A Strasskirchen, tranquille bourgade à une heure et demi de Munich, quelque 2.700 votants sont appelés dimanche à se prononcer pour ou contre l'implantation d'une méga-usine du géant bavarois de l'automobile.
Le projet a valeur de signal alors que l'industrie allemande traverse une période de marasme, confrontée à des coûts énergétiques élevés et des carnets de commandes de l'étranger qui se tarissent.
S'ajoutent des exigences réglementaires toujours plus strictes et les subventions plus attractives proposées ailleurs, aux États-Unis notamment, qui sont autant de vecteurs poussant des entrepreneurs à revoir leurs implantations «made in Germany».
BMW entend pour sa part «investir plusieurs centaines de millions d'euros» dans cette usine «au cœur du développement de véhicules électriques en Allemagne», soutient Alexander Kiy, responsable du projet d'usine de Strasskirchen chez le constructeur.
Le site prévu emploiera à terme plus de 3.200 personnes et livrera 600.000 batteries haute tension par an, devant ensuite être installées dans les nouveaux modèles électriques sortant des usines bavaroises de Ratisbonne, Munich et Dingolfing, la plus grande usine automobile européenne de BMW.
- Terres arables -
Autant dire qu'un rejet du projet dimanche compromettrait gravement le lancement prévu vers 2025 de la nouvelle gamme de véhicules électriques du fabricant de la X3.
BMW applique déjà cette stratégie pour ses usines à l'étranger, en Hongrie, aux Etats-Unis, au Mexique et en Chine.
La commune de Strasskirchen a été choisie en remplissant aussi ce critère de proximité. Mais une frange d'habitants s'oppose au géant de l'automobile, craignant que leur territoire rural, au sud du Danube et de la forêt bavaroise, ne devienne une zone industrielle, avec une multiplication du trafic routier.
«Plus de 100 hectares de terres arables de première qualité seraient détruits à jamais», une erreur «dans la perspective du changement climatique», s'emporte Thomas Spötzl, 44 ans, porte-parole d'un mouvement qui veut tenir tête à BMW.
Le constructeur offre au contraire «une chance immense pour la région d'investir dans des technologies durables et des emplois d'avenir», réplique Martin Götz, 45 ans, natif de Strasskirchen et porte-parole d'une association de soutien au projet d'usine.
Les deux camps se déchirent depuis des mois.
- Réticences -
«Pour la Bavière, et pour toute l'Allemagne, il doit encore être possible de faire naître une grande implantation industrielle de ce type», affirme Armin Soller, maire du village voisin d'Irlbach, également concerné par le site prévu par BMW.
Mais «il existe une nette réticence à créer des sites industriels en Allemagne», souligne Milan Nedeljkovic, membre du directoire de BMW en charge de la production.
Le pays a pourtant «besoin d'un engagement en faveur de la croissance économique, surtout en période de transformation» énergétique et numérique, ajoute-t-il.
Plusieurs grands projets industriels ont toutefois été annoncés dans la première économie européenne ces derniers mois, comme des usines de fabrication de semi-conducteurs portées par les leaders mondiaux du secteur.
Le chancelier Olaf Scholz a récemment appelé les régions, communes et même l'opposition parlementaire à soutenir un «pacte allemand» pour rendre le pays plus agile, dynamique, moins bureaucratique, mais cela n'a pas vraiment convaincu les milieux économiques.
«Nous avons besoin d'un concept global qui garantisse le maintien de notre compétitivité et de nos implantations», a déclaré lundi Arno Antliz, directeur financier du géant Volkswagen, devant la presse à Francfort.
A quelques jours du référendum, le maire de Strasskirchen, Christian Hirtreiter, veut croire que «l'ambiance est désormais clairement pour BMW».
En cas de vote favorable dimanche, BMW viendrait contrer un mouvement de défections d'entreprises dans le canton.
Ainsi une usine à papier de la zone industrielle voisine à Plattling, avec 500 salariés, a annoncé en juillet sa fermeture. Les coûts d'énergie élevés ont été avancés comme raison.