Table ronde à Riyad: L'importance croissante de l'Arabie saoudite et de la région du Golfe à l'échelle mondiale

Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, a participé à une table ronde organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad (Photo fournie).
Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, a participé à une table ronde organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad (Photo fournie).
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Publié le Mardi 16 janvier 2024

Table ronde à Riyad: L'importance croissante de l'Arabie saoudite et de la région du Golfe à l'échelle mondiale

  • Le journaliste italien Federico Rampini s'est exprimé lors d'un événement organisé par le Gulf Research Center et la Maison européenne - Ambrosetti
  • Il a révélé que le sentiment «optimiste» des milieux d'affaires contredisait les récits des médias occidentaux sur l'Arabie saoudite

RIYAD: Au cours des dix dernières années, l'Arabie saoudite a connu une transformation «étonnante», favorisée par des réformes internes et des changements géopolitiques qui ont rehaussé le profil et l'importance du Royaume au niveau mondial, selon Federico Rampini, journaliste, écrivain et conférencier italien primé.

S'exprimant dimanche lors d'une table ronde organisée dans la capitale saoudienne, Riyad, sur « l’importance de l'Arabie saoudite, de la région du Golfe et du Moyen-Orient », M. Rampini a fourni une perspective globale sur la montée en puissance du Royaume, vue des États-Unis, de l'Europe et de la Chine.

Le séminaire, organisé conjointement par le Gulf Research Center et la Maison européenne - Ambrosetti, a exploré les tendances mondiales en matière d'économie, de transition énergétique et de géopolitique, qui ont ouvert la voie à l'émergence du Royaume en tant que poids lourd régional.

L'un des changements géopolitiques les plus fondamentaux de ces dernières années a été l'invasion de l'Ukraine par la Russie en février 2022, qui a entraîné des sanctions occidentales sur le pétrole et le gaz russes et a contraint l'Europe à s'aligner plus étroitement sur les États du Golfe pour ses approvisionnements en énergie.

«La guerre en Ukraine a rompu les relations qui nous unissaient depuis des décennies à la Russie pour nos approvisionnements en énergie fossile et autres matières premières et produits de base», a indiqué M. Rampini lors du séminaire.

Les participants à la table ronde avec Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad, lundi 15 janvier 2023 (Photo fournie).

«Il s'agit d'un contre-choc, symétrique et opposé à celui de 1973-79. Il y a cinquante ans, nous avons dû nous tourner vers la Russie après l'embargo pétrolier de l'OPEP lié à la guerre du Kippour», a-t-il ajouté.

La nécessité pour l'Europe de renforcer sa sécurité énergétique dans un contexte de hausse des prix a également eu des répercussions sur le programme relatif aux énergies renouvelables, qui a dû être relégué au second plan.

«Dans le même temps, la guerre en Ukraine a remis en question les opinions les plus extrêmes, radicales et naïves des écologistes sur une décarbonisation rapide et totale», a expliqué M. Rampini.

Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, a participé à une table ronde organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad le lundi 15 janvier 2023 (Photo fournie).

L'Ukraine n'est pas le seul facteur qui a motivé ce réalignement. Les perturbations de la chaîne d'approvisionnement dues aux pandémies et la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine ont également renforcé l'intérêt pour les partenariats avec le Moyen-Orient, aidés en cela par la diversification économique de l'Arabie saoudite.

La pandémie et la nouvelle guerre froide entre l'Occident et la Chine, avec toutes les perturbations des chaînes d'approvisionnement, ont suscité un nouvel intérêt pour certains pays du Moyen-Orient en tant que partenaires potentiels pour «délocaliser chez les amis» et «atténuer les risques» du secteur manufacturier, a signalé M. Rampini.

«Cela concorde avec le programme d'industrialisation de la Vision 2030 de l'Arabie saoudite», a-t-il ajouté.

L'Arabie saoudite a évité d'être un bénéficiaire passif de ces changements géopolitiques. Le Royaume a été proactif ces dernières années, établissant des collaborations avec d'autres économies émergentes, notamment des pays africains riches en ressources.

«Le regain d'intérêt pour l'Afrique, surtout pour son abondance en ressources naturelles, requiert des partenariats avec des acteurs qui y ont déjà investi, comme l'Arabie saoudite, et qui, pour des raisons politiques et culturelles, sont mieux accueillis que les pays occidentaux», estime M. Rampini.

EN BREF

● Federico Rampini est un journaliste, écrivain et conférencier italien primé.

● Il a été rédacteur en chef adjoint du quotidien Il Sole 24 Ore et correspondant étranger en chef de La Repubblica depuis 1997.

● Le Gulf Research Center a été fondé en juillet 2000 pour mener des études de haute qualité sur tous les aspects des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) ainsi que de l'Iran, de l'Irak et du Yémen.

Une relation sur laquelle les dirigeants occidentaux avaient fondé leurs espoirs était la normalisation des relations entre l’Arabie saoudite et Israël – une initiative lancée en 2020 avec la signature des accords d’Abraham par les Émirats arabes unis, le Bahreïn, le Soudan et le Maroc.

L'Arabie saoudite aurait été en pourparlers pour signer les accords. La guerre à Gaza entre Israël et le groupe militant palestinien Hamas semble toutefois avoir fait reculer l'initiative menée par les États-Unis.

«L'innovation géopolitique des accords d'Abraham, en tant que précurseur d'une détente plus générale entre les pays arabes et Israël, a semblé réduire les risques d'instabilité et de conflit, favorisant un climat plus propice à l'afflux d'investissements étrangers», a signalé M. Rampini.

«Malheureusement, ce scénario a changé radicalement après l'attaque du Hamas du 7 octobre», a-t-il ajouté.

Les participants à la table ronde avec Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad, lundi 15 janvier 2023 (Photo fournie).

Les changements au sein même de l’Arabie saoudite et le changement d’attitude qui en a résulté ont également contribué à l’importance croissante du Royaume.

«La Vision 2030 et ce que nous pourrions appeler “l'effet MBS” ont incité à plusieurs changements dans la perception de l'Arabie saoudite», a déclaré M. Rampini, en référence à la stratégie de réforme transformatrice lancée par le prince héritier saoudien, Mohammed ben Salmane, en 2016.

«Ces changements sont encore en cours, incomplets et susceptibles de provoquer des réactions négatives», a-t-il mentionné.

«À un niveau plus profond, l'Arabie saoudite a cessé d'être associée au fondamentalisme islamique. L'évolution du statut des femmes a eu un impact. L'espoir que le Royaume devienne presque aussi cosmopolite et laïque que Dubaï ou le Qatar a suscité un nouvel intérêt pour ce pays.

«Ensuite, il y a tout le dynamisme en termes d'opportunités commerciales, de grands projets allant des énergies renouvelables au développement urbain, la nouvelle vocation pour le tourisme et la durabilité – le changement générationnel, non seulement dans le leadership, mais aussi dans la main-d'œuvre», a précisé M. Rampini.

L'évolution des attitudes à l'égard de l’Arabie saoudite est également liée à l'évolution de la situation politique en Occident, où un revirement vers la droite et une forme plus pragmatique de conservatisme ont influencé les programmes de politique étrangère.

«La question de la démocratie et des droits de l'homme est devenue plus conflictuelle dans les pays occidentaux», a jugé M. Rampini.

«D'une manière générale, les partis de gauche et les partis verts ont tendance à prôner une politique étrangère fondée sur des valeurs, et ils le font souvent d'une manière très radicale et rigide», a-t-il ajouté.

«Les partis conservateurs et de droite préfèrent une realpolitik basée sur les intérêts et l'équilibre des pouvoirs. Étant donné que de nombreux pays occidentaux semblent se tourner vers la droite, je m'attends à ce que les relations avec l'Arabie saoudite s'améliorent», a-t-il estimé.

La stratégie de réforme, la Vision 2030 vise à jeter les bases d'une société saoudienne dynamique et d'une économie prospère (Photo fournie).

Bien entendu, l'Occident n'est pas le seul partenaire potentiel de l'Arabie saoudite. Le Royaume a reconnu un alignement croissant sur la Russie au sein de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP+), ce qui a suscité l'inquiétude de Washington quant à l'affaiblissement de l'influence régionale des États-Unis et aux possibilités offertes à Moscou et à Pékin.

«La position géopolitique de l'Arabie saoudite a accru sa pertinence», a déclaré M. Rampini. «Du point de vue des États-Unis, deux développements récents sont une source d'inquiétude ; du point de vue de la Chine et de la Russie, ils constituent une opportunité.»

«L'alignement croissant de l'Arabie saoudite et de la Russie au sein de l'OPEP+ est l'une de ces évolutions», a-t-il indiqué.

«La convergence sur la stratégie de tarification de l'énergie est encore plus inquiétante que le refus de l'Arabie saoudite d'adopter et d'appliquer des sanctions contre Moscou (dans la mesure où le refus de ces sanctions est commun aux pays du Sud).»

«L'autre préoccupation est la possibilité que l'Arabie saoudite devienne membre des BRICS (groupe des principales économies émergentes). Les responsables américains de la politique étrangère craignent que la Chine ne transforme les BRICS en un club anti-occidental.»

 «Les discussions sur la dédollarisation, bien qu'elles ne soient pas concluantes, sont considérées comme faisant partie du même grand projet entretenu par les dirigeants chinois», a-t-il mentionné.

L'Arabie saoudite a reçu une invitation à rejoindre le bloc des BRICS, composé à l'origine du Brésil, de la Russie, de l'Inde, de la Chine et de l'Afrique du Sud, lors du sommet du groupe qui s’est tenu au Cap en 2023. Bien qu'il n'ait pas encore répondu à l'invitation, le Royaume deviendrait un poids lourd économique s'il y adhérait.

Et même si Riyad choisit de rester en dehors des BRICS, ses relations avec la plus grande économie du bloc, la Chine, ont porté leurs fruits à d'autres égards, au grand dam des États-Unis.

«Le rôle de la Chine dans la normalisation diplomatique entre l'Arabie saoudite et l'Iran a été salué pour ses résultats positifs, mais il a renforcé les soupçons selon lesquels Pékin tente d'éloigner l'Arabie saoudite de son alliance traditionnelle avec les États-Unis», a indiqué M. Rampini.

M. Rampini a également évoqué le rôle, ou l'absence de rôle, de l’Arabie saoudite dans certaines des plus grandes questions régionales du moment, en particulier la guerre à Gaza et les événements en mer Rouge, où les attaques des Houthis contre la navigation commerciale ont été affrontées par des frappes américaines et britanniques sur des cibles des milices au Yémen.

«La guerre de Gaza et les troubles de la mer Rouge ont eu des effets contradictoires», a-t-il indiqué.

«Ils ont renforcé la perception de l'Arabie saoudite comme une puissance régionale majeure, un acteur indispensable à la stabilité. Toute solution à la question palestinienne, quelle que soit la personne qui la préconise, implique un rôle pour l'Arabie saoudite – un rôle politique, financier ou peut-être militaire», a-t-il souligné.

«Les États-Unis, l'Union européenne et la Chine sont tous sur la même longueur d'onde. Il n'y a pas de plan de paix futur pour le Moyen-Orient sans une forte implication de l'Arabie saoudite», a-t-il insisté.

«La diplomatie saoudienne est sollicitée et elle est impliquée dans toutes les négociations», a-t-il ajouté.

M. Rampini a reconnu les raisons de la réticence apparente de l'Arabie saoudite à s'engager dans un nouveau cycle d'hostilités au Yémen, en particulier à la suite des critiques formulées par les capitales occidentales et compte tenu des progrès récents dans les pourparlers avec les Houthis.

Toutefois, M. Rampini a mis en garde contre le fait que la déférence de l’Arabie saoudite à l'égard des efforts déployés par les pays occidentaux pour protéger le commerce maritime en mer Rouge pourrait être interprétée comme une vulnérabilité.

«Les troubles actuels en mer Rouge ont contraint les États-Unis à intervenir militairement contre les Houthis, dans une région où l'on pouvait s'attendre à ce que les Saoudiens soient le principal pourvoyeur de sécurité», a-t-il précisé.

Federico Rampini, journaliste italien, écrivain et expert principal en géopolitique à la Maison européenne - Ambrosetti, a participé à une table ronde organisée par le Gulf Research Center (GRC) à Riyad, lundi 15 janvier 2023 (Photo fournie).

«Je sais que ces remarques peuvent irriter les Saoudiens, qui se souviennent des pressions exercées sur eux par la communauté internationale, en particulier les États-Unis, pour qu'ils mettent fin à leurs opérations militaires au Yémen», a-t-il estimé.

Israël et les États-Unis ont apparemment été pris au dépourvu par l'attaque du Hamas du 7 octobre – une défaillance des services de renseignement qui, selon M. Rampini, donne une mauvaise image non seulement d'Israël, mais aussi de l'ensemble de la région du Golfe.

«Il y a eu de multiples échecs en matière de renseignement avant l'attaque du Hamas. L'échec israélien a été mis en évidence avant tout, l'échec américain aussi», a-t-il jugé.

«Mais on peut se demander pourquoi les autres acteurs de la région n'ont pas été suffisamment alertés sur le fait que l'Iran et le Hamas feraient n'importe quoi pour empêcher la normalisation ultime entre Israël et les pays arabes», a-t-il demandé.

Bien que de nombreux investisseurs soient à juste titre effrayés par la crise qui se déroule à Gaza et qui risque d'entraîner le Liban, la Syrie, l'Irak, le Yémen et même l'Iran dans une conflagration régionale plus large, d'autres restent optimistes quant à la prospérité du marché saoudien.

Toutefois, M. Rampini estime que l'attitude du public n'a pas évolué, en grande partie à cause d'un paysage médiatique peu sympathique.

«Dans les pays occidentaux, il y a un décalage entre le discours des grands médias sur l'Arabie saoudite et les milieux d'affaires», a-t-il souligné.

«La plupart des médias s'accrochent aux stéréotypes, sont peu conscients des progrès réalisés, même en matière de droits de l'homme, et traitent l'assassinat de Jamal Khashoggi en octobre 2018 comme la raison ultime d'écarter ce que j'ai appelé l’“effet MBS”.»

«Le monde des affaires a une approche opposée», a reconnu M. Rampini.

Relatant l’expérience des récentes conférences commerciales, M. Rampini a fait part de l’enthousiasme autour des opportunités d’investissement en Arabie saoudite, à un moment où les économies occidentales connaissent une croissance lente.

«Lors de mes réunions et entretiens avec les milieux d'affaires occidentaux et saoudiens ici à Riyad, je ressens aujourd'hui la même atmosphère optimiste que celle que j'ai ressentie il y a vingt ans en Chine, lorsque j'y vivais», a-t-il soutenu.

«Je ressens la même attitude positive, l'optimisme, la confiance que tout est possible, la conviction que l'avenir se construit dans un pays comme celui-ci, alors que l'Occident est en déclin», a-t-il conclu.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Macron à Beyrouth: soutien ferme aux Libanais et leurs nouveaux dirigeants, pour une ère nouvelle

Le président français Emmanuel Macron serre la main de son homologue libanais Joseph Aoun au palais présidentiel de Baabda le 17 janvier 2025. Le 17 janvier, M. Macron a annoncé que Paris accueillerait dans les prochaines semaines une conférence internationale « pour la reconstruction du Liban » après une guerre entre le groupe militant Hezbollah et Israël. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron serre la main de son homologue libanais Joseph Aoun au palais présidentiel de Baabda le 17 janvier 2025. Le 17 janvier, M. Macron a annoncé que Paris accueillerait dans les prochaines semaines une conférence internationale « pour la reconstruction du Liban » après une guerre entre le groupe militant Hezbollah et Israël. (AFP)
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  • Pour affronter ces défis et amorcer l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour le pays, le président français estime qu’il faut s’adosser à trois piliers : restaurer la souveraineté, mettre le Liban sur la voie de la prospérité
  • C’est ce credo que Macron a déroulé lors de ses entretiens avec Aoun et qu’il a réitéré durant ses rencontres avec Salam et le chef du parlement libanais Nabih Berry

PARIS: En se rendant à Beyrouth, quelques jours après l’élection du nouveau président libanais Joseph Aoun et la désignation du nouveau premier ministre Nawaf Salam, le président français Emmanuel Macron a voulu confirmer que la France se tient fermement aux côtés du Liban et des Libanais, dans cette nouvelle ère qui s’ouvre.

C’est une ère porteuse de grands espoirs, pour un pays qui semblait voué au chaos, à cause de l’ineptie de sa classe politique et de ses luttes internes. C’est ce qu’il a voulu constater par lui-même en allant au contact des nouveaux dirigeants et du peuple libanais.

Mais c’est également une ère de défis complexes et difficiles, tant le Liban est fragilisé au niveau de ses institutions, de son économie et de son tissu social par des pratiques mercantiles et communautaires, les ingérences externes, puis récemment une guerre avec Israël qui a laissé une partie de son territoire en lambeaux.

Pour affronter ces défis et amorcer l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour le pays, le président français estime qu’il faut s’adosser à trois piliers : restaurer la souveraineté, mettre le Liban sur la voie de la prospérité et consolider son unité.

C’est ce credo que Macron a déroulé lors de ses entretiens avec Aoun et qu’il a réitéré durant ses rencontres avec Salam et le chef du parlement libanais Nabih Berry.

S’exprimant devant les journalistes à la suite de son tête-à-tête avec Aoun au palais présidentiel de Baabda il a souligné que la souveraineté passe par le respect du cessez-le-feu instauré entre le Liban et Israël le 26 novembre dernier et qu’il a qualifié de «succès diplomatique historique qui a permis de sauver des vies». Avec pour effet la nécessité de consolider le mécanisme de surveillance dont la France fait partie.

Cela implique une application stricte des engagements pris par les autorités israéliennes et libanaises dans le cadre de l'accord et dans les délais prévus.

 Soulignant que « des résultats ont été obtenus » à ce niveau, Macron a estimé qu’ils « doivent se fédérer, se confirmer dans la durée », avec « un retrait total des forces israéliennes, et un monopole total de l'armée libanaise sur les armes ».

C'est pourquoi ajoute Macron « nous soutenons, avec force la montée en puissance des forces armées libanaises et leur déploiement dans le sud du pays » tout en continuant à « consolider l'appui international en matière d'équipement de formation, et de soutien financier ».

Cet effort est soutenu par, la France à titre bilatéral et « je sais aussi que nos amis, l'arabie saoudite le Qatar les pays de la région sont prêts à faire davantage » ajoute-t-il, tout en travaillant « avec vous à la démarcation de la ligne bleue pour dégager une solution pérenne au bénéfice de la sécurité de tous ».

Macron a par ailleurs rappelé que cette souveraineté ne concerne pas que le sud du Liban, et que le contrôle des autres frontières, notamment dans le contexte du bouleversement en cours en Syrie, « constitue aussi un enjeu majeur ». 

L’autre pilier étant la prospérité au bénéfice de tous, il exprimé l’espoir d’une formation rapide du nouveau gouvernement pour mener à bien cette tâche et subvenir à l’urgence humanitaire qui n’est pas révolue.

La nécessité de réformer

La France assure t-il veille à ce que les engagements pris le 24 octobre à Paris soient tenus et qu'ils se traduisent matériellement au profit des populations déplacées par la guerre, Mais « au-delà des réponses d'urgence, la communauté internationale doit anticiper un soutien massif à la reconstruction des infrastructures des habitations détruites par la guerre, tout particulièrement au sud, où le million de déplacés libanais sont rentrés pour trouver leur maison et leur village réduits en cendres ».

À ce propos Macron a précisé qu’une conférence internationale pour la reconstruction se tiendra à Paris dans quelques semaines, lors d’une visite qu’effectuera le président libanais.

La prospérité suppose également des réformes, elles sont « attendues et connues » et s’adressant à Aoun dans des termes empreints d’une chaleur amicale « vous les portez, et vous les défendez », la réforme de la justice, la réforme bancaire, la réforme du marché de l'énergie, la lutte contre la corruption, « toutes ces réformes nécessaires, c'est le gouvernement à venir qui le portera, elles sont indissociables de cette reconstruction ». 

L'ensemble de ces points poursuit Macron doit servir le troisième objectif, « celui d'une nation libanaise, réconciliée et unie dans son pluralisme », car la plus grande des appartenances « est celle à une république qui croit dans l'universel, et d'un pluralisme qui respecte toutes les religions, toutes les communautés leur donnent à chacune sa place ».

Ce n'est que dans cette unité, assure-t-il dans « ce pluralisme réconcilié que le chemin est possible », rendant hommage au peuple libanais, aux milliers de victimes que le pays a déploré depuis le déclenchement de la guerre, « une guerre dans laquelle le Liban a été plongé, malgré lui par l'irresponsabilité de quelques uns ».

Avant sa rencontre avec Aoun au palais de Baabda Macron avait déposé une gerbe au monument du soldat inconnu, puis il s’est livré à un exercice qu’il affectionne particulièrement, en déambulant dans le quartier de Gemayzeh, qui avait été dévasté par l’explosion du port de Beyrouth en 2020

Évoluant au milieu d’une foule de libanais qui l’ont accueilli par des applaudissements chaleureux, il a siroté un café puis il a regardé des livres sur la reconstruction de ce quartier, qu’il avait visité juste au lendemain de l’explosion.

Il a échangé en toute spontanéité avec les personnes qui l’entouraient, il a fait des selfies, bu des jus de fruits, partagé une pizza en écoutant attentivement les personnes qui s'adressent à lui.

« Vous êtes adorable » lui lance une vieille dame, « aidez le Liban » lui demande un homme, une autre personne lui fait part de sa crainte d’une reprise de la guerre.

« Bon courage » et « garder le moral », assène le président français à ses interlocuteurs, avant de souligner que l’ère qui s’ouvre est une ère d’espoir où chacun a sa part à accomplir.

Macron avait commencé sa visite par une rencontre avec le premier ministre libanais en exercice Najib Mikati, et deux entretiens avec le chef d’état major de la FINUL, le général Jean-Jacques Fatinet, puis avec le commandant des opérations spéciales au sein du mécanisme de surveillance du cessez le feu le Général Jasper Jeffers et du représentant de la France au sein de ce mécanisme le général Guillaume Pin Hun.

 


Le procureur de la CPI, Karim Khan, rencontre le nouveau dirigeant syrien 

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  • Le président déchu, Bachar al-Assad, qui a fui à Moscou, refusait de coopérer avec la CPI, ne reconnaissant pas sa compétence sur son territoire
  • M. Chareh et le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, ont rencontré "une délégation de la Cour pénale internationale, dirigée" par Karim Khan, a déclaré Sana, qui a également publié des images de la réunion

DAMAS: Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Karim Khan, a été reçu vendredi par le nouveau dirigeant syrien, Ahmad al-Chareh, qui a pris le pouvoir après la chute de Bachar al-Assad accusé de crimes durant la guerre civile, a indiqué l'agence de presse officielle Sana.

M. Chareh et le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, ont rencontré "une délégation de la Cour pénale internationale, dirigée" par Karim Khan, a déclaré Sana, qui a également publié des images de la réunion.

Le président déchu, Bachar al-Assad, qui a fui à Moscou, refusait de coopérer avec la CPI, ne reconnaissant pas sa compétence sur son territoire.

Le groupe islamiste de M. Chareh, Hayat Tahrir al-Sham (HTS), a mené une coalition qui a renversé Assad le 8 décembre, plus de 13 ans après la répression sanglante de manifestations anti-Assad ayant déclenché une guerre qui a fait plus de 500.000 morts.

Les nouvelles autorités ont promis de rendre justice aux victimes des atrocités commises durant les décennies de règne du clan Assad, s'engageant à juger les responsables impliqués dans la torture des détenus.

Elles ont exhorté la communauté internationale à leur remettre les personnes recherchées qui ont fui.

La CPI, basée à La Haye, n'a pas été en mesure d'enquêter sur la Syrie car le pays n'a jamais ratifié le Statut de Rome, son traité fondateur.

En 2014, la Russie et la Chine ont opposé leur veto à un projet de résolution du Conseil de sécurité visant à renvoyer le dossier syrien devant la CPI.

 


Explosion au port de Beyrouth: le juge reprend ses enquêtes après deux ans de suspension

Une source judiciaire a indiqué à l'AFP, sous couvert d'anonymat, que M. Bitar avait "repris ses investigations dans le dossier et engagé des poursuites contre trois employés du port et sept officiers de haut rang de l'armée, de la sécurité générale et des douanes". (AFP)
Une source judiciaire a indiqué à l'AFP, sous couvert d'anonymat, que M. Bitar avait "repris ses investigations dans le dossier et engagé des poursuites contre trois employés du port et sept officiers de haut rang de l'armée, de la sécurité générale et des douanes". (AFP)
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  • M. Bitar, juge indépendant, avait dû interrompre son enquête en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah, ainsi qu'à une série de poursuites judiciaires
  • La reprise de ses investigations intervient après l'élection du nouveau président libanais Joseph Aoun et la nomination de Nawaf Salam comme Premier ministre, permises par un affaiblissement du Hezbollah après sa guerre dévastatrice contre Israël

BEYROUTH: Le juge libanais Tarek Bitar, chargé d'enquêter sur la  gigantesque explosion meurtrière au port de Beyrouth a repris ses investigations et engagé des poursuites contre dix nouvelles personnes jeudi, a indiqué à l'AFP une source judiciaire.

Le 4 août 2020, l'une des plus grandes explosions non nucléaires de l'histoire a dévasté des pans entiers de la capitale du Liban, tuant plus de 220 personnes et en blessant plus de 6.500.

M. Bitar, juge indépendant, avait dû interrompre son enquête en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah, ainsi qu'à une série de poursuites judiciaires.

La reprise de ses investigations intervient après l'élection du nouveau président libanais Joseph Aoun et la nomination de Nawaf Salam comme Premier ministre, permises par un affaiblissement du Hezbollah après sa guerre dévastatrice contre Israël et la chute de Bachar al-Assad en Syrie.

M. Aoun et M. Salam se sont engagés à garantir l'indépendance du pouvoir judiciaire et à empêcher toute ingérence dans le travail du juge, dans un pays où la culture de l'impunité prévaut.

Une source judiciaire a indiqué à l'AFP, sous couvert d'anonymat, que M. Bitar avait "repris ses investigations dans le dossier et engagé des poursuites contre trois employés du port et sept officiers de haut rang de l'armée, de la sécurité générale et des douanes".

Il a précisé que les interrogatoires débuteront à partir du 7 février. Des séances d'interrogatoire sont également prévues en mars et avril avec d'autres inculpés, parmi lesquels des anciens ministres et députés.

Selon la même source, M. Bitar prévoit ensuite de clore l'enquête et de la transmettre au procureur général près la Cour de cassation pour qu'il examine l'affaire, en vue de formuler un acte d'accusation.

"Espoir" 

"Les promesses faites par le président et le Premier ministre, puis la reprise de l'enquête (...) aujourd'hui, nous donnent l'impression qu'il y a un espoir que les droits des victimes, pour lesquels nous n'avons cessé de lutter, ne seront pas oubliés", a déclaré à l'AFP Cécile Roukoz, l'une des avocates des familles des victimes, qui a perdu son frère dans l'explosion.

Jeudi, le Haut-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme Volker Türk a appelé à la "reprise d'une enquête indépendante", insistant sur la nécessité que les responsables "rendent des comptes" et proposant l'aide de son Bureau à cette fin.

La déflagration a été provoquée par un incendie dans un entrepôt où étaient stockées sans précaution des tonnes de nitrate d'ammonium, malgré des avertissements répétés aux plus hauts responsables.

Un premier juge chargé en 2020 de l'enquête avait dû jeter l'éponge, après avoir inculpé l'ex-Premier ministre, Hassan Diab, et trois anciens ministres.

Tarek Bitar s'était à son tour attaqué à des responsables politiques, mais a été confronté aux mêmes obstacles et à une demande du Hezbollah qu'il soit démis de ses fonctions.

Il avait repris son travail à la surprise générale en janvier 2023, inculpant plusieurs personnalités de haut rang, avant d'être poursuivi pour insubordination par le procureur général, une première dans l'histoire du Liban.

Les proches de victimes et de nombreuses ONG internationales ont demandé à plusieurs reprises la formation d'une commission d'enquête internationale, mais s'étaient heurtés à un refus officiel du Liban.

Dans son premier discours mardi, M. Salam a dit qu'il ferait "tout son possible pour rendre justice aux victimes de l'explosion".