PARIS: Le monde pourrait bientôt voir son premier «trillionnaire» – c’est-à-dire une personne qui possède un millier de milliards de dollars – d’ici à dix ans, selon un rapport qu’a publié l'organisation de lutte contre la pauvreté Oxfam International dans la cadre de son évaluation annuelle des inégalités mondiales, qui coïncide avec le rassemblement des élites politiques et économiques à Davos.
Alors que l'éradication de la pauvreté est estimée à plus de deux cents ans, la richesse des plus riches pourrait atteindre des sommets sans précédent dans la prochaine décennie.
Une «décennie de division»
Le directeur exécutif par intérim d'Oxfam, Amitabh Behar, indique que le rapport montre que le monde est entré dans une «décennie de division». La montée des milliardaires, apparue pour la première fois en 1916, a déjà suscité des inquiétudes relatives à une exploitation systématique qui se cacherait derrière l’écart de richesse croissant. Certains ont soutenu qu’il n’existe pas de «bons» milliardaires. Au XXe siècle, John D. Rockefeller, de la Standard Oil, est généralement considéré comme le premier milliardaire du monde.
Le rapport annuel d'Oxfam, intitulé «Inequality Inc.», met en relief les inégalités mondiales tout en soulignant la disparité croissante entre les ultrariches et le reste de la société. Les dix personnes les plus riches ont vu leur fortune collective augmenter d'environ un demi-milliard de dollars au cours de la dernière année.
Les cinq personnes les plus riches du monde – le Sud-Africain Elon Musk, PDG de Tesla, Bernard Arnault et sa famille, de la société de luxe LVMH, Jeff Bezos, fondateur d'Amazon, Larry Ellison, fondateur d'Oracle, et Warren Buffett, gourou de l'investissement – ont vu leur richesse augmenter de 114% depuis 2020, ce qui équivaut à un salaire horaire de 14 millions de dollars par heure (1 dollar = 0,92 euro).
La pandémie de Covid-19 a agi comme un catalyseur, «aggravant» les inégalités, selon Oxfam. «Les cinq premiers milliardaires ont doublé leur richesse. D'un autre côté, près de 5 milliards de personnes se sont appauvries», précise Amitabh Behar lors d'une interview à Davos, en Suisse, lors du Forum économique mondial. Le rapport souligne la nécessité d'une «nouvelle ère d'action publique» pour réduire l'écart entre les personnes ordinaires et les ultrariches.
Oxfam appelle à des mesures concrètes, dont la rupture des monopoles, la réforme fiscale et le renforcement du secteur public face au pouvoir des entreprises. Le rapport indique également que la démocratisation des structures corporatives pourrait considérablement réduire l'inégalité, par exemple en favorisant la propriété des employés.
Pour Amitabh Behar, «aucune entreprise ou individu ne devrait avoir autant de pouvoir sur nos économies et nos vies».
Oxfam met en garde contre une disparité croissante alimentée par le pouvoir des entreprises. Amitabh Behar affirme qu’il est urgent qu’une action collective rétablisse l'équilibre entre les ultrariches et le reste de la société. Il estime que le fossé s'est «creusé» depuis la pandémie de coronavirus.