BRUXELLES : Le Premier ministre britannique Boris Johnson et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen décideront dimanche d'abandonner ou non les difficiles négociations commerciales post-Brexit, après un échange téléphonique décisif à la mi-journée.
Le négociateur britannique David Frost a rencontré son homologue européen Michel Barnier dimanche matin au siège de la Commission européenne à Bruxelles, au lendemain d'ultimes négociations qui se sont achevées tard dans la nuit.
Il en est ressorti une heure et demie plus tard pour retourner à la mission diplomatique britannique, a constaté une journaliste de l'AFP.
Mme von der Leyen et M. Johnson doivent s'entretenir à la mi-journée, avant une annonce plus tard dans l'après-midi, selon Bruxelles et Londres.
Aucun scénario ne peut être écarté, entre un "no deal" catastrophique économiquement, la prolongation des discussions et même l'annonce d'un compromis - le plus improbable -, tant ces pourparlers tendus, émaillés de coups de bluff et de dates butoirs non tenues, ont été riches en rebondissements depuis leur lancement en mars.
Mais la tendance semblait négative samedi dans la soirée, une source gouvernementale britannique ayant fait savoir qu'"en l'état actuel, l'offre de l'UE (restait) inacceptable".
Londres et Bruxelles ont rivalisé de pessimisme ces derniers jours, M. Johnson estimant un échec "très, très probable", quand la chef de l'exécutif européen jugeait "faibles" les espoirs d'accord.
Si les deux dirigeants décidaient de prolonger à nouveau les échanges, cela ne pourrait être que "de quelques jours au maximum", a averti le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes, Clément Beaune.
"Nous sommes déjà dans le temps additionnel", a-t-il souligné dans le Journal Du Dimanche.
Le Premier ministre irlandais, Micheal Martin, dont le pays est en première ligne en cas de "no deal", a affirmé à la BBC qu'il espérait "vivement" un accord. "Le fait qu'ils aient négocié jusque dans la nuit est un signe important en soi", a-t-il fait valoir.
En dépit d'échanges toujours plus intensifs, les divergences semblent inconciliables entre des Britanniques qui veulent retrouver une liberté commerciale totale et des Européens soucieux de protéger leur immense marché unique.
Royal Navy
"Si l'UE peut trouver le moyen de nous traiter comme un pays indépendant normal, je pense qu'il y a toutes les raisons d'être confiant, mais nous n'en sommes pas encore là", a encore insisté dimanche le chef de la diplomatie britannique Dominic Raab sur SkyNews.
Signe d'un regain de tension, le ministère britannique de la Défense a annoncé, à la veille de cette nouvelle échéance, que des navires de la Royal Navy se tenaient prêts à protéger les zones de pêche nationales où pourraient survenir des accrochages en cas d'absence d'accord.
Le Royaume-Uni, qui a officiellement quitté l'UE le 31 janvier, abandonnera définitivement le marché unique et l'union douanière le 31 décembre.
Sans accord commercial, ses échanges avec l'UE se feront selon les seules règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), synonymes de droits de douane ou de quotas, au risque d'un nouveau choc pour des économies déjà fragilisées par le coronavirus.
Les discussions butent sur trois sujets: l'accès des pêcheurs européens aux eaux britanniques, la manière de régler les différends dans le futur accord et surtout les conditions que les Européens exigent des Britanniques pour éviter toute concurrence déloyale.
L'UE est prête à offrir à Londres un accès sans droits de douane ni quotas à son immense marché. Mais elle entend dans ce cas s'assurer que le Royaume-Uni ne se livrera pas à du dumping en s'écartant des normes environnementales, sociales, fiscales européennes ou de celles sur les aides d'Etat.
Si tel est le cas, elle veut pouvoir prendre des contre-mesures rapides, comme des droits de douane, sans attendre que le différend soit tranché dans le cadre d'une procédure d'arbitrage classique, afin de protéger ses entreprises. Londres s'y oppose fermement.
Pragmatique, la Commission a publié jeudi des mesures d'urgence pour maintenir, en cas de "no deal", le trafic aérien et le transport routier entre le Royaume-Uni et l'UE pendant six mois, ainsi que l'accès réciproque aux eaux de pêche pour un an.