CASABLANCA: Mais où est le vaccin? C’est la question que se posent les Marocains ces derniers jours. Le pays, l’un des premiers au monde à avoir annoncé, en grande pompe, au début du mois de novembre, le lancement imminent d’une vaste campagne de vaccination, tarde encore à vacciner sa population. Pourquoi un tel retard? Les lots de vaccin commandés n’auraient-ils pas encore été livrés? S’agit-il d’un problème d’organisation et de logistique? Si les Marocains s’impatientent, les médias restent sur leur faim. Les autorités sanitaires, pas plus que le gouvernement marocain, ne daignent apporter le moindre élément de réponse pour rassurer la population.
Le silence laisse place à des rumeurs
Et pourtant, le Maroc aurait tout verrouillé afin de faire de cette campagne de vaccination une réussite. Au mois de septembre 2020, le pays avait signé deux accords avec le laboratoire chinois Sinopharm et le britannique AstraZeneca pour une livraison de 65 millions de doses de vaccins. Cette dernière devait avoir lieu avant la fin de l’année 2020, l’objectif étant de vacciner vingt-cinq millions de Marocains de plus de 18 ans. Le ministre de la Santé, Khalid Aït Taleb, avait alors annoncé que la campagne de vaccination aurait lieu pendant le mois de décembre. Il a précisé par la suite qu’elle se déroulerait à partir de la mi-décembre.
Vingt jours plus tard, le silence laisse place à des rumeurs. Certains parlent d’un simple retard administratif: la commission marocaine d’enregistrement des médicaments n’aurait pas encore approuvé les vaccins d’AstraZeneca et de Sinopharm. L’autorisation de mise sur le marché marquera le début de la campagne de vaccination. Ces deux vaccins ont pourtant reçu l’approbation des autorités sanitaires de leurs pays respectifs, le 30 décembre pour le britannique AstraZeneca, et le lendemain pour le chinois Sinopharm.
Sinopharm remplacé par AstraZeneca lors de première phase?
Alors que le vaccin de Sinopharm était censé être administré lors de la première phase de la campagne de vaccination, on nous confie qu’il sera remplacé, dans un premier temps, par le vaccin d’AstraZeneca. La commission d’enregistrement des médicaments se pencherait en effet, en priorité, sur l’autorisation de ce vaccin. Le Maroc aurait-il des réserves au sujet du vaccin de Sinopharm, efficace à 79%, contre 94% pour celui d’AstraZeneca? Ou le Royaume aurait-il été lâché par Pékin, qui a initié une véritable diplomatie du vaccin ces derniers jours? «Des pays qui n’ont pas signé d’accord avec les Chinois et qui n’ont pas participé aux essais cliniques, contrairement au Maroc, ont déjà reçu leur premier lot de vaccins Sinopharm et ils ont débuté la vaccination de leur population. Les Chinois n’auraient-ils pas respecté leurs engagements vis-à-vis du Maroc? Le Maroc aurait-il perdu la bataille diplomatique du vaccin? On doit nous dire ce qu’il en est», exige une source proche du dossier.
Deux simulations, concluantes selon les autorités
Outre cette diplomatie du vaccin, la logistique pose un énorme défi au Maroc. Plusieurs voix se sont élevées pour mettre en doute la capacité du pays à réussir cette campagne, qui durera trois mois. Qu’il s’agisse de la distribution, du stockage ou des moyens humains nécessaires pour vacciner les vingt-cinq millions de Marocains, plusieurs observateurs contestent notamment les simulations effectuées à la fin de décembre par les autorités. En effet, le ministère de la Santé et celui de l’Intérieur ont opéré deux simulations relatives à la logistique, au stockage et au transport du vaccin, ainsi qu’à l’organisation des sites de vaccination (près de 2 800 au niveau national). Ces simulations ont été concluantes, affirment de leur côté les autorités marocaines.
Quoi qu’il en soit, ces effets d’annonce n’ont pas rassuré les millions de personnes qui, dans le Royaume, attendent impatiemment le début de la campagne de vaccination. Les Marocains ont été touchés de plein fouet par la crise sanitaire; ils attendent comme un salut cette vaccination qui tarde à voir le jour.