Des éleveurs s'organisent pour abattre leurs bêtes à la ferme plutôt qu'à la chaîne

Soumis à la double souffrance du stress et de l’abattage, les animaux d’élevage échapperont ils aux abattoirs industriels ? (Jeff Pachoud/AFP)
Soumis à la double souffrance du stress et de l’abattage, les animaux d’élevage échapperont ils aux abattoirs industriels ? (Jeff Pachoud/AFP)
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Publié le Vendredi 31 juillet 2020

Des éleveurs s'organisent pour abattre leurs bêtes à la ferme plutôt qu'à la chaîne

  • Il s’agit en priorité d’éviter aux animaux le stress d'être arrachés de leur environnement et des transports en bétaillères qui s'allongent à mesure que le nombre d'abattoirs se réduit
  • "C'est vraiment important de réduire les transports et manipulations qui provoquent stress et souffrance", insiste une militante pour le bien-être des animaux d'élevage

PARIS : De la Normandie à la Provence, des éleveurs ferraillent pour abattre leurs bêtes à la ferme plutôt que dans un abattoir et s'assurer qu'elles soient "respectées jusqu'au bout". Le principe est accepté par les autorités mais la mise en route patine.

Leur volonté : éviter aux animaux le stress d'être arrachés de leur environnement et des transports en bétaillères qui s'allongent à mesure que le nombre d'abattoirs se réduit, une centaine d'établissements ayant disparu depuis le début des années 2000.

Il s'agit aussi de s'assurer que l'animal est "respecté jusqu'au bout", selon les mots de l'éleveur de Loire-Atlantique Guylain Pageot, qui évoque le "choc" causé par les images d'animaux malmenés dans des abattoirs, diffusées par l'association L214.

"Ces violences qu'on fait aux animaux, on les fait aux éleveurs et aux consommateurs", tranche Emilie Jeannin depuis sa ferme de Bourgogne où elle élève 230 bovins avec son frère. Elle a choisi d'amener elle-même ses charolaises à l'abattoir dans un van attelé à son véhicule. Sans pour autant être rassurée sur la suite : "J'ai une boule au ventre à chaque fois. Le bouvier (qui les réceptionne) peut être irréprochable, mais on n'est pas à l'abri que le bovin croise des cochons qui crient très fort et le stressent", décrit-elle. "On ne peut plus considérer qu'il n'est pas possible de faire autrement", juge cette éleveuse, membre de la Confédération paysanne, qui a découvert en 2016 en Suède un camion-abattoir qu'elle veut importer en France. Son projet : un attelage de quatre remorques, dont deux réfrigérées, qui va de ferme en ferme. Des professionnels y tuent et mettent en carcasse - cuir et viscères sont retirés - les animaux qui seront commercialisés sous la marque Le Boeuf éthique.

"Je me suis dit que soit je mettais cet abattoir en place, soit j'arrêtais d'être éleveuse", affirme Emilie Jeannin. Pour boucler une partie de son investissement à 1,8 million d'euros, elle vient de réunir 250.000 euros en quelques jours sur la plateforme de financement participatif Miimosa. Et espère une mise en service au premier semestre 2021 avec l'aval des services vétérinaires.

"Ne perdons pas de temps"

La mise à mort des animaux de boucherie (bovins, ovins, caprins, porcins, équidés) devant obligatoirement être réalisée dans un abattoir agréé, Emilie Jeannin pourrait ainsi être la première à faire tuer - légalement - une vache à la ferme depuis la promulgation fin 2018 de la loi Alimentation, qui acte l'expérimentation des abattoirs mobiles et leur évaluation.

En février, la Cour des comptes estimait que ce mode d'abattage pourrait se substituer aux abattoirs publics dont la gestion est jugée trop coûteuse.

Encore faut-il qu'il voie le jour... "Plusieurs projets d'abattoirs mobiles sont en cours mais aucun agrément n'a été délivré à ce stade", rapporte le ministère de l'Agriculture.

A ce rythme, "on pourra difficilement faire une expérimentation", remarque Frédéric Freund, directeur de l'Oeuvre d'assistance aux bêtes d'abattoirs (Oaba), association spécialisée membre du comité de suivi chargé d'évaluer ces nouveaux outils.

Pour lui, "l'État serait bien inspiré de débloquer quatre, cinq millions d'euros pour débloquer les quatre, cinq projets les plus aboutis". "Allons-y, ne perdons pas de temps", dit-il, convaincu que l'abattage mobile n'a "que des avantages" pour les animaux, tout en répondant aux attentes des éleveurs, des consommateurs et des ONG.

"On voudrait que ça se développe le plus possible", confirme Léopoldine Charbonneaux, directrice de CIWF France, qui milite pour le bien-être des animaux d'élevage.

"C'est vraiment important de réduire les transports et manipulations qui provoquent stress et souffrance", insiste-t-elle. L'ONG "encourage" donc ces projets "pour peu qu'ils donnent des garanties de protection animale au moment de l'abattage", c'est-à-dire qu'ils s'assurent que l'animal n'est pas effrayé à l'approche de l'outil, qu'il est correctement immobilisé pour être étourdi et mis à mort sans douleur.

"Projet pilote"

Camion-abattoir, caisson d'abattage sur roues prolongeant des sites fixes existants ou nouveaux... Les formats varient, mais le financement pose invariablement problème.

"Les éleveurs ne peuvent pas porter tout le poids du changement sur leurs épaules, ils n'y arriveront pas sinon", pense Christophe Osmont, éleveur de vaches et de cochons dans la Manche, qui préside l'association normande L'Abatt'mobile.

Il ne se risque pas à donner une date de mise en service de son projet, pas plus que Max Tortel, qui élève des porcs noirs à Aix-en-Provence et espère un partenariat avec une enseigne bio pour lever les fonds nécessaires.

Installé dans le sud de la Loire-Atlantique, Guylain Pageot préside l'association Aalvie (Abattage des animaux sur leur lieu de vie) qui fédère 150 éleveurs dont le projet se concrétiserait au plus tôt en septembre 2021.

Ils doivent construire deux sites, l'un au sud et l'autre au nord de la Loire, chargés de mettre en carcasse les animaux qui auront été tués à la ferme, dans une sorte de remorque. Les élevages doivent être proches des sites de mise en carcasse pour des raisons sanitaires.

Budget : sept millions d'euros. Une collecte auprès du grand public est aussi ouverte sur Miimosa.  "Le schéma financier reste à mettre sur pied", convient volontiers l'éleveur laitier bio, qui aimerait en faire un "projet pilote pour que tous les territoires puissent s'approprier la méthode".

La viande est destinée aux circuits courts, les cadences sont forcément lentes et les volumes limités. "Je pense qu'on ne fait pas du tout trembler M. Jean-Paul Bigard", PDG du numéro un français de la viande, plaisante Guylain Pageot.

Présidé par M. Bigard, le syndicat défendant les intérêts des industriels Culture viande n'a pas répondu à nos sollicitations.

Stéphane Dinard plaide lui pour que ce soient les abattoirs en partie financés par les pouvoirs publics qui s'équipent de caissons pour tuer les animaux au sein des exploitations. 

Il assume d'avoir illégalement fait abattre ses animaux dans sa "micro-ferme" de Dordogne. "Il est hors de question de changer ma façon de faire" en attendant que les nouveaux outils soient opérationnels, dit cet opposant au système industriel et cofondateur de l'association Quand l'abattoir vient à la ferme, avec la chercheuse de l'institut Inrae Jocelyne Porcher.

"C'est long mais on vient de tellement loin. Les services vétérinaires étaient vent debout (contre l'abattage à la ferme), les choses ont évolué petit à petit", retrace cette sociologue spécialiste des relations de travail entre animaux et humains.

Jocelyne Porcher sent désormais une ouverture: "Je pense qu'il y a des animaux qui vont échapper à l'abattoir industriel."


A Marseille, Notre-Dame de la Garde, symbole de la ville, se refait une beauté

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  • "C'est la chance d'une vie" d'avoir pu étudier "depuis la fin des années 1990 jusqu'à aujourd'hui" cette basilique, raconte l'architecte en charge des travaux de redorure et de restauration, Xavier David
  • Après l'installation pendant plusieurs semaines d'un échafaudage enveloppé d'une bâche thermosoudée, les travaux porteront à la fin de l'été sur la surface de la statue, dont la dorure a été abîmée par le mistral, l'air marin et la pollution industrielle

MARSEILLE: Cent mètres carrés de feuilles d'or à appliquer derrière un échafaudage surplombant la baie de Marseille, dans le sud de la France: un chantier monumental s'apprête à démarrer à Notre-Dame de la Garde pour redonner son éclat à la "Bonne Mère", statue de la vierge à l'enfant emblématique de la ville.

"C'est la chance d'une vie" d'avoir pu étudier "depuis la fin des années 1990 jusqu'à aujourd'hui" cette basilique, raconte l'architecte en charge des travaux de redorure et de restauration, Xavier David.

"On est enfin arrivé au plus haut, au plus précieux, au plus important", ajoute-t-il à propos de la redorure de la statue haute de 11,2 mètres et dont la couronne, à 225 mètres au-dessus de la Méditerranée, est le point culminant de la deuxième ville de France.

Pour évaluer avec précision les travaux, prévus de février à décembre, Xavier David a notamment descendu en rappel les quatre versants de la vierge dorée.

"Il faut voir aussi avec la main, on ne peut pas seulement voir avec l'oeil", explique celui qui arpente depuis plusieurs décennies l'étroit escalier en colimaçon situé dans les entrailles de la "Bonne-Mère", au sommet duquel on peut observer, par une trappe au milieu de la couronne de la statue, toute la ville de Marseille, sa baie et ses collines.

Après l'installation pendant plusieurs semaines d'un échafaudage enveloppé d'une bâche thermosoudée, les travaux porteront à la fin de l'été sur la surface de la statue, dont la dorure a été abîmée par le mistral, l'air marin et la pollution industrielle.

"La redorure de la statue a lieu à peu près tous les 30 ans", explique à l'AFP le père Olivier Spinosa, recteur du sanctuaire.

"Peu de personnel" 

Et de rappeler que la "Bonne Mère" est "véritablement une statue qui rassemble parce que, quand on arrive à Marseille, on la voit de loin, parce que, un jour ou l'autre, beaucoup de Marseillais se sont tournés vers elle, pour retrouver un peu de souffle, un peu d'espérance, de la joie".

"La vierge, c'est la mère, c'est l'enfant, c'est très méditerranéen, c'est l'amour, donc voilà, je crois que rien que pour ça, il faut la redorer", s'enthousiasme Nicole Leonetti, une retraitée marseillaise en visite à la basilique.

En amont de ce chantier de près de 2,5 millions d'euros, le diocèse de Marseille, propriétaire de l'édifice, a lancé une campagne de dons, proposant aux particuliers de financer une des 30.000 feuilles d'or nécessaires.

Le diocèse a également reçu le soutien de mécènes, comme l'armateur CMA CGM du milliardaire Rodolphe Saadé, basé à Marseille, ou encore le club de foot Olympique de Marseille et le groupe de spiritueux Pernod Ricard.

Lors du lancement de la campagne en mai, le cardinal de la ville, Jean-Marc Aveline, avait insisté sur "l'importance symbolique de Notre-Dame de la Garde", assurant que la "Bonne Mère" évoquait aux Marseillais des valeurs d'accueil et de dignité.

Marseille est "une ville où la population, pour la plupart, est arrivée d'ailleurs (...) à cause de divers problèmes de guerre, de famine, de misère, de corruption", avait détaillé le cardinal.

Le chantier ne concernera pas seulement la surface de la statue, mais aussi sa structure métallique ou encore les anges du clocher.

"Il y aura peu de personnel, seulement des compagnons très pointus, très compétents qui vont travailler sur la pierre, d'autres sur le fer, avant l'arrivée des doreurs" au mois d'août, explique Xavier David.

Une douzaine de doreurs travailleront "dans une sorte d'atmosphère stérile" à l'intérieur de l'échafaudage recouvert de la bâche.

La statue a été réalisée au XIXe siècle en "galvanoplastie", qui consiste à plonger un moule en plâtre dans un bain de cuivre.

Elle est la plus grande au monde réalisée avec cette technique, "qui donne en sculpture le travail le plus fin et le plus pérenne, puisque 140 ans plus tard, cette statue est encore parfaitement intacte", explique l'architecte. "A la condition qu'on lui apporte un soin particulier tous les 25-30 ans."


Paris appelle les forces rwandaises à «quitter instamment la RDC»

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  • "La souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC ne sont pas négociables", a déclaré à la presse le porte-parole de la diplomatie française Christophe Lemoine, selon qui le ministre Jean-Noël Barrot est attendu à Kigali après s'être rendu à Kinshasa
  • Dans la capitale congolaise, M. Barrot s'est entretenu dans la matinée avec le président Félix Tshisekedi avant de s'envoler pour Kigali où il doit rencontrer Paul Kagame

PARIS: Paris appelle les forces rwandaises à "quitter instamment" la République démocratique du Congo et le groupe armé M23 qu'elles soutiennent à "se retirer immédiatement des territoires dont il a pris le contrôle", a affirmé jeudi le ministère des Affaires étrangères.

"La souveraineté et l’intégrité territoriale de la RDC ne sont pas négociables", a déclaré à la presse le porte-parole de la diplomatie française Christophe Lemoine, selon qui le ministre Jean-Noël Barrot est attendu à Kigali après s'être rendu à Kinshasa.

Dans la capitale congolaise, M. Barrot s'est entretenu dans la matinée avec le président Félix Tshisekedi avant de s'envoler pour Kigali où il doit rencontrer Paul Kagame.

Comme l'avait fait Emmanuel Macron lors d'un échange téléphonique avec son homologue rwandais il y a quelque jours, le chef de la diplomatie française, "redira cette position: le retrait des troupes rwandaises" du territoire de la RDC, selon Christophe Lemoine.

La démarche diplomatique française s'inscrit "en soutien aux processus" de Luanda et de Nairobi", des médiations conduites par l'Angola et le Kenya, respectivement au nom de l'Union africaine et de la Communauté des États d'Afrique de l'Est, a-t-il précisé.

Le groupe armé antigouvernemental M23 a pris le contrôle de Goma, grande ville de plus d'un million d'habitants, à l'issue d'une offensive éclair de quelques semaines au côté de troupes rwandaises. Il a indiqué jeudi qu'il continuerait sa "marche de libération jusqu'à Kinshasa".


Larcher au PS: «censurer à nouveau le gouvernement» serait «irresponsable»

Le président du Sénat français Gérard Larcher (C) s'exprime après le discours du Premier ministre français François Bayrou (non vu) au Sénat, la chambre haute du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (AFP)
Le président du Sénat français Gérard Larcher (C) s'exprime après le discours du Premier ministre français François Bayrou (non vu) au Sénat, la chambre haute du parlement français, à Paris le 15 janvier 2025. (AFP)
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  • Le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé jeudi les socialistes à "la responsabilité", car "censurer à nouveau le gouvernement" serait "une idée irresponsable"
  • Si la commission mixte paritaire, composée de sept députés et sept sénateurs, parvient à s'entendre jeudi ou vendredi, le texte de compromis reviendra au vote à l'Assemblée lundi et au Sénat mardi

PARIS: Le président LR du Sénat Gérard Larcher a appelé jeudi les socialistes à "la responsabilité", car "censurer à nouveau le gouvernement" serait "une idée irresponsable", alors qu'une réunion cruciale pour trouver un compromis entre Assemblée et Sénat sur le projet de budget de l'État doit s'ouvrir à 9h30.

"Il faut qu'ils mesurent leur responsabilité vis-à-vis du pays", a déclaré Gérard Larcher sur France 2. "Est-ce qu'on peut continuer à être sans budget, avec les conséquences que ça a au quotidien pour les citoyens, pour les collectivités territoriales, pour le monde économique?", a-t-il interrogé.

Si la commission mixte paritaire, composée de sept députés et sept sénateurs, parvient à s'entendre jeudi ou vendredi, le texte de compromis reviendra au vote à l'Assemblée lundi et au Sénat mardi. Dans la chambre basse, le Premier ministre François Bayrou devrait faire usage du 49 alinéa 3 de la Constitution, pour le faire adopter sans vote et donc s'exposer à une motion de censure des députés.

"Est-ce qu'on peut continuer à jouer de cette manière? Je pense que les socialistes sont des gens responsables et qu'à un moment ou un autre, ils marqueront  clairement qu'ils ne sont pas d'accord avec ce budget", a défendu le président du Sénat. "Mais l'idée de censurer à nouveau le gouvernement m'apparaît une idée irresponsable".

Interrogé sur le point d'achoppement spécifique de l'aide médicale d'État (AME) avec la gauche mais aussi les macronistes, qui appartiennent à la coalition gouvernementale, Gérard Larcher a souhaité que la réduction de son enveloppe par le Sénat ne soit pas "caricaturée".

"Bien entendu, les soins d'urgence, les grossesses, la prévention, les vaccins, tout ceci est maintenu", a-t-il assuré, "mais nous réduisons l'enveloppe de l'aide médicale d'État et nous mettons sous condition d'avis médical un certain nombre d'interventions".

La droite souhaite diminuer de 200 millions les crédits alloués à l'AME réservée aux étrangers en situation irrégulière. In fine, la version commune proposée devrait acter cette réduction, selon une source parlementaire.