Une vague de chaleur «extrêmement dangereuse» suffoque les Etats-Unis

Satya Soviet Patnaik se protège du soleil en faisant la queue pour prendre une photo au panneau historique Welcome to Las Vegas lors d'une vague de chaleur à Las Vegas, Nevada, le 14 juillet 2023. (AFP)
Satya Soviet Patnaik se protège du soleil en faisant la queue pour prendre une photo au panneau historique Welcome to Las Vegas lors d'une vague de chaleur à Las Vegas, Nevada, le 14 juillet 2023. (AFP)
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Publié le Dimanche 16 juillet 2023

Une vague de chaleur «extrêmement dangereuse» suffoque les Etats-Unis

  • A Phoenix, métropole de l'Arizona dans le sud-ouest des Etats-Unis, 47°C ont ainsi été mesurés samedi soir, pour le 16e jour consécutif de maximales au-delà de 43°C
  • Dans le sud de cet Etat de la côte Ouest, les pompiers luttent depuis vendredi contre plusieurs incendies très violents qui ont ravagé plus de 1 214 hectares et entraîné l'évacuation de la population

LOS ANGELES: L'Ouest américain et une grande partie du sud des Etats-Unis se retrouvent écrasés ce weekend par une vague de chaleur "extrêmement dangereuse", selon les services météo, le mercure atteignant jusqu'à 47°C dans certaines villes.

"Une vague de chaleur accablante et extrêmement dangereuse doit frapper l'Ouest ce weekend, de même que certains endroits dans le Sud", a alerté le Service météo national (NWS) dans un bulletin samedi matin.

"Plusieurs records de températures sont probables et des problèmes de qualité de l'air seront courants dans plusieurs régions des Etats-Unis", a estimé le NWS.

Et le répit ne devrait pas arriver de sitôt pour les plus de 90 millions d'Américains sous le coup d'une alerte aux hautes températures, car le dôme de chaleur devrait "rester stationné au-dessus (de ces régions) pour les prochains jours", a prédit le NWS.

A Phoenix, métropole de l'Arizona dans le sud-ouest des Etats-Unis, 47°C ont ainsi été mesurés samedi soir, pour le 16e jour consécutif de maximales au-delà de 43°C.

Une partie de l'Etat se retrouve en niveau d'alerte "magenta", un "niveau de chaleur extrême rare et/ou de longue durée" qui représente le niveau d'alerte le plus élevé du NWS.

Dans le centre et le sud de la Californie, le thermomètre a oscillé entre 41°C et 45°C, selon le NWS. Et dans la célèbre Vallée de la Mort, il a grimpé jusqu'à 51°C, tandis que 54°C sont attendus dimanche.

«On se meurt»: face à la chaleur, le cri d'alarme d'ouvriers au Texas

Perché sur une plateforme pour peindre un mur de 10 mètres de haut dans la chaleur intense du Texas, Maynor Alvarez s'est soudain senti fébrile avec une envie de vomir. Il a voulu redescendre mais son contremaître lui a ordonné de "continuer à produire".

La vague de chaleur qui sévit depuis près d'un mois dans le sud des Etats-Unis touche de plein fouet les ouvriers du bâtiment, qui sont exposés à des températures supérieures à 40°C.

Et cela ne devrait pas aller en s'améliorant: des températures record sont attendues ce week-end, notamment 46°C samedi à Corpus Christi, dans le sud du Texas.

"J'ai déjà souffert de coups de chaleur. Et vous savez ce que ça fait? Des crampes dans les jambes et les bras, des maux de tête, une envie de vomir et des palpitations", dit Maynor Alvarez, peintre en bâtiment d'origine guatémaltèque, lors d'une manifestation vendredi près de l'hôtel de ville de Houston, la grande ville du sud texan.

Mais, ajoute cet ouvrier de 42 ans, "quand je me plains à mon superviseur, qui est en bas, il me dit de continuer à travailler (...) Je descends parce que je n'en peux plus (...) Si j'étais resté cinq minutes de plus, je ne serais pas là pour vous le raconter".

Les manifestants s'opposent à une récente loi approuvée par le gouverneur républicain du Texas, Greg Abbott, remettant en question le droit des ouvriers du bâtiment de villes comme Dallas ou Austin à faire une pause pour s'hydrater toutes les quatre heures.

«Une loi qui tue»

La loi, qui doit entrer en vigueur en septembre, n'interdit pas ces pauses hydratation mais entend harmoniser les règlements au niveau de l'Etat sur un ensemble de sujets liés au droit du travail ou à l'agriculture, plutôt que de laisser les municipalités, généralement démocrates, légiférer sur le sujet. Et ce, au nom de la liberté d'entreprendre.

"C'est une loi qui tue", estime Maynor Alvarez de son côté.

Une vingtaine de kilomètres plus au nord, Juan, un Mexicain de 28 ans qui préfère ne pas donner son nom de famille, est debout sur une échelle et termine des travaux sur le mur d'un bâtiment en construction.

La température ressentie dépasse les 40°C et le soleil est aveuglant.

Coiffé d'un casque, et portant un gilet et des lunettes de protection, il s'est entouré la tête d'une sorte d'écharpe pour protéger sa nuque des rayons de soleil.

"Quand je ne bois que de l'eau, j'ai des vertiges, j'ai envie de vomir à cause de la chaleur, j'ai besoin d'autre chose, d'un Coca, d'un Gatorade, et de froid, pour pouvoir fonctionner correctement. La période la plus chaude de la journée se situe entre 11 heures et 15 heures", explique-t-il à l'AFP.

Son collègue Edwin, âgé de 21 ans et également mexicain, revient avec une boisson hydratante. "J'y suis presque accoutumé, mais cette année la chaleur est plus forte", dit-il.

«Insensée»

Maynor Alvarez dit toutefois qu'il est impossible de se plaindre, sous peine de ne pas être payé à temps plein ou de se voir refuser du travail.

Lors du rassemblement à Houston, Luz Martinez, également ouvrière dans le bâtiment, raconte comment elle a dû travailler dans un immeuble de 20 étages où les ouvriers devaient redescendre au rez-de-chaussée pour boire à l'extérieur.

"Le 4 juillet, jour férié (aux Etats-Unis), on rénovait une école, dans un espace clos, sans clim car il y en a qui ne veulent pas payer l'électricité", explique-t-elle en se souvenant d'un collègue qui a fait un malaise.

"On se meurt. Nous priver d'eau, de pauses pour nous hydrater, ce n'est pas juste", ajoute-t-elle.

Les ouvriers déplorent la mort d'un collègue de 46 ans à la mi-juin, Felipe Pascual, sur un chantier dans la banlieue de Houston.

Le Texas est l'Etat qui enregistre le plus de morts dans le secteur du bâtiment liés à la chaleur: 42 entre 2011 et 2021, selon des chiffres officiels de la section texane du syndicat AFL-CIO.

"Il n'est pas toujours possible d'être à l'ombre, nous sommes des travailleurs dans la construction. Avoir ces pauses et boire de l'eau est essentiel pour continuer", affirme à l'AFP Cristian Canela, représentant du syndicat local des peintres en bâtiment, qui dénonce une loi "insensée".

Vague atypique 

Dans le sud de cet Etat de la côte Ouest, les pompiers luttent depuis vendredi contre plusieurs incendies très violents qui ont ravagé plus de 1.214 hectares et entraîné l'évacuation de la population.

Pour le climatologue Daniel Swain, de l'université de Californie à Los Angeles, le mercure dans la Vallée de la Mort pourrait égaler voire dépasser la température de l'air la plus haute jamais mesurée de façon fiable sur Terre, soit 54,4°C enregistrés au même endroit en 2020 et 2021, selon plusieurs experts.

"Cette vague de chaleur n'est PAS typique des chaleurs du désert en raison de sa longue durée, de ses températures extrêmes le jour, et de ses chaudes nuits", a martelé l'antenne de Las Vegas du NWS dans un tweet, poursuivant: "tout le monde doit prendre cette vague de chaleur au sérieux, y compris ceux vivant dans le désert".

Au Texas, le fournisseur d'énergie Reliant Energy a demandé aux habitants de la grande ville de Houston de restreindre leur consommation d'électricité afin de modérer la pression sur le réseau électrique.

D'autres régions des Etats-Unis sont de leur côté à risque d'importantes intempéries.

"Des orages forts à violents, de fortes pluies et des inondations sont possibles dans plusieurs endroits, particulièrement et malheureusement en Nouvelle-Angleterre, déjà saturée" par de récentes précipitations, selon le NWS.

Cette région du nord-est du pays, et particulièrement l'Etat du Vermont, a été touchée cette semaine par des inondations "historiques et catastrophiques", conséquence de pluies torrentielles.

«Aucun répit»

Au Canada, le nombre d'incendies ne cesse d'augmenter notamment dans l'ouest du pays, où en quelques jours plusieurs centaines de départs de feux ont été recensés, déclenchés majoritairement par des orages.

"On se retrouve cette année avec des chiffres qui sont pires que nos scénarios les plus pessimistes", explique à l'AFP Yan Boulanger, chercheur pour le ministère canadien des Ressources naturelles.

"Ce qui est complètement fou, c'est qu'il n'y a eu aucun répit depuis le début du mois de mai", analyse ce spécialiste des feux de forêt.

Plus de dix millions d'hectares sont déjà partis en fumée sur l'ensemble du pays - soit plus de 11 fois la moyenne sur un an de la dernière décennie.

Le record annuel absolu -- établi à 7,3 millions d'hectares en 1989 -- a déjà été largement dépassé.

Au total, le pays a dénombré 4.088 incendies depuis janvier, dont de nombreux brasiers atteignant des centaines de milliers d'hectares. Plus de 150.000 personnes ont par ailleurs dû être déplacées.

L'impact se fait également ressentir chez le voisin du sud, car la fumée des feux de forêt a vu plusieurs Etats américains du nord, comme le Montana et le Dakota du Nord, enregistrer des niveaux "néfastes" de qualité de l'air.

Les émissions de gaz à effet de serre accroissent la puissance, la durée et le rythme de répétition des vagues de chaleur, selon des experts.

L'Agence américaine de protection de l'environnement indique notamment que "les vagues de chaleur se produisent de manière plus fréquente qu'auparavant dans les grandes villes à travers les Etats-Unis".

"Leur fréquence a augmenté de manière continue, d'une moyenne de deux vagues de chaleur par an durant les années 1960 à six par an au cours des décennies 2010 et 2020", précise-t-elle.


Selon une source ukrainienne , Zelensky ne serait pas prêt à signer un accord sur les minerais avec Washington

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo AFP )
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Le président ukrainien Volodymyr Zelensky n'est « pas prêt » à signer un accord avec les États-Unis qui leur offrirait un accès préférentiel aux minerais du pays, a affirmé samedi à l'AFP une source ukrainienne proche du dossier, alors que les deux pays sont en pleines tensions.

Donald Trump réclame depuis plusieurs semaines l'équivalent de 500 milliards de dollars de terres rares, en guise de dédommagement, selon lui, du soutien américain à Kiev face à l'invasion russe, une condition qu'Ukraine ne peut accepter pour l'instant.

« Le président ukrainien n'est pas prêt à accepter le projet dans sa forme actuelle. Nous essayons toujours de faire des changements de manière constructive », a expliqué cette source ukrainienne qui a requis l'anonymat.

« Ils veulent nous soutirer 500 milliards de dollars », a-t-elle accusé.

« Quel genre de partenariat est-ce là ? (...) Et pourquoi devons-nous donner 500 milliards, il n'y a pas de réponse », a-t-elle encore dit, affirmant que Kiev avait « proposé des amendements. Ils ont été soumis ».

Depuis l'appel entre Donald Trump et Vladimir Poutine le 12 février, Moscou et Washington ont exprimé leur volonté de repartir sur de nouvelles bases, et le président américain a complètement renversé la position de son pays concernant la guerre en Ukraine, en reprenant la rhétorique du Kremlin sur la responsabilité de Kiev.

Le 24 février 2022, l'Ukraine a été envahie par la Russie, le Kremlin affirmant agir pour protéger le pays contre la menace de l'OTAN et empêcher un élargissement de l'organisation.

Donald Trump souhaite négocier un accord avec l'Ukraine afin d'obtenir un accès à 50 % de ses minerais stratégiques, en guise de compensation pour l'aide militaire et économique déjà fournie à Kiev.

Le conseiller à la sécurité nationale de M. Trump, Mike Waltz, s'est montré très pressant vendredi.

« Le président Zelensky va signer cet accord, et vous le verrez à très court terme, et c'est bon pour l'Ukraine », a-t-il insisté lors d'un rassemblement de conservateurs près de Washington.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a rejeté avec vigueur la première proposition américaine d'accord, arguant qu'il ne pouvait « pas vendre » son pays.

Il a toutefois laissé la porte ouverte à des « investissements » américains en échange de telles garanties.

De son côté, Donald Trump affirme que les États-Unis ont dépensé 350 milliards de dollars pour s'engager dans une guerre qui ne pouvait pas être gagnée. Or, selon l'institut économique IfW Kiel, l'aide américaine globale à l'Ukraine, financière, humanitaire et militaire, a atteint 114,2 milliards d'euros (près de 120 milliards de dollars au cours actuel) entre début 2022 et fin 2024, dont 64 milliards d'euros en assistance militaire.

Le 1er février, M. Zelensky a assuré que l'Ukraine n'avait reçu à ce stade que 75 des 177 milliards de dollars d'aide votée par le Congrès américain.


Les États-Unis proposent à l'ONU une résolution pour « une fin rapide » du conflit en Ukraine

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine.  (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (G) accueille l'envoyé américain Keith Kellogg dans ses bureaux à Kiev le 20 février 2025, dans le contexte de l'invasion russe de l'Ukraine. (Photo par Sergei SUPINSKY / AFP)
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  • Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale de l'Ukraine.
  • Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE.

NATIONS-UNIES : Les États-Unis ont proposé un projet de résolution à l'Assemblée générale de l'ONU qui ne mentionne pas le respect de l'intégrité territoriale du pays, après une nouvelle attaque du président américain Donald Trump contre son homologue ukrainien Volodymyr Zelensky.

Dans un communiqué, le secrétaire d'État américain, Marco Rubio, a exhorté les pays membres de l'ONU à approuver cette nouvelle résolution « simple » et « historique », et « tous les États membres à la soutenir, afin de tracer un chemin vers la paix ».

« Cette résolution est une bonne idée », a rapidement commenté l'ambassadeur russe à l'ONU, Vassili Nebenzia, déplorant toutefois l'absence de référence « aux racines » du conflit.

Les Européens, désarçonnés par l'ouverture du dialogue américano-russe sur l'Ukraine, n'avaient pas réagi samedi matin à la proposition américaine.

« Nous n'avons pas de commentaire pour l'instant », a simplement indiqué l'ambassadeur français à l'ONU Nicolas de Rivière, alors que l'Assemblée générale doit se réunir lundi.

Le texte proposé par les États-Unis ne condamne pas l'agression russe ni ne fait référence explicite à l'intégrité territoriale de l'Ukraine, ce qui ressemble à une trahison de la part de Kiev et à un coup bas contre l'UE, mais aussi à un mépris pour les principes fondamentaux du droit international », a déclaré à l'AFP Richard Gowan, de l'International Crisis Group.

L'Assemblée générale de l'ONU se réunit lundi pour marquer le troisième anniversaire de l'invasion russe de l'Ukraine.

À cette occasion, l'Ukraine et les Européens ont préparé un projet de résolution qui souligne la nécessité de « redoubler » d'efforts diplomatiques pour mettre fin à la guerre « cette année », et prend note des initiatives de plusieurs États membres ayant présenté « leur vision pour un accord de paix complet et durable ».

Le texte réitère également les précédentes demandes de l'Assemblée générale, appelant à un retrait immédiat et inconditionnel des troupes russes d'Ukraine ainsi qu'à la cessation des attaques de la Russie contre l'Ukraine.

Ces précédents votes avaient rassemblé plus de 140 voix sur les 193 États membres.

Les nouvelles salves de M. Trump contre M. Zelensky interviennent alors que la visite de l'émissaire du président américain, Keith Kellogg, semblait avoir apaisé la situation. Ces nouvelles attaques de M. Trump contre M. Zelensky font suite à des premières invectives virulentes plus tôt dans la semaine, qui avaient suscité une vive réaction de la part de Kiev et la stupéfaction de ses alliés européens.

M. Zelensky avait déclaré avoir eu des échanges « productifs » avec M. Kellogg, et ce dernier l'avait qualifié de « dirigeant courageux et assiégé d'une nation en guerre ».

Vendredi, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a réaffirmé que le président Vladimir Poutine était « ouvert » à des pourparlers de paix.

La Russie exige notamment que l'Ukraine lui cède quatre régions ukrainiennes, en plus de la Crimée qu'elle a annexée en 2014, et qu'elle n'adhère jamais à l'Otan. Des conditions jugées inacceptables par les autorités ukrainiennes qui demandent à leurs alliés des garanties de sécurité solides.

M. Trump et ses collaborateurs ont jugé « irréaliste » l'adhésion de l'Ukraine à l'Otan et son ambition de reprendre ses territoires perdus à la Russie.

Sur le terrain, la situation reste difficile pour les troupes ukrainiennes. L'armée russe a revendiqué vendredi la prise de deux localités dans l'est de l'Ukraine.


60 ans après, l'assassinat de Malcolm X continue de secouer l'Amérique

L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
L'avocat Ben Crump (à droite) et la fille de Malcolm X, Ilyasah Shabazz, s'adressent à la presse pour demander la déclassification des documents du pasteur musulman afro-américain et militant des droits de l'homme Malcolm X, à l'occasion du 60e anniversaire de son assassinat, à Harlem, dans l'État de New York, le 21 février 2025. La conférence de presse s'est tenue au Malcolm X and Dr Betty Shabazz Memorial and Educational Center, dans la salle de bal où Malcolm X a été assassiné le 21 février 1965. (Photo de CHARLY TRIBALLEAU / AFP)
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  • Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ».
  • « Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

NEW-YORK : Six décennies jour pour jour après sa mort, un hommage est rendu vendredi à la figure de proue du mouvement « Black Power », notamment pour son héritage en matière de « justice sociale ». C'est ce que rappelle le Shabazz Center, le mémorial et centre éducatif installé dans l'ancienne salle de bal de Harlem où il a été abattu à 39 ans, au faîte de son influence, et ce quelques mois seulement après l'abolition de la ségrégation raciale.

Qui a commandité le meurtre ? Comment le drame a-t-il pu survenir en pleine réunion publique, alors que les menaces pesant sur le militant, porte-voix de la « Nation of Islam » puis de l'abolition des discriminations, étaient connues des autorités ?

Pour obtenir des réponses, sa famille a engagé en novembre 2024 des poursuites au civil spectaculaires, réclamant 100 millions de dollars aux forces de l'ordre et aux agences fédérales qu'elle accuse, selon elle, d'avoir joué un rôle à divers degrés dans son assassinat.

Dans ce dossier qui doit entrer dans le vif du sujet début mars devant un tribunal de Manhattan, la famille assure disposer d'éléments nouveaux lui permettant d'assigner en justice la police de New York (NYPD), le FBI ou encore la CIA.

« Nous espérons que la vérité tant attendue éclatera, après 60 ans d'attente, et que ce qui s'est passé sera documenté », explique à l'AFP Ilyasah Shabazz, la fille de Malcolm X.

- « Qui a donné l'ordre ? » -

Selon l'assignation en justice, la famille du leader afro-américain, également connu sous le nom d'El-Hajj Malik El-Shabazz, estime que les forces de l'ordre et les services de renseignement américains ont sciemment désengagé les policiers dont la mission était de le protéger la nuit du drame.

Des agents en civil ne sont pas non plus intervenus au moment des faits et, depuis sa mort, les agences de renseignement s'emploieraient à dissimuler leurs agissements, selon la plainte.

Contactée par l'AFP, la police de New York n'a pas souhaité s'exprimer pour l'instant.

« Cette dissimulation a duré des décennies, privant la famille Shabazz de la vérité et de leur droit à obtenir justice », estime auprès de l'AFP Me Ben Crump, qui défend le dossier pour les filles de Malcolm X.

« Nous écrivons l'histoire en nous dressant ici face à ces torts et en demandant des comptes devant les tribunaux », se félicite le conseil, qui a demandé vendredi la « déclassification de documents » liés à ce dossier.

L'affaire avait déjà rebondi en 2021, lorsque deux des trois anciens hommes reconnus coupables de l'assassinat et ayant passé plus de vingt ans derrière les barreaux ont finalement été innocentés, ce qui constitue l'une des plus grandes erreurs judiciaires des États-Unis. En réparation, les deux Afro-Américains ont touché 36 millions de dollars de la part de la ville et de l'État de New York.

« On sait déjà assez précisément comment l'assassinat de Malcolm X s'est déroulé. On sait qui en est responsable : cinq membres de la Nation of Islam. La seule chose qu'on ignore, c'est qui a donné l'ordre », observe Abdur-Rahman Muhammad, historien et spécialiste reconnu du dossier, dont les travaux pendant des décennies ont contribué à disculper les deux accusés à tort.

Selon lui, les éléments mis en avant aujourd'hui par la famille de Malcolm X sont « peu crédibles ».

Il concède toutefois que « si la plainte permet de déterminer qui a donné l'ordre final, alors elle aura de la valeur ».

Cet énième rebondissement aura au moins permis de remettre en avant « l'héritage » de Malcolm X, plus important que jamais sous le second mandat de Donald Trump, « ennemi implacable » de la communauté noire, affirme l'historien.

« Cela va inciter les Afro-Américains à se serrer les coudes », anticipe Abdur-Rahman Muhammad. « En résumé, la communauté noire doit revenir au message de Malcolm : lutter. »