MAGDEBOURG, Allemagne: Portée par des sondages records, l'extrême droite allemande a affiché vendredi ses rêves de pouvoir, confiante d'être l'un des plus grands partis du pays à un an de scrutins européen et régionaux et en vue des législatives de 2025.
Dix ans après notre création, "nous sommes devenus adultes, avec des sondages qui nous créditent de 22%" des intentions de vote, a lancé le président de l'Alternative pour l'Allemagne, Tino Chrupalla, à l'ouverture d'un congrès à Magdebourg, l'un de ses fiefs de l'est du pays.
Dans les dernières enquêtes, cette formation --78 députés sur les 736 au Bundestag, soit l'avant-dernier groupe parlementaire en nombre-- pointe désormais en deuxième position au plan national (19 à 22%), devant le parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz, et juste derrière les conservateurs (26 à 27%), actuellement dans l'opposition.
«Prêts pour plus»
"Nous sommes prêts pour plus", a ajouté M. Chrupalla, devant quelque 600 délégués venus de toute l'Allemagne, qui ont notamment décidé d'adhérer au parti européen "Identité et démocratie" (ID), comprenant notamment le Rassemblement national français et la Ligue italienne.
Juste avant l'ouverture du congrès, la co-présidente du mouvement Alice Weidel a clairement affiché l'ambition du parti de gouverner l'Allemagne toute entière, via pour la première fois un ou une candidate à la chancellerie aux législatives de 2025.
"Je dis très clairement que notre parti, qui est maintenant la deuxième force politique nationale du pays" dans les sondages "doit avoir l'ambition de diriger et qu'elle ne peut le faire qu'en candidatant à la chancellerie", a-t-elle dit à la chaîne ZDF.
Quelques dizaines de manifestants, appartenant à un collectif d'associations antiracistes et antifascistes, ont protesté devant le bâtiment du congrès.
"J'ai peur de ce qui pourrait arriver si l'AfD parvient à un moment donné au pouvoir", dit Steven Braun, 18 ans, portant en cape un drapeau arc en ciel et venu spécialement des environs de Brême (nord).
Particulièrement dans le viseur de l'extrême droite: des scrutins régionaux prévus en septembre 2024 dans l'est de l'Allemagne, en Saxe, Thuringe, et dans le Brandebourg.
Dans ces trois régions, où l'AfD est déjà créditée d'environ 30% des intentions de vote, "nous pouvons être les plus forts, nous pouvons prendre la responsabilité de gouverner", a lancé Chrupalla, sous les applaudissements.
Dans l'est de l'Allemagne, l'AfD est déjà récemment parvenue à faire élire son premier maire sous ses couleurs, ainsi qu'à prendre la tête d'un conseil d'arrondissement.
Dans ces régions de l'ancienne RDA communiste, beaucoup de citoyens s'estiment perdants de la réunification des deux Allemagne en 1990 et sont plus enclins à voter pour les extrêmes.
A l'ouest en revanche, en Bavière et en Hesse, où des scrutins régionaux se tiennent en octobre cette année, l'AfD stagne dans les sondages.
Interrogée par l'AFP, la tête de liste de l'AfD en Bavière, Katrin Ebner-Steiner, 44 ans, a reconnu que sa formation faisait "un peu moins bien dans les sondages que dans l'Allemagne entière". Elle espère cependant récolter "autour de 15%" des voix.
«Nous sommes l'original»
Dans son discours d'ouverture, M. Chrupalla s'est gaussé de Friedrich Merz, président des conservateurs (CDU), le parti de l'ex-chancelière Angela Merkel, affirmant ironiquement qu'il "aimerait plutôt être président de l'AfD".
M. Merz avait récemment décrit la CDU comme "l'alternative pour l'Allemagne avec de la substance". "Mais nous sommes l'original et personne d'autres", lui a rétorqué le président de l'AfD.
Ce dernier a néanmoins tendu la main aux conservateurs, n'excluant pas de possibles alliances. La digue construite par la CDU contre l'AfD est "une erreur", a-t-il dit. En début de semaine, Merz avait ouvert la porte à une alliance au plan local, avant de la refermer face au tollé provoqué en interne.
Créée en février 2013, l'AfD était à l'origine un parti anti-euro, avant de devenir une formation anti-islam et anti-immigration.
Elle surfe sur la grogne d'une partie de l'opinion contre l'actuelle coalition gouvernementale, composée des sociaux-démocrates, des écologistes et des Libéraux, ainsi que du mécontentement face à l'inflation et l'immigration.