CONAKRY: Le bilan de l'explosion et de l'incendie du principal dépôt de carburant de Guinée est passé jeudi à 23 morts, selon le gouvernement, alors qu'à Conakry, des heurts ont opposé les forces de sécurité et des groupes de jeunes protestant contre le manque d'essence dans les stations-service.
Dans la nuit de dimanche à lundi, le souffle de l'explosion et l'incendie qui a suivi dans la zone portuaire de Kaloum, le quartier administratif et des affaires de Conakry, ont provoqué d'importants dégâts matériels et mis à l'arrêt l'économie.
Le sinistre a provoqué "23 décès" et 241 blessés, a annoncé le gouvernement dans un communiqué lu jeudi soir à la télévision publique.
Le précédant bilan publié mardi avait fait état de 18 morts et plus de 212 blessés lors de l'incident.
Sur les 241 blessés, 167 ont regagné leurs domiciles et 74 sont toujours hospitalisés, a dit le gouvernement dans le communiqué.
"De nombreuses déclarations font état d'un nombre important de disparus. Des investigations sont en cours" pour les élucider, a-t-il ajouté.
Le chef des militaires au pouvoir en Guinée, le colonel Mamadi Doumbouya, a annoncé mercredi soir un deuil national de trois jours, à partir de jeudi, en hommage aux victimes.
L'explosion et l'incendie ont laissé des centaines de ménages sinistrés, entraîné d'importants dégâts matériels et continuent de paralyser l'économie du pays.
Le gouvernement a annoncé la reprise de l'approvisionnement en gasoil, mais la distribution d'essence reste coupée depuis l'incident et la restriction des camions-citernes est maintenue.
Ecoles fermées et travailleurs priés de rester chez eux
Le gouvernement guinéen a annoncé la fermeture des écoles lundi et demandé aux travailleurs de rester chez eux, quelques heures après un incendie dans le principal dépôt de carburant du pays à Conakry, qui a fait des dizaines de blessés selon une source médicale.
"Les travailleurs du secteur public et privé sont invités à rester chez eux", excepté les forces de défense, et "les établissements scolaires publics et privés seront fermés", a annoncé le gouvernement dans un communiqué.
Les stations-service vont rester fermées et "dans les prochaines heures, un bilan d'étape sera communiqué et une enquête sera ouverte pour situer les causes et les responsabilités", dit le communiqué.
L'incendie "d'origine inconnue" s'est déclaré dans la nuit et son "ampleur et ses conséquences pourraient directement impacter les populations", a-t-il dit.
Tensions liés à la pénurie d'essence
Ce manque d'essence a provoqué jeudi à Conakry des heurts entre les forces de sécurité à des groupes de jeunes réclamant ce carburant dans les stations-service.
Les affrontements ont sporadiquement mis aux prises jeudi après-midi des jeunes mobiles jetant des pierres, à des forces de défense massivement déployées, qui ont riposté en tirant du gaz lacrymogène, a constaté un journaliste de l'AFP.
Des centaines de jeunes, cagoulés ou masqués pour la plupart, ont barricadé la route menant des périphéries de Conakry au centre de la capitale, notamment dans les quartiers de Sonfonia, Wanindara, Kagbelen, Koloma et Hamdallaye.
Ils ont érigé des barricades, renversé des poubelles et brûlé des pneus.
En Guinée, beaucoup de jeunes vivent des courses en moto-taxi.
Ils exigent la réouverture des stations services pour tous les types de carburant.
"On ne peut vendre du gasoil et nous priver d’essence. La plupart des Guinéens n’utilisent que de l’essence", ont scandé des protestataires.
"Nous sommes aussi des citoyens à part entière, nous voulons travailler pour manger et nourrir nos familles, comme les autorités. Nous n’avons pas où puiser de l’argent. Nous voulons simplement que le gouvernement s’acquitte de ses obligations. Sinon, qu’il dégage", a déclaré à l'AFP l'un d'entre eux.
D'autres manifestations pour exiger de l'essence ont eu lieu dans la matinée.
Par ailleurs, des ONG se sont alarmées de la censure de certains médias privés en Guinée et des restrictions de l'accès aux réseaux sociaux pendant cette période de crise.
L'Organisation guinéenne de défense des droits de l'homme et du Citoyen (OGDH) a appelé les autorités, dans un communiqué, à rétablir l'accès aux réseaux sociaux et aux médias privés "compte tenu du rôle que ces derniers jouent en terme d'informations des populations sur l'ensemble du territoire national" et pour favoriser "une sortie de crise rapide".
Depuis le début de l'année, l'accès à internet et/ou aux réseaux sociaux a été restreint à plusieurs reprises, des sites d'information en ligne ont été inaccessibles, des radios ont été rendues inaudibles et retirées de l'offre de certaines plateformes de diffusion.
Plusieurs distributeurs, notamment Canal+, ont été sommés en décembre par la Haute Autorité de la Communication (HAC) de suspendre la diffusion de chaînes de télé privées pour des "impératifs de sécurité nationale".