WASHINGTON : La prise de contrôle du Sénat américain par les démocrates, si elle se confirme, sera déterminante pour le président élu Joe Biden qui devrait pouvoir pousser ses réformes prioritaires et procéder sans entrave à des nominations.
Lors des deux élections sénatoriales partielles en Géorgie mardi, le candidat démocrate Raphael Warnock a battu la sénatrice républicaine Kelly Loeffler. L'autre démocrate en lice, Jon Ossoff, semblait lui aussi en position de créer la surprise face au républicain David Perdue.
Les démocrates auraient alors 50 sièges au Sénat, comme les républicains. Mais comme le prévoit la constitution, la future vice-présidente Kamala Harris aurait le pouvoir de départager les votes, et donc de faire pencher la balance du côté démocrate.
Atout pour les nominations
Parmi les attributions du Sénat américain figure l'examen et la confirmation par un vote, d'abord en commission, puis de tous les sénateurs, des plus hauts responsables de l'administration, des ministres, leurs adjoints, mais aussi des ambassadeurs, des responsables militaires et des directeurs des multiples agences fédérales qui constituent le gouvernement américain.
Le Sénat confirme aussi les juges, notamment ceux de la Cour Suprême, la plus haute juridiction du pays dont les décisions ont d'importantes répercussions sur des sujets de société, comme l'avortement ou le mariage homosexuel.
L'entourage du président élu a d'ailleurs fait connaître dès mercredi le choix de M. Biden pour le poste de ministre de la Justice: Merrick Garland, 68 ans, qui avait été le candidat de Barack Obama à la Cour suprême en 2016 mais dont la nomination avait été bloquée par les républicains.
Selon les médias américains, M. Biden hésitait à choisir M. Garland car il craignait de ne pouvoir faire approuver un juge progressiste pour le rempacer à la tête d'un important tribunal d'appel de Washington.
Les républicains ont fait savoir qu'ils s'opposeraient au moins à une nomination proposée jusqu'ici par Joe Biden, celle de Neera Tanden, une progressiste choisie pour diriger le Budget.
Des réformes plus rapidement
Le contrôle du Sénat par les démocrates, qui sont déjà majoritaires à la Chambre des représentants, donne à Joe Biden tous les leviers du pouvoirs pour la première fois depuis le début de la présidence de Barack Obama, une période pendant laquelle l'ancien président démocrate a fait approuver un programme majeur de sauvetage de l'économie après la crise financière de 2008, et l'assurance santé de millions d'Américains.
C'est d'ailleurs l'argument que les républicains ont brandi pendant la campagne sénatoriale de Géorgie, affirmant que les Etats-Unis allaient sombrer dans le socialisme.
Le chef des démocrates au Sénat, Chuck Schumer, n'a pas attendu les résultats officiels pour assurer mercredi dans un communiqué que Joe Biden et Kamala Harris pourraient compter sur lui pour «accomplir des réformes audacieuses».
Premières mesures possibles
Alors que la pandémie a fait bondir le chômage, M. Biden pourrait faire approuver une aide financière de 2 000 dollars pour chaque Américain, une mesure jusque-là bloquée par le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell.
Il pourrait aussi faire approuver un salaire minimum de 15 dollars de l'heure dans tout le pays, alléger la dette des étudiants et étendre, la grande réforme du système de santé Obamacare, que l'administration républicaine a tenté d'amoindrir, en créant notamment une nouvelle option de système d'assurance-santé géré par le secteur public, qui concurrencerait les assureurs privés.
Les modérés en arbitres
Même si les démocrates parviennent à contrôler le Sénat, ce sera avec une majorité tellement étroite que les sénateurs centristes, comme le démocrate Joe Manchin ou les républicains Susan Collins, Lisa Murkowski et Mitt Romney, vont jouer un rôle majeur.
M. Manchin, qui soutient largement les priorités démocrates en matière d'économie et de politique étrangères, risque de s'opposer à toute politique environnementale qui menacerait l'industrie minière de son Etat de Virginie-Occidentale.
En outre, la majorité des démocrates à la Chambre des représentants est la plus étroite depuis près d'un siècle.
Quoi qu'il en soit, le temps sera compté avant les prochaines élections législatives de 2022, que la plupart des présidents américains ont perdu pendant leur premier mandat.