MARSEILLE: Un garçonnet a perdu la vie dans un incendie qui s'est déclaré dans une barre d'immeuble d'une cité paupérisée de Marseille, dans la nuit de lundi à mardi. Un drame "qui devait arriver et qui arrivera encore", selon un habitant.
Parti d'un appartement au deuxième étage d'une barre qui en compte sept, au Parc Kalliste, le sinistre a provoqué la mort d'un enfant de quatre ans (bien quatre ans) par asphyxie dans un autre appartement du 5e étage et blessé neuf autres occupants de ce logement dont cinq enfants pour certains dans un "état grave", a détaillé le parquet de Marseille dans un communiqué.
Mardi soir, 11 personnes étaient toujours hospitalisées dont l'occupant de l'appartement d'où est parti le sinistre, gravement brûlé, détaille le parquet qui a ouvert une enquête de flagrance pour homicide et blessures involontaires.
"C'est un drame pour Marseille qui perd un de ses enfants, c'est un jour de tristesse pour les Marseillais", a témoigné Benoît Payan, le maire divers gauche qui s'est déplacé dans cette cité des quartiers populaires du nord de Marseille gangrénée par les trafics de stupéfiants, le chômage et la pauvreté.
Selon le commandant des marins-pompiers de Marseille, arrivés sept minutes après l'alerte à 04h45, l'incendie a pu être éteint en une heure et "l'essentiel des victimes ont probablement été provoquées par les fumées épaisses et toxiques" dégagées par les flammes.
Il y avait énormément de fumées dans la cage d'escalier et l'appartement où a débuté l'incendie a été totalement détruit, a déclaré l'amiral Lionel Mathieu, précisant que huit habitants avaient dû être "extraits de leurs appartements par la grande échelle".
La cité Parc Kalliste, dont le bâtiment A touché par les flammes cette nuit, était à l'origine un ensemble de neuf barres d'immeubles, lors de l'achèvement de sa construction, en 1958, pour reloger les Français revenus d'Indochine. Mais deux de ces barres, la B et la H ont été démolies depuis, à la fin des années 2010, et deux autres devraient bientôt l'être (la G et la I).
Squatteurs et marchands de sommeil
Très dégradée, largement squattée, cette cité est l'une des plus pauvres de Marseille.
"Ca devait arriver et ça arrivera encore", dénonçait mardi matin un habitant de la cité, Mohamed Yahia-Berrouiguet, professeur de mathématiques à la retraite, décrivant auprès de l'AFP une copropriété privée à la dérive, avec des appartements squattés pouvant accueillir jusqu'à 20 personnes et des T5 "qui se louent jusqu'à 900 euros par des marchands de sommeil".
"Personne ne fait rien pour ce quartier, il n'y a plus rien, même les associations ne sont plus là", s'indignait l'ancien enseignant: "On a fait partir les gens mais les Nigérians reviennent et cassent, mais c'est normal, ils n'ont nulle part où aller".
"Le bâtiment derrière celui où s'est déclaré l'incendie était entièrement squatté (NDLR: le B), donc quand il a été détruit, les squatteurs se sont répartis dans les autres immeubles. Il y a beaucoup de marchands de sommeil ici", a confirmé sur place le député LFI de la circonscription, Sébastien Delogu, en espérant "que l'Etat apportera l'argent pour que la mairie puisse racheter des appartements et les requalifier".
En août 2021, un incendie, probablement d'origine criminelle, avait touché un immeuble en partie squatté, dans la cité HLM des Flamants, également dans les quartiers nord de Marseille, faisant trois morts, de nationalité nigériane.
En juin, Emmanuel Macron avait annoncé un plan de sauvetage exceptionnel visant quatre copropriétés dégradées de Marseille du type de Parc Kalliste.
Avec 40 000 logements considérés comme des taudis, soit 10% du parc immobilier, et autant de personnes en attente de logements sociaux, la deuxième ville de France souffre d'un grave problème de logements insalubres.
"Il y a des branchements électriques sauvages, les compteurs sont piratés", décrivait mardi Patrick, propriétaire depuis 11 ans à Parc Kalliste: "Certains se branchent directement sur le compteur général, ou même parfois sur l'ascenseur, il y a parfois quinze branchements par prise électrique".
"Ici il n'y a aucune loi, les enfants sont abandonnés", regrette M. Yahia-Berrouiguet: "Tout ce qu'ils ont c'est le soleil, et parfois un ballon".