Trump en l'espace de deux semaines.
  • « Les immigrés sont les bienvenus ici », criaient les manifestants réunis devant la bibliothèque de la plus grande ville des États-Unis, à quelques encablures de la célèbre Trump Tower du milliardaire. 

NEW-YORK : Des milliers d'Américains sont descendus dans la rue samedi à New York et dans d'autres grandes villes du pays pour une deuxième journée de mobilisation anti-Trump en l'espace de deux semaines.

« Pas de roi en Amérique » ou « Résistons à la tyrannie » pouvait-on lire sur des pancartes lors de la manifestation new-yorkaise, à côté d'images du président américain affublé d'une moustache à la Hitler.

« La démocratie court un grand danger », a déclaré à l'AFP Kathy Valy, 73 ans, une descendante de survivants de la Shoah, qui affirme que ce que ses parents lui ont raconté à propos de la montée du nazisme dans les années 1930 « est en train de se passer ici ».

« La différence avec les autres fascistes (...) c'est que Trump est trop bête pour être efficace et que son équipe est divisée », se rassurait-elle.

Les manifestants ont particulièrement dénoncé la politique anti-immigration de la Maison Blanche, alors que la Cour suprême a suspendu les expulsions d'immigrés sur la base d'une loi de 1798 sur « les ennemis étrangers ».

« Les immigrés sont les bienvenus ici », criaient les manifestants réunis devant la bibliothèque de la plus grande ville des États-Unis, à quelques encablures de la célèbre Trump Tower du milliardaire. 

Des contestataires se sont aussi rassemblés devant la Maison Blanche à Washington, bien qu'en nombre apparemment inférieur à la précédente mobilisation du samedi 5 avril, qui avait réuni des dizaines de milliers de personnes.

Benjamin Douglas, 41 ans, a dénoncé : « L'administration Trump mène un assaut contre l'État de droit et le fait qu'il faut empêcher l'État d'empiéter sur les droits des gens qui vivent ici, aux États-Unis. »

M. Douglas, un Américain d'origine palestinienne portant un keffieh sur la tête, tenait une pancarte en soutien à Mahmoud Khalil, un étudiant arrêté le mois dernier à New York et menacé d'expulsion pour avoir organisé des manifestations contre la guerre à Gaza.

L'administration républicaine s'en prend à des personnes « afin de faire monter la xénophobie et d'éroder des protections juridiques bien établies », accuse-t-il. 

Des rassemblements ont également été signalés à l'extérieur de concessions Tesla, la marque automobile propriété d'Elon Musk, milliardaire chargé par Donald Trump de réformer en profondeur la fonction publique.

La mobilisation était organisée par un groupement baptisé 50501, en référence aux 50 États du pays et à l'objectif de 50 manifestations. L'ensemble de ces actions doit aboutir à un mouvement d'opposition unique au milliardaire républicain.

Le mouvement constitue « une réponse décentralisée et rapide aux actes anti-démocratiques et illégaux de l'administration Trump et de ses alliés ploutocrates », explique-t-il sur son site internet.

Selon cette organisation, quelque 400 manifestations étaient prévues dans la journée et 50501 a appelé des millions de personnes à descendre dans la rue.

Toutefois, il est difficile d'obtenir des chiffres précis, de nombreux services de police refusant de fournir des estimations.