PARIS: Il faut "mettre en échec la Russie" sans lui "faire la guerre", a estimé mardi soir le ministre français des Affaires étrangères Stéphane Séjourné dans un entretien sur la chaîne de télévision française LCI.
"Nous vivons un point de bascule qui doit nous emmener à tenir tête à la Russie et il faut jouer le rapport de force pour protéger les Français, protéger les Européens", a-t-il estimé, ajoutant: "Notre conviction, c'est qu'il faut continuer à soutenir l'Ukraine", pays qui a été envahi par la Russie le 24 février 2022.
Le chef de la diplomatie française s'exprimait après les déclarations du président français Emmanuel Macron, qui a jugé plus tôt mardi à Prague "nécessaire" de bousculer les alliés de l'Ukraine, les exhortant à "ne pas être lâches" face à une Russie "inarrêtable".
M. Macron a aussi dit "assumer" ses récents propos controversés sur la possibilité d'envoyer des militaires occidentaux en Ukraine pour des missions d'appui, non combattantes. Sur la question d'un envoi de troupes, la grande majorité des pays occidentaux avaient déjà fait savoir qu'ils n'envisageaient absolument pas un tel scénario.
Interrogé sur ces déclarations d'Emmanuel Macron, M. Séjourné a affirmé : "Il faut mettre en échec la Russie sans faire la guerre à la Russie, c'est le cadre qu'a fixé le président de la République (...) et le cadre de la cobelligérance ne doit pas être atteint".
"Nous n'avons jamais franchi le stade de la cobelligérance et nous ne le franchirons pas", a-t-il ajouté.
"La France parle dans un cadre un peu différent, c'est une puissance dotée (de l'arme nucléaire, NDLR); je pense que la France peut parler d'égale à égale à la Russie", a poursuivi le ministre.
"Les messages qui ont été renvoyés par la France et par les Européens aussi, c'est un élément de rapport de force" avec la Russie, a-t-il estimé.
"Si l'Ukraine tombe, probablement la Russie aura des velléités, et si la Russie a des velléités, on a un risque de guerre ; il y aura des conséquences en cascade, et je ne donne pas trop cher de l'Union européenne (...), il faut éviter ce scénario", a-t-il lancé.
Evoquant sa rencontre mardi à Paris avec la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock, M. Séjourné a indiqué que son homologue avait "réitéré sa détermination à soutenir l'Ukraine dans la durée (...) et sa grande détermination à garantir l'unité des Européens".
"Elle est lucide sur les conséquences d'une victoire de la Russie en Ukraine, et je pense qu'on partage entre nous la question de la protection des Européens, qui passe aussi par un rapport de force, et elle en a conscience", a-t-il estimé.
Interrogé sur les élections européennes du 9 juin prochain, le ministre français a jugé qu'il y avait "un risque de +Frexit+ généralisé" après ces élections et "probablement un risque de blocage des institutions". "Et un blocage des institutions ça veut dire pas d'aide à l'Ukraine", a-t-il souligné.
Le chef de la diplomatie française a précisé qu'il serait "en fin de semaine" en tournée dans les Etats baltes pour "pouvoir échanger avec eux sur le contexte".